Vive la cohabitation !

La servilité des parlementaires devant le pouvoir exécutif a pour conséquence un pouvoir présidentiel bien trop élevé : la cohabitation comme solution?

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Vive la cohabitation !

Publié le 7 septembre 2013
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La servilité des parlementaires devant le pouvoir exécutif a pour conséquence un pouvoir présidentiel bien trop élevé. Éloge de la cohabitation comme solution.

Par Gabriel Lévy, de l’Association des contribuables de l’Intercommunalité d’Aubagne.

En cette rentrée parlementaire, alors que les articles de notre constitution relatifs aux pouvoirs du président de la République sont analysés et commentés, ce titre ne manquera pas de choquer une partie de nos lecteurs. Mais n’est-ce pas là un moyen provisoire d’échapper au système monarchique exécrable dans lequel nous vivons, l’installation d’une cohabitation ayant pour effet le respect absolu de notre constitution ?

Une nation qui se prétend démocratique ne peut pas accorder autant de pouvoirs à un seul homme. Il ne s’agit pas seulement des pouvoirs officialisés par notre constitution, mais aussi de ceux qu’il s’accorde au nom d’une interprétation douteuse de cette dernière (par exemple, le « domaine réservé » de la politique étrangère), de la pression qu’il exerce, à tout moment et en tout lieu, sur la classe politique et par voie de conséquence sur nos institutions. Les élus de sa majorité et ses ministres ? Des courtisans, parfois fiers de l’être (« Si tu m’utilises j’ai besoin de toi comme guide ») [1]. Les conseillers ? Des personnalités probablement compétentes, mais « qui doivent tout au Prince » [2]. Un règne dans lequel « la vertu n’y est point nécessaire et l’honneur y serait dangereux ».

Des monarques fascinés par un pouvoir, pourtant éphémère, conçu comme celui « de contraindre » [3] . Comme M. Mitterrand, pourtant pourfendeur de « l’exercice solitaire du pouvoir » avant de s’en délecter, nous en ferions – peut-être – de même à leur place, ce qui prouve la perversité de notre système politique : « le pouvoir absolu corrompt absolument».

Qu’arrive-t-il alors ? Le président est chaque jour plus détesté par une partie d’un électorat déçu, et il est battu par celui qui n’a de cesse de clamer le subjectivisme et les foucades de celui qu’il affronte. Monsieur Hollande ne sera probablement pas « renouvelé », pas plus que ne l’ont été M. Giscard d’Estaing, M. Sarkozy, ou M. Chirac, si ce dernier avait eu l’imprudence d’être candidat en 2007. Le peuple n’en peut plus d’essayer, il veut rompre le joug des présidences monarchiques.

Ainsi la stabilité politique, souhaitée autrefois par les auteurs de la constitution, est-elle mise en défaut. Les réformes économiques fondamentales n’aboutissent pas parce qu’elles n’ont pas le temps d’être expérimentées, jugées dans la durée et parce que, risquant de compromettre les carrières de ceux qui les font, voire de ceux qui les proposent, elles sont vite abandonnées. Les réformettes antérieures sont « détricotées ». Les lois sont faites et défaites au gré du Prince, alors que la stabilité politique et la sécurité fiscale sont consubstantielles de la volonté d’entreprendre.

On a accusé la cohabitation d’aboutir à la paralysie des institutions. Or, le renouvellement du « guide suprême », devenu la règle tous les 5 ans au terme d’une campagne électorale permanente, a pour conséquence la stérilisation intellectuelle d’une classe politique hantée par la compétition. Dans le cas d’une cohabitation, comme celle fréquente aux États-Unis, le président et les assemblées – ces dernières votant les crédits – sont, en pratique, obligés de composer (l’intervention en Syrie), et le pays est à l’abri des caprices ou des lubies (l’intervention française en Libye), étant acquis qu’une décision abandonnée par une assemblée d’élus responsables vaut mieux que la décision déraisonnable d’un seul.

En définitive, il devient indispensable soit de « défaire » notre constitution, soit de procéder à son application rigoureuse selon l’article 20 qui stipule : « le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation. Il dispose de l’administration et de la force armée. Il est responsable devant le Parlement ».

La cohabitation n’étant qu’une rare affaire de circonstance, mieux vaut brider définitivement la présidence en la contraignant au respect scrupuleux de cet article 20, même si l’on devait assister un jour à l’installation d’une cohabitation… dans la majorité.

Sur le web.

Notes :

  1. « Le Monde du 17 juin 2013 : « La lettre d’allégeance de Christine Lagarde à Nicolas Sarkozy » …« Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting…Si tu m’utilises, j’ai besoin de toi comme guide et comme soutien : sans guide, je risque d’être inefficace, sans soutien je risque d’être peu crédible »
  2. « Le fait que l’on doit tout au Prince, fait que l’on ne doit rien à sa patrie » Montesquieu : L’Esprit des Lois
  3. André Malraux. La condition humaine
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  • Oui le Président français , c’ est le Roi Louis XIV élu par ses sujets, les électeurs.

  • « L’absolutisme inefficace » de J.F. Revel (1992) indique clairement que la cohabitation est un pis-aller pour une constitution aussi mal agencée que la nôtre, ayant produit la succession d’incapables politiques se relayant au pouvoir depuis 55 ans.
    Quant à l’article 20, quel pouvoir serait assez inconséquent pour s’autolimiter? Aucun: tout pouvoir s’étend aussi loin que possible…

  • Pour ma part, j’avoue que la cohabitation ne me paraît pas une solution crédible face au problème bien réel de la collusion des pouvoirs exécutif et législatif aujourd’hui au France. Je rejoins Hermodore sur le fait que l’article 20 n’est pas une formule magique.
    Mais il faut bien dire que je ne vois pas de solution à ce problème au sein de notre démocratie représentative.

  • Je pense surtout qu’il faudrait une profonde réforme de nos institutions autour des principes de liberté ,de propriété et de subsidiarité;Mais bon je rêve…

  • Les commentaires sont fermés.

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