En septembre dernier, nous nous élevions contre le projet de réforme de la police judiciaire comme représentant une menace de notre État de droit. Efficacité des services de la PJ, indépendance de la justice dans le cadre des opérations de police judiciaire, la réforme inquiétait les citoyens mais les policiers eux-mêmes qui, dans leur très grande majorité faisaient souffler un vent de fronde sur le ministère de la place Beauvau.
Début février étaient connus les résultats de la mise en place des directions territoriales de la police nationale en outre-mer et l’expérimentation de la réforme de la police menée dans huit départements métropolitains. Ces expérimentations ont données lieu à deux rapports aboutissant à des conclusions diamétralement opposées.
Selon les conclusions du rapport de la mission inter-inspections (IGA, IGJ, IGPN), rendues le 1er février, la création des DTPN ultramarines « a produit des effets positifs et incontestés ».
« La réforme a engendré une plus grande lisibilité de l’action de la police, la multiplication d’opérations coordonnées interservices, un meilleur partage des moyens et effectifs, une plus grande circulation. »
Pour les huit départements expérimentateurs en métropole, le « bilan est à conforter » du fait de la brièveté des expérimentations en raison des mouvements de contestation qui ont secoué la police judiciaire (PJ) à l’automne.
Mais les inspections estiment que des effets positifs sont malgré tout mesurés avec « notamment une plus forte présence de la police aux frontières (PAF) et un meilleur traitement administratif des étrangers en situation irrégulière. »
Le 2 février 2023, un rapport du Sénat porte également sur les DTPN.
Des conclusions divergentes
Mais les conclusions du rapporteur, le sénateur Philippe Dominati, sont bien différentes : « écueil structurel », « anachronique », « inadapté ».
Le rapport sénatorial rappelle que la PJ est une police d’excellence qui obtient des « résultats probants ». Son « taux d’élucidation des affaires varie ainsi de 74 % pour les contrefaçons à 95 % pour les affaires de trafic de stupéfiants. Ces taux sont notablement plus élevés que les taux moyens d’élucidation des différents services de la police nationale ».
Dans un communiqué daté du 3 février 2023 l’Association Nationale de la Police Judiciaire (ANPJ), « conteste leur interprétation partiale du rapport d’évaluation des inspections de l’Administration, de la Justice et de la Police Nationale. Il est en effet trompeur de le résumer au fait que « la création des DTPN et DDPN n’a produit que des effets positifs et incontestés » au regard des nombreuses réserves émises dans cet audit. »
Selon l’association :
« Il ressort ainsi de cet audit que l’expérimentation menée dans les départements tests en métropole est incomplète, mal acceptée, et d’une portée limitée puisqu’effectuée à droit constant, sans cadrage initial et qu’elle a été focalisée sur le pilotage des services et non leur réelle efficience. […] Les résultats en apparence plus concluants dans les départements d’outre-mer sont tempérés par les inspections qui soulignent une acceptabilité de la réforme largement perfectible. »
Pour l’ANPJ, « cette réforme, qui n’emporte pas l’adhésion de celles et ceux qui en sont les principaux acteurs, est d’ores et déjà vouée à l’échec. »
Le vent de fronde n’est pas près de retomber. Un grand rassemblement national, intersyndical et interprofessionnel est annoncé pour le 11 mars 2023 à 14 h 00 à Paris.
Le gouvernement ne veut pas que les J. O. 2024 se passent comme le Coupe de football. La France serait alors pointée du doigt par toutes les Nations d’une part mais nos élus seraient surtout obligés d’admettre leur incompétence jusque dans le domaine de la police.
Regrouper tous les services sous le préfet lui donne une force d’intervention quasi illimitée pour sauver ces J. O., tant en hommes qu’en rapidité d’intervention et en réactivité sur le tout Paris.
Trouver la raison de cette réforme explique pourquoi elle est si mal ficelée.