Par Guillaume Nicoulaud.
Au 30 septembre 2016, la dette publique française (c’est-à-dire la dette des administrations publiques au sens de Maastricht) s’établissait à 2160,4 milliards d’euros soit 97,6 % du PIB. C’est le niveau le plus élevé jamais constaté en temps de paix.
En quoi consiste la dette publique ?
Cette dette comprend la dette de l’État lui-même, les dettes des organismes divers d’administration centrale1, les dettes des administrations publiques locales2 et les dettes des administrations de sécurité sociale3.
Voici comment elles se répartissaient au 30 septembre 2016, en milliards d’euros (source : Insee) :
C’est donc l’État lui-même, au sens de la comptabilité nationale, qui a contracté l’essentiel de notre dette publique. Cette dette de l’État, de façon marginale, a été contractée sous forme de dépôts réalisés auprès du Trésor (l’État, entre autres choses, est aussi banquier) et de crédits (je n’en sais pas plus).
Mais l’écrasante majorité, 1636,2 milliards d’euros au 30 septembre 2016 (source : AFT), soit 95 % de la dette de l’État, a été contractée sous forme d’obligations émises sur les marchés financiers. C’est la dette négociable de l’État.
Qui gère la dette publique ?
Cette part de la dette publique est intégralement gérée par l’Agence France Trésor (AFT), une agence placée sous l’autorité du directeur général du Trésor et chargée de gérer la dette et la trésorerie de l’État.
Elle prend la forme de deux types d’obligations :
- Les Bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF) qui sont des obligations à court terme (un an au maximum) destinés à pourvoir aux besoins de trésorerie de l’État (comme payer les salaires des fonctionnaires à la fin du mois)
- Les Obligations Assimilables du Trésor (OAT) qui représentent l’essentiel (91 % au 30 septembre 2016) et permettent à l’État d’emprunter de l’argent sur de plus longues périodes4 : l’échéance la plus lointaine à l’heure où j’écris ces lignes est fixée au 25 mai 2066, soit un peu moins d’un demi-siècle5.
Bref, si on ne tient compte que de la dette publique officielle6, les trois quarts ont été empruntés sur les marchés financiers sous forme d’obligations.
Cela n’a, en soi, rien d’exceptionnel : la plupart des autres pays s’endette de la même façon, et c’est aussi de cette façon que nous avons fonctionné pendant des siècles7.
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- Les organismes divers d’administration centrale (ODAC) forment une catégorie d’établissements publics composée, pour l’essentiel, d’agences gouvernementales (le CEA, l’AMF, Météo France…), de groupement d’intérêt public et d’écoles et universités publiques. On en compte environ 700 selon la liste des ODAC publiée par l’Insee en mai 2016. ↩
- Les administrations publiques locales regroupent les collectivités locales — 35 885 communes, 101 départements, 18 régions et 2062 métropoles et communautés (source, 1er janvier 2016) et les organismes divers d’administration locale (ODAL) ; c’est-à-dire, principalement, les collèges, les lycées, les chambres consulaires (commerce, agriculture, métiers), les établissements publics locaux (pompiers, CCAS…) et un certain nombre d’associations financées sur fonds publics locaux. ↩
- Les administrations de sécurité sociale (ASSO) comprennent les régimes obligatoires de sécurité sociale — régime général, régime social agricole (MSA), régime social des indépendants (RSI), AGIRC et ARRCO —, l’assurance chômage, la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et le Fonds de réserve des retraites (FRR), mais aussi les hôpitaux et certaines œuvres sociales. ↩
- L’AFT utilisait également, jusqu’au 31 décembre 2012, des Bons du Trésor à intérêt Annuel (BTAN) pour les maturités intermédiaires. Ces choses n’existent presque plus : le dernier BTAN arrivera à maturité le 25 juillet 2017. ↩
- En moyenne, la dette négociable de l’État avait une durée de vie (le temps qui nous sépare du remboursement du capital) de 7 ans et 124 jours au 30 septembre 2016. ↩
- Les engagements hors bilan de l’État sont, à eux seuls, un vaste sujet qui occupe beaucoup la Cour des comptes : outre de nombreuses garanties accordées aux uns et aux autres, ils comportent des milliards de dettes en bonne et due forme (retraites des fonctionnaires, dettes de la SNCF…) qui n’apparaissent pas dans les chiffres officiels. ↩
- Emprunter de l’argent et, éventuellement, exproprier ses créanciers est une habitude des États presque aussi vieille que la monnaie elle-même. Les historiens estiment habituellement que le premier véritable emprunt public de l’État français date de 1535, sous le règne de François Ier. ↩
Cet article défrise un max. C’est comme s’il présentait un poison potentiellement mortel en oubliant d’en relater les inconvénients !
Il convient d’ajouter que, quand une dette arrive à maturité, les États trouvent habituellement de nouveaux prêteurs pour rembourser la dette précédente. C’est ce qu’on appelle “faire rouler la dette”.
Ça explique la théorie chère aux politiques, et aux économistes qui les soutiennent, selon laquelle la dette publique n’a pas besoin d’être remboursée et que donc son montant est sans importance. Ça marche tant que ça marche, mais il arrive un moment où ça ne marche plus, et alors c’est la Grèce.
Tout à fait, et l’article n’évoque pas ce risque !