Par Henri Dumaine.
La levée de boucliers syndicale que suscite la réforme du collège imposée par Najat Vallaud-Belkacem a de quoi surprendre. Qu’une formation estampillée à droite (elle s’en défend) comme le Syndicat national des lycées et collèges (SNALC) déclare refuser « une réforme désastreuse », passe encore. Mais que cette réforme suscite également la mobilisation de plusieurs des syndicats collectivistes grenouillant dans les parages de la rue de Grenelle, voilà qui est plus surprenant.
La FSU de Bernadette Groison s’est pourtant rangée dans le camp du « non ». L’union de l’eau et du feu ? Pas tant que ça. Même si, depuis 2008, le syndicalisme scolaire est en voie de fragmentation, il reste majoritairement dominé par des formations de gauche. Lors des élections professionnelles de 2014, c’est la FSU qui a conservé la première place (35,5 % des suffrages), suivie par l’UNSA-Éducation (21,9 %), le FNEC-FP-FO, (13,6 %), le SGEN-CFDT (8,9 %) et la CGT Educ’action (5,5 %). Le SNALC n’apparaît qu’en 6ème position avec près de 5,5 % des voix.
Les syndicats collectivistes mordent la main qui les nourrit. Mais pas trop fort. Car ils sont largement gâtés par leur ministre de tutelle qui permet aux enseignants de disposer de temps libre pour leur activité syndicale. Coût de cette faveur : environ 82 millions par an. Après la FSU, championne toute catégorie avec 817 postes de syndicalistes en équivalent temps plein (ETP) pour l’année scolaire 2012-2013, ce sont l’UNSA (444 ETP), FO (166), la CFDT (156), la CGT (123) et Sud Éducation (117) qui profitent des plus gros avantages.
La mobilisation de la FSU contre la réforme du collège n’est pas dénuée d’arrière-pensées politiques. Elle intervient quelques mois après une « mobilisation » contre la nouvelle répartition des zones d’éducation prioritaire et un bilan critique de la réforme des rythmes scolaires. Depuis des mois, la FSU cherche à engager un bras de fer avec un gouvernement par lequel elle s’estime trahie.
Selon un sondage Opinion Way pour Le Figaro de juillet 2015, les enseignants sont à peine 21 % à se déclarer prêts à voter une nouvelle fois pour François Hollande alors qu’ils étaient 42 % à le soutenir en 2012. Portées par la stagnation des salaires et le discrédit frappant leur profession, les manifestations anti Belkacem du printemps 2015 s’inscrivent aussi dans une tradition de confrontation bête et méchante. Depuis les années 1960, s’est engagée une dialectique négative avec, d’un côté des ministres de l’Éducation qui poussent leurs réformettes et, de l’autre des syndicats qui les bloquent.
« Développer une école plus juste socialement »
À l’université, bon nombre de professeurs ont soutenu l’interminable suite de «mobilisations» printanières qui se sont généralisées depuis mai 68. Même logique pour les enseignants du secondaire. Réformes Fontanet/Haby au milieu des années 1970, projet Devaquet en 1986, loi Fillon en 2005… Aujourd’hui, malgré l’émergence d’un courant syndical de droite, la majorité des enseignants reste attachée à l’esprit du plan Langevin-Wallon. Ceux-ci, technocrates proches du PC, ont transformé l’école en théâtre de lutte des classes au détour des années 1950. Les différences de niveaux entre élèves ont fini par être assimilées à des inégalités qu’il fallait niveler. Porté par la gauche syndicale, ce courant progressiste a connu une victoire avec l’instauration du collège unique dans les années 1970. La réforme du collège de 2015 est une nouvelle étape. Cette fois, on va jusqu’à supprimer les classes bilangues et les sections européennes jugées trop inégalitaires. « On préfère les indicateurs mesurant les écarts entre les meilleurs et les plus faibles (…) à des indicateurs mesurant en valeur absolue le niveau des élèves et leur progression (…) : c’est le signe d’un changement de priorité, l’éducation devant être, avant tout, créatrice d’égalité », résument Olivier Vial et Inès Charles-Lavauzelle dans un livre intitulé « L’école, malade de l’égalitarisme » (Éditions CERU).
Paradoxalement, c’est parfois au nom de cet égalitarisme radical que certains syndicats protestent contre la réforme Belkacem. Si FO, la CGT et Sud la rejettent, ce n’est pas parce qu’ils militent pour un retour à l’enseignement traditionnel. Mais, parce qu’ils redoutent que l’antiélitisme forcené de la réforme ne provoque la fuite des meilleurs élèves vers le privé, une nouvelle sélection sociale…
D’autres syndicats ont des visées ouvertement « boutique ». Ils redoutent par exemple que l’apparition de nouveaux « enseignements pratiques interdisciplinaires » (EPI) menace la spécialisation des enseignants. Ils sont aussi inquiets devant les 20 % de marge d’autonomie laissée aux chefs d’établissement à l’idée qu’elle crée une concurrence entre les établissements et une émulation entre les enseignants.
Et l’école dans tout cela ? Comme l’écrit l’UNSA il s’agit de « secouer les carcans d’un système sclérosé pour développer une école bienveillante et plus juste socialement ». Pour y parvenir autant changer les programmes et puis, pourquoi pas, arrêter d’enseigner le français au titre de ses difficultés discriminantes !
- «École : nos enfants en péril», Les Enquêtes du contribuable d’octobre/novembre 2015. En kiosque. Vous pouvez commander en ligne ce numéro : 5,50 €€ (port compris).
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Consternante vision du syndicalisme portée par des enfants gâtés du système démocratique. Et oui, la démocratie a un coût (bienvenue dans monde réel)! Et non, les syndicalistes ne sont pas tous des rougeots bas du front qui s’épanouissent uniquement dans la confrontation. La notion d’intérêt collectif…?
L’intérêt collectif est une notion qui échappe définitivement à des syndicats motivés uniquement par les intérêts catégoriels. L’intérêt collectif est sans ambiguïté la privatisation et la mise en concurrence des écoles, la libération des enseignants du statut de faux fonctionnaire, ainsi que l’instauration de bons d’achats scolaires distribués aux familles qui retrouveraient ainsi leur libre choix et leur pouvoir de sanction à l’encontre des établissements et des enseignants inefficients. Quel syndicat aujourd’hui soutient ces indispensables mesures de salubrité publique ? On désespère de découvrir un jour dans ce pays un syndicat effectivement soucieux de l’intérêt collectif.
Je cite un représentant syndical qui parlait à la télé :
« oui nous allons nous battre pour les cours de latin, le truc, le bidulle,… » bon et comme j’ai l’habitude de dire, les syndicats sont intelligents, ils mettent en premier les arguments qui vont faire mouche sur les parents, comme çà on a du soutient… et en dernier, leur unique combat… « la remise en cause par la réforme structurel du… » bref ils vont devoir etre présent 3h de plus à l’école par semaine.
Donc l’interet collectif, faites moi rire…
Et bien mo qui suis professeur syndiqué (SNALC), je dois quand même avouer je partage le point de vue de l’auteur en grande partie. Tous les syndicats (sauf le mien qui le refuse par principe) sont des organisations ultra-politisées et ultra subventionnées, et qui s’aplatissent dès que le ministère fait mine de raboter leurs privilèges.
Même si la réforme de Najat s’applique, elle n’aurait qu’à légèrement infléchir sa doxa pour tous les syndicats s’y rallient, y compris contre leurs bases.
Là où l’auteur se trompe, c’est que le syndicalisme doit avoir une part d’argent public, même réduite. Sinon, il cautionne implicitement le système pourri mis en place par l’ex CNPF pour « fluidifier » le dialogue social, y compris la CGT, soi-disant en pointe dans la lutte anticapitaliste. Et je sais de quoi je parle : mon père, ex-syndiqué CGT, responsable départemental, les a vu passer, les valises de billets, au siège national. Il a eu le tort de poser quelques questions faussement naïves qui lui ont valu quelques inimitiés.
« Contre toute attente, une partie des syndicats de gauche renâcle contre la réforme Vallaud-Belkacem. »
Pourquoi contre toute attente ? Faudrait réviser vos classiques. Tenez je vous aide.
Théorème du mammouth : Tout syndicat d’enseignants de gauche s’oppose à toute réforme qui ne consiste pas en une diminution des horaires ou en une augmentation des rémunérations.
Par exemple prenez Jospin qui a été le ministre de l’Éducation qui a le plus distribuer de milliards aux profs. Et bien quand il est devenu 1er ministre et qu’il a stoppé le robinet à finance, les profs l’ont éjecté.
Ils ont eu Chirac pour 10 ans puis Sarkozy, comme quoi faire des longues études n’aide pas toujours à réfléchir.
Vous êtes opposés à cette réforme lamentable ? Mobilisez-vous : http://www.cartecollege.fr/
Vous êtes perdus et voulez démêler le vrai du faux sur cette réforme ? Renseignez-vous : https://www.youtube.com/watch?v=587alMXFpuA ou http://www.reformeducollege.fr/
 » Mais, parce qu’ils redoutent que l’antiélitisme forcené de la réforme ne provoque la fuite des meilleurs élèves vers le privé, une nouvelle sélection sociale… »
C’est vrai et c’est extrêmement juste.
Cependant, le nombre de places disponible dans les écoles privées sous contrats sont limitées par l’état.
Donc, oui cela se traduira inexorablement par une école publique poubelle et quelques écoles privées aux tarifs de plus en plus cher car obéissant à la loi de l’offre et de la demande.
C’est cela qu’il faudrait changer: ne plus limiter le nombre d’établissements privés et éventuellement affecter les dépenses éducatives à ces établissement ( mais le chèque éducation resterait la meilleure solution ).
Lorsque les parents ne sont pas contribuables, qu’ils perçoivent un revenu avoisinant les 800 euros, quelle sera la forme éducative pour les enfants ?