Cet article est rédigé à l’occasion d’une proclamation du gouvernement italien de limiter les anglicismes. C’est un élément d’une question plus générale : l’évolution des langues et en particulier du français, devrait être un enrichissement alors que c’est souvent une déstructuration.
Beaucoup de personnes ne se posent pas la question, notamment les libéraux et ceux que je vais nommer les bourdieusiens. Les premiers appliquent leur idéal de liberté à l’évolution de la langue, sans se rendre compte des problèmes que cela pose. Les autres estiment que le français est une langue qui, par sa complexité, maintient « les gens du peuple » dans un statut inférieur et les empêche d’évoluer vers les classes supérieures.
Par ailleurs, le terme « évolution » est trompeur car il a une connotation positive, alors que le phénomène est beaucoup plus nuancé, comme le montrent les possibles extrêmes d’une telle évolution : l’enrichissement mais aussi la déstructuration, voire la destruction de la continuité de la langue dans l’espace et dans le temps.
La position libérale
La position libérale est dans la ligne du slogan « laissez-faire » des libéraux dans le domaine économique.
La langue est pour eux une sorte d’être vivant qui évolue à sa façon, et l’État n’a pas à s’en mêler. Ils pensent que l’évolution naturelle des langues est inévitable et que, par exemple, le franglais est simplement le reflet de l’influence de l’anglais dans notre société mondialisée.
Certains ajoutent que l’anglais est prédominant dans les domaines de la technologie, des affaires et de la culture populaire, et qu’il exerce pour cela une influence significative sur de nombreuses langues, et pas seulement le français. Bref, ils passent de « naturel » à « inévitable ».
Ce « laisser-faire » des libéraux s’applique à toutes les influences extérieures, notamment argotiques. Certains linguistes d’opinions politiques pourtant opposées sont de leur avis, car ils voient là une occasion de « casser la société », ou, de façon plus intéressée, de recevoir des commandes d’études, de grammaires, de dictionnaires…
Nous verrons que cette attitude présente d’importants inconvénients, et que nous sommes là plutôt dans un domaine régalien, c’est-à-dire où l’action publique se justifie en pratique et de façon majoritairement consensuelle.
Une évolution « non régalienne » dans un premier temps
Dans l’histoire du français comme dans celle de bien d’autres langues, il y a deux périodes différentes : celle où la langue n’est qu’orale, et celle où elle devient écrite.
L’histoire du français commence avec l’occupation romaine, et beaucoup de mots dérivent de l’argot militaire des garnisons. Les couches supérieures apprenaient le latin classique, langue du pouvoir.
Ces deux variantes du latin ont diffusé lentement (les spécialistes parlent de cinq siècles) vers les couches moyennes et inférieures de la société.
Mais comme la quasi-totalité de la population ne savait pas écrire, les mots se sont largement déformés.
D’abord dans l’espace : le latin a donné les différentes variantes de l’italien, de l’espagnol, du portugais, du roumain.
En France, il a donné des langues locales qui n’étaient pas intercompréhensibles, et dont les plus connues sont le provençal, le gascon, le picard… et le français du domaine royal.
Ce dernier, comme les autres langues romanes, a fini par être tellement différent du latin que la masse des croyants ne comprenait plus la messe. Cette situation servait l’Église catholique, qui rassemblait la quasi-totalité des alphabétisés, en latin évidemment. Les clercs pouvaient asseoir leur autorité en arguant de textes que le bon peuple ne comprenait pas.
Une langue non écrite, et a fortiori non enseignée scolairement, évolue très vite et de façon différente suivant les endroits.
En parallèle, l’élite utilise une autre langue, normée et évoluant peu, de manière à garder l’intercompréhension dans le temps et dans l’espace. Ce fut à l’époque le cas du latin, langue écrite commune dans une grande partie de l’Europe. Et cela malgré la disparition de l’empire romain.
Cela n’a pas empêché la naissance d’une littérature populaire en vieux français, dont les textes les plus connus sont ceux des cycles arthuriens de Chrétien de Troyes ou la Chanson de Roland. On a également quelques harangues de chefs à leurs troupes illettrées, la plus connue étant celle des Serments de Strasbourg en 842, texte souvent considéré comme étant le premier en vieux français.
Le passage à l’écrit implique le régalien
La situation change totalement à la Renaissance et au début de l’Âge classique : le vocabulaire et la grammaire sont normalisés et largement figés, tandis qu’on assiste à un vaste enrichissement du vocabulaire transposé directement du latin.
Les classes moyennes et supérieures étaient d’ailleurs de plus en plus lettrées avec le début de la scolarisation, en général religieuse ou par précepteur. À l’écrit, elles abandonnent le latin pour le français, notamment du fait de cet enrichissement du vocabulaire.
Ce mouvement est accompagné par le pouvoir : par l’Ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539, François Ier décida que la vie juridique devait se faire en français et non plus en latin.
Créée par Richelieu en 1635, l’Académie française fut proclamée gardienne de la langue.
Entre les deux, Luther lança la Bible et les services religieux en allemand, et non plus en latin, imité par des locuteurs des autres langues européennes, protestants d’abord, puis catholiques.
En France, c’est la langue du roi qui fut choisie. On oublie qu’elle n’était à l’époque la langue maternelle que des habitants de l’Île-de-France à l’Orléanais, et seulement une langue seconde des lettrés des autres régions françaises.
L’écrit impose la normalisation de la langue pour qu’elle soit comprise dans tout le royaume, et bien au-delà dans le cas du français. C’est grâce à cette normalisation que nous comprenons les textes écrits depuis cette époque.
On dit que les jeunes Anglais d’aujourd’hui ne comprennent plus Shakespeare dans le texte original, et qu’il faut le traduire en anglais moderne… avec la perte de contexte qu’implique toute traduction. Toujours en Angleterre, où la langue du pouvoir était le français depuis Guillaume le Conquérant, mais où le latin était présent comme ailleurs, les textes juridiques mélangèrent ces deux langues, qui furent bientôt trois avec l’anglais, et les bibliothèques juridiques un peu anciennes ne sont lisibles que par des spécialistes. Merci à François Ier !
L’enrichissement, oui, mais comment ?
Traditionnellement, l’enrichissement s’est fait par la francisation de l’orthographe et de la prononciation. Celle, massive, qui a eu lieu à la Renaissance à partir du latin s’est poursuivie ensuite : l’anglais riding coat, le vêtement de la chasse à courre, a donné « redingote ».
Plus tôt, l’arabe al gabr (démontrer) avait donné algèbre.
Au XXe siècle, il y a eu l’invention du mot « ordinateur » en 1955 par François Girard, responsable du service publicité pour IBM, sur les conseils de son ancien professeur de lettres à Paris, Jacques Perret, alors que beaucoup de langues ont gardé le mot anglais computer (calculateur).
Jusque-là, cet enrichissement a été considéré comme positif.
Mais aujourd’hui, le franglais ne francise pas les mots nouveaux et surtout en intègre d’inutiles, ce qui dévalorise la langue au lieu de l’enrichir.
Citons, parmi tant d’autres, l’exemple du terme « challenge », fréquent dans la presse économique et qui tend à s’imposer dans le langage courant. Challenge est de plus prononcé à l’anglaise « tchallinge » alors que c’est l’exact synonyme du mot défi qui a l’avantage d’être plus court et de ne pas bouleverser le lien entre orthographe et prononciation.
Pour les défenseurs du français, ce n’est pas une évolution ni un enrichissement, mais une corruption.
Beaucoup de termes anglais ont une existence éphémère, mais ceux qui paraissent les plus durables voient des propositions de francisation proposées par les commissions de terminologie. Ces dernières font un travail remarquable, avec toutefois parfois, à mon avis, le défaut de vouloir traduire exactement, ce qui est un peu lourd.
L’exemple de l’anglais montre pourtant que l’on peut prendre des mots simples et que le contexte se charge du reste. Comme c’est le cas par exemple du mot souris : c’est le contexte qui nous dit s’il s’agit du rongeur ou de l’accessoire informatique.
Communiquer oui, mais aussi raisonner !
Il y a un deuxième débat derrière le « laisser-faire » en matière linguistique et un encadrement régalien. C’est celui de l’usage de la langue.
Une opinion est que la langue ne sert qu’à communiquer : peu importe la langue et son vocabulaire, l’essentiel est d’être compris, ici et maintenant. C’est la forme extrême d’une opinion majoritaire dans beaucoup de milieux, même instruits.
À l’opposé, une minorité, mais très influente, donne un rôle culturel à la langue : c’est l’expression d’une communauté dont les valeurs se sont exprimées dans des œuvres classiques.
Dans le cas du français, on n’a que l’embarras du choix : Ronsard et du Bellay à la Renaissance, Pascal, Molière, Corneille et Racine sous Louis XIV, Voltaire et les Lumières un siècle plus tard, Victor Hugo et les romantiques au XIXe siècle, et leurs successeurs de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.
Ce rôle culturel va au-delà de la communion dans certaines grandes œuvres.
Il est censé animer toutes les opinions politiques, économiques et philosophiques, rappeler les principales œuvres scientifiques etc. Ce rôle culturel est d’autant plus important que les références au latin ont disparu du langage courant avec la quasi fin de son enseignement dans les collèges et lycées.
La langue structure notre pensée.
Certains vont plus loin encore en disant que la langue structure la pensée : un Français de formation classique ne pensera pas comme un Américain et encore moins comme un Chinois ou un Africain, dont les textes de référence sont totalement différents.
C’est l’équivalent de la biodiversité, que l’on veut à juste titre protéger dans le monde animal et végétal car la supprimer serait mettre en péril ce qui fait la richesse de l’humanité, et ferait perdre des idées ou des attitudes fondamentales.
Une conséquence de cette opinion est qu’il faut que des textes anciens restent lisibles, non seulement en France mais dans les autres pays de la francophonie ; qu’il y ait donc un enrichissement mais non une déstructuration.
Les régimes autoritaires l’ont bien compris qui veulent « du passé faire table rase ».
Citons la Russie soviétique, la Chine de l’époque maoïste et son rebondissement actuel avec « la pensée du président Xi » et bien d’autres despotes de moindre envergure, qui ont tous en commun d’avoir simplifié et appauvri leur langue nationale, notamment pour limiter le passé et le présent à ce qui leur convenait. La Chine a même adopté de nouveaux caractères « plus simples à dessiner », mais qui rendent le passé illisible sauf traduction par l’État, avec par ailleurs la perte de tout le contexte poétique, voire culturel.
Remarquons que les démocraties utilisant les caractères chinois (Taïwan, Japon, Singapour) ont conservé des caractères traditionnels.
Pour aller plus loin dans l’analyse du rôle de la langue dans la réflexion, je vous recommande le site de l’Observatoire européen du plurilinguisme.
Passons aux problèmes concrets, tant dans l’espace que dans le temps.
Courir derrière la langue dans l’espace et dans le temps
Je suis toujours dans l’hypothèse où on laisse toutes les langues évoluer spontanément, ce qui est, encore une fois, une idée majoritaire.
Très vite on verra apparaître des décalages dans l’espace, c’est-à-dire que l’intercompréhension sera difficile d’une région à l’autre, dans ce qui devrait pourtant en principe être la même langue. L’histoire est riche de phénomènes de ce genre depuis l’éclatement du latin entre les diverses langues romanes à celui de l’anglais ; et dans une moindre mesure du français, comme Google le signale dans le choix des langues qu’il propose : français de France, français du Canada… anglais d’Australie, du Canada, des Caraïbes etc.
Il y a aussi les variations dans le temps : la plupart des langues modernes, sauf le français, nécessitent de « moderniser » les textes fondateurs pour un usage scolaire, au risque de perdre le contexte de l’époque.
En France, il y a les auteurs d’avant la normalisation de l’orthographe, comme Montaigne, et ceux des époques suivantes pour lesquels le texte d’origine reste compréhensible même s’il paraît daté à certains jeunes aujourd’hui… auxquels on peut répondre que c’est leur propre langage qui sera bientôt daté…
Bref, la scolarisation, et donc la lecture des adultes, impose des manuels scolaires qui ne peuvent pas changer sans arrêt, donc une normalisation de l’orthographe, de la grammaire et du vocabulaire.
Si une certaine évolution des langues est souhaitable et inévitable, elle doit rester en pratique lente et contrôlée par des systèmes scolaires. En France, les partisans du rôle culturel du français s’insurgent ainsi contre « les déviations » de l’enseignement actuel. Et notamment de la tolérance de nombreux enseignants pour les argots, jargons et créoles.
Je mets dans cette catégorie l’écriture inclusive que je considère comme un jargon politique, et qui a été condamnée par l’Académie française et par des tribunaux : le 12 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble-Alpes a débouté l’université de Grenoble en appel de sa condamnation pour avoir rédigé ses statuts en écriture inclusive.
Personnellement, j’estime que ces « variantes » se développent spontanément justement pour n’être comprises que par des initiés, donc sont délibérément des obstacles à l’intercompréhension dans le temps et dans l’espace. Sans compter que passé l’effet de mode, elles peuvent se révéler éphémères.
La simplification de l’orthographe
C’est un sujet très voisin de celui de l’évolution de la langue. Les Italiens et les Espagnols ont plongé : il n’y a plus de pharmacie mais des farmacia.
À titre personnel, je suis partisan d’une simple élimination des complications extrêmes, tant en vocabulaire qu’en grammaire – les Québécois nous conseillent d’oublier les « exceptions aux exceptions » de l’accord du participe passé – en supprimant seulement ce qui complique l’apprentissage du français par les étrangers.
Je laisse donc la parole aux spécialistes du Français Langue Étrangère.
Et n’oublions pas la francophonie !
Nous avons vu les complications scolaires, géographiques et historiques entraînées par une transformation rapide. Je crains notamment une dislocation de la francophonie, et donc l’abandon du français qui ne serait plus une langue internationale.
Par ailleurs, cela peut mener à une perte de sa richesse lexicale et à une difficulté à préserver certaines nuances et subtilités spécifiques au français. Je pense notamment à la disparition du passé simple, pourtant vecteur de précision. Plus généralement cette précision, supérieure à celle de l’anglais d’après les juristes internationaux, disparaîtrait avec la dislocation de la grammaire.
Finalement, si suivre l’évolution spontanée du français paraît une idée de bon sens, et elle est d’ailleurs majoritaire, elle paraît peu praticable à l’examen.
Dans l’idéal, il faudrait une organisation à l’échelle de la francophonie ayant pour mission une aide à l’enrichissement par des banques de terminologie communes et un œil sur les programmes scolaires pour veiller à une bonne continuité dans l’espace et dans le temps des principales règles de grammaire.
Nous avons tous remarqué que l’Académie française commençait à s’internationaliser. Elle devrait aller plus loin en accueillant la crème de la francophonie, et la richesse de ses vocabulaires variés.
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La langue n’est une fonction régalienne de l’état. D’ailleurs, aux USA, il n’y a pas de langue officielle au niveau fédéral.
En France, l’état s’occupe de tout, de l’éducation, donc de la langue.
Laissons la population libre de s’organiser.
Au Portugal ont a essayé un accord orthographique avec les pays de langue officielle portugaise. Il comprenait tous les pays d’ anciennes colonies du Portugal, à savoir :
– Brésil ;
– Angola ;
– Mozambique ;
– São Tomé e Príncipe;
– Guinée ;
– Cap Vert ;
– et bien sûr, le Portugal européen.
Premièrement : Comme le Brésil est le plus grand pays de tous, l’ accord a essayé d’ imposer la graphie du Brésil aux autres, incluant le Portugal européen. Toutefois en droit international pour qu’ un traité fonctionne il faut que toutes les pays le signent. Ce qui n’ a pas été le cas. L’ Angola et le Mozambique ne l’ ont pas fait.
Deuxièmement : l’ argument pour faire passer l’ idée, était que cela aurait un effet positif pour la compréhension du portugais par tout ce monde lusophone.
Résultat : éliminer quelques consonnes ici et là ne mène à rien en faveur de cette meilleure compréhension par tous, du portugais. Le portugais , comme le latin à été à l’ origine d’ autres façons de parler ce même portugais. C’ est tout à fait normal. Ce qui n’ est pas normal est d’ imposer cette façon d’ écrire à tout le monde, le Portugal européen compris. Cela sonne faux. On a l’ impression d’ un texte mutilé. Voici le cas où l’ évolution de la langue, naturelle, n’ y est pour rien. Avant, les différents pays utilisaient, d’ ailleurs légitimement, chacun leur propre orthographe. Mais une langue ne se limite pas à l’ orthographe. Le vocabulaire et la syntaxe y ont leur part. Or cela n’ a pas été touché, ce que revient à ne changer rien du tout. Seule la politique a été prise en compte.
La zizanie était installée. Aujourd’ hui, au Portugal européen, chaque auteur fait comme il veut. Il s’ exprime selon d’ avant ou d’ après l’ accord. Il y eu même des intellectuels/polititiens qui ont fait la défense que ces modifications avaient une base scientifique, que c’ était « l’ évolution » normale de la langue. Pas du tout, la suppression d’ un c ou d’ un p, par ici et par là, ne change rien à la donne.
L’adoption de mots anglais n’est pas toujours dommageable, par quelle expression française remplacerait-on « week-end » par exemple ? « Congé de fin de semaine »? Bon courage si vous voulez faire passer cette expression dans le langage courant !
Plus graves me semblent les grosses fautes de syntaxe, de plus en plus fréquentes, même chez des journalistes dont l’écriture est pourtant le métier, et les fautes d’emploi : « problématique » au lieu de « problème » par exemple, ou encore « complexifier » au lieu de « compliquer ».
En effet, quand on parle de langue, on se cantonne généralement à la sémantique, ce qui est secondaire car c’est la syntaxe qui cimente la langue. De nouveaux mots peuvent apparaître sans risque, sinon celui de ne plus guère retrouver la graphie et la structure sémantique de notre enfance. Un peu mais pas trop, surtout qu’il y a des mots de chez nous que nous avons oubliés et qui auraient un excellent emploi. L’anglo-saxon ne se prive pas de puiser dans le latin qui est pourtant la langue native de la nôtre ! Ce dernier a un avantage d’être basé de préférence sur des mots courts qui sont rares en français et qui permettent un débit rapide si apprécié aujourd’hui. Le français est une langue qui demande un tempo qui laisse goûter les mots, leurs sens superposés, leurs tonalités si variées, le temps réfléchir à ce qu’on dire.. aussi. Mais c’est malheureusement toute une culture…
« On dit que les jeunes Anglais d’aujourd’hui ne comprennent plus Shakespeare dans le texte original ». Moi je le comprends, donc c’est inquiétant. D’un autre côté je comprends aussi Rabelais en texte original. Mais pas la Chanson de Roland ni les serments de Strasbourg (qui sont particulièrement intéressants car ils sont aussi en ancien allemand).
Si la langue doit être coordonnée par des échelons supérieurs (et cela est douteux), pourquoi cela devrait il être la France? Il y a plus de locuteurs français en dehors de la France que dedans! Quand aux néologismes, j’en ai un: mèl?? Les québécois avaient proposés courriel, refusé par l’académie française, qui a choisit l’anglicisme.
Ne devrait il pas plutôt y avoir un organe supranational pour cela? Il n’y en aura pas car la France est trop imbue de sa langue et l’état souhaite garder le pouvoir dessus. Du coup sans cesse des mots seront introduit au forceps, au mépris des usages (en France comme ailleurs), puis modifiés par des néologismes pourris. Je pense qu’actuellement, le Québec est un meilleur défenseur de la langue française que la France, c’est un comble…
Ce qui est amusant dans le choix de « mél » pour franciser l’anglais « mail » c’est qu’on a oublié que « mail » vient du français « malle » du temps de la malle-poste. Donc si on voulait refranciser « mail » on aurait du choisir « malle », retour à l’envoyeur.
En plein COVID, le cluster a provoqué de nombreuses réactions ! Etant donné le contexte, le foyer faisait bien l’affaire.
D’abord une anecdote : j’étais à une réunion de l’OTAN présidée par un Américain. On sentait que l’assistance peinait. Un Anglais a fini par se lever et a dit bien fort: « Monsieur le président, je vous rappelle que la langue de travail de cette réunion est l’anglais »
Ensuite, je ne suis pas certain que l’absence de langue officielle aux États-Unis soit due au libéralisme. A l’origine, la langue commune des élites était le français. Plus tard, des États-Unis se sont persuadés de la primauté de leur langue. Donc inutile d’officialiser.
D’ailleurs le français n’a été officialisé que récemment, parce qu’il était menacé.
Oui, c’est langue commune qui garde unie une population. Les États-Unis vont le savoir très tôt ceux qui sont persuadés que les cultures peuvent se mêler ne savent pas qu’ils reconstruisent la fameuse Tout de Babel.
«La langue structure notre pensée!» tiens, des guillemets français?
Ce que je crains le plus, ce sont les faux frères : mots qui existent en français et en anglais mais dont la signification est différente. L’exemple typique est le mot « alternative ». La logique dit que l’alternative est l’existence de deux solutions entre lesquelles il faut choisir. Lorsqu’on dit donc qu’il n’y a pas d’alternative, c’est qu’il n’y a pas le choix d’une autre solution.
Le sens anglais est simplement que l’alternative est une autre solution. C’est ce second sens qu change le sens du discours logique. Il y en a même qui parlent de plusieurs alternatives, pour plusieurs solutions au choix.
L’Académie française a beau dire puisque l’usage est là et généralise le sens anglais. Voilà donc bien un cas de structure de la pensée mis à mal par un seul mot.