Et si on interdisait le tabac ?

Les tendances néo-prohibitionnistes de la lutte anti-tabac cachent des risques pour la santé et les finances publiques, selon une nouvelle étude de l’IEM

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imgscan contrepoints 684 le tabac tue

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Et si on interdisait le tabac ?

Publié le 2 février 2012
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Les tendances néo-prohibitionnistes de la lutte anti-tabac cachent des risques pour la santé et les finances publiques, selon une nouvelle étude de l’IEM.

Un article de l’Institut économique Molinari

Il y a 5 ans (1/02/07), le gouvernement français imposait l’interdiction de fumer dans la plupart des lieux publics fermés (les bars, restaurants, etc., y ont été soumis à partir du 1er janvier 2008). Depuis, les choses se sont encore durcies et l’objectif est désormais de « dénormaliser » le marché du tabac, dixit le député Yves Bur qui – dans le cadre d’un groupe de travail chargé d’évaluer l’application en France de la Convention-cadre de lutte anti-tabac de l’OMS (CCLAT) – devrait dévoiler dans les prochains jours de nouvelles « propositions assez fortes » en ce sens.

Sous l’impulsion de la CCLAT et dans leur lutte contre le tabagisme, de nombreux États ont, en effet, multiplié leurs réglementations anti-tabac. Au point que la question de sa prohibition n’est plus une simple lubie dans certains pays. Des projets de loi en ce sens ont déjà vu le jour, entre autres, en Finlande ou en Islande. Le Bhoutan, en Asie, a même franchi le pas en interdisant totalement la vente de tabac en 2004. En France, Jacques Attali s’est aussi déclaré en faveur d’une telle interdiction du tabac, estimant que le sujet devrait être au centre des débats lors des élections présidentielles, alors que la Ligue contre le cancer souhaite imposer une « sortie du tabac » à l’horizon 2030.

« Le fait est que face à une demande qui « refuse » de disparaître, la lutte anti-tabac s’engage de plus en plus dans une logique de prohibition de facto du tabac. Elle consiste à étouffer de façon graduelle – et à terme totale – le marché officiel de tabac », souligne Valentin Petkantchin, auteur de l’étude.

Une « bouffée d’oxygène » pour le marché noir

Or, quand le marché officiel est mis « hors jeu », le marché noir prend systématiquement le relais pour satisfaire la demande, à l’image de ce qui s’est passé au Bhoutan.

C’est aussi la leçon de l’une des expériences occidentales les plus sévères en la matière, la prohibition d’alcool aux États-Unis entre 1920 et 1933. Après une baisse initiale, la consommation est repartie à la hausse par la suite. Elle aurait été 5 fois plus importante en 1929 qu’en 1921.

Une néo-prohibition du tabac serait d’autant plus contreproductive qu’il existe d’ores et déjà un marché noir de cigarettes bien organisé :

• un trafic illicite estimé à 11% du marché mondial ;
• un « manque à gagner » en termes de recettes fiscales non-collectées pour les États européens d’environ 10 milliards d’euros ;
• 20% des achats effectués en dehors du réseau officiel en France, dont 5% provenant du trafic illicite (contrebande, contrefaçon et ventes sur Internet).

Ce marché illicite, nourri par une fiscalité écrasante de l’ordre de 80% du prix de détail d’un paquet en France – se substituera à l’offre légale, si les actions toujours plus prohibitives des pouvoirs publics finissent par la faire disparaître. Or, une telle situation présente des effets pervers que ce soit en matière de santé ou de finances publiques.

Une consommation plus dangereuse

D’une part, les consommateurs font face sur le marché illicite à un manque d’information chronique et à des produits de moindre qualité, parfois plus dangereux pour la santé.

• les boissons vendues au « noir » lors du « régime sec » avaient une teneur en alcool 2,5 fois plus élevée et pouvaient contenir des substances dangereuses pour la santé (alcools industriels) ;
• les cigarettes de contrebande, produites dans l’illégalité, peuvent avoir des niveaux de cadmium et de plomb – des métaux nocifs pour la santé – 6,5 et 13,8 fois plus importants que dans les cigarettes originales de marque.

Les politiques visant à pénaliser les achats sur le marché officiel condamnent paradoxalement les fumeurs à se fournir en produits illicites potentiellement plus nocifs pour leur santé, souligne l’étude de l’IEM.

Des finances publiques dégradées

D’une part, les politiques néo-prohibitionnistes menacent l’ensemble de la filière légale de tabac et les recettes fiscales que l’État en retire. Cette activité représente en 2010 :

• 3,4 milliards d’euros de revenus pour les fabricants de tabac, les distributeurs et les 28 000 buralistes en France ;
• environ 13,2 milliards d’euros en TVA et droits de consommation ;
• d’autres recettes, liées à la fiscalité des entreprises (impôt sur les sociétés, etc.).

D’autre part, la néo-prohibition du tabac nécessite le déploiement de moyens policiers, judiciaires, etc., supplémentaires pour lutter contre le trafic illicite. Il s’agit de ressources qui ne peuvent du coup pas être utilisées pour protéger la population contre de vraies agressions. La population dans son ensemble risque également de souffrir de l’augmentation du crime organisé avec son lot de violence et de corruption qui l’accompagnent.

L’étude de l’IEM conclut : dans cette logique néo-prohibitionniste, la lutte anti-tabac risque de s’enliser et de devenir une lutte sans fin contre le trafic de tabac. Les effets pervers de toute nouvelle proposition visant la « dénormalisation » de l’offre légale de tabac ne devraient plus être ignorés.

—-
Intitulée Et si on interdisait tout simplement le tabac ?, l’étude est disponible sur le site de l’Institut Économique Molinari.

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  • J’ai du mal a saisir pourquoi un tel article a sens unique lorsque la question, c’est la liberte du fumeur contre la liberte du non-fumeur a ne pas subir celle du fumeur. Le tabagisme passif tue, donc je prefere m’en passer volontiers…

    C’est comme les limitations de vitesse, Pompidou etait contre, son argument etant « ceux qui meurrent dans un accident a cause de la vitesse ne peuvent s’en prendre qu’a eux-memes », sauf que quand on roule trop vite et qu’on perd le controle du vehicule, on peut en percuter un autre ou faucher un pieton… La liberte de marcher sur le trottoir sans risquer sa vie, en somme…

    Boire de l’alcool, en revanche, ne gene pas. L’alcoolisme passif n’existe pas.

    • « Boire de l’alcool, en revanche, ne gene pas. L’alcoolisme passif n’existe pas. »

      Ah bon.

      • C’est pas les vapeurs d’alcool dans un bar qui rendent bourré…

        • « C’est pas les vapeurs d’alcool dans un bar qui rendent bourré… »

          Non, mais c’est le type bourré qui te rentre dedans qui te rend mort.

          • Non, mais la distinction ici se fait sur la notion de lieu public. L’alcool tue parce qu’il se fait sur la route. Le tabac tue parce qu’il se fait dans les bars. Ce sont 2 choses differentes.

    • Quelques citations de Friedrich Hayek :

      « Freedom granted only when it is known beforehand that its effects will be beneficial is not freedom. »

      « To act on the belief that we possess the knowledge and the power which enable us to shape the processes of society entirely to our liking, knowledge which in fact we do not possess, is likely to make us do much harm. »

      « ‘Emergencies’ have always been the pretext on which the safeguards of individual liberty have been eroded. »

      Dans ce cas particulier, laissez-moi allumer ma cigarette de temps en temps, mais n’hésitez pas à venir me parler si elle vous dérange.

    • Dans la mesure ou ne peut plus fumer dans les lieux publics, il n’y a plus de gene pour les autres. Par ailleurs, vous n’avez pas compris l’article : avec la prohibition vous ne retirerez pas la cigarette mais seulement son usage legale (et accessoirement les entrees d’argent).

      Pour la vitesse, pompidou devait dire cela parce qu’en general, lorsqu’on va vite (je parle de vitesse reelle, et nondu ressenti par autrui) on le fait en general tout seul

  • La législation sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics est, une fois n’est pas coutume, une bonne idée car comme on dit ma liberté commence là où s’arrête celle des autres, je ne vois pas pourquoi moi non fumeur je devrais supporter la fumée des autres.
    Par ailleurs l’état ayant le monopole de l’assurance maladie interdire le tabac me semble être une bonne idée dans la mesure où je n’aurais plus à payer pour les cancers de gens qui ne veulent pas comprendre que le tabac représente une menace pour leur santé et pour celle de leur entourage. Les choses seraient différentes si on supprimait la sécurité sociale, mais ce n’est pas pour demain.

    • L’appellation « interdiction de fumer dans les lieux publics » est trompeuse puisqu’elle concerne aussi des lieux privés comme les bars et les restaurants. En effet, ceux-ci ont un propriétaire bien défini.

    • Il y a confusion des genres entre le remboursement (et ses modalités) des soins apportés par exemple aux fumeurs et la prohibition.
      Or, TOUS les exemples de prohibition menés à ce jour ont mené aux mêmes constats : marché noir, mafias, corruption, violence, etc…
      Ne pas vouloir voir les effets pervers de la prohibition relève du négationnisme le plus absolu.
      Quant au tabagisme passif, certes il existe ; pour autant, ce dernier n’augmente que de 30 % les risques de cancers des voies aéro-digestives par rapport aux non-fumeurs. Etant donné que les risques de cancers aéro-digestifs sont extrêmement faibles chez les non-fumeurs, le tabagisme passif rendrait ce risque d’extrêmement faible à très très faible.
      En conclusion, il s’agit de ne pas minimiser les conséquences du tabagisme passif, mais également de ne pas les exagérer, ou en tout cas de ne pas se retrancher derrière pour justifier d’une politique prohibitive dévastatrice sur le plan sociétal.
      Donc, clairement, NON à la prohibition sur le tabac.

    • C’est une idée fréquente, mais elle ne résiste pas à l’examen.

      1. Les fumeurs coûtent moins chers que les personnes en bonne santé (puisqu’on en est à cette comptabilité macabre).

      2. Si je poussais le raisonnement à l’extrême, j’en appellerais à l’extinction de tous mes congénères, puisque, vivants, ils tombent malades ; ce qui m’oblige à payer pour le remboursement de leurs soins… Comme disait Staline, « plus d’homme, plus de problème ».

      Tout cela pour dire qu’il vaudrait effectivement mieux un autre système que notre Sécu.

    • Si c’est une question de fric, un fumeur meurt vers ses 65 ans au lieu de 85 ans. Son cancer aura coûté moins cher à la société que 20 ans de retraite qui n’exclut pas de toute façon d’autres pathologies coûteuses de fin de vie.

  • Très bon article ,je suis aussi de votre avis :le tabac doit etre interdit à la vente parce qu’ il tue :à mon tour de vous proposer le mien :

    DEFINITION ALCOOLISME PASSIF (VERSION 10.6) :
    l’ alcool c’ est 50 % de la
    criminalité et 20 % des homicides (en étudiant les crimes liés à l’ alcool ,on trouve par ex. les
    agressions sexuelles) ;s’ ajoute à cela 10000 morts/an rescencés par alcoolisme passif :
    touchant les faetus des femmes enceintes (malformations) ,les accidents de la route ,la
    violence conjugale ,l’ enfance & adolescance maltraitées (battus) ,les accidents du travail &
    enfin les bagarres en boites de nuit ,bars-pubs ,fêtes en plein air municipales ;S’ ensuit du
    syndrôme de dépression visible dans nombre de cas de personnes victimes d’ alcoolisme passif ,
    avec des cas très grâves touchés par du harcellement moral (menaces de casser la figure ,
    menaces de mort ,moqueries-humour à caractère répréhensible & agressif- ,injures ,alcoolisme forcé ,réprimendes injustifiées au travail ,etc…caractérisés par de la débilité ,folie ou squizophrénie):de
    nombreux auteurs (essais sur le cancer) montrent les liens existant entre la dépression et une
    augmentation de la fréquence des cancers ainsi que d’une mortalité précoce (cancers par
    alc. passif ainsi prouvé) ;mortalité pouvant aussi se traduire par des suicides .L’ alcoolique désocialise l’ entourage sobre ,le terrorisant et gachant le bonheur des autres .
    Enfin ,il faut préciser les nuisances sonnores remarquables nottemment dans les pubs irlandais mais tout autant possibles dans le simple voisinage de quartier ou résidentiel .
    L’ ALCOOL TUE (environ 200.000.000 morts évitables/sciècle) & des étiquettes spécifiques
    mentionnant les dangers devraient être apposées sur chaque bouteille .
    Enfin l’ alcool devrait être interdit en lieux publics sauf dérogation spéciale ,avec obligation de protéger les
    personnes sobres ,en tolérant l’ alcool dans des lieux confinés & séparés . (Des assurances commencent à prendre en charge ce fléau ;le passive drinking fait rage sur le net:en 10aines de pages
    .On parle de guerre mondiale contre l’ alcool-« la presse-Mathieu Perreault »- suite à l’ engagement de l’ OMS pour
    réduire l’ usage nocif de l’ alcool après la lutte contre le tabagisme)

  • merci bien ,je v pondre la version 10,7 (tjs finale) grâce à vous .Met en cause aussi le droit de vente ou du moins le remet en question pour l’ alcool (disons qu’ au dessus de 4 ° je n’ ai rien à redire ,mais arrivé à 9 ,déjà les personnes alcooliques peuventfaire souffrir leur entourage :bravo les internautes ,continuez & n’ ayez pas peur de ce qui va arriver .

  • Enfin un institut qui bosse !Je vous donne 1 autre sujet :celui de l’ alcool :je pense aussi que ces drogues pourrissent plus les finances qu’ elles ne renflouent les caisses de l’ Etat !

  • beaucoup de commentateurs sur ce site, ne veulent pas que l’etat leur interdise quoi que se soit, ils veulent rouler tres vite, fumer et boire tous leur saoul; joli programme, vive la liberté. pourtant, je ne pense pas que les père du liberalisme au 18ième siecle, comme benjamin franklin, adam smith ou plus tard say et bastiat, faisait l’apologie des differents vices dans lesquels se complet une partie de l’humanité.
    quand on n ‘est pas capable de se discipliner par soi-mème, il ne faut pas s’etonner que l’etat en vienne a le faire a sa place .

    • Ben voyons. C’est bien connu : les hommes de l’État, contrairement aux gens de la société civile, ne sont animés d’aucuns vices ! Laissons-nous guider par ces bons petits pères la vertu !

      Comment peut-on être servile à ce point. Ça me dépasse.

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