Par Ferghane Azihari.

Une monnaie à cours forcé, comme son nom l’indique, est une monnaie qui nous est imposée par la force, généralement celle d’un État. La monnaie en question bénéficie dans ce cas d’un privilège de monopole : il est pratiquement interdit de la concurrencer.
Gare à vous si vous n’utilisez pas l’euro !
Ainsi l’État français prend soin de réprimer sévèrement tout individu qui s’aventurerait à questionner le monopole monétaire qu’il partage avec ses homologues européens dans le cadre de l’Union économique et monétaire (UEM) où seul l’euro a cours légal.
Le Code pénal punit en son article 442-4 « la mise en circulation de tout signe monétaire non autorisé ayant pour objet de remplacer les pièces de monnaie ou les billets de banque ayant cours légal en France » de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
Dans la même perspective, « le fait de refuser de recevoir des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France » est réprimé par l’article R 642-3 du même code.
Si vous êtes salarié et que vous arrivez à convaincre votre employeur de vous payer en une autre monnaie que l’euro, cette clause est tout bonnement réputée non-écrite.
Vous le voyez, l’État se montre très insistant. Il veut absolument vous convaincre d’utiliser sa monnaie. Et refuser cette invitation peut vous valoir un peu plus que quelques reproches. Voilà qui est tout de même bien étrange, ne trouvez-vous pas ?
L’euro craindrait-il la concurrence ?
Les politiciens ne cessent de vanter la qualité de leur monnaie. « L’euro est une monnaie forte. C’est une monnaie solide », entendons-nous régulièrement. Ces mêmes gens craignent pourtant la concurrence et menacent de nous punir si nous ne l’utilisons pas.
Or l’excellence ne craint pas la concurrence. Cette réticence est propre à la médiocrité. Nul besoin de menace pour vendre un bon actif. Seuls les escrocs pratiquent l’extorsion et la vente forcée. Un actif utile et désirable suscite de la demande sans qu’il y ait lieu d’utiliser la violence. Dans le commerce, l’utilisation de la force est en réalité un signe de faiblesse.
Pendant des siècles, les êtres humains ont utilisé des métaux précieux pour réaliser leurs échanges. Les métaux précieux ne se sont pas imposés par la force. Ils ont été sélectionnés par le marché en raison de qualités qui favorisaient leur liquidité : rareté, divisibilité, durabilité, transportabilité, sécurité.
Émettre de la monnaie n’est donc pas une « fonction régalienne » comme on a coutume de l’apprendre à l’école. La monnaie est une invention née d’un processus de marché.
Supprimer toute concurrence à l’euro pour cacher sa faiblesse
Quel est donc l’intérêt du cours forcé ? Il réside dans la suppression de toute forme de concurrence monétaire qui entraverait les desseins des États puisqu’elle révèlerait la piètre qualité de leur monnaie.
La concurrence révèlerait la dégradation continue du pouvoir d’achat des monnaies. La bonne monnaie aurait vite fait de chasser la mauvaise, comme on se débarrasse d’une action boursière dont on sait que sa valeur est irrémédiablement vouée à chuter.
Le cours forcé permet donc aux producteurs de monnaie placés en situation de monopole de s’adonner à toute sorte de manipulations sans rendre de comptes à qui ce soit. La création monétaire peut-être illimitée – ou presque – sans risquer de subir une quelconque sanction puisqu’il est impossible de recourir à une monnaie de meilleure qualité. Il est donc plus difficile de lutter contre la dilution de son pouvoir d’achat.
Cette absence de discipline explique en grande partie pourquoi l’écrasante majorité des expériences de monnaies dites fiat ou fiduciaires ont échoué, et ceci depuis la Chine médiévale.
Le cours forcé ne sert donc pas à faciliter le commerce comme on a coutume de l’entendre. C’est un mécanisme destiné à servir les gouvernements en premier lieu. Ces derniers accèdent ainsi à une capacité d’endetter continue pour garantir leurs dépenses au détriment de nos finances.
C’est pourquoi il vaut mieux se fier à des actifs affranchis des manipulations politiques. Les métaux précieux constituent à cet égard des refuges peu susceptibles de nous trahir.
“Parier contre l’or revient à parier sur les gouvernements. Celui qui parie sur les gouvernements et leur papier-monnaie parie contre 6 000 ans d’histoire de l’humanité” (Charles de Gaulle).
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Pour plus d’informations et de conseils de ce genre, c’est ici et c’est gratuit.
On m’a appris durant mes cours de commerce que “la mauvaise monnaie chasse la bonne”. En gros, quand deux monnaies sont en concurrence (par exemple l’Euro et une monnaie en laquelle le citoyen européen a plus confiance) alors les particuliers, les entreprises et même les banques thésaurisent la “bonne” monnaie (épargne à valeur durable) et utilisent au quotidien la monnaie de singe.
Et en définitive, point besoin d’imposer l’usage de l’Euro : nombreux sont les quidams qui épargnent déjà dans d’autres devises… ou en or physique, pour reprendre les suggestions récurrentes d’Agora…
La vraie formulation de cette loi, c’est que la monnaie légalement surévaluée chasse la monnaie légalement sous-évaluée. Cette loi se manifeste lorsque la loi fixe le taux de change, comme dans un régime de bimétallisme. Donc rien à voir avec une situation de libre concurrence des monnaies.
Hayek à ce sujet:
http://herve.dequengo.free.fr/Hayek/Dom/DOM6.htm
Cool, merci pour le lien… On en apprend toujours !
J’imagine comme ce serait commode si je voulais tout payer en dollars et mon boulanger n’être payé qu’en roubles!
Changez de boulanger ! Ou encore, achetez des roubles…
Il n’y a aucun problème à l’utilisation de monnaies concurrentes. On comprend sans effort qu’à notre époque de dématérialisation, l’absence de concurrence monétaire est absurde. En quoi est-ce difficile de payer en utilisant, par exemple, une dizaine de monnaies concurrentes, quand vous pouvez utiliser indifféremment la même carte à puce ?
Tant que l’OTAN existera, l’Euro ne sera qu’une matriochka du USD.
Qu’est-ce que l’OTAN vient faire ici? On parle de forcer l’usage d’une monnaie de singe, contre toute liberté de marché, ce qui implique l’usage de la force.
Les fans d’économie autrichienne et de sa théorie de la valeur devraient le savoir: à partir du moment où la violence est admissible, les armes valent plus cher que les lingots d’or. À quoi bon adosser une monnaie sur des métaux précieux quand on peut l’adosser sur une force militaire suffisamment forte pour pouvoir voler le contenu de n’importe quel coffre?
Une seule remarque pour cet article simple et éclairant: préciser que c’est la fonction de réserve de valeur qui est ici au centre du débat. Beaucoup de néophytes ont du mal avec ce concept de valeur de la monnaie.
Dans le cadre des politiques exotiques des BC (NIRP ou ZIRP par exemple), cette fonction de réserve de valeur devient essentielle et très visible pour le plus grand nombre. Au point de justifier la disparition du cash en partie, et ne pas relativiser l’impact des mesures prises.
Bonjour
Je suis payée en transactions virtuelles en Euro. Pour moi ce n’est pas de la monnaie, ni des billets.
J’ai un porte monnaie électronique et c’est ma banque qui en assure la gestion et pour cela j’ai des frais imposés par cette dernière.