Par Lun Zhang1.
Un article de The Conversation
Les Chinois ont coutume de dire gailai de zhonghui lai : ce qui doit arriver arrivera. L’état actuel de la relation sino-américaine le confirme à nouveau : une nouvelle guerre froide s’annonce causée par les conflits structurels et idéologiques entre la Chine et les États-Unis, voire le monde occidental.
Le 23 juillet, en Californie, Mike Pompeo, secrétaire d’État américain, a prononcé un discours lourd de sens dans la Bibliothèque de l’ancien président Richard Nixon, marquant ainsi son propos d’une référence historique. C’est en effet Nixon qui, il y a un demi-siècle, initiait une politique d’ouverture des États-Unis vers la Chine. Pompeo lui, la referme, en déclarant que cette démarche a été un échec.
Selon lui, la Chine communiste n’a pas évolué vers un pays libre « comme souhaité » par les États-Unis, malgré les mesures prises par Washington pour encourager l’ouverture et la réforme du pays. Le pouvoir chinois demeure tyrannique et menace désormais le monde libre grâce aux moyens issus de ses échanges économiques avec le monde extérieur.
En reprenant et détournant la célèbre phase de Ronald Reagan en référence aux Soviétiques, « Trust but verify » (faites confiance mais vérifiez), Mike Pompeo affirme que le temps est venu de « ne pas croire » ce que dit Pékin et de « vérifier » ce que fait le pouvoir chinois (Distrust and verify).
Il appelle enfin à la construction d’une nouvelle « alliance des pays démocratiques et libres » pour défendre la liberté face à une Chine de plus en plus agressive sur la scène internationale.
Une « menace » chinoise
Ce nouveau discours fait écho à un document officiel de la Maison Blanche publié au mois de mai qui dressait le même constat d’échec de la politique d’engagement. Il représente en réalité une synthèse des discours successivement prononcés sur la Chine ces derniers jours par les plus hauts responsables du gouvernement américain.
Du secrétaire de la Défense Mark Esper, au ministre de la Justice Bill Barr, en passant par le conseiller à la Sécurité nationale Robert O’Brien ou le directeur général du FBI Christopher Wray, chacun à son tour met en garde sur la menace chinoise.
Citons un exemple avancé par Christopher Wray parmi les 5000 dossiers d’espionnage en cours d’enquête, plus de 2000 concernent la Chine, et une nouvelle enquête est ouverte toutes les 10 heures pour compléter cette liste.
Il est tentant de mettre tous ces propos sur le compte d’une stratégie électorale visant à redresser la cote de popularité de Donald Trump. Ses chances de reconduire son mandat s’amenuisent en effet de jour en jour en raison de sa gestion négative de la pandémie. Cette stratégie est évidente. Mais ignorer les raisons profondes qui conduisent à un changement aussi radical de la position de Washington à l’égard de la Chine reviendrait à commettre une grave erreur de jugement.
Une hostilité grandissante des Américains
Ce changement s’inscrit dans une longue évolution de la relation sino-américaine depuis plus d’une décennie. On trouve déjà certains germes de ces discours hostiles dans le débat mené par les stratèges et spécialistes américains de la Chine vers 2015. L’arrivée au pouvoir de Donald Trump n’a fait qu’accélerer la mise en œuvre de ces tendances. D’ailleurs, le discours du vice-président Pence prononcé il y a deux ans à l’Institut Hudson avait déjà donné le ton.
De plus, l’hostilité grandissante des Américains vis-à-vis de la Chine, quelle que soit leur couleur politique, constitue une base solide à ce changement politique.
Les sondages montrent que la méfiance à l’égard de Pékin n’a cessé d’augmenter ces dernières années, enregistrant récemment un taux historique : selon une enquête de Pew datée du mois d’avril, 90 % des Américains pensent que la Chine représente une menace pour les États-Unis et 66 % ont une opinion négative de la Chine, qu’ils soient sympathisants des républicains ou des démocrates.
Ces résultats montrent que si l’Amérique est profondément divisée sur de nombreux dossiers, il existe néanmoins un consensus politique qui fédère tous les camps : arrêter l’expansion de la Chine.
À titre d’exemple, retenons les deux votes unanimes au Sénat sur Hongkong, en réaction de la mise en place de la Loi de la Sécurité nationale imposée par Pékin, pour supprimer tous les avantages accordés par les États-Unis à la cité malgré sa rétrocession à la Chine, et il y a deux ans sur la visite de hautes personnalités politiques de Washington et Taipei.
Comment Pékin perd peu à peu ses alliés
Face à la politique très nationaliste menée par les autorités chinoises, répressive à l’intérieur, comme en témoigne la politique menée à l’encontre des minorités ethniques et les démocrates chinois et agressive à l’extérieur, en particulier depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping. Pékin est en train de perdre ses derniers sympathisants aux États-Unis, à Wall Street, à Washington, ou encore sur les campus américains.
C’est ce que j’ai pu constater personnellement sur place ces derniers mois en tant que visiting scholar à Harvard : il est rare de voir un intellectuel ou un homme politique prendre position pour défendre Pékin dans les médias ou dans les conférences publiques.
Les lobbys, autrefois très actifs en faveur de la Chine dans le milieu des affaires perdent de leur influence. Bill Barr a ainsi récemment mis en garde certaines entreprises sur les risques légaux qu’elles encouraient si elles continuaient de faire affaire avec la Chine.
Les critiques sur la politique chinoise du président américain concernent plutôt son approche et son efficacité : mieux s’associer aux alliés européens, canadiens ou japonais que s’appuyer sur la seule capacité des États-Unis. Il est intéressant de voir que dans le discours de Pompeo, ces deux positions commencent à se rejoindre.
Des coups tactiques qui s’enchaînent
Certains signes montrent que les élites professionnelles de l’administration Trump reprennent une partie la main au chef de l’État et ses décisions arbitraires, profitant de sa perte de popularité.
Les coups tactiques s’enchaînent. La fermeture récente du consulat chinois à Houston a été suivie par l’arrivée d’une délégation américaine conduite par le ministre de santé à Taiwan, du jamais vu depuis l’établissement de la relation diplomatique entre Pékin et Washington.
Non content de bannir les réseaux Tik tok et WeChat des États-Unis, Washington a même annoncé il y a quelques jours une opération de « nettoyage du net » (The Clean Nework) visant à chasser les entreprises d’IT chinoises du sol américain.
Un conflit militaire bien opportun
L’éventualité d’un conflit militaire partiel entre ces deux géants en raison de certains sujets polémiques, comme celui de la Mer méridionale, n’est plus à écarter. Chine et États-Unis s’y préparent sérieusement. Plusieurs porte-avions américains se regroupent dans la région et les exercices militaires de deux côtés s’intensifient.
Cette tension entre les deux rives de l’Océan Pacifique peut s’avérer utile pour Donald Trump comme pour Xi Jinping pour détourner l’attention des problèmes sociaux internes.
Elle pourrait aider à la réélection de l’un et à la consolidation du pouvoir de l’autre. Même si Joe Biden remporte les élections en novembre, nul doute que la ligne politique chinoise des États-Unis demeurera fondamentalement la même.
Ces derniers mois ont été marqués par un tournant significatif dans la relation sino-américaine. Les tensions perdureront dans les années à venir. Il reste à voir si les autres pays du monde, en particulier européens, sont prêts à affronter une situation internationale qui sera largement déterminée par cette nouvelle donne.
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- Professeur des universités en Civilisation chinoise, Responsable du séminaire Modernité chinoise, transition et réforme en Chine, CY Cergy Paris Université. ↩
La question que je me pose est, combien de temps encore le petit pays appelle usa arrêtera de se prendre pour les maîtres du monde. La démographie n’est vraiment pas en leur faveur. A part leurs esclaves européens, ils n’ont aucun allié de poids.
Il n’ont point besoin d’alliés de poids. 330 million d’américains forment la première puissance économique, diplomatique, militaire et technologique du globe. Ni la Chine, ni la Russie ne lui arrivent à la cheville. Et certainement pas non plus les pays émergent comme l’Inde ou le Brésil. A l’avenir cela changera peut-être, mais pour l’instant les Etats-Unis sont la seule superpuissance. De ce fait, il remplisse naturellement leur rôle de « maître du monde », comme l’ont fait la Perse ou Rome en leur temps, ou encore la France et l’Angleterre, il n’y pas si longtemps…
Quant aux européens, Vae Victis ! Sans les deux guerres, nous n’en serions pas à jouer les second rôle et compter sur l’otan pour notre défense.
Les USA sont loin d’être parfait, et je ne suis pas non plus particulièrement américanophile, surtout lorsque l’ont voit ce qu’ils sont devenu politiquement et culturellement. Mais pour l’instant, il vaut mieux eux que la Chine…
Pour ma part je vois la réalité de façon plus nuancé… Sur le plan technologique la chine progresse bien plus vite que les USA ( qui du reste ne progresse guère plus en dehors des quelques licornes de la Silicon Valley ) on oublie de dire que le point de rupture est en parti du a l’affaire Huawei , qui en l’espace de 5 ans a écrasée tout les concurrents mondiaux.
L’idée n’est pas de débattre sur le bien fondé de ces sanctions même si pour ma part l’interdiction d’une marque sur le sol national relève plus d’une stratégie empruntée aux régimes communistes envers et contre toute forme de libéralisation qui jusqu’à il n’y pas si longtemps formait le socle des pays occidentaux , mais bref .
L’idée est donc de construire un mur invisible contre la vague technologique chinoise qui menace la suprématie du monde occidental. D’ailleurs l ancien Patron de Google ( Eric Schmidt ) a affirmé au micro de la BBC : que ce n’était qu’une question de temps avant que la chine ne devienne la première puissance mondiale.
L’autre problème des pays occidentaux est qu ils épuisent leur ressources a se diviser sur des questions non essentielles à leur survie : en France qui occupe le débat c’est le chauffage des terrasses l’hiver , le budget de la santé , et la fin des chaudières au fuel , aux USA c’est la gestion du COVID , le débit des pommeaux de douches , la présence des troopers a Portland etc.
Comme presque toute les sociétés occidentales nous sommes enfermés dans une vision étriquée de la réalité qui repose sur le dogme de notre prétendue supériorité inébranlable , alors que tout les signaux indiquent un changement de grande ampleur dans l’équilibre des forces que nous nous efforçons de combattre de la façon la plus fainéante qu’il soit c’est à dire en rejetant la faute sur l’autre plutôt que de se (re?)mettre au travail.
Vous semblez penser qu’en France et plus générallement en Europe, il n’existe aucun spécialiste compétent en géopolitique de haut niveau. Que les services secrets extérieur et de l’armée sont inefficace, que personne ne pense au dangers que représente la Chine ??…
Vous vous trompez lourdement.
Entre la Chine qui nous vole nos vignobles et les américains nos industries, je ne saurais choisir ou poser ma phobie sauf que nos vignes restent où elles sont alors que nos industries disparaissent.
Je vous comprend. Notre situation, pas juste en tant que français, mais plus largement en tant qu’européen, est peu enviable. Entre les inepties socialistes qui gangrènent nos politiques, la lente combustion de nos libertés fondamentales et le fait d’être tiraillés entre le bloc américain et le bloc sino-russe, nous avons des soucis à nous faire !
Les américains volent nos industries? Faut vous soigner, à ce point c’est grave! Si Alstom a fait faillite c’est bien à cause de l’état français et son ignorance économique crasse. GE a Racheté la branche Turbine, et seulement elle. Les entreprises du CAC ont acheté des entreprises américaines car dans un monde libéral c’est ainsi.
Bravo, 500% d’accord avec vous, enfin un commentaire sensé….Personnellement, je préfère être dans un monde « dominé » par les USA ( une grande démocratie, meilleure que le nôtre), que par la Chine communiste actuelle !!
Si vous estimez que les États Unis sont un « petit pays », alors la France est un confetti.
Si vous pensez que la démographie est en défaveur des États Unis, n’oubliez pas que la natalité de la France est, depuis 40 ans, catastrophique avec à peine un tiers des naissances venant des français de souche … et aucune politique nataliste -les politiciens français de tous bords favorisant l’immigration (dont on voit les ravages sur la société).
Si vous croyez que les européens sont les esclaves des États Unis, c’est que vous ne comprenez pas la situation géopolitique actuelle … comme l’arrogant Macron qui, après avoir donné des leçons, a la Pologne, à la Hongrie, à l’Italie, au Brésil et aux États Unis (mais la il est tombé sur un os) a maintenant la prétention de diriger le Liban … peut-être avec ses amis du mouvement terroriste Hezbollah, financé et armé par l’Iran.
Je compare pas les usa à la France mais à l’ue.. La France n’est même plus un confetti, c’est le néant. De plus il faut comparer l’espace dans lequel vie une société, les usa, c’est très petit, et ses habitants semblent pris de folie.
L’UE est une coquille vide, une construction arbitraire qui ne repose sur rien. Il n’y a absolument pas de culture européenne : ni langue, ni culture, ni projet, ni aspirations, etc. communs/communes.
Les USA ont beaux être multicommunautaires, ils ont sentiment patriotique qui n’existe nul part en Europe : Un américain ; qu’il soit blanc, noir ou jaune ; se SENT américain. Cela n’existe nul part ailleurs y compris dans ces pays qui se gargarisent d’être assimilationnistes, n’en déplaisent à nos soit-disant « patriotes » d’ « extrême-droite ».
L’UE est une union douanière qui marche plutôt bien dans ce cadre restreint. Son versant civilisationnel n’existe que dans l’esprit des technocrates qui en tireraient un bénéfice.
Les USA sont immenses, aussi grands que la Chine….
Quant à la France, elle possède la meilleure armée (toutes armes) d’Europe et est grandement respectée pour cela par les USA. Les spécialistes de l’armée française donnent souvent des conseils aux US, notamment dans le domaine de l’anti guérilla.
Vous méritez bien votre surnom! Une telle méconnaissance de la situation asiatique est atterrante. La bas tous les voisins de la Chine sont des alliés des USA: Japon, Philippines, Australie et même Vietnam qui se sent directement menacé par l’impérialisme de Xi. Quant aux Européens ils ne sont en rien des esclaves, la guerre économique le prouve, mais des petits pays trop faibles militairement pour impressionner! Donc nous avons besoin d’un allié de poids.
L’Iran, Nouvelle Colonie Chinoise ? voir sur Gatestone institute :L’accord est entièrement au profit de la Chine. Les 400 milliards de dollars qui seront investis sur 25 ans, représentent une petite somme pour la deuxième plus grande économie du monde ; la Chine aura les pleins pouvoirs sur les îles iraniennes ; elle s’approvisionnera en pétrole iranien à un prix de faveur et accroitra sa présence et son influence dans presque tous les secteurs de l’industrie iranienne, à commencer par les télécommunications, l’énergie, les ports, les chemins de fer et les banques. La Chine est par ailleurs le premier importateur mondial de pétrole.
Certains politiciens et quelques médias d’État iraniens ont fait preuve d’esprit critique sur l’accord. Le journal Arman-e Melli, par exemple, a osé titrer : « L’Iran n’est pas le Kenya ou le Sri Lanka (pour être colonisé par la Chine) ».
A l’instar de certains dirigeants africains, les mollahs vendent leur pays à la Chine. De son côté, Pékin est plus que satisfait de signer des accord avec des dictateurs, d’ignorer les violences qu’ils font subir à leur peuple et de piller leur nation pour faire avancer ses projets d’hégémonie mondiale.
Prof d’université donc anti Trump. Ses allusions à la gestion du Covid tombent à plat, puisque la santé relève des états et non du Président. En France cela n’a pas joué sur la côte de Macron malgré son absence de gestion!
D’autant qu’en nombre de morts par millions d’habitants, les USA sont plus faibles que nous, que l’Italie, Que l’Espagne….
Bon, mais les média français ont décidé de tuer Trump comme ils ont tué M. le Président Sarkozy…Quel pays de merde !!!
Le danger ce n’est pas la Chine par elle même, mais le dictateur sanguinaire qui la dirige. Du temps de Deng la Chine s’ouvrait au monde et n’était pas impérialiste. Mais avec un tel tyran suffisant et impitoyable, un vrai stalinien, on voit ce qui se passe en Mer de Chine où il bafoue le droit international de la mer!
Enfin les yeux s’ouvrent…. Mais comment supporter l’existence d’une hyperdictature communiste d’un milliard et demi d’individu dans notre monde de 2020.
Merci M. Trump et continuez fermement à contenir le PCC dans ses limites admissibles.
Je plains le peuple chinois…