Comment se débarrasser de 3 000 milliards d’euros de dette ?

Comment se débarrasser de 3000 milliards de dette publique ? Philippe Lacoude donne quelques pistes.

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Comment se débarrasser de 3 000 milliards d’euros de dette ?

Publié le 7 juin 2023
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Tout porte à croire que nos « premiers de la classe » ont évité de se prendre à nouveau une mauvaise note car, après la dégradation de la note de la dette française par l’agence Fitch en avril, l’agence Standard and Poor’s maintient finalement le AA de l’État français.

 

Dette et notes…

Lorsque la dette publique d’un pays augmente, non seulement en pourcentage du produit intérieur brut, mais surtout en pourcentage de ses recettes fiscales – qui sont la vraie mesure de sa capacité de remboursement – la probabilité que l’État fasse défaut augmente.

Ce risque de défaut pèse sur les détenteurs d’obligations. Leurs actifs n’ont pas autant de valeur intrinsèque que de valeur faciale. En d’autres termes, on ne peut pas dire qu’une dette de 100 euros vaut cette valeur s’il existe 3, 5 ou 10 % de probabilités qu’elle ne soit pas remboursée.

En conséquence, si une banque pouvait valoriser le titre de la dette souveraine de 100 euros du Bélouchistan inférieur pour 100 euros dans son bilan, elle tromperait ses actionnaires.

Si le Premier ministre du Bélouchistan inférieur déclare que les caisses du Trésor sont vides, notre banque devrait donc enregistrer une perte en conséquence dans ses comptes de résultats et de bilan.

Il doit donc exister un mécanisme pour décoter certaines obligations d’État.

La Banque des règlements internationaux (BIS) préconise une technique comptable en conséquence (ici et ) dont on peut d’ailleurs déplorer la mansuétude à l’égard des dettes publiques…

L’idée est d’utiliser les services d’agences de notations (NRSRO) privées et indépendantes et d’appliquer une pénalité comptable aux « mauvaises dettes ».

 

Hausse du coût des emprunts

À chaque dégradation de la note de la France, l’État doit payer un peu plus que les autres pays qui ont une dette moins élevée ou une meilleure note.

À plus de 3000 milliards d’euros de dette publique, toute hausse, même minime, des taux d’intérêt se transforme vite en milliards d’euros.

Un pays qui aurait moins de dettes publiques, en pourcentage de son économie, paierait un taux plus bas à ses créanciers.

Pour cette raison, la France paie un taux d’intérêt sur ses obligations à dix ans substantiellement plus élevé que l’Allemagne :

Comme nous pouvons le voir, le passage à l’euro a été l’occasion d’un resserrement des taux entre la France et l’Allemagne.

Pendant une longue période, qui a duré jusqu’à la crise grecque, il n’y avait pas vraiment de différence, en pratique, entre la signature allemande et la signature française.

Puis le sarkozysme est arrivé, – une gabegie d’argent public avec près de 622 milliards d’euros de dettes supplémentaires tandis que le reste de l’Europe essayait de contrôler ses dépenses. Le taux des obligations d’État françaises est monté à 1,5 % au-dessus de l’Allemagne.

 

Un coût réel

Depuis, le différentiel n’est jamais retombé à zéro.

S’il a l’air minime, à peine 0,56 % en avril avant la dégradation de Fitch, il est quand même non négligeable dans le sens où ces 0,56 % s’appliquent en partie à 3 000 000 000 000 euros.

Il est difficile de chiffrer la facture exacte car la dette française a une maturité moyenne de neuf ans. Elle est composée de produits à très court terme, d’obligations à 10 ans et de quelques titres à presque 50 ans.

Ceci dit, clairement, si l’on regarde la courbe, la défiance des marchés et des agences de notation envers la dette française a coûté plus de 100 milliards d’euros depuis la crise grecque.

 

Des agences accommodantes

Comme nous l’évoquions ici lors du passage de la France à 3000 milliards de dettes publiques, « les agences de notations sont toujours très en retard sur les marchés mais elles réviseront inévitablement la note de la dette française ».

C’était une semaine avant la dégradation de la note française par Fitch.

Les agences réagissent des mois après que les situations financières des États ou des entreprises se dégradent.

En ce sens, l’abaissement de la note française par Fitch hier, ou probablement de Standard and Poor’s et Moody’s demain, est ainsi plus ou moins inévitable.

Le maintien de la note AA par Standard and Poor’s n’est à coup sûr que temporaire compte tenu des actes économiques irrationnels passés des principaux dirigeants français ainsi que de la récession mondiale qui s’annonce plus sévère que prévue.

En fait, les agences sont extrêmement laxistes : il est absolument évident que l’État français ne remboursera jamais ses 3000 milliards de dettes en termes réels.

Je mets au défi quiconque de m’expliquer comment on rembourse 3000 milliards d’euros de dette publique avec 293 milliards de recettes fiscales lorsque l’on dépense 455 milliards chaque année…

Au mieux, les investisseurs ne pourront récupérer cette somme qu’en valeur nominale, c’est-à-dire en euros qui seront complètement dévalués. Au pire, il arrivera un moment où il faudra restructurer la dette française en appliquant une décote aux valeurs nominales, en disant, par exemple que le Trésor ne pairera que 60 ou 70 centimes pour chaque euro de dette.

 

Se protéger

Cette facture sera payée par tous les actionnaires des compagnies d’assurance et des banques, et par tous ceux qui détiennent directement ou indirectement des titres d’État, pensant qu’ils sont moins risqués qu’ils ne le sont vraiment…

Beaucoup de Français, qui ne comprennent pas vraiment les rouages de la finance, seront frappés de plein fouet lorsqu’ils prendront la mesure de l’exposition de leurs produits financiers favoris, vendus par des commerciaux ignares ou désinvoltes.

 

Une faillite inéluctable ?

Il y a quelques années, alors que nous discutions en petit comité de ce triste état de fait, un grand économiste français a déploré le fait que « nous sachions pourtant très bien ce qu’il faudrait faire ».

Ma réaction initiale a été l’incrédulité dans le sens où je ne pense pas que la trajectoire puisse être infléchie, à ce point.

Mais après tout, si nous pouvions instantanément enseigner les finances publiques à ceux qui refusent la réalité de la physique, de la biologie, et qui considèrent que les mathématiques sont discriminatoires, savons-nous vraiment ce qu’il convient de faire ?

Comment se débarrasser de 3000 milliards de dette publique ?

Si nous commençons par rejeter l’idée farfelue de sortir de l’euro de façon à pouvoir les rembourser en « nouveaux nouveaux francs » en faisant tourner la planche à billets, il ne peut s’agir que de diluer cette somme pharamineuse de 3000 milliards dans une économie dont la taille réelle – et pas seulement nominale – a doublé ou triplé.

D’abord faudrait-il que cette somme cesse immédiatement de grossir. Il faudrait ramener la dépense publique exactement au niveau des recettes et s’interdire toute émission de dette nouvelle. Ceci implique de comprimer les 455 milliards de dépenses nettes du budget général et de les ramener aux 293 milliards de recettes.

En d’autres termes, il faudrait se passer d’au moins un bon million de fonctionnaires, ramenant ainsi la fonction publique de la France au niveau de celle de l’Allemagne, per capita. La tâche serait politiquement ardue mais économiquement facile tant il est vrai qu’il y a beaucoup plus de fonctionnaires qui travaillent que de fonctionnaires qui produisent…

À l’évidence, les impôts ont atteint un tel point qu’ils étouffent l’activité des individus. Il faudrait donc drastiquement les baisser pour augmenter l’activité. Tout aussi nocifs que les impôts, les réglementations en tout genre – dont le Cerfa est le symbole – devraient disparaître à un rythme soutenu. Enfin, il faudrait arrêter de tout subventionner, des éoliennes aux cantines scolaires, des transports en commun aux entreprises d’État…

Enfin, il faudrait massivement privatiser tout ce qui peut l’être – l’État a des actifs immobiliers considérables – pour faire émerger une nouvelle classe d’actionnaires et de propriétaires. Il est impossible d’avoir une croissance élevée sans engager des masses importantes de capital.

En somme, il faudrait adopter le Code du travail suisse, le Code des impôts singapourien, et l’entrepreunariat américain.

Ce serait douloureux à court terme, mais bien moins que l’effondrement brutal des finances publiques dans le désordre et la violence…

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  • Les solutions existent pour les nuls; il suffit de lire « Capitalisme et liberté  » de M. FRIEDMAN… Il existe même en version française depuis des décennies ! Ce livre est bien plus intéressant que ce que produit notre… ministre de l’économie et des finances ou plutôt ministre de la dépense et de la dette.

  • Finalement, le plus facile reste encore de sortir de l’euro et de faire tourner la planche à billets.
    À quoi bon soulever des montagnes quand il est si simple de passer par-dessus ? (Boris Vian)

  • Merci M. Macron, partez vite avant que nous ayons 5000 milliards de dettes, car ce n’est pas vous qui aurez le courage de sauver notre pays !

  • La solution est simple : Mélenchon et ses LFIstes (attention, ce n’est pas le nouveau groupe de rock à la mode 😂😂😂😂). On deviendrait ainsi le Cuba de l’Europe. Lénine n’a-t-il pas annulé l’emprunt russe ?

    • L’annulation type révolution russe peut-il vraiment porter le nom de « solution » ? Ca revient quand même un peu à crasher la bagnole pour qu’on ne voie plus le pare-chocs enfoncé…

      • C’est la solution NUPES qui regroupe toutes les gauches caviar de France et de Navarre.
        Quant à la droite, c’est pas mieux. N’oublions pas qu’un déficits annuel de 3% comme l’autorise Maastricht, c’est 3% du PIB de dette supplémentaire. C’est à dire au bas mot 90 milliards par an. Et aucun parti ne propose de déficits à 0%….

        • Gouverner n’est plus prévoir mais dépenser sans mesure. Regardez le rigide Bercy qui en est à plus de 700 milliards en 6 ans et il devrait tenir encore 4 ans. Heureusement qu’il a du temps libre pour écrire.
          Au fait il vient de subventionner une fabrique de batteries électriques à hauteur de 2,9 milliards dans le sud de la France, qui va rendre sa souveraineté à la France en faisant concurrence à la Chine qui produit tout 10 fois moins cher. Comme il a mis l’économie russe à genoux il y a un an.
          Quand les Français vont-ils comprendre que ces politiciens sont fous ?

          • J’ai voulu écrire le rigolo de Bercy au lieu du clavier qui m’a substitué rigide Bercy qui ne veut rien dire.

            • Rigide aussi, il est! ( dixit Yoda)
              Rigolo un peu moins ( enfin tout dépend de qui le trouve drôle?)
              Votre clavier pratique l’IA?

  • Y a pas à s’inquiéter, c’est tout simple, supprimer les 200Md de « cadeaux aux entreprises » et récupérer les 100Md de « truanderie fiscale » (expression mélenchonesque). Avec ça on double les recettes de l’état! Et puis notre lider maximo n’a-t-l pas dit que « les dette souveraines sont un simple jeu d’écriture »? Avec ça on finance aisément la semaine de 28h et la retraite à 55 ans.
    Plus sérieusement si les agences de notation ne dégradent pas plus la note de la France c’est en raison du montant élevé de l’épargne des Français. Elle se disent (et probablement n’ont-elles pas tort) qu’en cas de gros coup de tabac l’état fera main basse sur une partie de cette manne.

    • Peut-être. Je penserais plutôt que les agences de notation ont la frousse d’apparaître comme celles qui auraient déclenché l’apocalypse, et qu’elles attendent donc encore un peu.

  • Je sais bnien qu’on fait rouler la dette et que l’on ne la rembourse pas… Il n’empêche que les taux augmentant, cela coute d e+ en +…
    « Ceci implique de comprimer les 455 milliards de dépenses nettes du budget général et de les ramener aux 293 milliards de recettes. »
    Ou de comprimer les 455 milliards de dépenses nettes du budget général et de les ramener à … 0 ?
    On privatise tout. L’Armée on privatise, la Police on privatise, la Justice on privatise, l’enseignement on privatise, l’Hopital on privatise… En fait ce qui marche et dont les usagers sont satisfaits… est déjà privatisé…

    • « Faire rouler la dette »
      En droit pénal, on appelle cela un délit de cavalerie (prison ferme).

      • Là elle a pris un sacré coup d’accélérateur depuis qu’elle « roule » à l’électrique!
        Après la prison ferme, le supplice de la roue où la chaise écologique à l’électricité verte renouvelable?

  • Puisque les responsables politiques de la dette sont identifiés les dégager aux prochaines élections. Pour PS et LR le problème semble déjà résolu. Malgré sans doute pléthore de candidats, le choix va vite être restreint…

    • Il faudrait surtout les remplacer par des qui soient expressément missionnés pour restaurer les finances publiques, plutôt que pour interdire les bagnoles ou doubler les éoliennes.

    • Seulement ils seront remplacés par les mêmes qui seront de toutes manières encadrés par les hauts fonctionnaires en place et qui sont intouchables.

  • Dans l’Ancien Testament il existait l’année jubilaire qui consistait à dates fixes la remise de toutes les dettes.
    Cela devait être un formidable frein pour les prêteurs qui devaient veiller à la solvabilité ponctuelle et préalable des débiteurs.
    L’étude de l’Antiquité nous révèle souvent des bonnes pratiques oubliées de nos jours.
    J’ai rarement rencontré la notion de subvention qui aujourd’hui comme la théorie moderne de la monnaie permet à n’importe quel crétin de dépenser sans compter un argent qui n’est pas le sien sous prétexte que son statut temporaire de politicien le lui permet sans aucune sanction judiciaire ni pécuniaire, ce qui est en soi formidable. Notre rigolo de Bercy s’en donne à cœur joie et sans aucune retenue.

  • Ce serait peut-être aussi l’occasion de rappeler la courbe de Laffer, parce que vu le niveau des prélèvements en France, on n’a guère de doutes sur le côté du sommet où on se trouve, et qu’il ne serait pas inutile de faire valoir que baisser l’impôt réduirait le déficit.

  • Il faut faire défaut et trouver une combine pour que la dette retombe sur l’Allemagne et la BCE.
    Quand on voit comment indirectement elle a réussi à saboter l’industrie nucléaire française et bien sûr comment elle a détruit l’Europe par 2 fois au cours du 20ème siècle sans jamais payer de réparation ni même de dommages de guerre, je trouve que c’est une solution morale.

  • il faut ramener l’Etat dans les frontières du régalien.
    mais comme près de 20 millions de français sont drogués à l’argent et à la dépense publique…
    Maintenant, si le FMI entre dans la danse…

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