Éducation et économie : un mauvais début pour le prochain quinquennat !

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Éducation et économie : un mauvais début pour le prochain quinquennat !

Publié le 17 mai 2022
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On remarquera que le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, dans ce bref entretien, où il n’est question que d’ajouter 1 h 30 d’enseignement scientifique aux élèves dont ce n’est pas un «  enseignement de spécialité », doit à la fois se référer aux paroles du président de la République et au Conseil supérieur des programmes qui a élaboré un « projet pour un nouveau programme de mathématiques » à la rentrée 2022 :

Un ministre très « contraint »

À l’origine de cette décision qui semble revêtir un intérêt capital, il s’agit seulement, comme le précise le journaliste, du constat selon lequel « tous ont besoin de faire des mathématiques ». Il ne s’agit donc pas de répondre à l’exigence formulée ces derniers mois par des chefs d’entreprises et des industriels français, sous une autre forme. Ils veulent « davantage de scientifiques, et si possible aussi des femmes scientifiques ».

 

L’avenir de l’industrie française dans l’Union européenne

Au moment où l’Union européenne compte beaucoup sur la France pour les puces électroniques et les marchés qui en découlent : voitures hautement automatisées, cloud, internet des objets, connectivité, espace, défense et supercalculateurs, il est surprenant de voir à quel point les Français ignorent que le baccalauréat français ne fournit pas aux établissements d’enseignement supérieur suffisamment de candidats à des études scientifiques et technologiques.

Ajouter 1 h 30 d’enseignement, probablement essentiellement de mathématiques, à des élèves ayant choisi de faire des études autres, n’a aucun intérêt pour l’économie française, mais il est toujours impossible en France pour un ministre de se référer à la relation éducation-économie !

Il s’agit donc dans cette dernière intervention d’un ministre en fin de parcours, de parler une fois de plus de l’école que les parents français connaissent, des quatre opérations à maîtriser dès l’école primaire, etc.

Au moment où il parle, se déroule à Nice un colloque des plus indispensables, organisé par l’UPSTI, car le cœur du problème n’est pas que tout le monde fasse des maths mais d’obtenir davantage de bacheliers et de diplômés de l’enseignement supérieur, compétents en Science, Technologie, Ingénierie et Maths (STEM), ayant été au contact des entreprises dès leur plus jeune âge. Or, si l’on se souvient de la campagne présidentielle, d’après Jean-Michel Blanquer et malheureusement beaucoup d’autres, l’école primaire française a pour objectif de faire acquérir les fondamentaux, une parole miracle qui séduit un maximum d’électeurs !

Il existe un profond décalage entre ce que la France offre comme potentiel aux yeux des partenaires européens et ce qu’elle distille à ses concitoyens en termes de promesses d’avenir, qui devraient reposer sur l’innovation et la recherche.

Les autres pays (en Europe, Chine, États-Unis…) sont convaincus que l’on ne devient pas innovant en ayant suivi des études primaires et secondaires outrageusement compartimentées dans le seul but de se soumettre au diktat de l’inspection générale de mathématiques et des syndicats enseignants.

 

La réponse française totalement inadaptée

Ce constat était déjà fait en 2008 lors de la présidence française de l’Union européenne ; il le fut encore en 2015 lors de la fondation de la EU STEM Coalition, dont je suis membre ; il l’est plus que jamais en 2022, puisque deux cohortes d’élèves ont parcouru le système scolaire secondaire français – de la sixième à la Terminale –  sans avoir eu une approche interdisciplinaire en relation étroite avec les pratiques et les besoins de l’industrie.

Certains ministres en ont été conscients : Arnaud Montebourg alors en charge du Redressement productif m’a demandé de contacter ses conseillers lors d’une rencontre au MEDEF ; en 2015, Emmanuel Macron alors ministre de l’Économie, a engagé ses collègues, ministre de l’Éducation (Najat Vallaud Belkacem) et ministre de la Recherche (Thierry Mandon), dans une action commune visant à faire le point sur l’actuel positionnement de la France dans l’enseignement des STEM et des relations école-entreprise.

Comme chacun sait, Arnaud Montebourg est parti faire ses propres armes à l’INSEAD puis en tant que créateur d’entreprise. Emmanuel Macron a quitté Bercy et les deux autres ministres n’ont bien évidemment pas donné suite à ce projet dérangeant qui aurait pu contrarier quelque peu les syndicats enseignants français et les électeurs inféodés.

Jean-Michel Blanquer affirmait hier également dans les médias qu’il n’y aurait aucun problème pour organiser ce supplément d’enseignement à la rentrée 2022 puisque le vivier existe. Mais quel vivier ?

S’il s’agit d’ajouter des heures d’un enseignement destiné à des élèves non spécialistes, nous avons sans aucun doute les professeurs. Encore faut-il que durant l’été, les chefs d’établissement remanient avec leurs supérieurs hiérarchiques leur dotation horaire globale puis qu’ils se livrent à un casse-tête supposé faire coïncider les emplois du temps des enseignants avec les nouvelles prévisions de service élaborées en cette fin d’année scolaire. Mais ils ont l’habitude de se plier sans les discuter aux exigences de dernière minute, n’ayant jamais fait l’expérience d’un réel leadership dans la gestion des moyens horaires, financiers ou humains qui leur sont attribués.

Qu’en est-il en revanche des enseignants dont nous aurions besoin pour assurer un enseignement dit de spécialité basé sur la pluridisciplinarité et les pratiques des entreprises ? Comme je l’ai déjà écrit dans de précédents articles ici-même, il est indispensable pour assurer un tel recrutement de personnels introuvables à l’heure actuelle, de proposer des salaires comparables à ceux de l’industrie et par conséquent de déconstruire le fonctionnement actuel de la gestion des ressources humaines au sein de l’Éducation nationale. Rien de moins !

 

Le prochain ministre

Emmanuel Macon aura-t-il le courage de désigner un ministre capable d’une telle audace ? Ce n’est qu’à ce prix que l’économie de la France pourra se relever, que la balance commerciale pourra se rééquilibrer, que l’endettement pourra se résorber…

Que l’on cesse de croire que l’école est un vase clos car partout ailleurs un ministre, un président, ne manquent pas une occasion de rappeler les relations étroites entre le système de formation initiale et la situation économique de son pays.

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  • The Real Franky Bee
    17 mai 2022 at 10 h 56 min

    L’effondrement de l’école française est une catastrophe. Mais comme sur de nombreux sujets, la France vit dans le déni. En 2022, il y 1 moins de candidats admissibles au CAPES de mathématiques que de postes à pourvoir. Qui va se saisir avec sérieux de ce sujet ô combien crucial pour l’avenir du pays ? Qui va mettre fin à des décennies de gabegie de la part d’une administration inefficace, irrésponsable, et aux motivations idéologiques suspectes ? Réponse : personne. Un conseil : fuez.

  • L’éducation mathématique en 2022 en France :
    https://www.youtube.com/watch?v=fJIjoE27F-Q
    Ca arrive ! 🙂

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