Ron Paul, la revanche du libéralisme classique

Comment interpréter ce succès de Ron Paul, en tête désormais dans les sondages dans l’Iowa?

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Ron Paul, la revanche du libéralisme classique

Publié le 24 décembre 2011
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Ron Paul en tête dans les sondages pour la primaire républicaine dans l’Iowa, voilà qui oblige les médias à enfin parler du libertarien texan. Mais surtout comment interpréter ce succès de Ron Paul?

Un article de Daniel Tourre, publié originellement dans Le Monde

Une hirondelle ne fait pas le printemps, mais pour tous les libéraux de la sphère occidentale le succès de Ron Paul est le signe qu’après un siècle d’augmentation constante du périmètre de l’Etat dans la société, le temps du reflux est peut-être arrivé. Et Ron Paul ouvre plusieurs pistes pour y parvenir.

Des Etats obèses partout dans le monde occidental. D’abord un constat : contrairement à ce qu’affirment en permanence les étatistes, jamais l’Etat en Europe ou aux Etats-Unis n’a eu une telle place dans nos vies en temps de paix. En un siècle le poids de l’Etat est passé d’environ 15 % du PIB à en moyenne 50 %. En France, nous avions déjà un Etat centralisé et imposant sous De Gaulle, en une génération nous avons en plus hérité d’un « infra Etat », des collectivités locales gourmandes et d’un « super Etat » l’Union européenne bavarde, sans d’ailleurs que l’Etat national n’ait lui-même significativement diminué de volume. Jamais nous n’avons eu autant de politiques, de bureaucrates pour nous soigner, nous éduquer, nous diriger, nous commander, nous ausculter, nous subventionner, nous dresser et surtout nous ponctionner. Contrairement à une légende urbaine, les USA ont suivi une trajectoire similaire. De l’Amérique de Roosevelt qui a prolongé la crise pendant une décennie tout en multipliant les bureaucraties aux politiques Keynésiennes des années 1970 en passant par les multiples guerres, l’Etat fédéral n’a fait que grossir. Reagan n’a lui-même que très peu diminué la place de l’Etat, mais surtout diminué les impôts sans diminuer les dépenses, en particulier celles destinées au secteur militaro-industriel.

Fin de règne du libéralisme utilitariste. Pour sortir de cette lente glissade vers toujours plus d’Etat, Ron Paul renoue d’abord avec un libéralisme classique très pur. Depuis plusieurs décennies, le libéralisme a d’abord été défendu par des utilitaristes : le libéralisme, c’est bien parce que c’est utile, en particulier pour la croissance économique. Cette vision utilitariste a souvent teinté le discours libéral d’un industrialisme béat et d’un tropisme en faveur de grandes entreprises. Le libéralisme classique, proche des racines historiques du libéralisme – auxquelles d’ailleurs des auteurs Français (Cantillon, Bastiat, Constant, Tocqueville) ont beaucoup contribué – part lui des droits naturels des individus, qui ne s’effacent jamais ni devant des Etats envahissants, ni devant des intérêts économiques particuliers instrumentalisant l’Etat. Le libéralisme classique est bien sûr favorable à l’économie de marché, conséquence de la liberté d’user de ses talents et la liberté d’échanger, mais à la condition stricte de ne pas utiliser l’Etat pour favoriser certains acteurs. Le discours de Ron Paul séduit cette Amérique convaincue – à juste titre – que ses libertés et ses propriétés sont petit à petit confisquées non seulement par l’Etat fédéral, mais aussi par des grands intérêts particuliers (banques, industries militaires) contrôlant les élus de Washington à leur profit.

L’Ecole autrichienne, les économistes qui ont vu juste. Le deuxième atout de Ron Paul, en science économique, c’est de s’être depuis plusieurs décennies imprégné de l’Ecole autrichienne (Mises, Hayek, Rothbard) en particulier sur les questions monétaires. Cette école, très libérale, qui s’oppose à la fois aux keynésiens et aux monétaristes, a aujourd’hui le vent en poupe dans les milieux libéraux. Elle met en cause l’existence même d’une banque centrale accusée non seulement de ne pas stabiliser la monnaie ou l’économie mais au contraire de provoquer des bulles et des crises tout en servant ouvertement les intérêts des grandes banques. La théorie des cycles de l’Ecole autrichienne a expliqué avec beaucoup de précision la crise de 1929 comme la crise que nous vivons actuellement. Fort de cette boussole, Ron Paul a dénoncé dès le début des années 2000 l’apparition d’une bulle et une fois la crise déclenchée il n’a voté aucun des fameux bails-outs des grandes banques tout en exigeant de la FED un grande transparence des comptes.

Ron Paul contre le néo-conservatisme. Sur le plan international, Ron Paul s’oppose violemment aux néoconservateurs qu’il accuse de servir exclusivement les intérêts du secteur militaro-industriel en incitant à des guerres inutiles.

Sur le plan des mœurs, bien que conservateur lui-même, Ron Paul refuse que l’Etat intervienne dans la vie des individus que cela soit pour la drogue ou les unions homosexuelles. Il se retrouve ainsi avec des supporteurs hétéroclites qui vont des provinciaux conservateurs des Etats du centre des USA aux gays branchés de San Francisco.

Ron Paul, un exemple pour les libéraux du monde entier. Retenez bien ce nom : Ron Paul. Qu’il perde ou qu’il gagne, sa révolution est en train d’influencer significativement le mouvement libéral aux USA et donne un exemple réussi aux libéraux du monde entier. Après plusieurs décennies de disparition quasi-totale, le libéralisme classique entre à nouveau par la grande porte dans l’arène politique. En Europe aussi, le libéralisme revient à ses sources classiques dans les milieux intellectuels et militants du libéralisme. Le phénomène Ron Paul n’est pas un accident, mais le symptôme d’un mouvement de fond en Occident qui fera aussi sentir ses effets en Europe et en France dans les prochaines années.

Note de Contrepoints: Daniel Tourre sort en janvier un livre sur le libéralisme, que nous vous recommandons chaudement. Plus d’informations sur le site de l’auteur.

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  • « sans d’ailleurs que l’Etat national n’est lui-même significativement diminué de volume ».

    « n’ait » et non pas « n’est ».

  • Philippulus ,

    Il me semblait que la teneur du message était plus importante que la fôte de sain taxe !!!

  • On ne règle pas un problème avec le mode de pensée qui l’a engendré. Paraphrase d’Einstein.

    Entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, c’est la liberté qui opprime et la règle qui affranchit. Lacordaire

    Laisser-fairisme et chienlit. Maurice Allais.
    Propos sur les pouvoirs. Alain

    Plan C : Etienne Chouard. Quel est le compte en banque de Ron Paul ? Qui le soutient ?

    • « On ne règle pas un problème avec le mode de pensée qui l’a engendré. » Tout à fait. C’est pourquoi on ne réglera pas la crise de l’Etat-providence avec le socialisme ou une quelconque forme de la pensée collectiviste qui a dominé le XXe siècle.

      La liberté est l’ensemble des droits, qu’aucune société régulière ne peut ravir à ses membres, sans violer la justice et la raison. (Lacordaire)

      Pour l’essentiel le libéralisme ne se réduit pas à une doctrine économique. C’est fondamentalement une doctrine politique dont l’essence est de définir les conditions sous lesquelles les hommes peuvent vivre ensemble. L’organisation économique n’en constitue qu’un chapitre et elle a pour objet de préciser le système institutionnel dans lequel prennent place toutes les actions économiques dans le cadre d’une économie de marchés. En fait, le fonctionnement de l’économie de marché est inséparable de son cadre institutionnel. (Maurice Allais)

      L’élite, parce qu’elle est destinée à exercer le pouvoir, est destinée aussi à être corrompue par l’exercice du pouvoir. (Alain)

    • Le compte en banque de campagne de Ron Paul est très bien rempli grace aux dons des innombrables personnes qui le soutiennent. Il a ainsi battu quelques records de « money bombs ». C’est de l’info plus que largement diffusée et disponible.

  • Ron Paul est comme prévu en train de payer à crédit ses newsletters ultra racistes des années 90.

    Jusqu’à présent il n’a jamais condamné clairement leur contenu, il les a juste « désavouées » en disant qu’il ne les lisait pas et qu’il ne les écrivait pas.

    Il est dans un dilemme politicien sur ce dossier ;:

    – soit il les condamne clairement et il s’aliène probablement les petits rednecks du sud qui votent pour lui à cause de sa caution white power.
    – soit il garde cette position intermédiaire pas très convaincantes et les médias lui resserviront cet étron encore fumant dans son assiette.

    Ron Paul : gros politicard à l’américaine, drapé derrière une intégrité factice.

    Au fa it qui écrivait ? Si ca se trouve c’était Rockwell… ou Rothbard.

    Ca pue, ca pue, ca pue….

    • Voilà les vrais faits de l’histoire des newsletters :
      http://articles.businessinsider.com/2011-12-20/politics/30537102_1_newsletters-paul-campaign-conspiracy-theories
      Et non Ron Paul n’est pas un politicien sinon il aurai un discours plus concilient dans ses vues de sa politique extérieur pour ne cité que cette exemple (parce que sinon supprimer la FED, remettre l’étalon-or, voté que des budgets à l’équilibre, etc. c’est vraiment se vautrer dans la facilité pour toute élection…).

      Traiter un libertarien de raciste c’est vraiment le comble de l’absurdité, d’une ignorance crasse de ce qu’est le libéralisme et ces principes, cela prouve la faiblesse argumentaire de ces contradicteurs. (On ne peut dénoncé le racisme qu’uniquement par les bases de la pensé libéral…)

  • Ne surtout pas lire les commentaires de l’article sur lemonde.fr, c’est affligeant de bêtise…
    Sinon, super article !

  • Voici un lien pour tous ceux qui souhaitaient savoir de quoi était constituée l’épargne de Ron Paul: http://blogs.wsj.com/totalreturn/2011/12/21/the-ron-paul-portfolio/

  • Ca va mal pour l’image de Ron Paul
    L’affaire des newsletters est longuement traitée en profondeur par le NYtimes, avec un excellent article qui montre bien que c’est probablement ce vieux réac raciste de Rothbard et ce gros clown de Rockwell qui est derrière les écrits racistes signés Ron Paul.

    Le HuffPost s’étonne à juste titre de la mollesse des dénégations de Ron Paul. en 1996, il ne disait pas qu’il ne les avait pas écrites : il disait juste qu’il fallait les replacer dans leur contexte.
    http://www.huffingtonpost.com/2011/12/26/ron-paul-newsletters-swiftness-of-black-men_n_1169990.html

    Mon interprétation : il ne veut pas froisser son électorat raciste, qui croit en lui à cause de ce passé de soutien aux idées ségrégationnistes.

    Ron Paul : politicard comme les autres, à la chasse aux voix, même celles qui puent le brun sombre.

    La honte des libéraux.

  • Les commentaires sont fermés.

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