Par Pierre-Louis Tamboise.

Qu’on ne s’y trompe pas. Ce que l’on croyait, en souriant, mijoter entre système Débrouille et relents d’Hippie Culture il y a une vingtaine d’années, explose et est devenu un « espoir » pour beaucoup. Partie de l’idée du « service rendu », liée au plaisir des contacts humains lorsqu’une vraie moralité les unit, l’économie participative se présente désormais comme une solution. De nouvelles formes d’association apparaissent à tous niveaux, jusque dans le système bancaire.
C’est ainsi qu’en pleine période de crise, Prêt-dunion.fr ou Prêt-entre-particuliers.com proposent de mettre en contact les prêteurs et les emprunteurs pour changer leurs relations morales et sociales en établissant des liens directs. Face à la pauvreté, Muhamad Yunus invente le Micro-Crédit qui d’ici 20 ans devrait tirer de la misère 500 millions de personnes. De son côté le Commerce Équitable de Tristan Lecomte réorganise la gestion agricole tandis que dans nos sociétés dites riches, c’est par le service que cela entre avec fracas : le transport développe des opportunités nouvelles, comme par exemple Uber (suspendu), qui proposait jusque-là des services voituriers strictement contrôlés au niveau du sérieux. La moindre erreur de courtoisie ou une défaillance dans la qualité du service et la « sanction tombait ! »… car celui qui tente d’embarquer ses clients dans un tour « juteux », doit se rappeler que les abus et excès seront notés et que « le portable qui l’a mis en contact avec ses clients a une fonction GPS qui indique le parcours le plus court » (ce qui fera rayer le malandrin du système collaboratif) : un principe de transparence, donc, qui a des conséquences directes car : “si vous passez en-dessous de 4 étoiles, on vous sanctionne en ne vous proposant plus de courses prioritaires”.
Parallèlement à ces avancées mondiales, une moralisation nouvelle du travail s’impose enfin en recréant une réelle responsabilité. Dans cet esprit, les sites de « notation d’hôtels et de restaurants », faits par les consommateurs, sont appréciés car ils impactent la fréquentation (comme avec TripAdvisor, entre autres). La nouvelle génération ouvre ainsi la voie à des applications innovantes et « transparentes ». Le succès de BlaBlaCar, le site de co-voiturage français, a entraîné dans son sillage une multitude de projets communautaires. Dans l’hôtellerie, ceux d’Airbnb, Housetrip ou Homelidays permettent aux propriétaires de louer leurs appartements et maisons sur internet ; quant aux sites de vente en ligne ils sont devenus désormais un commerce quasi naturel, comme avec eBay, Leboncoin.fr, etc.
À ces enseignes s’ajoutent encore celles de l’« échange » de biens, mais aussi de location d’appartements, de machines, de bateaux qui pullulent comme Bricolib, Zilok, Jelouetout, Servisphère, voire aussi des services (de plomberie, d’électricité, etc.), qui se déclinent à l’infini tels GoGoRunRun, Jwebi, ou même de détectives, ou encore de cuisine qui fournissent des plats de chefs à des prix réduits (Monvoisincuisine.fr, Marmijote, Nestor-paris.com) et qui les livrent en 30 minutes. Tandis que Globe-docteur.com « assure la prise en charge des français à l’étranger »… (d’après un article de Christophe Doré et Pascal Grandmaison, Figaro Magazine du 10 juillet 2015 et surtout la magnifique et complète étude de L’expansion, N°805 de juin 2015 titrée à la une : “L’invasion des barbares !”).
De ces économies « participatives et collaboratives » qui poussent au partage et à la convivialité, on espère une réduction massive de la circulation et de la pollution, un développement du voyage et des services, une réduction du chômage par des emplois nouveaux, etc. S’il est certain qu’elles vont bouleverser les hiérarchies, le commerce et les administrations, des études de prospective à mener sur le sujet seraient plus productives que d’essayer de les contraindre pour préserver des intérêts qu’on peut négocier autrement. Mais ça y est ! On entre dans un autre univers où ces réseaux remplaceront ceux, perdus, de la petite entreprise, de l’artisanat dans la production, des intermédiaires inutiles, etc.
Ne croyez-vous pas que chaque fois que le client fait lui-même tout ou partie du job directement sur son smartphone ou sur internet, cela veut dire que l’on a privé quelqu’un de son boulot quelque part ? Même remarque pour tous les jobs qui sont ou seront remplacés par des logiciels…