Dette d’Air France : les Français épongeront les ministres

Pour Bruno Le Maire, ce n'est pas au contribuable d'éponger les dettes d'Air France. Doit-on le mettre en contact avec Darmanin et Philippe au sujet des dettes de la SNCF, pour rire ?
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Air France (CC0 Public Domain)

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Dette d’Air France : les Français épongeront les ministres

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 7 mai 2018
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Pendant que la foule bigarrée des paléo-communistes se rassemble à Paris pour « faire sa fête à Macron » et en profiter pour célébrer, avec entrain et toute la presse grand public frétillante à ce sujet, le deux-centième anniversaire de la naissance de Karl Marx, la première saison de gréviculture française pour l’année 2018 continue de battre son plein.

Certes, on sent comme un petit essoufflement, tant à la SNCF qu’à Air France et peut-être devra-t-on compter sur la seconde saison de gréviculture, en automne, pour obtenir une belle moisson annuelle de jours chômés et de nouveaux droits acquis de haute lutte.

En attendant ce quatrième tour social (après le troisième, encore en cours) et avant que ne soit définitivement enterrée l’idée de ne pas payer les jours de grève, quelque part au milieu d’un été qu’on espèrera chaud, calme et ensoleillé, force est de constater que ces mouvements de grève ainsi que les petits prurits syndicalo-communistes n’ont pas donné beaucoup de résultat.

Comme je le notais dans un précédent billet, on ne peut que s’en réjouir et ce ne sont pas les pitreries de Corbière, le député de Seine-Saint-Denis, qui modifieront la donne : les Français n’ont pas grand-chose à carrer des agitations post-prandiales des syndicalistes et de la France Insoumise, ce qui permet d’envisager peut-être la mise en place de réformes réellement structurelles, lorsque le Président Macron et son gouvernement auront repris possession de la paire de gonades qu’ils ont égarées en avril, quelque part à Notre-Dame-Des-Landes.

Cependant, ne vous inquiétez pas. Des recherches ont été lancées, par nul autre que Bruno Le Maire ce qui autorise à imaginer un succès flamboyant.

Il faut comprendre notre petit homme de Bercy vient de réveiller le poney lion qui sommeillait en lui, à la suite de l’évolution récente de la situation à Air France.

La grève sévit en effet depuis plusieurs mois dans la compagnie aérienne française depuis que Jean-Marc Janaillac, le PDG, s’est entêté à vouloir la remettre sur les rails de la croissance et de la profitabilité. Compte-tenu des abominables aménagements qu’il proposait au personnel navigant, des conditions de travail lamentables voire dégradantes qu’il entendait mettre en place, une minorité de pilotes n’a eu d’autre choix que de refuser courageusement de travailler à pousser les wagonnets infamants de l’aérien low-cost dans cette mine de rien sombre et dangereuse qu’est devenue Air France.

C’est donc sans surprise que le récent référendum salarial fut un échec cinglant pour le patron de la compagnie. À la question « Pour permettre une issue positive au conflit en cours, êtes-vous favorable à l’accord salarial proposé le 16 avril 2018 ? », les salariés ont répondu non à plus de 55% : une augmentation de 7% en quatre ans, c’est moins qu’une aumône et quasiment un affront pour ces Forçats du Ciel.

Et c’est aussi sans surprise que le patron a déposé sa démission selon le principe maintenant bien ancré en France qui veut que l’entreprise n’appartient en rien à ses actionnaires mais bien à ses salariés. Au moins Marx a-t-il été suivi en France au-delà de toute espérance.

Pendant que certains s’inquiètent déjà de savoir qui pourra bien prendre le relais de ce dirigeant qui tentait, sans scrupules, d’adapter l’entreprise à la donne aérienne internationale et que, déjà, des noms se bousculent à l’entrée du fromage de l’entreprise, d’autres se posent la question de l’avenir même de cette société qui, il faut bien le dire, accumule des pertes assez joufflues.

Et c’est là que Bruno et sa paire de baloches en leasing interviennent puisque ce dernier a tout dernièrement déclaré que, je cite,

l’État n’est pas là pour éponger les dettes, venir à la rescousse d’entreprises qui ne feraient pas les efforts nécessaires de compétitivité

Et il ne s’est pas contenté de cette affirmation particulièrement courageuse puisque, jugeant même qu’« Air France était dans la bonne direction » avant ce conflit, il a ajouté

J’en appelle au sens des responsabilités de chacun, des personnels navigants, des personnels au sol, des pilotes qui demandent des augmentations de salaire qui sont injustifiées : prenez vos responsabilités, la survie d’Air France est en jeu. Quand on a le niveau de rémunération actuel des pilotes, que l’on sait que l’entreprise est en danger, on ne demande pas des revendications salariales aussi élevées.

Devant la violence de ce genre de propos, on se doute que la direction, les syndicats et tout le personnel navigant ou pas d’Air France se sont dressés comme un seul bagagiste pour dire stop à cette abominable exploitation !

L’instant de stupeur passé, on devra cependant s’interroger sur la lucidité de ce brave Bruno qui, en substance, vient d’expliquer que les revendications des grévistes sont un peu n’importe quoi, que tout ceci coûte une blinde et que ce n’est pas au contribuable de payer la facture finale.

Lucidité qui pourra lui permettre de converser sereinement avec le Bruno Le Maire d’il y a quelques jours qui n’a semble-t-il rien trouvé à redire lorsque les ministres Darmanin et Philippe faisaient assaut de communication concernant la SNCF.

Il faut en effet se rappeler qu’à côté de la dette SNCF, la dette d’Air France semble presque mignonnette. Pourtant, cela n’empêche nullement nos ministres d’en discuter la reprise par l’un ou l’autre mécanisme étatique. Pour le moment, on ne peut que savourer les contorsions grotesques de nos gouvernants tentant de faire croire que cette dette colossale ne sera absorbée ni par une hausse des prix du billet ni par une hausse des impôts. Comme l’utilisation des paillettes de pets de licornes a été écartée, on se demande un peu comment ils vont procéder, mais baste, passons.

Autrement dit, tout indique que le contribuable sera bel et bien mis à taxation pour éponger les décennies d’errances syndicales de la société ferroviaire française, pendant que société aérienne devra se faire une raison.

En réalité, Le Maire compte surtout sur le fait qu’il sera délicat pour les pilotes de passer pour une classe ouvrière exploitée là où les cheminots harpent sur ce discours depuis des lustres. Ou peut-être compte-t-il sur KLM, l’entreprise partenaire d’Air-France, pour reprendre en main l’avion ivre, alors qu’il sait pertinemment qu’il n’y a absolument personne pour reprendre le train bourré (j’avais envie d’écrire « train saoul », mais avec ces grèves, il est plus souvent l’un que l’autre).

En tout cas, il compte surtout sur le fait qu’aucun journaliste n’osera lui faire la remarque que sa position est difficile à concilier avec le reste du gouvernement qui ouvre actuellement les discussions pour la gestion du passif mammouthesque de la SNCF. Il compte sur le fait que ses petites déclarations pourront le faire voir comme courageux et décidé à peu de frais. Il compte probablement sur le fait que même si internet a une excellente mémoire, les médias n’en ont pas.


—-
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  • La folie c’est d’avoir engrangé autant de réformes difficiles en même temps. Sans compter que certaines auraient dû être différées et bien mieux cogitées et mijotées avec soin. Qui vivra verra !

    • Quelles réformes (à part de la cosmétique) ?

    • La folie est de croire de l’Etat peut se reformer.

    • Je pense que vous vouliez dire « engagé » et non « engrangé », beau lapsus révélateur !

      • Exact et en plus révélateur comme vous dites. Merci.

      • @ MichelO

        Oui, c’est « engagé » et même moins que ça! C’est une simple brèche dans un des « droits-z’acquis » qui peuplent la vie française d’aberrations dans les amendements d’une loi dessinée, elle, au cordeau comme un jardin de A.Le Nôtre, avec des fontaines!

        Mais comme on dit, c’est le premier pas qui coûte!

        Aux suivants à terminer le travail de sape commencé par cette première brèche (sans revenir à 0), quand le courant d’eau choisira ce chemin moins contraignant pour quitter le bassin.

        Et des brèches parmi les tabous, E.Macron en a déjà créées quelques unes à léguer à ses successeurs dans les tabous de la vie sociale française (à rénover en urgence)! Il donne l’impression de savoir où il va; et ne croyez pas qu’il vous le dira! Sa communication est pesée au mg près!

  • Un petit édito bien senti et comme on les aime, mais… dans ce contexte et pour une fois, même s’il y un gros foutage de gueule derrière, c’est un peu la réponse du berger à la bergère, la grève des pilotes d’Air France étant largement au niveau pour prétendre à un titre de champion du monde dans ce domaine.
    Sur le fond, il n’a pas tort. Pour la cohérence… ça viendra peut-être plus tard ? (hum…)

    • Le problème n’est évidemment pas ce que dit le frétillant Bruno, mais le fait que la SNCF devrait être mise devant la même fermeté, que ça n’est pas le cas, et que le détournement de fonds publics aura lieu à Air France tout comme pour la SNCF 🙁

      • Le détournement de fonds public est quotidien partout et en tout alors un peu plus ..
        C’est desesperant.
        Pour ceux qui peuvent quitter le pays, c’est le mieux.
        Nous , qui devons rester , nous boirons le calices jusqu’à la lie.
        Il n’y a pas d’échappatoire.
        La seule solution, c’est une hausse brutale des taux .
        Bref…

        • Lorsque la hausse arrivera entraînant une faillite retentissante, nos politiques rejetteront la faute, non sur leur indéniable incompétence mais sur les « vilains économistes – spéculateurs » européens !

  • ce petit mr Bruno Lemaire qu’il revoit. .la Dépense Publique..57%..qu’il l’a ramène à 50 %….qu’il retourne à l’école !!! maïs cela n’est pas dans sa capacité !!!!

  • Et les français n’ont pas plus de mémoire qu’une huitre!

  • (j’avais envie d’écrire « train saoul », mais avec ces grèves, il est plus souvent l’un que l’autre).

    Un train peut en cacher un autre… En même temps, un train bourré masque le train saoul de polytocards, adeptes de Karlot, ivres des taxes qu’ils vont imposer au pays.

    CPEF 🙁

  • Air France-KLM… deviendra KLM-Air France… au mieux ❗

  • voila des chiffres!
    rémunérations de base moyenne brute .(source air journal )

    stewart /hotesse 3.600 E
    chef de cabine 4.600 E
    cadre c1 6.200 E
    cadre C2 7.300 E
    cadre C3 7.800 E

    pilote instructeur 19.831 E
    cdt de bord 17.820 E
    co pilote 12.820E

    personnel au sol
    se situe du bas de l’echelle
    Ouvrier 2.980 E
    technicien 3.295 E
    cadre 7600 e

    une sociéte a bout de bras des contribuables , qui va encore perdre de l’argent .
    non décidément leur combat pour une augmentation ne me fait pas rire ! qu’on les privatise que l’état se désengage de tels guépiers !. car c’est nous qui allons encore payer les pots cassés .quand notre président va t il enfin remettre les pendules a l’heure et agir ! en 2022 ?

  • Quoi qu’ils fassent et nous barratinent , SNCF ou Air France, tout ça va atterrir dans l’IRPP des Contribuables qui comme d’habitude payeront.Comme les appelait Frédèric Bastiat « Les Spoliateurs du Gouvernement légal de la France ».

  • les Français épongeront les ministres … les sinistres…
    Actuellement, ministre = sinistre 🙁

  • Si au bout du compte on paye les jours de grève et que l’on reprend les dettes de ces sociétés, on peut se demander où est la réforme.

  • Pourquoi le petit Bruno sépare -t-il Air France et SNCF ? Cette nuance serait-elle pour « impressionné », espérant, par une fermeté de langage (enfumage), amadouer les dirigeants de KLM en vu d’une aide financière ?
    Ce Bruno Le Maire croit-il en ses déclarations ? Ou est-ce un pur « foutage de gueule » bon pour les contribuables (gogo-payeurs) pour « combler » les abîmes financiers d’une gestion étatique désastreuse ?
    Une gestion responsable et rigoureuse avec bénéfices à l’appui est mission impossible pour nos politiques. Mais appeler systématiquement les contribuables à financer un constant déficit dû à leur incompétente notoire, ne semble pas les soucier !
    Il y a longtemps que les transports ferroviaires et aériens devraient être gérés par des entreprises privées, elles ne s’en porteraient que lieux ! (nos finances aussi !) A quand la privatisation de TOUTES les entreprises étatiques ? Ce n’est pas avec « Jupiter », champion du centralisme et du « tout état », que cela se réalisera !

    • Le « petit Bruno » ressemble comme deux gouttes d’eau à un collègue centralien que j’avais. Il m’avait enseigné qu’il faut toujours se faire remarquer dans les réunions en arrivant en retard, en posant une question idiote, et en partant en avance, ce qui est bien plus efficace qu’une participation consciencieuse. Et que pour l’arithmétique, il faut laisser les autres faire les additions. Bruno tout craché, à part que lui laisse les autres lui faire les soustractions…

  • à H16..et là dette EDF 35 MILLIARDS déjà ils parlent d’augmenter l’électricité. ..quelle belle gestion acheter l’électricité écologique plus cher et la vendre à perte…
    très belle gestion !!!! et nous payeront encore la note…RAS LE BOL de ces lumières sorties de grandes écoles. …

  • toutes entreprises d’État est ingérable d’abord par les politiques et par les dirigeants de ces entreprises Énarques bien sûr. ..c’est comme pour Bercy,un membre de la Cour des Comptes qui devient ministre des finances ..apres avoir critiqué L’ÉTAT pour ses Dépenses et de le Dette du PIB..Quand il a la fonction ne fait pas mieux que ces prédécesseurs ….à méditer !!!

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