Canada : 5 mythes sur la gestion de l’offre

Faut-il réformer la gestion de l’offre au Canada ?

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Canada : 5 mythes sur la gestion de l’offre

Publié le 14 novembre 2015
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Par Mathieu Bédard.

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Plusieurs documents de l’Accord de partenariat transpacifique sont maintenant disponibles. Malgré de fortes pressions pour réformer son système de gestion de l’offre pour les produits laitiers, la volaille et les œufs, le Canada va maintenir son système. Le marché pour ces produits fera un peu plus de place aux importations, leur donnant des parts de marché, en subventionnant grassement les producteurs pour les compenser.

Pourtant, selon une étude récente, la gestion de l’offre coûte en moyenne 444 dollars par famille et affecte plus les ménages pauvres que les riches.

Les discussions sur les conséquences de l’abolition d’un tel système, coûteux, inéquitable et dépassé, ont donné lieu à plusieurs exagérations. Certains groupes tentent de nous faire croire que le ciel va nous tomber sur la tête si la gestion de l’offre est réformée.

Prenons le temps de revenir sur certains de ces mythes.

 

Chute de la qualité

On peut lire dans les médias certaines affirmations sur les conséquences de la menace du lait américain, avec ses pratiques plus industrielles que les nôtres.

Il est important de se souvenir que, comme pour n’importe quel produit destiné à la consommation humaine, le lait importé doit se conformer à nos lois et notre réglementation. Les quelques 5 % de produits laitiers que nous importons actuellement selon les producteurs laitiers du Canada, par exemple, doivent se conformer à la Loi sur les aliments et drogues, le Règlement sur les aliments et drogues, la Loi sur les produits agricoles au Canada, le Règlement sur les produits laitiers, et la Loi sur la salubrité des aliments au Canada, ainsi que d’autres règles se rapportant à ces lois.

Même sans gestion de l’offre, le lait importé devrait répondre aux mêmes exigences que le lait produit ici.

 

Les pays ayant abandonné les quotas laitiers sont en crise

Les Australiens ont aboli leur système de quota laitier en 2000. On lit parfois que son industrie laitière est en crise depuis. Bien que dans les mois qui suivent un changement aussi important il y ait toujours une période d’ajustement, la production par ferme en Australie a augmentée de 71% depuis 2000, en partie grâce à l’accès aux marchés étrangers.

Une étude récente suggère qu’il est plausible que l’exportation des produits laitiers canadiens croisse elle aussi de façon substantielle, étant donné la bonne réputation canadienne pour la sécurité et la salubrité alimentaires.

 

Fin des petits producteurs et arrivée des fermes gigantesques

Les partisans de la gestion de l’offre prétendent qu’en absence de quotas, on verrait l’arrivée de fermes immenses, beaucoup moins nombreuses et beaucoup plus industrielles.

Il est vrai que dans un système sans quota les fermes canadiennes, surtout familiales, chercheraient probablement à s’agrandir pour être plus efficaces. Mais une étude récente contredit l’idée qu’elles deviendraient alors d’immenses usines. On passerait simplement de microentreprises à de petites entreprises.

Pour donner une idée, la taille optimale des fermes ressemblerait à la taille typique d’une franchise de Tim Hortons. L’abondance des terres agricoles et de l’eau au Canada suggère que les fermes n’auraient pas besoin d’atteindre une taille démesurée pour être compétitives, contrairement aux fermes de l’ouest américain.

 

La fin de la gestion de l’offre pour le lait menacerait 4500 à 6000 fermes

Une étude commandée par Agropur laisse croire que 40 % de la production laitière serait à risque advenant la fin de la gestion de l’offre. Cependant, cette étude est fondée sur l’hypothèse irréaliste que les fermes ne feraient rien pour s’adapter et ne tenteraient pas de profiter de l’ouverture des marchés étrangers pour exporter. C’est comme si une étude nous disait qu’on risque d’avoir trop chaud ou trop froid si on n’adapte pas nos vêtements à la saison.

La même étude nous apprend pourtant quelques pages plus loin que les États de l’est américain ne produisent pas assez de lait pour leur propre consommation, et que nos fermes pourraient profiter de ce marché pour exporter.

 

Sans gestion de l’offre, plus de produits laitiers, volaille et œufs sur les étagères

Les quatre premiers mythes ne sont pas les seuls épouvantails utilisés par les tenants du système de gestion de l’offre.

On va même jusqu’à essayer de vous faire croire que c’est « la disponibilité des produits laitiers, de la volaille et des œufs canadiens sur nos étagères qui risque d’être remise en cause si le système de gestion de l’offre est aboli ». Au Canada 91 % de la production agricole est faite hors du système de gestion de l’offre. La quasi-totalité du monde, et tout le reste du monde développé, n’ont pas de système de gestion de l’offre, sans pour autant qu’il y ait de pénurie.

Pour résumer, il est vrai que si on devait un jour abolir la gestion de l’offre, cela soumettrait nos agriculteurs présentement privilégiés par la loi à une plus grande concurrence. Mais, d’une part, il ne faut pas surestimer l’ampleur des changements ; d’autre part, le revers de cette plus grande concurrence est une baisse substantielle des prix pour les consommateurs, dont les ménages les moins fortunés profiteraient le plus.

Somme toute, même sans gestion de l’offre, l’agriculture aurait de beaux jours devant elle au Canada.

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