Afrique du Sud : les droits fonciers des pauvres en danger !

Il est impensable que, pour certains, la réforme agraire en Afrique du Sud soit un retour aux politiques de l’apartheid, au lieu d’une extension et d’un renforcement des droits de propriété pour les plus démunis et les plus vulnérables.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Afrique du Sud : les droits fonciers des pauvres en danger !

Publié le 8 juin 2018
- A +

Par Eustace Davie.
Un article de Libre Afrique

En 1991, le gouvernement de l’apartheid reconnaissait sa violation la plus grave des droits de l’homme : le refus de la propriété des terres aux Sud-Africains noirs. Comment ? Le gouvernement a adopté la Loi sur la mise à niveau des droits fonciers, intitulée ULTRA. L’objectif de l’ULTRA était de transformer les régimes fonciers moins efficaces des townships en une propriété complète et d’intégrer l’enregistrement de ces droits mis à niveau dans le système de registre officiel des actes. Il établissait un mécanisme par lequel les nouveaux propriétaires de quelque 5 millions de propriétés, pourraient soumettre des documents prouvant leur possession désormais intégrée dans le registre.

Tout part d’une belle intention

Le gouvernement abrogeait en même temps le Natives Land Act de 1913. Il supprimait ainsi cette loi qui a interdit pendant 78 ans aux Sud-Africains noirs d’être propriétaires dans plus de 80 % de l’Afrique du Sud et ordonnait un transfert massif de toutes les propriétés dans les townships formalisées et examinées. L’ULTRA a permis également qu’après réalisation de nouvelles études et l’établissement de townships formels, les mêmes règles s’appliqueraient. Pourtant, malgré l’ULTRA et l’abolition du Natives Land Act, de nombreux Sud-Africains noirs restent de simples locataires de leur propre bien. La raison est simple : les propriétaires de ces terrains urbains n’ont pas été informés de leur mise à niveau. L’ULTRA a été adopté et classé, comme une simple formalité. Certaines municipalités en ont pris connaissance, mais la masse des townships n’a pas été mise à niveau. Les bureaux de contrôle des actes ont soit été mal informés, soit ont négligé de mettre en œuvre les formalités visant à transférer la propriété de l’État vers la population.

Tout s’est arrêté à l’intention

Ceux qui vivent sur les propriétés concernées sont, en vertu de la loi, de véritables propriétaires, mais leur droit n’a été consigné dans aucun registre et ils ne possèdent donc pas de titres de propriété. Cela rend leur propriété stérile et les place virtuellement en résidence surveillée. Sans preuve de propriété, ils ne peuvent en effet ni vendre ni céder leurs possessions. Les personnes concernées sont donc obligées de demeurer où elles vivent. Les projets de parents désireux de se rapprocher de leurs enfants et de familles souhaitant trouver un emploi ailleurs tombent à l’eau, en raison de l’absence de titre de propriété. Ces ménages ne peuvent pas non plus emprunter en hypothéquant leur propriété.

Le plus inquiétant est qu’un futur gouvernement pourrait abroger l’ULTRA, ce qui pourrait même remettre en cause la propriété des habitants du township alors même qu’elle leur a été accordée dans le passé, sans pour autant que soit procédé l’enregistrement systématique de ces droits. Ce risque pourrait être levé si leur propriété était enregistrée et leurs titres de propriété rapidement transférés.

Le projet de réforme agraire Khaya Lam (My Home) de la Free Market Fondation, va dans ce sens, avec le soutien de donateurs généreux et la coopération de certaines municipalités. Le projet veille non seulement à l’enregistrement des droits de propriété mais également à celui des transferts, ainsi que la remise aux propriétaires de leurs titres de propriété. On compte actuellement 5100 transferts en cours et titres présentés. Le nombre total de propriétés est, lui, estimé à 5 millions.

L’histoire des droits de propriété des Sud-Africains noirs en 4 étapes

1) Les Sud-Africains noirs ont été privés du droit de posséder des biens fonciers pendant 78 ans (entre 1913 et 1991)

2) On estime à 5 millions le nombre de foyers propriétaires de la maison qu’ils occupaient sans être informés de leurs droits

3) Ceux qui détiennent des titres de propriété ont bénéficié d’une protection complète de leurs droits de propriété pendant 27 ans (entre 1991 et 2018, à l’annonce de l’expropriation sans indemnisation).

4) La fin de la garantie des droits de propriété du fait du changement constitutionnel proposé pourrait jeter les Sud-Africains noirs dans l’insécurité qu’ils avaient connue pendant les années d’apartheid.

Une régression de la sécurité foncière

Les townships continuent d’exister aujourd’hui sous la même forme que durant l’apartheid. Les municipalités possèdent les terres sur lesquelles les townships et les habitants ne peuvent vendre légalement, céder ou hypothéquer les biens qu’ils occupent. Ils ne peuvent pas considérer « leurs » propriétés de la même manière que les autres Sud-Africains en banlieue. Cette privation de propriété génère automatiquement un manque d’investissement de la part des habitants, et à l’absence d’un marché immobilier.

Garantir les droits de propriété des plus faibles

Si nous voulons que les townships deviennent des banlieues de classe moyenne, la propriété devra s’étendre aux millions de démunis et ne devra plus être menacée par un régime d’expropriation. L’expérience socialiste de la propriété d’État (ou tutelle de l’État) a clairement échoué et a produit des zones démunies, pauvres et peu attrayantes où le gouvernement ne se soucie pas de maintenir les parcelles et les maisons qu’il possède officiellement. Seuls les propriétaires privés sont incités à consacrer du temps et des efforts à leur propriété pour l’entretenir.

Il est impensable que, pour certains, la réforme agraire en Afrique du Sud soit un retour aux politiques de l’apartheid, au lieu d’une extension et d’un renforcement des droits de propriété pour les plus démunis et les plus vulnérables. Si le gouvernement se penche sérieusement sur la réforme foncière, il doit mettre de côté ses projets de réforme sur l’expropriation et s’évertuer à appliquer un principe fondamental de la Constitution : protéger les possessions de ceux qui vivent sous un régime foncier incertain. La réforme agraire n’a pas de sens sans droits de propriété privée.

Sur le web

Voir les commentaires (0)

Laisser un commentaire

Créer un compte

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La propriété est un principe économique essentiel pour que les marchés fonctionnent et que leurs participants vivent en harmonie les uns avec les autres. Mais comme pour beaucoup de choses à l'ère moderne, la scène (et le mème qui l'accompagne) du film de 1987 The Princess Bride s'applique : « Vous continuez à utiliser ce mot ; je ne pense pas qu'il signifie ce que vous pensez qu'il signifie ».

Article original paru dans le Mises Institute.

 

Pour l'encyclopédie du marxisme, la propriété signifie l'accumulation injus... Poursuivre la lecture

Origine de la querelle

À la toute fin du XIXe siècle, l’Afrique du Sud se compose de quatre colonies : le Cap, l’Orange, le Natal, et le Transvaal ; y vivent 2 700 000 indigènes, 311 000 Anglais, et 391 000 Hollandais.

Les rapports entre les différents groupes n’avaient, sans doute, jamais été simples. Les Hollandais s’étaient établis en 1652 au Cap. Vers la fin du XVIIe siècle, ils avaient été rejoints par quelques huguenots français réfugiés. En étendant sa domination, cette population bigarrée, pas toujours pacifique, s’opposa aussi... Poursuivre la lecture

Fin mai, près de 28 millions d’électeurs sud-africains se rendront aux urnes pour élire leurs représentants aux Parlements provinciaux et national. Cette septième élection générale démocratique pourrait marquer un tournant historique, avec la possibilité pour l’African National Congress (ANC) de ne pas atteindre la majorité absolue pour la première fois en trois décennies.

 

Le 29 mai, l’Afrique du Sud est appelée à renouveler son Parlement national et ses assemblées provinciales. Pour la première fois depuis la fin de l’ap... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles