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Un article de Trop Libre
Selon le digital index and economy market réalisé par la Commission européenne, en 2016 l’Estonie se classe deuxième juste derrière la Finlande parmi les États membres de l’Union européenne en matière de e-services publics1.
Si une telle position peut surprendre pour un pays dont seulement 50 à 60 millions d’euros sont affectés par an au développement du e-gouvernement2, il n’y a pourtant rien d’étonnant à cela.
Un travail de fond et de long terme
Plus que d’argent public – le programme de e-gouvernement russe aurait coûté plus de 90 millions de dollars en 2014 pour un résultat très mitigé3 – la réussite de la transition numérique de l’État exige un travail de fond et de long terme.
En Estonie, la révolution numérique a été anticipée et provoquée par le politique de concert avec l’administration.
Dès les années 1990, l’État estonien s’est engagé pleinement dans la transition numérique y voyant le moyen d’acquérir un avantage compétitif vis-à-vis de pays face auxquels il ne pouvait rivaliser au sortir de son indépendance.
La dématérialisation des services publics
Grâce à une politique du numérique volontariste, l’administration estonienne a entrepris la dématérialisation de la plupart de ses services publics sous la forme d’une architecture décentralisée, la X-Road, qui permet d’assurer la protection des données des utilisateurs.
Par l’intermédiaire de leur seul numéro ID de leur carte d’identité, les citoyens estoniens peuvent accéder à plus de 500 e-services dont le vote, la déclaration et le paiement de l’impôt en moins d’une heure ou encore l’accès aux ordonnances médicales4.
Mais la transition numérique de l’État estonien ne s’arrête pas à la seule dématérialisation des services publics, elle procède aussi d’une réflexion sur le rôle de l’État dans l’économie numérique.
L’Etat estonien s’est adapté
Les entrepreneurs estoniens n’ont pas à se battre contre un État résigné à l’immobilité, contre une administration réfractaire à toute transformation et contre une société étouffée par un cadre réglementaire inadapté.
Plutôt que d’intervenir par le moyen d’arbitrages maladroits entre des acteurs traditionnels désireux de conserver leur pouvoir de marché et l’émergence d’acteurs disrupteurs, l’État estonien s’est lui-même adapté.
Face à l’émergence de l’économie collaborative, par exemple, au lieu d’interdire ou de tricoter de nouveaux statuts toujours plus complexes, l’administration estonienne a été la première à conclure un accord avec la plateforme Uber ayant pour objet la transmission automatique des données relatives aux revenus des chauffeurs – sous réserve de l’accord du chauffeur – à l’administration fiscale.
Simplifier la vie des entrepreneurs
En outre, confrontée à un marché intérieur limité, l’Estonie s’efforce de renforcer son attractivité en simplifiant la vie des entrepreneurs.
Il est ainsi possible d’enregistrer sa société en ligne en moins de 20 minutes, d’utiliser une signature électronique pour la plupart des documents administratifs5 et les non-ressortissants estoniens ne résidant pas en Estonie peuvent gérer leur entreprise directement depuis l’étranger par l’intermédiaire de l’e-residence, une application lancée en 2014 par le gouvernement estonien qui permet d’avoir accès aux e-services non liés à la citoyenneté6.
Il n’y a pas en soi de « miracle » estonien. Si cette ex-république soviétique de 1,3 million d’habitants peut aujourd’hui se targuer d’être le pays européen disposant du plus grand nombre de start-ups par habitant7 et d’avoir donné naissance à des pépites qui ont aujourd’hui acquis une envergure internationale telles Skype et Transferwise, c’est parce que sa transition numérique ne se réalise pas contre ni malgré les pouvoirs publics mais avec et grâce à la mutation entreprise par l’État.
Dès lors, espérons que l’État français n’ait pas à atteindre un point de non-retour pour comprendre que s’il veut faire de la France une véritable puissance numérique, il doit d’abord opérer sa propre transformation.
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Sur le web
- Digital Single Market, DESI composite 2016, site consulté le 21 mars 2017 Lien ↩
- Bloomberg, Envying Estonia’s Digital Government, 4 mars 2015. ↩
- Bloomberg, Envying Estonia’s Digital Government, 4 mars 2015. ↩
- e-estonia, Facts, Lien. ↩
- e-estonia, e-business register, site consulté le 21 mars 2017 Lien. ↩
- e-estonia, Estonian e-Residency, site consulté le 26 mars 2017 Lien. ↩
- e-estonia, Facts, site consulté le 21 mars 2017 Lien. ↩
C’est aussi et surtout parce que c’est un des pays les plus libéral d’Europe, classé 11ème pour la liberté économique alors que la France est 70ème en dessous du Ghana:
Indice liberté économique – Classement des pays
Elle a aussi une presse beaucoup plus libre:
Indice liberté de la presse – Classement des pays
Une dette faible:
https://www.contrepoints.org/2014/08/14/177061-cette-dette-publique-que-lon-nous-cache
Elle fait partie des ex-pays de l’URSS qui s’en sortent très bien parce qu’ils ont adopté la liberté contrairement à d’autres comme la Biélorussie, la Bosnie-Herzégovine, la Russie qui s’enfoncent dans les problèmes, la corruption et la répression.
La France expérimente, le « soft socialisme », une férule bureaucratique qui s’est imposée sans violence, mais le « résultat » est déjà visible, comme partout, comme toujours.
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