Punaises de lit : le nouveau reflet de l’addiction française à l’État

La psychose des punaises a révélé un autre parasite : notre addiction à l’intervention étatique et l’extension ininterrompue du cadre de ce qui relève de l’action publique.

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Photo de JShim sur unsplash

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Punaises de lit : le nouveau reflet de l’addiction française à l’État

Publié le 5 octobre 2023
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Une nouvelle psychose collective s’est emparée des Français. Le réchauffement climatique ? Un nouveau variant de la covid ? La menace d’un conflit nucléaire ? Non ! Les punaises de lit !

Cela pourrait prêter à sourire si la séquence politique et médiatique que nous traversons ne mettait pas en lumière ce que la culture politique française fait de pire : l’addiction à l’État et le délitement de la responsabilité individuelle.

Certes, ces insectes ont un pouvoir de nuisance non négligeable. Mais était-il nécessaire de faire de l’invasion des punaises de lit un sujet d’ampleur nationale ?

 

Un « service public de la désinsectisation » ?

En effet, depuis le début de la semaine, chaque camp politique s’est approprié le sujet.

Chez Renaissance, on annonçait ce mardi 3 octobre 2023 un texte transpartisan prévu pour décembre, appelant à tous les groupes de « l’arc républicain » de se joindre à eux. Car c’est bien connu, c’est à la République que s’attaquent ces petites créatures hématophiles !

Du côté de La France Insoumise, la réponse apportée par la majorité est insuffisante et Mathilde Panot, qui a senti que le sujet était propice au (bad) buzz, ne manque pas une occasion de se faire remarquer. Quand elle ne se rend pas à l’Assemblée nationale avec une fiole remplie de punaises de lit mortes, elle propose, sans ironie aucune, un « service public de la désinsectisation », évidemment « gratuit » et destiné à tous les Français qui pourraient s’en « saisir immédiatement ». « Oui, la puissance publique a quelque chose à faire sur cette question » a affirmé celle qui s’est manifestement transformée en quelques jours en spécialiste de la désinsectisation, dissertant sur les bonnes et mauvaises techniques pour combattre les punaises de lit, afin de convaincre son auditoire que l’État est évidemment mieux placé que les entreprises privées pour lutter contre ce fléau.

On pourrait se contenter de désespérer de l’atonie du débat public français, tant cette séquence politique donne une image pathétique de notre vie parlementaire.

 

Les Français et le réflexe étatique

Malheureusement, elle dit aussi beaucoup du réflexe étatique qui caractérise notre culture politique et dont tout le monde est, à différentes échelles, complice.

Que ce soit les politiques, les journalistes, les intellectuels, les artistes, ou simplement les citoyens, tous semblent avoir intégré l’idée selon laquelle chaque problème appelle une réponse de l’État. C’est ce que montre un sondage réalisé par YouGov pour Le HuffPost, dans lequel 55 % des sondés estiment que le gouvernement devrait lancer un plan national contre les punaises de lit.

En résulte une extension ininterrompue du cadre de ce qui relève de l’action publique. On pourrait ironiquement prédire l’annonce prochaine d’un « grand plan anti-punaises de lit », d’une « grande consultation citoyenne pour combattre les punaises de lit », d’un « ISF anti-punaises de lit » afin de financer des « chèques punaises de lit », mais on l’a vu avec les annonces de madame Panot, la réalité a déjà dépassé la fiction. Cela appelle donc une réponse sérieuse et argumentée.

Pour beaucoup, l’extension du domaine d’intervention de l’État est, intuitivement, une bonne chose. Il va prendre la responsabilité de résoudre les problèmes que les citoyens n’arrivent pas à résoudre eux-mêmes. N’est-il pas rassurant de se dire que si demain mon habitation est infestée de punaises de lit, je n’aurais pas à payer une entreprise de désinsectisation car l’État s’occupera de tout ?

C’est cette promesse qui est une illusion. D’abord, parce que contrairement à ce qu’affirme madame Panot, la gratuité de l’action publique est un mythe. Tout ce que l’État donne au citoyen, le citoyen le paye à un moment ou à un autre. Mais surtout, l’extension du domaine d’intervention de l’État réduit drastiquement son efficacité, alors même qu’elle augmente la pression fiscale.

C’est presque devenu un lieu commun de parler de « l’hôpital en crise », de « l’école en crise », de « la justice en crise », de la « police en crise »…

On touche ici aux limites de l’État providence qui, au-delà d’un certain niveau d’engagement, ne parvient plus à remplir correctement les fonctions dans lesquelles il est pourtant le plus légitime. En filigrane, se pose aussi la question du délitement de la responsabilité individuelle que cause nécessairement l’État-providence. Peut-on raisonnablement « vivre-ensemble » si « tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde » ? (Frédéric Bastiat, Harmonies économiques, 1850)

Ne serait-il pas temps de prendre du recul et d’évaluer les domaines pour lesquels l’intervention étatique est légitime, et ceux où elle entrave l’efficacité et la responsabilité individuelle ?

Et de ne jamais oublier qu’à chaque fois que l’État décharge un individu de ses responsabilités, c’est autant de libertés qu’il lui confisque.

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Créer un compte Tous les commentaires (19)
  • La NUPES se fait écho de l’ensemble des partis politiques. Tous sont contents de détourner les Français des vrais problèmes de la France comme son déficit abyssal. Sinon, il eut été facile de dire que les cafards sont aussi un problème, mais qu’il est traité sans l’aide de l’État. Et je suis consterné par le silence des écologistes. En effet, quand on protège les sur-mulots porteurs de toutes les maladies imaginables, ne doit on pas protéger aussi au nom de l’écologie ces innocentes punaises dont l’éradication se fait par des produits chimiques polluants ? Bonne mère, si même les écolos veulent éradiquer les insectes, quel monde allons nous laisser à nos enfants…

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    • Qu’en pense Aymeric Caron, depuis son logement Versaillais, celui qui voulait que l’on protège les moustiques qui ne font que leur travail de moustique, à savoir une mère qui nourrit ses enfants?

  • Vous incluez les citoyens dans la longue liste de ceux qui sont responsables de cette addiction à l’état.
    Je ne crois pas que ce soit le cas. Le sujet des punaises de lit est la parfaite démonstration de la paresse et de l’incompétence de nos politiques et de nos médias. Leur seule préoccupation est de causer dans le poste.
    La plupart des Français en ont ras le bol de l’intervention de l’état, qui prétend s’occuper de tout mais qui est incapable de faire tourner son administration.
    Que madame Borne convoque une réunion interministérielle pour parler punaises est consternant.
    Que les députés LFI soient ridicules est on ne peut plus normal.
    Mais la palme revient, sans conteste, à monsieur Véran qui affirme, avec sa modestie habituelle, qu’il est évident que la prolifération des punaises de lit est liée au réchauffement climatique.
    J’espérais, sans trop y croire, qu’un quelconque spécialiste nous sortirait une ânerie de ce genre. C’est Véran qui s’y est collé en dégainant plus vite que les gars du GIEC.
    J’ai honte que le gouvernement de mon pays se soit choisi ce personnage comme porte parole. C’est un manque de respect évident à l’égard des Français qui font encore l’effort d’aller voter.

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    • les français se prennent dans la figure les effets d’accpeter de croire en des absurdités…
      le libéral défend la liberté individuelle
      le français défend SA liberté..

    • Non les Français n’en ont pas ras le bol de l’intervention de l’état, lorsqu’ils se plaignent c’est pour en changer le contenu, pas pour la supprimer

  • «Que ce soit les politiques, les journalistes, les intellectuels, les artistes, ou simplement les citoyens, tous semblent avoir intégré l’idée selon laquelle chaque problème appelle une réponse de l’État.»
    Une réponse de l’exécutif, l’Etat n’étant que le bras armé de ce dernier. Pas vraiment étonnant lorsque Marcron au sujet de la révision (ha ha) de la Constitution dénonce sur un ton gaullien l’impuissance de la IVe et les querelles de parti, et donc la nécessité de la Ve et son exécutif fort, en la personne du Président, pour pouvoir agir.
    Punaise ! les Men in Tie régulent vraiment tout pour préserver notre vie des tracas !

  • En lisant le titre, j’ai cru que Monsieur Gauthey était en pleine confusion, qu’il se croyait le 1er avril et qu’il avait sorti une blague… euh… piquante…! Que nenni ! que nenni ! Son texte colle tellement à l’actualité qu’il me laisse sans voix. C’est tellement énorme que je n’ai en fait aucun commentaire à écrire…

  • Oui, c’est d’un ridicule achevé et c’est désespérant ! A croire que ceux qui gouvernent et informent les citoyens ont complètement perdu le sens des réalités et de ce qui est important ou pas.

    • Je suis pas d’accord avec vous car ce qui est du niveau des gouvernants c’est justement une invasion de punaises. Heureusement qu’elles se sont décidées à attaquer sinon il aurait fallu faire un embargo sur quelque chose ou un confinement. Mince Édouard Philippe n’est plus premier ministre…

  • « Tout ce que l’État donne au citoyen, le citoyen le paye à un moment ou à un autre. »
    Surtout que le citoyen qui paie (beaucoup) est rarement celui qui reçoit ( un peu) et qui s’imagine que c’est « gratuit »)!

    • Ça me rappelle ce mot d’un grand économiste, François Hollande, « ça coûte rien, c’est l’état qui paye ».

  • Ah, j’ai hâte que l’état se préoccupe de mes corps au pieds…. et prévoit une distribution de chaussures sans condition de revenus… hi hi ça devient grotesque ! à moins que ce soit pour camoufler un manque de compétence…..

  • Deux remarques.
    1. Pourquoi l’arc républicain ? Parce que c’est une affaire de chochottes. Il en faut plus pour terrasser la peste brune ou le péril rouge. Bien sûr.
    2. Comment les combattre ? On peut choisir le Leviathan. Mais plus sûrement une bombe à 15 € dans toutes les bonnes pharmacies en viendra à bout sans difficulté.

  • 1) Oui quelle médiocrité des politiciens français sur cet exemple
    Voir sur ce sujet l’excellent édito récent de Remi Godeau, le non moins excellent rédacteur en chef de l’Opinion, décrivant parfaitement la dérision et le pathétique de la prise compte du sujet:
    https://www.lopinion.fr/politique/punaises-de-lit-mediocrite-de-la-politique-francaise
    2)encore mieux: avez vous appris que l’ineffable Jean-Pierre Jouyet, parangon de la bureaucratie d’Etat et grand faiseur de tous les chapeaux à plumes de la caste d’Etat qui nous gouverne et nous ruine, s’est mis à publier aux éditions Albin Michel un livre intitulé «  Est ce bien nécessaire monsieur le ministre? » dans lequel il admet avoir ignoré le rôle néfaste de la bureaucratie pendant toute sa carrière ? Et prône la réforme d’e l’Etat vers moins de bureaucratie avec la ferveur du nouveau converti……..!!!!! On croit rêver !!!! La révolution serait elle en marche de l’intérieur ? Encore un peu de patience !!!!! La bête étatique à idéologie socialo-communiste va s’auto vider d’elle même….! Ben voyons. Gageons qu’elle va encore résister un moment….. la question est quand va t elle s’effondrer? .Mrs Tatcher disait : « le socialisme s’effondrera quand les autres n’auront plus d’argent ! »
    Ça vient…..
    Alors bientôt un pays gouverné par la liberté et la responsabilité…..! ????

  • Le traitement contre les punaises est la terre diatomée.
    Voilà c’est fait et bon WE

  • Pour une majorité de citoyens, la soumission volontaire à un paternalisme de bon aloi est de loin plus désirable qu’une liberté nécessitant réflexion pour faire de bon choix, surtout que l’on peut rejeter sur d’autres la responsabilité de mauvais choix s’exonérant de tout sentiment de culpabilité. Et cela rencontre l’égo des élus qui adorent se présenter en homme ou femme providentiels, tout en rejetant toute responsabilité sur le thème « on n’a pas voulu me suivre assez loin »

  • et il ne fait rien pour ce pU..tain de moustique ..

  • Même si on en croit le sondage dont toutes les questions sont débiles et orientées, il y a quand-même 25% des sondés qui répondent non et 20% qui s’en foutent. Ce ne sont pas tous les citoyens qui sont adicts à l’État mais une petite majorité, ce qui est plutôt encourageant étant donné le matraquage idéologique permanent dont nous sommes victimes.

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