L’art de la négociation selon Donald Trump

Le livre qui vous apprend comment Donald Trump négocie est désormais disponible en français, et vous apprend beaucoup sur le style du président américain.

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L’art de la négociation selon Donald Trump

Publié le 27 juin 2019
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Par Thierry Godefridi.

Il y a un peu plus de 30 ans, paraissait The Art of the Deal, un livre, mi-biographie, mi-guide de conseils en gestion, d’un quadragénaire new-yorkais, magnat de la promotion immobilière. Le livre, classé premier de la liste des meilleures ventes du New York Times pendant 13 semaines et présent sur ladite liste pendant 48 semaines au total, acheva d’établir le statut de célébrité nationale de son auteur aux États-Unis.

C’est, après la Bible, le livre préféré de Donald Trump. Il fallut attendre que son auteur accède à la présidence des États-Unis pour que ce livre soit traduit et publié en français, trente ans plus tard, en 2017, sous le titre de Trump par Trump.

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En plus des aspects hagiographiques, l’ouvrage présente une méthode en onze points pour réussir, une démarche s’inspirant des théories du pasteur et écrivain américain Norman Vincent Peale (1898-1993), un spécialiste des questions psychologiques et un apôtre de la puissance de la pensée positive.

Négociation simple et directe

En guise d’introduction à son discours de la méthode, Donald Trump déclare dans The Art of the Deal  :

Mon style de négocier est très simple et direct. Je vise très haut et puis je continue à pousser et pousser et pousser jusqu’à ce que j’aie ce après quoi je suis. Parfois, je me suis contenté de moins que ce que je cherchais, mais dans la plupart des cas je finis tout de même par obtenir ce que je veux.

Si, dans sa nouvelle fonction exécutive, la gestion des ressources humaines de Donald Trump (voir La révolution Trump de Drieu Godefridi) à l’égard de ceux qu’un président français appelait ses « collaborateurs » s’apparente plus à son style hire & fire dans l’émission de télé-réalité « The Apprentice » (« You’re hired ! » – Vous êtes engagé !, « You’re fired ! » – Vous êtes viré !), qu’en est-il de son style à l’égard de ses confrères et néanmoins concurrents sur la scène internationale, les dirigeants des autres États de la planète ?

Il y a quelques mois, après les échanges virils entre Trump et Kim sur l’importance respective des boutons leur permettant de déclencher le lancement de missiles, les médias évoquèrent l’imminence d’une guerre nucléaire avec la Corée du Nord et semèrent la panique. Aujourd’hui, ils n’en parlent plus. Il semble même que Trump et Kim devraient se rencontrer dans les prochains mois. Depuis l’annonce de ce possible tête-à-tête, il n’y a plus eu de tirs de missiles ni de manœuvres militaires d’envergure sur la péninsule coréenne.

Face à la Chine et à la Russie

Il y a quelques semaines, après que Trump ait menacé de lever 50 milliards de dollars de droits de douane sur les importations en provenance de la Chine et le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois ait menacé de mesures de rétorsion du même ordre, les médias se complurent à dénoncer les dangers d’une guerre commerciale, jusqu’à ce que, le 9 avril, à la surprise générale, le président Xi lui-même annonce une concession majeure sous la forme d’une réduction significative des droits d’entrée sur les véhicules importés en Chine, droits dont les constructeurs automobiles américains sont particulièrement affectés.

Il y a quelques jours, après que la Russie ait menacé les États-Unis de détruire leurs missiles et leurs plateformes de lancement s’ils s’en prenaient au régime en place en Syrie, Trump eut recours à son moyen de communication favori pour s’y répandre avec son inimitable verve :

La Russie jure d’abattre tous les missiles tirés sur la Syrie. Attention la Russie, parce qu’ils arrivent, beaux, neufs et ‘intelligents !’ Il ne faut pas s’associer à un Animal Assassin qui gaze son peuple et que ça amuse !

Quant à la forme et quant au fond, un tweet, le vocabulaire, la syntaxe, la ponctuation, c’est une curieuse façon pour un président des États-Unis de s’adresser à la nation qui possède le deuxième plus grand – voire le plus grand – arsenal d’armes nucléaires et qui éprouve à l’égard des États-Unis une animosité exacerbée par des décennies de rivalité, de défiance et de mépris. Quoi qu’il en soit, avant les frappes dont ils avaient été prévenus, les Russes prirent la sage précaution de faire quitter le port de Tartous en Syrie par leurs navires de guerre.

Coups de génie ou coups de folie ? Trump a-t-il, un seul instant, envisagé d’anéantir la Corée du Nord à l’arme nucléaire ? A-t-il, un seul instant, envisagé de déclencher avec la Chine une guerre commerciale susceptible d’entraîner des conséquences économiques monstrueuses pour son propre pays ? A-t-il, un seul instant, envisagé de provoquer une guerre nucléaire avec la Russie ? Qui sait ?

Le style managérial de l’homme d’affaires américain qui parle haut et fort et qui manie le stick de préférence à la dialectique transparaît dans le comportement de Trump sur la scène politique mondiale, la seule sans doute que cet homme habitué aux privilèges, à la reconnaissance et à l’autonomie juge à la mesure de sa démesure.

C’est un homme à l’ego sur-dimensionné qui se considère comme l’être le plus important au monde et qui se jauge dorénavant à des egos semblables au sien, moins, peut-être, ce sens inné qu’a le locataire de la Maison-Blanche de l’hyperbole véridique1.

Reste, comme le disait Warren Buffett, qu’à ce jeu-là, la moindre erreur d’appréciation peut s’avérer fatidique.

Cet article a été publié une première fois en 2018.

Sur le web

  1. « Truthful hyperbole », une forme d’exagération et de mystification, est une expression que Trump revendique et qui date de l’époque de The Art of the Deal, paru en 1987 dans sa version originale.
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Créer un compte Tous les commentaires (13)
  • Donald Trump a repris la diplomatie de Théodore Roosevelt: celle du gros bâton! On négocie, mais avec un gourdin à la main. Ce qui montre à l’adversaire qu’il n’a pas le choix entre la négociation et le gourdin.

    • Bonjour,
      C’est tout à ƒait juste.
      Avec le nom qu’il porte, on peut aisément imaginer qu’il joue au bridge avec le slogan « Je le coupe et j’en rejoue……. »
      Otto von Bismarck ƒaisait à peu près la même chose, mais il avait un certain sens de l’Honneur, et quelques restes de considération pour les vaincus.

  • Bonjour Monsieur,
    Vous avez bien raison de nous ƒaire réƒléchir à cette énigme,
    « Pourquoi ça marche? ».
    Car, il ƒaut bien vous l’accorder, « ça marche » assez souvent!!!!!
    Reste que cet homme-là ne « négocie » pas. Il pratique plutôt un kata supérieur de Kara Te – shotokan, appelé Basai Dai, ce qui dire
    « déƒoncer la ƒorteresse ».
    Personnellement j’aime beaucoup l’enseignement de Robert Moran (« What distinguishes the good negociators ƒrom the crowd ») : Proƒessor oƒ Cross-cultural Communications, Graduate school oƒ international management / Arizona, dans les années 1980.
    Car, au ƒinal, manque très-probablement au Président Trump l’idée-même de la durée. Son mépris cinglant pour toute l’Amérique £atine (surtout les ƒemmes), son goût pour les mots blessants….
    Evidemment, personne ne pourra jamais l’obliger à lire Hernani :
    « £’affront, que l’offenseur oublie en insensé,
    « Vit et toujours remue au cœur de l’offensé….
    — En effet, j’avais oublié cette histoire.
    « Celui dont le blanc saigne a meilleure mémoire ;
    « Vous, Monsieur, qui venez de me parler ainsi,
    « Ne demandez, un jour, ni grâce, ni merci ».
    (Acte IV, scène 4)
    Post scriptum : Serai ravi de courir un jour un Marathon avec vous… si vous n’êtes pas trop sous les 200 minutes?

    • Ne prenez pas les paroles de Trump à la lettre. Vous oubliez que ce n’est pas un perdreau de l’année, et qu’il est archi connu aux States. Tout américain le connaît et sait très bien quelles sont ses opinions. Surtout les journalistes qui l’ont côtoyé des décennies durant. Il fut sa vie durant démocrate, jusqu’à la présidentielle de 1992 où il soutint l’homme d’affaire Ross Perot, contre Bill Clinton et Bush père, ce qui fit perdre ce dernier, les voix de Perot étant républicaines elles manquèrent et permirent la victoire de Clinton. Ce sont les mesures socialistes de Clinton qui le détachèrent du parti démocrate.
      Il n’a aucun mépris pour les latinos et les femmes (beaucoup sont à des postes majeurs dans son groupe) et il adore sa fille qui est un de ses conseillers principal, peut être même favori. Ce qui n’a rien d’étonnant, elle est très intelligente et compétente! Trump n’est qu’un homme d’affaire dur, forcément pragmatique, qui se fiche des a priori. Seuls les faits et le succès lui importent.

      • En effet, so ƒar, so good.
        Ca serait donc un bon père de ƒamille…..

      • Quant à Ross Perot, le milliardaire (grâce au rachat par General Motors de sa société Electronic Data Systems), j’étais à Dallas pendant sa ƒameuse campagne électorale……… il a effectivement ƒait perdre les Républicains. Mais ça ne LUI a rien coûté : Cette campagne a été ƒinancée à plus de 99% par des étudiants et autres militants idéalistes. Sa pingrerie ƒut telle qu’après l’admiration nationale (il avait payé sur ses deniers personnels une « mission » de libération de ses ingénieurs détenus en otages dans l’ambassade u.s. à Tehran) que le Rédacteur-en-cheƒ du Dallas Morning News s’est ƒendu d’un éditorial plein de rage, « Ross Perot is no longer my hero ».
        Sic transit gloria mundi…………

    • Cher Monsieur, je vous remercie de me lire et d’avoir laissé un commentaire. Pour le marathon, il faudra encore attendre que je trouve une solution à un petit problème de ménisque fracturé avant d’attaquer le 65e de la série. Voir http://www.marathonien-coeur-esprit.com Bonne semaine (et bon entraînement)!

      • Bonjour Monsieur,
        Ravi de vous lire, en effet.
        Risque-tout parƒois?
        Je compatis, ƒorcément, car un accident de montagne m’a privé de mobilité pendant plusieurs mois, il y a de cela plus de cinquante ans.
        £’alimentation?
        Ce n’est évidemment qu’une petite partie du rétablissement, car le cartilage est très-lent à se ressouder. Il ƒaut énormément de vitamine E et aussi des oligo-éléments (amandes et huîtres ne ƒeront pas un régime trop cruel).
        Merci inƒiniment pour le lien internet. J’avouerai que mon Héros personnel est Hussein Ahmed Salah, vainqueur en surpuissance du Marathon de Paris, 1986 ((NON mentionné dans la version FRANCAISE de wikipedia…)). Un truc inimaginable!!! départ comme une ƒlèche au quarantième-deuxième kilomètre. Ca rappelle l’avant-dernière scène du ƒilm « £es Tricheurs ». Pascale Petit au volant d’une Jaguar, à 140 kilomètres à l’heure, s’aperçoit qu’elle est poursuivie dans la nuit. Elle écrase l’accélérateur (((avec sa chaussure à talon haut))) et la Jaguar bondit soudain comme le ƒauve dont elle emprunte le nom, on-se-sent-projeté-malgré-soi-contre-le-dossier de son siège……
        Un rêve, n’est-ca pas? se sentir-pousser-des-ailes, quand tout le monde croit que, ça y est, vous êtes au bout du rouleau!

  • pas besoin de livre, on sait très bien:
    On discute ou je te casse la gueule?

  • Trump obtient des succès car il négocie en position de force. Son pays reste la première économie mondiale. Et surtout, son armée est de très loin la première mondiale . Cela fait il de lui un bon négociateur ?
    Si un jour il devait négocier en position de faiblesse, on verrait alors s’il est si bon que cela.

  • C’était pas la peine de le republier…

    • Surtout que la date au début est celle du jour et que l’information de republication figure tout en bas…J’ai perdu 3 mn de mon temps…

  • Les commentaires sont fermés.

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