Primaires : zizanie à gauche

Les partisans de la primaire à gauche veulent-ils vraiment faire gagner la gauche en 2017 ?

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François Hollande Credit Photo Mathieu Delmestre Solfé Communications (Creative Commons)

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Primaires : zizanie à gauche

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 16 janvier 2016
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Par Éric Verhaeghe.

François Hollande Credit Photo Mathieu Delmestre Solfé Communications (Creative Commons)
François Hollande Credit Photo Mathieu Delmestre Solfé Communications (Creative Commons)

On se marre bien à gauche, avec cette histoire de primaires qui semble beaucoup agiter les esprits. Il est vrai qu’avec un attentat par mois, 3,5 millions de chômeurs, une économie déprimée et une crise migratoire majeure, le seul sujet qui peut occuper légitimement les esprits est celui de la désignation du futur candidat pour l’an prochain.

Primaires : Hollande s’accroche à son fauteuil

Bon, d’une certaine façon, on peut les comprendre, ces esprits qui s’excitent pour savoir s’il faut ou non une primaire pour 2017. Hollande ne donne pas dans la dentelle et leur stimule forcément une percée de boutons de derrière les fagots. Il faut dire qu’il parle de sa réélection… depuis son élection. L’envie lui vient de loin. Il y pensait déjà quand il avait annoncé qu’il ne se représenterait pas s’il ne parvenait pas à inverser la courbe du chômage. C’était son âge naïf : il croyait vraiment que l’économie était comme une machine à laver, avec des cycles courts et des cycles longs qui s’enclenchent tout seuls.

Personne ne sait s’il a compris que la désastreuse politique fiscale menée par le désastreux Jean-Marc Ayrault avait tué toute possibilité de relancer la lessiveuse. Toujours est-il qu’il croyait à un cycle court de dépression et un cycle long de croissance, et c’est l’inverse qui se produit : l’économie n’en finit pas d’être déprimée, et personne ne sait quand le programme va passer sur l’indicateur croissance.

Cette petite inversion des cycles ne lui facilite pas la vie et ruine systématiquement tous ces espoirs de rebond en popularité. Même des dizaines de morts dans les rues, des commémorations de tout et de rien, des empilements de discours larmoyants, des promenades sur tous les lieux de guerre et de mémoire, n’y font rien. Les Français ne le prennent pas au sérieux. Du coup, il se crispe, le pépère Hollande, et il est bien tenté de passer en force sur la question de 2017.

Primaires : la ridicule argumentation des frondeurs

Les coups de menton présidentiels ont le don de hérisser tous ceux qu’il a trahis (ce qui fait du monde). On notera en premier lieu Thomas Piketty, qui s’imaginait avant 2012 pouvoir changer le monde par la politique (et par le candidat Hollande, le meilleur ennemi de la finance mondiale), et qui a vu toutes les portes se fermer une à une, pour lui, au Parti socialiste, à mesure que le pouvoir se rapprochait et que ses relations avec Aurélie Filipetti se dégradaient. Mais comment un universitaire pouvait-il imaginer un instant que le Parti socialiste était capable de porter des idées ? Il fallait une sacrée dose de cécité pour y croire – dose qui laisse planer un doute sur le sérieux du bonhomme.

Le même Piketty propose aujourd’hui que François Hollande, s’il veut être réélu, passe par les fourches caudines de la primaire, descende dans l’arène face à Cécile Duflot, à Mélenchon, à on ne sait qui encore. Qu’entre deux attentats, entre deux sommets internationaux, il fasse campagne pour se présenter aux électeurs de gauche, comme s’il n’était pas le chef de l’État. Voilà une belle idée qui renforcera l’image de la France à l’étranger, et qui garantit une grande victoire de la gauche en 2017.

En effet, de deux choses l’une. Soit Hollande est élu à l’issue de la primaire comme le candidat de la gauche, mais il aura suffisamment écorné sa fonction et son rôle, il aura suffisamment pris de coups pour ne pas être un instant crédible en 2017. On l’imagine dans un débat avec Mélenchon et Duflot, s’entendant dire ses quatre vérités, puis faire campagne en 2017 avec le soutien des mêmes Mélenchon et Duflot qui lui auront infligé une volée de bois vert ? Pas besoin de la droite pour arriver affaibli au scrutin : le nombre de voix qu’il aura recueillies à la primaire donnera une bonne indication du score qu’il réalisera aux présidentielles, et sa stature sera définitivement carbonisée.

René le Honzec, primaires à gauche
René le Honzec, primaires à gauche

Mais le pire pour le pays serait évidemment que Hollande ne soit même pas désigné comme le candidat de la gauche pour 2017. On mesure, dans cette hypothèse, le désastre pour la France d’être dirigée par un homme désavoué officiellement par son propre camp. Autant proposer une vacance du pouvoir à partir de septembre 2016, en pleine tourmente terroriste, et autres… On voit mal comment un candidat de gauche, quel qu’il soit, pourrait se relever d’une telle chienlit.

Bref, dans tous les cas, une primaire à gauche ne peut qu’affaiblir un peu plus la gauche tout entière.

La primaire et ses étranges partisans

Dans le lot de ceux qui appellent à l’organisation d’une primaire, on lit des noms stupéfiants. Par exemple, l’un des premiers signataires est Guillaume Duval, rédacteur en chef adjoint d’Alternatives Économiques, qui vient d’être nommé personnalité qualifiée au Conseil Économique, Social et Environnemental au titre de la protection de la nature et de l’environnement. Voilà une belle nomination entre copains qui est immédiatement suivie par un coup de sabot dans les jambes.

Je note aussi le nom de Marie Desplechin, notoirement incapable d’aligner deux idées politiques sensées (mais tout aussi notoirement capable de répéter sans le moindre doute les âneries qui circulent dans les cercles parisiens), ou encore celui de Vikash Dhorasoo, ancien footballeur de l’équipe de France. On se demande pourquoi Nabila ou Loana ne figurent pas sur la liste. Peut-être sont-elles opposées à la primaire et préfèrent-elles une candidature « naturelle » de Hollande l’an prochain.

On voit bien ici que les partisans de la primaire sont plus mus à la fois par un opportunisme et une haine du personnage Hollande que par le souci de faire gagner leur camp en 2017.

La primaire et le Front National

Alors que le pays est battu par les flots, le nombrilisme parisien de ceux qui demandent une primaire en dit long sur l’incapacité de la gauche à se renouveler sociologiquement et à se hisser au niveau des enjeux qui préoccupent les Français. Dans ces conditions, toutes les conditions sont rassemblées pour une défaite impressionnante en 2017 et pour une mise en exergue du Front National.

La seule chance qui reste à la gauche, c’est la droite. Les divisions y semblent aussi considérables qu’à gauche, et ce qui ressemble de plus en plus à un combat des Horace et des Curiace est plus incertain du fait de la médiocrité des combattants que du fait de leur force.

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  • Je ne sais pas si ces primaires sont susceptibles de faire perdre la gauche, mais une chose est certaine il faut virer le roi des nuls avant qu’il ait fini de trucider l’économie du pays.

    L’Attila des temps modernes…

  • La seule sortie honorable pour le PS serait que François Hollande renonce à se représenter or, une telle clairvoyance sur ses errements et ses limites est impossible de la part d’un homme politique français « normal » qui a goûté au pouvoir.
    Ce pouvoir est une addiction, une ivresse, une spirale qui étourdit, isole, et diminue les capacités d’auto-critique.
    La pompe royale qui entoure la fonction présidentielle ne fait que mener au paroxysme la personnalisation outrancière d’une fonction de porte-parole du peuple qui existe à tous les niveaux du pouvoir, maires, députés, sénateurs, préfets et hauts fonctionnaires.
    Le « choc de simplification » toujours attendu devrait toucher prioritairement le train de vie des personnages de l’état, l’exemple des pays scandinaves montre que la simplicité et l’exercice du pouvoir politique ne sont pas incompatibles.
    Désacraliser l’exercice du pouvoir pour en écarter les pies fascinées surtout par les ors de la République, diminuer les avantages de façon drastique, les hôtels et palais mis à disposition, les cérémonies officielles, les cumuls de rémunérations, limiter les mandats, que le roi soit nu…

    Mais les français le souhaitent-ils vraiment ou ne préfèrent-ils pas des dirigeants pas toujours irréprochables qui excusent d’une certaine manière leurs propres faiblesses…

  • Quelques mois avant la primaire qui a désigné Hollande, on ne parlait que des divisions du PS.
    Après la primaire à droite, tout le monde s’alignera derrière le candidat désigné. Espérons que, contrairement à ce qui s’est passé en 2012, ce ne sera pas le plus mauvais, le plus incompétent et le plus retors qui sera désigné…
    Cet article montre bien que les divisions à gauche vont, elles, durer jusqu’à l’élection présidentielle.

  • Contrairement à ce que dit l’auteur, Piketty a bien influencé la politique d’Hollande et le résultat est catastrophique. Il fut écouté par le candidat François Hollande qui, dans son programme (page 17), reprenait à son compte l’intitulé de son livre précédent (« Pour une révolution fiscale »). Lors d’un entretien réalisé par Mediapart le 28 janvier 2011, François Hollande affirmait ainsi « le constat est implacable : on paye d’autant plus d’impôts qu’on a de bas revenus, on a un système antiredistributif ». Mais le diagnostic fait par l’économiste était erroné. http://www.lopinion.fr/13-mai-2014/philippe-aghion-theorie-piketty-est-contestable-ainsi-que-l-analyse-empirique-qu-il Prendre en compte ce qui permet réellement de comparer la pression fiscale entre les catégories des 50 millions de Français majeurs permet d’effectuer un premier correctif sur ses résultats et de montrer que l’on passe de 24 à 40 % d’imposition sur l’échelle des revenus, au lieu de 40 à 33 %. Puis en intégrant les prestations, la courbe passe de 17 à 40 % ! Notre système d’impôt sur le revenu est donc nettement progressif. Confiant dans le diagnostic erroné, le caricaturant même, François Hollande a commencé son mandat en imposant… tous ceux qui payent l’impôt sur le revenu, classes moyennes et supérieures, qui dans son esprit pouvaient supporter sans problème une hausse de prélèvements ! On sait désormais quelles ont été les conséquences dramatiques pour l’économie de cette politique fiscale.

  • Piketty est un idéologue. Un universitaire sérieux ne truque pas ses chiffres comme le fait Piketty. Piketty c’est le mec qui prends les chiffres qui l’arrangent et mets de côté les chiffres qui ne colle pas avec son idéologie, il n’hésite pas à truquer les chiffres. La thèse de Piketty a été contestée dès sa publication par les plus éminents d’entre eux comme l’illustre John Galbraith (un Démocrate, donc insoupçonnable de partialité idéologique) ou Philippe Aghion ( Harvard et collège de France) qui fut son professeur et celui de Macron et conseiller économique de Hollande en 2012. Tous ont identifié les mêmes erreurs de calcul et un manque de rigueur (pour ne pas dire manipulation) dans les données statistiques. d’ailleurs, Piketty a trafiqué les chiffres et volontairement complexifié son argumentation pour que le lecteur s’y perde et conclut comme le signataire de cet article. Le trafic des chiffres a été souligné par la Havard School, quant à la confusion du raisonnement il suffit de lire les premières pages de la démonstration de M. Piketty pour s’en rendre compte.
    Si l’anglais ne vous rebute pas, je vous conseille la lecture de cette « book review » de 43 pages du livre de Thomas Piketty : http://ejpe.org/pdf/7-2-art-4.pdf . c’ est absolument remarquable.

    Piketty cite toujours des périodes qui l’arrange. Par exemple, quand il parle de concentration du capital, il part toujours de 1918, quand tout le capital d’Europe avait été annihilé.

  • Que reste-t-il du « grand amour » que lui portaient ses électeurs et électrices en 2012 qui ont tellement attendu le changement, pensant qu’un Président socialiste allait leur remplir les poches avec l’argent des riches ?
    Dans la quantité beaucoup n’ont peut être pas connu 14 ans avec Mitterrand ? Ou beaucoup ignoraient ce qu’est en réalité le socialisme ?

    « Le socialisme, c’est la philosophie de l’échec, le credo des ignorants, le prêche de l’envie et de la haine, sa mission est de distribuer la misère, de manière égalitaire, pour le peuple » (W. Churchill)

  • Je verrais bien , aux primaires de la gauche , Homer Simpson en candidat ! son QI est représentatif du niveau intellectuel des socialistes !

  • Les commentaires sont fermés.

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