CAC 40, Nasdaq ou Dow Jones pour ne citer que les plus connus, les indices sont l’outil le plus simple pour comprendre en une fraction de seconde le comportement des marchés boursiers. Ou du tout du moins, c’est la vision traditionnelle que nous avons à leur sujet…
Prenons par exemple le CAC 40 : comme tous les investisseurs le savent, cet indice représente les 40 valorisations les plus élevées de la bourse française. Tandis que celui-ci vient d’atteindre un plus haut historique à l’heure de l’écriture de ces lignes, la logique voudrait que ces 40 valeurs soient dans une forme resplendissante. Mais est-ce vraiment le cas ? Pas vraiment…
En réalité, sous l’effet des champions du CAC que sont LVMH, Hermès ou L’Oréal (près de 40 % de la capitalisation totale à eux trois), le CAC 40 doit maintenant plutôt être considéré comme un indice du luxe que comme une mesure de l’économie française.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Pour le comprendre, il est nécessaire de se pencher sur l’inexorable ascension des ETF et de la gestion indicielle.
Les ETF profitent beaucoup aux grandes valeurs
Beaucoup moins chargés en frais que les fonds d’investissement classiques, les ETF (ou trackers) sont des supports automatisés qui répliquent automatiquement les performances d’indices. Or, statistiquement, ces ETF obtiennent de meilleures performances que les fonds d’investissement humains près de 9 fois sur 10. Pourtant, l’objectif des fonds actifs est justement de battre ces indices…
En combinant simplicité et performances, il est donc facile de comprendre l’engouement pour les ETF et leur part croissante dans les portefeuilles de tous les gestionnaires de la planète.
Toutefois, une conséquence à l’achat d’ETF est que beaucoup d’investisseurs font dorénavant l’économie d’analyses fastidieuses à la recherche des meilleures valeurs du marché. En lieu et place, ces investisseurs achètent des packs de valeurs prêts à l’emploi. Or, cet afflux massif d’argent profite naturellement aux valeurs qui se taillent déjà la part du lion dans ces indices. Par conséquent, les écarts de valorisation entre le haut et le bas du panier augmentent mécaniquement.
Autrement dit, alors qu’auparavant, la valorisation d’une entreprise reposait essentiellement sur ses perspectives de croissance, les flux drainés par les ETF profitent aveuglément aux premières valorisations d’un indice, engendrant un effet boule de neige pour celles-ci.
Ainsi, sur le CAC 40, les trois premières valeurs que sont LVMH, L’Oréal et Hermès représentent près de 40 % de la valorisation totale de l’indice ! Certes, ces sociétés sont des modèles de rentabilité, mais combien d’investisseurs en ETF CAC 40 savent qu’en réalité, près de 40 % de leur placement est capté par ce trio de tête ? Parmi les investisseurs débutants qui découvrent la bourse à travers les ETF, le doute est de mise.
Dans ces nouvelles conditions de marché, il est difficile d’interpréter les variations du CAC 40 sans prendre en compte la distorsion induite par les ETF par rapport aux critères de valorisation passés…
Apple et Microsoft au firmament
De l’autre côté de l’Atlantique, cette dynamique sur les ETF est aussi très palpable, avec des conséquences assez inattendues.
Ainsi, alors que l’on pensait l’acronyme GAFAM (Google – Apple – Facebook – Amazon – Microsoft) particulièrement bien installé, la concentration est également à l’œuvre !
En effet, d’après le Wall Street Journal, la part combinée d’Apple et Microsoft a atteint 13,30 % du S&P 500 en mars 2023, l’indice des 500 plus grandes capitalisations américaines. Les valeurs les plus importantes deviennent des valeurs refuges, non plus seulement pour leurs caractéristiques intrinsèques, mais aussi grâce à cette nouvelle dynamique des flux, alimentée en grande partie par les ETF.
Pourtant, les difficultés qui ont touché Google, Amazon ou Facebook (avec des chutes de capitalisation de près de moitié) étaient aussi à l’ordre du jour du côté d’Apple et Microsoft. Pour ces raisons, de nombreux analystes n’hésitent pas à affirmer que tant que les valorisations de Microsoft et surtout Apple ne se retournent pas brutalement, il n’y aurait pas matière à sérieusement s’inquiéter dans le cas d’une baisse brutale des marchés financiers.
Mais si un tel scénario devait arriver, il est sûr que les marchés actions traverseraient une forte période de turbulences, le temps que le marché se crée de nouveaux repères. Peut-être au profit de valeurs délaissées, parce que situées en bas des indices ?
Dans le contexte actuel, de nombreux analystes pensent en effet que de très bonnes affaires sont à réaliser dans ce compartiment dans le cadre d’un stock picking, même si à ce jour, une liquidité amoindrie sur ces valeurs en cas de choc boursier est le principal inconvénient aux yeux des investisseurs institutionnels.
Conclusion
En théorie, investir sur les marchés boursiers via des ETF, que ce soit via un compte-titres ou une assurance vie, a beaucoup de sens. Mais si l’espace d’un instant, tous les investisseurs ne procédaient que via des ETF, la conséquence immédiate serait que la bourse ne pourrait plus jouer son rôle de filtre entre les valeurs. Elle perdrait donc son utilité !
Que conclure ?
Bien que nous soyons très loin de ce scénario, les flux d’argent apportés par les ETF constituent néanmoins une lame de fond qui complexifie la compréhension des marchés financiers. De plus, les valeurs gagnantes dans leurs indices respectifs (Apple, LVMH notamment) pourront-elles continuer de grimper indéfiniment ? Cela viendrait heurter de plein fouet l’adage selon lequel les arbres ne montent pas jusqu’au ciel…
Émettre un avis serait particulièrement hasardeux. Mais une chose est sûre, les investisseurs, experts comme débutants, ont tout intérêt à comprendre le poids croissant des flux ETF dans la composition des indices si leur objectif premier est justement de diversifier…
Un indice calculé sur quelques dizaines de valeurs est forcément très peu équilibré. C’est le cas du CAC40 et du Dow Jones (DJIA, 30 valeurs). Il est plus prudent de se référer à des indices larges comme S&P500 (qui a le défaut d’être centré sur les USA) ou mieux, le MSCI World Index (plus de 1500 valeurs réparties dans 23 pays).
L’ETF n’est nullement un passage obligé, c’est une facilité. Les indices, à partir du moment où ils sont continuellement mis à jour (cf. le remplacement de Vivendi par Edenred ces jours-ci), représentent une manière bête mais efficace de sélectionner les meilleures valeurs du moment sans rien y connaître. Le stock-picking est une manière très laborieuse et exigeante de faire mieux, mais aussi de risquer plus gros. Il y a la place pour les deux, et il ne faut surtout pas demander à l’un de faire ce que fait l’autre.
L’investisseur lambda ne connaît pas les perspectives de l’entreprise dans laquelle il investit. Ce n’est pas son job et souvent Il n’a pas les capacités ni le temps de les évaluer. Il n’y investit que pour la rentabilité de ses économies.
Alors il investit dans les actions que son trader lui conseille comme ayant eu une courbe ascendante qui devrait continuer.
L’investisseur professionnels doit rendre des comptes à ses supérieurs et sa prime sera proportionnelle à ses bénéfices à court terme et non à ceux qu’il fera dans 10 ans.
Donc ces 2 profils d’investisseurs n’investissent que sur du relatif court terme en fonction du retour des investissements passés et non des investissements présents.
Si les ETF sont meilleurs que les fonds, c’est parce que les gestionnaires sont mauvais. Les ETF se développant, leur performance va baisser, et une opportunité pour de meilleurs gestionnaires va apparaitre.
Il y a aussi le fait qu’avec la baisse des taux d’intérêts, l’effet des frais de gestion est devenu beaucoup plus important. Mécaniquement, les frais auraient du baisser en proportion (quitte à baisser la qualité de la gestion), ce qui ne s’est pas produit.
Bref, les ETF font concurrence aux gestionnaires, qui vont ainsi devoir s’améliorer. Et cela veut dire aussi de meilleures opportunités pour les investisseurs plus réfléchis. Que du bon donc.
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