Drame : des journalistes découvrent la vraie vie politique

Confronté à des militants fillonistes, les journalistes découvrent que certains ne sont pas tendres et ne se demandent surtout pas pourquoi.
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Journalistes - pierrO - CC BY SA 2.0

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Drame : des journalistes découvrent la vraie vie politique

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 12 mars 2017
- A +

Par h16.

Décembre 2012, un drame secouait le monde du journalisme : Jean-Baptiste Malet découvrait le monde du travail très manifestement sur un malentendu. Mars 2017, rebelote tragique : des journalistes découvrent que, dans le monde réel, faire de la politique au lieu de collecter des informations comporte parfois des risques, surtout lorsqu’ils ont abondamment miné le terrain auparavant.

L’article de référence sera produit par FranceInfo, cette indispensable chaîne « d’informations » que tout le monde réclamait à cor et à cri. Dans ce dernier, on découvre, effaré, le nouveau calvaire des petits Albert Londres de la France profonde, les risques insensés que prennent chaque jour les futurs Hemingway et autres Blaise Cendrars du 21ème siècle.

Et ce n’est pas joli joli : à la violence des combats en Syrie, à la tension à peine soutenable des reportages sur des otages en milieu djihadiste se sont succédé les interviews trottoir sur militants locaux et les questions à chaud au candidat présidentiel en goguette, et au lieu d’un parcours de santé, c’est à une véritable guérilla urbaine qu’il faut faire face à présent dans laquelle aucun coup, aucune bassesse, aucune limite ne sera envisagé ni même toléré.

En quelques paragraphes circonstanciés, la situation est décrite, horrible dans son aspect le plus brut : des militants sont méchants avec des journalistes et pire encore, ces militants sont fillonistes.

La lecture est dure, insoutenable parfois dans la précision chirurgicale des exactions ignobles perpétrées sur les journalistes qui, héroïquement, se sont aventurés dans ces jungles modernes de meetings de droite où se sont, très rapidement, radicalisés les centristes de droite, où œuvrent en sous-main les sections d’assaut séguinistes révolutionnaires, où les escadrons de la mort estrosiens sévissent sans frein.

On apprend ainsi que lors d’un meeting enfiévré, le carré presse, situé au milieu d’un rassemblement de militants, probablement encadrés par de jeunes fillonistes en chemises brunes portant drapeaux à sourcils gammés, va vivre un moment « étonnant » puisque, d’un coup, « Il y a eu une vague de sifflets contre les journalistes. »

Plus loin, on découvre avec horreur que certains soutiens officiels de Fillon n’hésitent pas à sortir l’une des pires injures qui puisse être, à peine un cran en dessous de « facho » qu’on n’entend pourtant jamais ni sur les plateaux télé, ni dans aucune tribune, jamais : une journaliste se fait ainsi traiter de « collabo ». L’impact est insupportable pour le petit flocon de neige la journaliste qui ne pourra qu’en faire part à ses confrères.

Mais il y a pire : les tensions sont telles que les journalistes n’arrivent plus à faire leur travail puisque, tenez-vous bien, les gens refusent maintenant de répondre à leurs questions. Il semble qu’a complètement disparu l’attrait du gros micro mou, jadis aimant puissant qui permettait au journaliste d’attirer n’importe qui en lui posant des questions puissamment pertinentes.

Et le reste de l’article ne laisse aucun doute : c’est un véritable fossé, que dis-je, un canyon d’ampleur biblique qui s’est ouvert entre les journalistes et les hordes « fanatisées » de militants de droite. La France vient d’entrer dans une ère nouvelle où le Front National n’est plus seul à répandre la peur et à nourrir le ventre fécond des heures les plus sombres de notre vivrensemble.

Au-delà de ce constat, l’article, bien qu’écrit par les scribouillards habituels déjà pas du tout biaisés, réussit quand même le pari de fournir quelques informations intéressantes, comme par exemple ceci :

D’affables et courtois, certains militants sont devenus hostiles, méfiants voire agressifs à l’encontre des journalistes.

Étonnant puisqu’on apprend que des militants, alors qu’ils étaient affables et courtois jusqu’à présent, sont maintenant excédés par l’attitude de certains journalistes. Rassurez-vous quand même : si le constat est ferme et définitif, le questionnement sur un tel cheminement de la part de ces gens auparavant affables n’a pas lieu.

Jusqu’à présent, notons que la violence n’est guère plus que verbale. Un peu plus loin, toutefois, c’est le drame :

C’était au moment où Fillon est arrivé. Un homme m’a attrapé, tordu le bras puis a voulu prendre mon micro avant de finalement me pousser.

Au moins avons-nous ici un cas (unique certes, mais clair) de violence (inouïe) sur un journaliste, par un individu totalement et indubitablement filloniste qui s’avérera un peu plus loin être un élu. Un politicien qui se laisse aller à des violences, voilà qui ne surprendra que les plus naïfs. Au-delà de cet exemple, force est de constater que l’ensemble des plaintes et autres chouinements de journalistes constituent essentiellement une variation sur le thème si délicieusement mignon des sentiments heurtés, des blessures sentimentales, psychologiques ou de conviction qu’un cerfa, justement destiné à bien enregistrer, permet de couvrir amplement.

En somme, le journalisme sur terrain hostile n’a qu’à bien se tenir.

Bien évidemment, on ne doit pas s’affranchir de conclure qu’il est globalement stupide et inexcusable de s’en prendre physiquement à des journalistes. Le libéral qui ne sommeille pas en moi se doit de rappeler que rien n’excuse la violence physique sur des individus qui font leur travail, même si c’est de façon alternative. Bien évidemment.

Mais jusqu’à preuve du contraire et en prolongement de ce qu’on observe, envoyer paître des journalistes reste aussi tout à fait légal. Les siffler aussi, même si ce n’est pas très agréable pour eux. Ça fait même partie de la liberté d’expression que ces derniers devraient s’empresser de défendre et non utiliser à géométrie variable. Plus à propos, en fait d’agression filloniste, on trouve surtout une poignée de cas (et encore, je suis gentil) qu’on pourra retrouver pour tous les partis et pour différentes équipes de journalistes (exemple ici avec Cyrille Eldin).

En revanche, je trouve extraordinaire la capacité de cette profession ou, en tout cas, des spécimens rapportés par l’article, à complètement occulter leur part de responsabilité dans ce retour de bâton : ces derniers observent que l’attitude des militants et sympathisants a fondamentalement changé, pouf, d’un coup, à la suite d’un travail tout à fait exemplaire de la presse, mais surtout, surtout, n’essayent pas de comprendre pourquoi, n’essayent pas d’expliquer, se contentent de condamner et de ne surtout rien corriger à leur attitude.

Pourtant, il suffira de se reporter au dernier rapport du CSA concernant le temps de parole de Fillon pour comprendre l’ampleur de l’hypocrisie et l’ironie de la situation : la presse ayant consciencieusement pilonné le candidat de droite se retrouve à devoir le laisser tranquille pour s’occuper du vaste néant de gauche ou des bateleurs des extrêmes pour compenser. Difficile de croire en un traitement impartial devant une telle différence entre les candidats. Difficile de corroborer l’idée d’une presse neutre qui aurait correctement fait son travail devant les témoignages nombreux d’un changement brutal des attitudes du peuple face à elle. Difficile d’oublier la méfiance toujours grandissante des citoyens envers la presse.

Eh oui : à force d’afficher leur mépris pour une partie du peuple, celle qui ne vote ou ne pense pas comme il faut, à force de tenter de manipuler tout le monde, de faire de la propagande au lieu d’informer, les journalistes subissent un retour de bâton. Pour nos petits flocons de neige journalistiques, il est plus que temps de chouiner sur leurs sentiments blessés.


—-
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  • les journalistes , il doivent faire comme les banquiers : réaprendre leur métier …..

  • Idem pour les politiques eux-mêmes, les sondeurs, les stars, les patrons du cac40, les économistes et zutres experts. Bref, ceux qu on appelle ou qui pensent être les élites. Tous ces gens qui peuvent imposer leur point de vue au « peuple » (qui ont ce pouvoir de communiquer), sans avoir rien a faire de ce que veut la majorité, c est a dire les autres que leur carre e connaissance (ou carnet d adresse mondain) en général le microcisme parisien. A un peu plus de 50 ans aujourd’hui hui je mesure le canyon entre le notable de mon enfance et les puissants idiots d aujourd hui

    • on ne peut pas imposer un point de vue…on peut le marteler à l’envie…n’entendre que lui dans les médias…
      Décider que les candidats aient le même temps de parole dans les médias, peut « protéger » les citoyens d’être exposés à une propagande qu’on peut imaginer d’autant plus facile que celui qui la diffuse est riche ..mais ce n’est pas sans poser question non plus. D’abord ça sous entend que les citoyens sont nécessairement enclins à choisir celui qui parle le plus et que grosso modo les gens sont des veaux qui ne pensent pas.
      On peut ajouter que donner du temps de parole reste un duperie, si vous mettez en face d’un candidat un journaliste partisan, il flattera ou pointera les inévitables mensonges. Mais bon quoi faire à part espérer une presse intelligente, critique, etc ?

  • des drapeaux à sourcils gammés ….ça va faire ma journée…

  • En effet dur dur de se promener avec un cochon d’Inde au bout d’une perche dans les rassemblements. Tout à commencé sur l’aire d’attente du bus. Les 2 représentants d’FR3 sous les hués, tentent un « nous nous sommes levés à 5h pour être là » et tous en cœur « vous auriez dû rester couchés bande de voyous », Chacun fuit la boule poilue avec « non je ne veux pas vous parler ». Enfin l’espoir, de nouveaux arrivants s’arrêtent, mais c’est pour mieux les invectiver. Au Trocadéro 2 stagiaires essayaient de se faire un chemin dans la foule sous les voyous! vendus ! pourris! lèches botte de Drahi, et soudain le perchiste se retourne et nous lance « mais je suis Belge et je suis un être humain quand même » Pour toute réponse dans l’hilarité générale​ « Pénélope et ses enfants aussi sont des être humain ». Mesdames, Messieurs les journalistes le respect se mérite. Je n’écoute plus le médias traditionnelles, ras le bol des poubelles et du constant appel à mes sentiments, sans chercher un instant à éveiller ma réflexion et ma curiosité. Alors GRAND MERCI À CONTREPOINT d’être là

    • Une groupie de FILLON qui traite les journalistes de voyous c’est un peu comme le client d’une prostituée qui traite de pervers les consommateurs de porno, non ?

      • Parce que bien entendu, quand on est pro Fillon, on est une groupie ?
        Vous devriez revoir la partie sur le respect de vos adversaires.
        Mais en êtes vous seulement capable ?

    • @Bichin
      « Mesdames, Messieurs les journalistes le respect se mérite.  »
      Le respect se mérite, se perd, et surtout une fois perdu il est difficile à récupérer.

  • Joli commentaire bien dans le style phonétique du pseudo !

    • Edit : @ Jack Shit

      • Alias Boule Shit 😉

        • En l’occurence, « Jack Shit » est une expression anglo-américaine pour dire « que dalle » …

          Mais, bon, c’est pas grave. On vous excusera …

          • Mais oui Bull Shit 🙂 Ce qui veut dire merde de taureau au sens originel. En pratique, cela veut dire raconter des salades.

            Je n’avais pas été trop méchant en francisant et déformant une partie de l’expression. C’était moins cru. Vous ne m’en tiendrez pas rigueur ❓

            Mais bon, c’est pas grave. On vous excusera …

            Bon assez « Bull shité » ❗

  • Merci h16. Cet article est une belle illustration des tactiques de victimisation utilisées par des journalistes fanatisés, syndiqués et encore trop nombreux. Heureusement que tous ne sont pas comme cela. Par ailleurs, imaginez l’impact de ce rejet et de ce refus de répondre de toute une partie des électeurs sur les sondages ? Si les fillonnistes refusent de répondre aux sondages, en plus des lepennistes, l’échantillonnage se résume à quelques gaucho perdus qui hésitent entre Macron, Mélanchon et Hamon. Quelle va t être leur surprise quand les urnes révéleront les vrais scores de ces élections présidentielles ? On en reparle dans quelques semaines 🙂

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