Bac 2019 : l’irruption surprise du contrôle continu

La grève par rétention de notes à laquelle se sont livrés des enseignants mécontents de la « réforme Blanquer » vient de reposer la question de l’intérêt d’un contrôle continu dans le cadre du bac.

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Bac 2019 : l’irruption surprise du contrôle continu

Publié le 15 juillet 2019
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Par Charles Hadji1.
Un article de The Conversation

La grève par rétention de notes à laquelle se sont livrés des enseignants mécontents de la « réforme Blanquer » vient de reposer, de façon inattendue, la question de l’intérêt d’un contrôle continu dans le cadre d’un examen tel que le baccalauréat.

Par-delà la polémique suscitée par la « solution technique » inventée par le ministre pour résoudre le problème qu’il devait affronter, on peut saisir l’occasion de cette irruption surprise pour tenter d’examiner sereinement cette question.

Bac 2019 : habile parade du ministre

Pressé par les événements, le ministre a dû se résoudre à prendre en compte « provisoirement » le contrôle continu (moyenne des notes obtenues dans la discipline sur les trois trimestres de l’année), lorsque la note terminale faisait défaut par suite de la grève. Cela a donné au contrôle continu (CC) une occasion inattendue de faire reconnaître son utilité.

La parade du ministre est habile. Elle prend les contestataires à contre-pied. Car c’est pour protester contre une réforme du bac qui, entre autres, attribuait au contrôle continu 40 % de l’évaluation finale, que certains professeurs se sont lancés dans une grève des notes. Or, le ministre neutralise les effets de leur action en recourant à l’objet de leur courroux !

Cette « solution technique » a l’avantage de ne pas être défavorable aux élèves. In fine, seule sera retenue la meilleure des deux notes : soit celle du CC prise provisoirement en compte ; soit celle du contrôle terminal (CT) enfin parvenue au jury. Ce dispositif ne mériterait-il pas alors d’être pérennisé ?

Les risques du contrôle continu

Ceux qu’avait surpris, voire sidérés, le contrepied du ministre, ont unanimement dénoncé une rupture d’égalité, entre élèves ayant obtenu un bac lié aux épreuves finales, et élèves n’ayant qu’un bac lié au contrôle continu, et donc, dans leur esprit, de moindre valeur. Mais que peut-on reprocher, exactement, au contrôle continu ?

On peut évoquer trois grands reproches. Le premier, et le plus courant, est que le contrôle continu introduit les aléas du « localisme » dans un examen national. Le bac doit être le même partout. Mais l’unicité d’une épreuve garantit-elle l’identité recherchée ? Et les correcteurs ne sont-ils pas différents d’une ville, et d’une région, à l’autre ? L’égalité que garantirait le contrôle terminal n’est en réalité qu’une fiction.

Le deuxième reproche, plus consistant, est que le contrôle continu intervient, par définition, avant la fin de la « formation ». Il serait donc foncièrement injuste, puisqu’il contrôle les effets d’une formation avant qu’on ait donné aux candidats toutes les chances de maîtriser ce qui sera l’objet du contrôle.

Mais, pour obtenir son permis de conduire, on peut valider le code plusieurs mois avant la conduite. Le contrôle continu peut avoir valeur certificative, s’il survient au terme d’une unité d’enseignement que l’on peut légitimement autonomiser (ex : à la fin d’un chapitre ou d’une grande partie du programme). Platon disait qu’il faut découper les poulets selon leurs articulations naturelles !

Enfin, on peut reprocher au contrôle continu de court-circuiter l’examen, en rendant inutile la note terminale, ce qui équivaut à en dénier la valeur. Mais il faut noter que, dans le cadre du dispositif « Parcoursup », les écoles et universités choisissent leurs futurs étudiants avant qu’aient été passées les épreuves terminales ! Celles-ci n’ont de fait pour rôle que de confirmer et valider a posteriori des choix fondés pour l’essentiel sur des résultats de contrôle continu…

Les limites du contrôle terminal du bac

C’est pourquoi, parallèlement, la croyance en la valeur immédiate d’un examen terminal mérite d’être interrogée. On peut faire, à cet égard, deux grandes observations. La première est qu’un examen terminal, a fortiori lorsque seuls ses résultats sont pris en compte, est une épreuve « couperet ». Il n’y a plus ni droit à l’erreur, ni possibilité de rattrapage. L’équité d’une telle épreuve n’est jamais assurée.

Car, et c’est la deuxième observation, avec une seule épreuve terminale par discipline, le champ de probation offert aux lycéens est particulièrement étroit. Le jury peut-il, sur cette seule épreuve, dire avec certitude, si, oui ou non, une connaissance ou une compétence est maîtrisée, d’une façon générale, et pérenne ?

La ou les compétences dont la maîtrise est visée auraient pu se manifester de façon plus claire et indiscutable, à d’autres moments, et dans d’autres épreuves, plus variées, et plus ouvertes.

Ni sanctification, ni diabolisation

Finalement, la question à trancher est de savoir si le bac peut reposer uniquement sur des épreuves terminales. L’enjeu est de concilier l’intérêt des élèves qui sont candidats, avec celui de la société qui délivre des diplômes. Le bac est un permis d’entrer dans des formations diplômantes, voire directement sur le marché du travail.

L’intérêt des candidats à ce permis est d’être traités équitablement, en faisant leurs preuves sans être victimes de la dimension de loterie inhérente à toute épreuve ponctuelle. D’où l’utilité d’une part significative de contrôle continu, leur permettant d’avoir toutes leurs chances de montrer ce dont ils sont capables.

L’intérêt de la société est de s’assurer que le diplôme qu’elle délivre atteste vraiment d’une palette et d’un niveau de connaissances et de compétences. D’où l’utilité d’une part significative de contrôle terminal, avec choix rigoureux des situations de probation (épreuves communes d’évaluation), et cadrage rigoureux de la « lecture évaluative » que les examinateurs feront des travaux produits par les candidats.

Aucune des deux modalités d’évaluation ne mérite d’être sanctifiée, ni inversement diabolisée. Finalement, la difficulté est ici de comprendre que tout contrôle est à la fois continu et terminal. Terminal, car il vient nécessairement après une séquence d’enseignement ou de formation. Continu, car il s’insère dans le temps plus long d’une activité visant un but.

Il s’agit bien de savoir si, à la fin, le but est atteint. Contrôle continu et contrôle terminal doivent donc être mis en œuvre, non en fonction de ce qui serait un intérêt intrinsèque, mais en fonction de la façon dont ils éclairent, ou non, l’atteinte du but que l’on poursuivait. De ce point de vue, le contrôle terminal n’est que le point ultime d’un contrôle continu.

Sur le web-Article publié sous licence Creative Commons

  1. Professeur honoraire (Sciences de l’éducation), Université Grenoble Alpes.
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  • Les questions soulevées par la prise en compte des notrs de contrôle continu concernent surtout l’inégalité de traitement par rapport à des candidats ayant raté une épreuve tout en ayant de meilleurs notes dans cette matière.
    Sur le reste, le bac est coûteux et ne signifie plus rien. Supprimons-le ainsi que Parcoursup. Que les établissements d’enseignement supérieur organisent eux-mêmes leurs modalités d’accès.
    Des économies à la clé et davantage de liberté et de reconnaissance du mérite? Un rêve…

    • Oui. D’ailleurs bon nombre d’ établissements d’enseignement supérieur organisent déjà leurs modalités d’accès même si elles exigent le bac. On pourrait peut-être alors imaginer un système de SAT américain, examen avec questionnaires à choix multiples même s’il y a une petite dissertation si mes souvenirs sont bons (corrigée par 3 personnes différente je crois). Comme aux USA, les options à prendre et les notes à obtenir seraient décidées par les facs. Ce SAT sanctionnant des connaissances académiques qui peuvent simplifier la sélection pour certaines matières (maths, physique etc), pour tout le reste, c’est la fac qui décide. Cet examen est payant (50 dollars il y a quelques années). Donc, en général, les lycéens qui ne sont pas prêts ne le passent pas. Pas de flonflons, pas de larmes. Pas d’usine à gaz coûteuse. C’est seulement une garantie que le lycéen possède telles compétences, nécessaires mais pas suffisantes, pour continuer dans telle ou telle voie. Et c’est financé par ceux qui souhaitent le passer. Celui qui ne le passe pas, ne paye pas pour les autres.

    • Le principal problème est que un examen met tout le monde sur le même pied d’égalité. Alors que le contrôle continu est local (l’un des arguments noté dans cet article mais qui pour moi est important). Généralement, les exercices de contrôle continu sont « plus simpliste » que les exercices du bac ; tout dépend des lycées ceci dit.

  • quand 80 % de la classe d’âge a le bac, il est clair que le bac n’est plus un discriminant de quoi que ce soit. quelqu’un dont on sait qu’il a le bac, on ne peut rien présupposer de son niveau, il faudra en savoir plus : filière, mention bien ou supérieure…
    pour comparaison, en suisse, le taux de maturité, l’équivalent du baccalauréat est aux alentours de 40 % (37,4 % en 2016 https://www.vsg-sspes.ch/fr/detailansicht/?tx_ttnews%5Btt_news%5D=417&cHash=38236a448d8ab982f6a8f3ef1361be7f ). la suisse est elle en plus mauvaise posture que la france sur ce critère là ? l’inflation de diplômes française fait elle autre chose que ce que fait tout type d’inflation, à savoir une perte de la valeur ?
    mon aîné n’est pas intéressé par les études académiques, il n’ira donc pas au lycée, à quoi cela lui servirait il ? traîner 3 ou 4 ans au lycée pour avoir à la fin un bac ? et alors ?
    il va donc débuter un apprentissage de cuisinier. et pas en france, pas la peine qu’il se fasse polluer la tête par des profs français qui vont lui dire de se méfier des patrons exploiteurs quand il sera en stage.
    il commence dans 10 jours son apprentissage en suisse : 4 jours par semaine au restaurant avec lequel il a signé son contrat de travail, 1 jour par semaine à l’école au cpln de neuchâtel, 5 semaines de congés payés par an. comme ça pendant 3 ans et ensuite, avec son cfc, il aura un vrai métier avec un salaire de 4 000 chf par mois, alors le bac à la française…

    • Je n’ai pas d’avis sur le bac, ni sur la manière de le faire passer. En revanche, on ne peut pas dire que 80% de la classe d’âge a le bac. 40 % seulement a un bac général (celui qui est en principe destiné à poursuivre des études supérieures). 15 % environ a un bac techno. A ce chiffre s’ajoute 20 % de « bac pro », un bac inventé de toute pièce en 1985, pour, en effet, mener 80 % d’une classe d’âge au bac. Ce bac pro est le BEP que nous avons connu auquel on ajoute une année de lycée et taux de réussite en première année de fac avec ce bac est proche de 1 %. Le vrai chiffre, avant le trucage inventé par Chevènement est donc plus proche des 65 %. Et le bac général reste sélectif, quoiqu’on en dise.
      Cela dit, je suis d’accord avec la petite bête, je pense que l’idéal serait que les établissements d’enseignement supérieur organisent eux-mêmes leur sélection.

  • — « LES RISQUES DU CONTRÔLE CONTINU »

    Pour le premier risque, plutôt que d’user d’un terme abscons (localisme ?), ce qui pose problème est la qualité des établissements scolaires.

    Et l’auteur oublie un risque, celui des matières additionnelles (langues exotiques, etc.), qu’on trouvera plutôt délivrées dans les meilleurs établissements parisiens plutôt qu’ailleurs. Il sera bien plus facile de multiplier et accumuler ses notes dans ces matières par un contrôle continue, plutôt que d’assumer cette charge supplémentaire au Bac.

    — « De ce point de vue, le contrôle terminal n’est que le point ultime d’un contrôle continu. »
    Ou l’art d’user d’un peu de rhétorique par arriver à ses fins…

  • Avec le recul du temps ; on amis à la poublle le certificat d’études , les profs ne préparent même plus le BEPC et le méprisent que va devenir le BAC de + en + dévalué.. et l’agitation autour du Bac 2019 a été désastreuse . Des profs font la grève des corrections, Blanquer qui prépare 1 réforme ou 1 naufrage ( par manque criants de moyens financiers) dont personne ne veut dans l’EN et qui ne comblera pas la délabrement masqué dans cette institution nationale… Où est passée l’école de mon enfance : par perte et profifs ? ertains disent : faut-il supprimer le BAC ? mais comment formera-t-on nos jeunes et sur quelles bases à l’avenir ? Bocus avait dit : j’ai débuté avec 2 bacs dans la vie; celui d’eau chaude et d’eau froide ! réflexion pas finaude mais non dénuée de réalité.
    1) Olivier Demeulnaere : Bacchanule : 90% de réussite au bac, 60% d’illettrisme : comment mettre fin à l’un des plus gros mensonges français ?
    https://olivierdemeulenaere.wordpress.com/2019/07/06/bacchanule-90-de-reussite-au-bac-60-dillettrisme-comment-mettre-fin-a-lun-des-plus-gros-mensonges-francais/
    2) Tatiana Ventose caricature l’état de l’enseignement :

    • Il y a bien un bac que j’ai passé, c’est celui de Rhinau sur le Rhin pour passer une journée à ‘Europa-Park’ en Allemagne.

      Et on peut le passer aussi souvent qu’on veut…

  • le bac est une fumisterie politique..
    Le niveau du bac a baissé de 70% en 50 ans
    la gauche veut que les enfants aient le bac pour flatter les parents électeurs
    la sélection s’opère ailleurs , d’abord dans le supérieur apres chez ’employeur..
    sauf pour l’etat qui embauche des caramels bien obéissants

  • Il y a aussi l’objectivité des profs. En moyenne les filles sont mieux notées parce qu’elles sont des filles. Ca va même jusqu’à se vérifier en mathématiques.
    Et puis à l’examen le prof qui ne vous aime pas ne peut pas vous saquer (sans mauvais jeu de mot).
    Moi qui ai passé ma scolarité à contredire des profs que je méprisais à les mettre face à leurs contradictions etc… Je suis passé de 10.5 de moyenne à 14.95 au bac.. Oui ça fait une différence: Les profs notent beaucoup plus qu’ils ne le croient, à la tête du client. Les profs sont injustes en plus d’être en grande majorité imbus d’eux mêmes et incompétents. Heureusement qu’il y a quelques bons profs qui font office d’îlots salvateurs dans cet océan de nullité crasse.

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