Comment organiser le marché français de l’électricité, au bénéfice des consommateurs dans le cadre de l’Union européenne

Cet article montre comment il est possible d’organiser le marché français de l’électricité dans le cadre européen, afin que les consommateurs aient des factures basées sur les coûts de production des sources bas-carbone, et non indexées sur le coût de production au gaz.

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Comment organiser le marché français de l’électricité, au bénéfice des consommateurs dans le cadre de l’Union européenne

Publié le 23 novembre 2023
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Dans un premier article, nous avons évalué les réponses apportées par le projet de réforme des marchés de l’électricité approuvée par le Conseil européen le 17 octobre dernier, à la flambée des prix du gaz et de l’électricité depuis l’automne 2021.

Cet article montre comment, en s’appuyant sur une solution optimisée du financement des très lourds investissements qu’il faut faire pour maintenir et développer le parc nucléaire centralisé, il est possible d’organiser le marché français de l’électricité dans le cadre européen, avec une concurrence organisée entre producteurs pour les autres moyens de production, et entre fournisseurs sur le marché en aval, afin que les consommateurs français, particuliers et entreprises, retrouvent des factures basées pour l’essentiel sur les coûts de production des sources bas-carbone, et non indexées sur le coût marginal de production au gaz.

Nota : les coûts et les prix sont exprimés en euro 2022 pour les évaluations prospectives, et en euros courants pour les études antérieures citées en référence. 

 

En France, le nucléaire est le socle de la production d’électricité, et a vocation à le rester

Avec une capacité de production annuelle de 380 à 400 TWh (après résolution du défaut générique de corrosion sous contrainte et démarrage de l’EPR de Flamanville), le parc nucléaire d’EDF représente environ 70 % de la production d’électricité française (540 TWh).

Même si cette proportion diminuera progressivement avec la progression des sources d’électricité renouvelables et l’augmentation des besoins en électricité résultant du remplacement de sources d’énergie fossile, la production d’électricité nucléaire du parc centralisé a vocation à rester de façon pérenne au-dessus de 50 %, pour autant que les conditions économiques et industrielles permettant le renouvellement du parc soient mises en place et maintenues dans le temps long.

 

Pourquoi le dispositif existant (ARENH) est-il défaillant, et a-t-il mis EDF en grande difficulté ?

Pour assurer le libre choix du fournisseur, tout en faisant bénéficier l’ensemble des consommateurs de la compétitivité du parc nucléaire français, la loi NOME de 2010 a institué un Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire produite par le parc historique d’EDF (ARENH) aux opérateurs fournissant de l’électricité aux consommateurs finaux du territoire métropolitain français, ainsi qu’aux gestionnaires de réseau pour couvrir leurs pertes.

Ce dispositif, institué jusqu’au 31 décembre 2025, devait procurer un accès ARENH à des conditions économiques équivalentes à celles résultant pour EDF de l’utilisation de ses centrales nucléaires.

À cet effet, le prix devait être réévalué chaque année sur proposition de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), et intégrer :

  • la rémunération des capitaux, prenant en compte la nature de l’activité,
  • les coûts d’exploitation,
  • les coûts d’investissement de maintenance nécessaires à l’extension de la durée d’autorisation d’exploitation.

 

De plus, le gouvernement devait présenter aux termes de la loi, tous les 5 ans, un rapport d’évaluation du dispositif, pouvant notamment proposer, sur la base de la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), de « prendre progressivement en compte dans le prix de l’électricité pour les consommateurs finals les coûts de développement de nouvelles capacités de production d’électricité de base, et de mettre en place un dispositif spécifique permettant de garantir la constitution des moyens financiers appropriés pour engager le renouvellement du parc nucléaire ».

 

La loi NOME n’a pas été appliquée correctement depuis 2012

Le prix de l’ARENH a été fixé à 42 €/MWh en 2012, et n’a jamais fait l’objet d’une réévaluation, malgré le plan d’investissement (« grand carénage ») qui a été engagé pour la sécurisation post Fukushima et la prolongation de la durée d’exploitation des réacteurs au-delà de 40 ans. Ce plan représente de manière pérenne un investissement de 5 milliards d’euros par an, comme l’a indiqué Luc Rémont, PDG d’EDF, lors de son audition au Sénat le 8 novembre dernier.

Le gouvernement français n’a jamais présenté devant le Parlement les évaluations du dispositif prévues par la loi, et il a fallu attendre que la Commission d’enquête parlementaire sur la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France en mars 2023 se saisisse du sujet pour mettre en lumière ces errements.

EDF commercialise annuellement de l’ordre de 270 TWh d’électricité nucléaire sur la base du prix de l’ARENH : 130 TWh directement à ses concurrents et aux gestionnaires de réseau, et 140 TWh via le Tarif Régulé de Vente d’Electricité (TRVE) et les offres de marché. Le prix de l’ARENH avait été évalué par la CRE en 2020 à environ 50 €/MWh, et en juillet 2023 dans un rapport demandé par le gouvernement, le coût du MWh nucléaire pour la période 2026-2030 est évalué à 60,7 € 2022, dont 2,5 € dus à l’intégration de l’EPR de Flamanville dans le parc : on peut donc estimer le vrai prix de l’ARENH actuel aux environs de 58 €/MWh.

S’il est difficile de reconstituer la perte de cash flow globale d’EDF depuis 2012, on notera qu’une sous-évaluation de 10 €/MWh induit une perte annuelle de l’ordre de 2,7 milliards.

Dans son audition, Luc Rémont avait donc raison de déclarer « qu’un système dans lequel EDF doit vendre deux tiers de sa production au-dessous du coût n’a pas d’avenir ».

De plus, pour EDF, vis-à-vis des concurrents, l’ARENH est un dispositif asymétrique : quand les prix du marché sont bas, les concurrents s’approvisionnent sur le marché et laissent EDF commercialiser son électricité nucléaire, mais quand les prix se redressent, comme depuis 2018, ils profitent à plein du dispositif, les demandes ayant atteint 133 TWh en 2019 et 147 TWh en 2020… avant la pandémie covid qui a écroulé la demande en 2020, et conduit les fournisseurs (notamment Total) à dénoncer leur engagement d’enlèvement !

 

Le dispositif de l’ARENH appliqué actuellement, est la source principale de l’affaiblissement continu de la capacité d’investissement d’EDF depuis 2012

Cette situation s’est traduite par un endettement en augmentation année après année, malgré plusieurs recapitalisations.

Du point de vue de la facture des consommateurs, le plafond d’enlèvement de 100 TWh est devenu insuffisant par rapport au volume d’électricité commercialisé par les concurrents d’EDF, ce qui a conduit la CRE à écrêter les demandes des fournisseurs : la proportion d’électricité nucléaire dans le sourcing des fournisseurs sur le marché et dans le TRVE, qui devrait être de 67 % en 2023, est ainsi seulement de 45 %.

Cela signifie que, dans le TRVE et dans les prix repère de l’électricité sur le marché B to B publiés par la CRE, 55 % du prix de fourniture dépend du prix de marché de gros, ce qui contribue à aggraver la flambée des prix de l’électricité et le coût budgétaire du bouclier tarifaire, l’« amortisseur nucléaire » n’étant utilisé qu’aux deux tiers de son potentiel. Avec, il est vrai un prix bradé, mais le bilan resterait positif pour les consommateurs et les finances publiques avec un prix de l’ARENH réévalué assorti d’un déplafonnement.

 

Un dispositif de prix régulé garanti à long terme par l’État est la solution optimale de financement des investissements de maintien et de renouvellement du parc nucléaire

Pour les réacteurs centralisés de type EPR, l’industrie nucléaire est une industrie très capitalistique et de très long terme : le coût de l’électricité produite par un EPR, à calendrier et coûts de construction respectés, dépend principalement du coût moyen pondéré du capital investi (CMPC), en raison des délais de construction avant début de production, et de la durée de vie de l’équipement (60 ans à 80 ans).

Le rapport du gouvernement sur le nouveau nucléaire publié début 2022 évalue ainsi le coût de production pour les EPR2 à 60 €/MWh avec un coût du capital de 4 %, et à 100 €/MWh avec un coût du capital de 7 %.

Cette évaluation du gouvernement est confirmée par l’expérience britannique du financement des EPR construits par EDF Energy : la première paire est financée par un Contrat pour Différence (CFD) d’une durée de 35 ans, avec un prix du MWh garanti par l’Etat UK de 96 £ (environ 115 €), qui reflète un CMPC de l’ordre de 10 %.

Cette valeur du CMPC s’explique par le fait que, si le risque de marché est couvert, le risque projet (dérive des coûts et délais de construction, investissements lourds de maintenance en cours d’exploitation, comme pour réparer le défaut générique de corrosion sous contrainte apparu fin 2021), n’est pas couvert. Dans ce schéma, aucun risque n’est pris en charge par le contribuable ou le consommateur, mais la contrepartie est un prix de l’électricité élevé.

C’est pourquoi pour la deuxième paire d’EPR, le gouvernement britannique négocie un schéma de financement de « Base d’Actifs Régulée » (BAR) qui permet de réduire le coût du capital, donc le coût de l’électricité qui sera produite. Dans ce schéma, le prix de l’électricité défini par le régulateur couvre les charges opérationnelles, ainsi qu’une rémunération de la base d’actifs dès la phase de construction, l’État apporte sa garantie sur la pérennité du dispositif, et les surcoûts par rapport à un coût cible sont reportés sur les consommateurs, jusqu’à un plafond.

En 2019, le site Econpapers indiquait que ce schéma permet d’obtenir des financements attractifs de la part d’investisseurs institutionnels (fonds de pension,…), avec un CMPC de 3,5 % conduisant à un prix de l’électricité pendant la phase de production du MWh de 53 £ (64 €), avec un risque de dérapage relativement maîtrisé : 64 £ (77 €) avec un surcoût de 48 %.

Un dispositif de prix régulé, réactualisé chaque année, permet donc d’obtenir un financement et un coût de production optimisé, le risque projet étant transféré sur la communauté des consommateurs.

En résumé, on peut retenir qu’un financement du parc nucléaire centralisé par un dispositif de prix régulé permettant de couvrir les coûts opérationnels et les coûts d’investissement, aussi bien pour la prolongation de la durée d’exploitation des réacteurs existants (5 milliards d’euros/an), que pour la construction du programme EPR2 (6 à 10 milliards/an selon l’ambition retenue dans la future stratégie énergétique française), permettrait d’obtenir un financement avec un CMPC de 4 à 5 %, et un Prix Régulé de l’Electricité Nucléaire (PREN) de l’ordre de 60 €/MWh à la mise en place en 2026.

Ce prix augmenterait ensuite progressivement, au fur et à mesure des investissements de construction des EPR2, pour atteindre à très long terme (extinction du parc nucléaire historique) le prix objectif du nouveau nucléaire (70 à 90 €/MWh selon les aléas de construction et de maintenance).

C’est un mode de financement comparable à celui des réseaux d’électricité (TURPE), qui permet depuis plus de 15 ans de financer, de façon optimisée et sans endettement, les investissements d’ENEDIS, qui vont atteindre 5 milliards par an en raison de l’accélération des raccordements de production éolien et solaire selon les indications du PDG d’EDF.

La vision d’EDF pour la politique commerciale et le financement du nucléaire est tout à fait différente.

Elle consiste à s’appuyer au maximum sur des instruments de marché de moyen ou long terme : contrats achats directs de long terme avec des industriels, ou des groupements d’industriels tel d’Excelsium, et ruban d’achat à 5 ans mis aux enchères sur le marché moyen terme pour industriels et fournisseurs concurrents. Et le moins possible sur la garantie de l’État via des Contrats pour Différence (CfD), garantissant un prix à long terme, car cela nécessite la négociation d’une aide d’État avec la commission européenne, avec des contreparties à négocier (notamment sur la position commerciale d’EDF, acteur dominant sur le marché français).

Cette vision principalement « marché » d’EDF conduit à des prix plus élevés du nucléaire pour couvrir les risques : par exemple, prix 70 €/MWh pour le nucléaire historique dès 2026, et probablement au-delà de 100 €/MWh à terme pour couvrir le coût de financement des EPR2.

 

Comment commercialiser l’électricité nucléaire produite ?

Solution 1 : utilisation des outils de long terme prévus dans le projet d’accord européen

Dans cette solution, la production nucléaire reste localisée dans l’entité de la tête du groupe Activités Production et Commercialisation France, et EDF cherche en priorité à commercialiser l’électricité, d’origine nucléaire ou non nucléaire, sur le marché « B to B », au moyen de contrats d’achat de long terme (10 à 20 ans), ou de rubans d’électricité de moyen terme attribués sur la base d’enchères, à des industriels, ou à des fournisseurs concurrents souhaitent se sourcer en partie par ce moyen.

Seul le solde de l’électricité nucléaire produite restant disponible serait commercialisé sur le marché de gros dans le cadre d’un contrat CFD, à un prix cible garanti par l’État, qui correspondrait au prix régulé PREN calculé chaque année par la CRE en fonction de l’évolution des coûts et du montant des investissements : il s’agit donc d’un prix évolutif dans le temps, dont il faudrait faire accepter le principe et le mode de calcul par la Commission européenne (pour prouver l’adéquation aux coûts et l’inexistence d’une aide d’Etat aux entreprises françaises).

Cette solution présente l’avantage de la manoeuvrabilité pour EDF pour optimiser ses marges, mais présente plusieurs inconvénients :

  • la visibilité du prix du nucléaire à long terme n’est que partielle, donc le coût du financement et le coût de production ne seront pas optimum.
  • les fournisseurs d’électricité concurrents d’EDF ne pourront avoir accès à l’électricité nucléaire qu’indirectement sur le marché de gros à un prix qui restera influencé par le prix marginal de production au gaz, soit directement auprès d’EDF par des contrats hors marché. 
  • s’agissant du TRVE, le coût de fourniture devrait dépendre à 100 % d’une acquisition d’électricité sur le marché de gros (voir consultation de la CRE sur le TRVE 2026 en cours)
  • de façon pérenne, l’État devra gérer un système de redistribution des sommes remboursées par EDF au titre du contrat CFD (on peut penser que le prix de marché spot sera en moyenne bien supérieur au PREN) vers les clients, probablement de manière indirecte via les fournisseurs sur le modèle du bouclier tarifaire et du dispositif amortisseur de crise.

 

De plus, dans cette organisation, EDF est à la fois un acteur dominant par sa taille sur le marché aval, détenu à 100 % par l’État, et le seul pouvant disposer à sa guise de l’électricité nucléaire du parc centralisé, avec un prix partiellement garanti par l’État : cela posera un problème vis-à-vis de l’Autorité de la Concurrence, et de la Commission européenne, qui pose la question de la faisabilité de cette solution.

C’est pourtant cette solution qui a fait l’objet de l’accord annoncé par EDF et l’Etat.

Solution 2 : attribution directe de volumes d’électricité nucléaire régulée et adaptation de l’organisation du groupe EDF

Cette solution consiste à considérer la production d’électricité nucléaire centralisée comme une commodité publique essentielle pour l’économie française, et à sortir du marché les volumes d’électricité de base nucléaire nécessaires pour satisfaire les besoins en électricité des consommateurs, au prorata du volume de production disponible, par rapport à la consommation totale.

Elle a le mérite de la simplicité pour injecter directement dans la facture des clients environ 65 % (un peu moins à terme) d’électricité nucléaire à un prix PREN optimisé dans le très long terme, avec une grande visibilité, tout en sécurisant le financement des investissements très lourds et indispensables, en priorité par l’auto-financement de l’opérateur.

C’est une solution analogue à celle proposé par la Commission Champsaur en 2009, à la source de la loi NOME en vigueur, mais avec des aménagements significatifs issus du retour d’expérience douloureux décrit plus haut :

  • l’État s’engage auprès de l’opérateur sur un prix régulé (PREN) garantissant année après année son équilibre économique, comme c’est le cas pour les réseaux d’électricité (TURPE).
  • les volumes d’électricité sont sollicités annuellement auprès de la CRE par les fournisseurs sur la base de leur portefeuille clientèle, comme actuellement, mais avec un engagement ferme d’achat (contrat take or pay), l’électricité nucléaire acquise ne pouvant être par ailleurs commercialisée sur le marché de gros.
  • en cas de manipulation par un fournisseur, s’il apparait qu’au cours de l’année « n » il a disposé d’un volume trop important d’électricité nucléaire par rapport aux quantités vendues, les volumes attribués l’année « n+1 » seront revus en baisse en conséquence (% d’attribution plus faible que le % théorique). 

 

Ne seront commercialisés sur le marché de gros que les quantités  d’électricité nucléaire produite en excédent et non distribuées dans le cadre de la régulation.

Afin de rendre cette solution acceptable dans le cadre des traités européens, et des règles de concurrence, il apparait nécessaire d’identifier clairement, et de façon opposable aux tiers, l’activité de production nucléaire centralisée en France (parc historique et renouvellement), par rapport aux autres activités de production et de commercialisation d’électricité du groupe EDF : cela conduit à proposer de filialiser cette activité d’opérateur au sein d’une filiale régulée à gestion indépendante, sur le modèle d’ENEDIS pour les réseaux de distribution.

EDF fournisseur sollicitera donc auprès de la CRE, au même titre que ses concurrents, un volume d’électricité nucléaire de base pour se sourcer.

Pour pouvoir appliquer cette solution, il faudra que l’État français négocie pour l’inclure comme possibilité dans l’accord européen sur les marchés de l’électricité, au titre de sa souveraineté. La priorité de la fourniture nucléaire sur le marché français se justifie par le fait que ce sont les consommateurs français qui prennent en charge le risque industriel.

Cette solution présente un avantage, car elle libère complètement la liberté d’action d’EDF sur le marché pour la valorisation de ses autres moyens de production, dans un cadre concurrentiel : thermique, éolien, solaire, hydraulique, et dans le futur les petits réacteurs nucléaires modulaires (SMR). Dans ce cadre, les outils de long terme prévus dans le projet d’accord européen seront bien entendu utilisables pour les productions décarbonées.

EDF conservera bien entendu ses obligations de service public spécifiques : fournisseur de dernier recours, obligation d’achat ENR, fourniture au TRVE sur le marché de détail (tant qu’il est jugé pertinent de la maintenir).

 

La structuration du marché français de l’électricité dans la solution proposée

Cette dernière peut se schématiser de la façon suivante :

% Sources production Coût de production

(€2022/MWh)

Mode de commercialisation (a)
10 % Gaz – fioul – charbon > 90 (b) Marché de gros spot (c)
25 % Sources Renouvelables ou bas carbone :

Eolien terrestre

Eolien offshore  

Solaire toiture bâtiments (P < 500 kWc)

Solaire grands parcs au sol 

Hydraulique au fil de l’eau

Hydraulique de barrage et Stations de Pompage (STEP)

Bioénergies

SMR (dans le futur)

60 – 95 

45 – 150 (e)

70 – 160

50 – 80

40

80

110

?

Obligation Achat (OA) (d)Contrat Achat Long Terme (PPA)

CFD

CFD

Autoconsommation et injection surplus en OA

PPA et CFD

 Marché de gros (éligible CFD)

Marché de gros spot (c)

OA ou CFD

PPA, « Energy as a Service » (f) 

CFD 

65 % Nucléaire parc centralisé : parc historique, EPR, futurs réacteurs 4ème génération neutrons rapides. 60,  en progression dans le temps vers 70-90  Prix Régulé (PREN) en attribution directe et complément CFD sur marché de gros

 

  1. Le fournisseur qui est aussi producteur peut utiliser sa production pour sourcer ses offres sur le marché B to B ou B to C
  2. Avec un prix du gaz de 30 €/MWh et un prix de carbone de 50 €/tonne eq CO2
  3. Ce sont les sources marginales pilotables appelées pour assurer la sécurité d’alimentation en temps réel
  4. En extinction (contrats antérieurs à 2016)
  5. Hors raccordement (20 €/MWh pris en charge dans le cadre du TURPE). Les 6 premiers parcs (3 GW) sont à un prix d’environ 150 €/MWh
  6. Le modèle économique de la société Naarea, qui développe un SMR à neutrons rapides de 40 MW prévoit de conserver la propriété et l’exploitation centralisée du parc, en vendant l’électricité et la chaleur produite au client.

 

La concurrence s’exerce librement sur le volume de 35 % hors production nucléaire, les fournisseurs utilisant pour se sourcer le parc de production dans lequel ils ont investi, et en complément l’acquisition sur les marchés de gros à terme et/ou spot, ou des contrats PPA conclus avec des producteurs : c’est une incitation à investir dans des moyens de production, les fournisseurs purs traders auront des difficultés pour rester compétitifs.

 

Faut-il conserver le Tarif Régulé de Vente d’Électricité pour les particuliers et les TPE ?

Ce tarif est toléré à titre transitoire dans le projet d’accord européen (article 53), bien que dans son principe, il s’agit d’une distorsion des règles de marché.

En période de crise, quand les prix de l’électricité augmentent significativement (marché de gros et de détail) avec un large impact négatif sur l’économie, la Commission peut ouvrir la possibilité d’étendre le prix régulé temporairement aux PME : les prix peuvent être fixés temporairement en-dessous des coûts, à condition de ne pas créer de distorsion de concurrence et que le niveau de prix n’incite pas à accroitre la consommation. Les fournisseurs sont indemnisés (bouclier tarifaire.)

Même avec 65 % de prix régulé nucléaire, le calcul du TRVE restera inflationniste, car le volume de 35% évalué au prix de marché selon le mode de calcul de la CRE (principe de « contestabilité » permettant à un fournisseur «  pur trader » de faire une offre compétitive par rapport au TRVE) le sera à un prix qui sera probablement durablement supérieur au coût moyen des sources de production en France.

La question du maintien du TRVE se pose, mais elle est politiquement sensible : il pourrait donc être maintenu, et utilisé comme tarif de dernier recours par EDF en cas de défaillance d’un fournisseur.

Mais la compétition sur le marché de détail devrait a priori se faire à des niveaux sensiblement inférieurs au tarif (le niveau actuel du TRVE intègre un coût de fourniture moyen de 110 €/MWh, après l’augmentation de 10 % au 1er août 2023.

 

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  • « au bénéfice des consommateurs.. »

  • Si je comprends bien l’article, le prix du nucléaire de nouvelle génération est…plus cher que l’ancien? N’y a-t-il pas un problème de logique? Ou alors cest peut-être dû aux nouvelles normes.

    De nombreuses questions me viennent à l’esprit:
    – peut-on sortir des traités européens?
    – comment arrêter la gabegie des énergies renouvelables?
    – peut-on imaginer un système entièrement basé sur le nucléaire et l’hydraulique (notamment les STEP)?
    – Il me semble que l’ancien système basé uniquement sur EDF, en tant qu’entité centrale de production, de transport et de vente ne fonctionnait pas trop mal. Serait-il possible d’y revenir et comment faire cela?

    • Oui on peut sortir des « traités européens » … à preuve le RU, avec en conséquence un meilleur fonctionnement de son économmie !
      Le reste c’est du bla bla de politicard autocentré sur ses propres intérêts.

  • Quand le problème est mal posé, les tentatives de résolution ne mèneront à rien. Il faudrait viser à produire de l’électricité abondante et bon marché, sans a priori moraux ou idéologiques. Ca demande des investissements, mais c’est le cas de toute industrie, et pour que ça marche, il faut que ça s’exerce dans un libre marché, point.

    • Comment peut on demander une énergie bon marché avec la nécessité d investissements colossaux en EPR soit plus de 10 milliards pièce avec une prévision de 6 à 10 qu il faut corréler avec l entretien coûteux du parc actuel vieillissant
      Les investisseurs ne viendront que si l état ne s engagepas sur un prix du MWH rémunérateur comme le gouvernement anglais l a bien compris
      Il s est engagé sur 100 euros du MWH pendant 35 ans sur Hinkley point
      Soyons sérieux……

      -1
      • Il a fallu des investissements colossaux pour avoir internet, des smartphones et des tablettes à prix raisonnable. Ca n’est pas le montant qui fera fuir les investisseurs si l’Etat leur garantit qu’il ne leur plombera pas la rentabilité par des difficultés à la construction du genre normes qui changent tous les vendredis ou soutien discret aux mouvements écolos, ni par des taxes, des tarifs et des règles de marché stupldes pendant la durée d’exploitation. Ceci vaut que l’opérateur soit public ou privé.
        Bien sûr, il faudrait que l’Etat soit crédible sur ces points, mais c’est bien plus facile que sur un prix pendant 35 ans.

  • A partir d’un kWh de 7 centimes, nous devrions au minimum le payer en tant que consommateur 27 centimes l’année prochaine: chercher l’erreur?

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