Vente à perte du carburant : emportée par le vent…

Les distributeurs de carburant ont refusé l’idée géniale du gouvernement.

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Vente à perte du carburant : emportée par le vent…

Publié le 24 septembre 2023
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Un article de la Nouvelle Lettre

Notre rédaction avait imprudemment dit tout le bien que nous pensions de l’idée de madame Borne détaillée concrètement par Bruno Le Maire lundi matin.

Nous avions sous-estimé l’appât du gain de ces grandes compagnies dont les superprofits sont considérables, et qui ne veulent pas être solidaires dans les périodes difficiles que vivent les Français les plus démunis.

En effet, voilà que ce matin le gouvernement vient d’annoncer qu’il devait renoncer à l’idée d’oublier la loi sur la vente à perte, qui devait permettre de maintenir le prix du carburant en dessous de deux euros le litre, voire même de le faire baisser de plusieurs dizaines de centimes.

Ce qui est surprenant est à mes yeux la réaction des diverses parties concernées.

J’ai entendu en particulier ce matin sur LCI l’interview de Mr Guillaume Kasbarian, président de la Commission Économie à l’Assemblée nationale, député d’Eure-et-Loir, du parti Renaissance. Ce qui le scandalisait, c’est que les industriels du carburant et les dirigeants de certaines grandes surfaces aient refusé la levée de l’interdiction de vente à perte prévue par la loi.

Il a employé deux arguments :

  1. Ces personnes avaient demandé la suspension de la loi, et auraient dû se féliciter de l’initiative du gouvernement
  2. La majorité d’une Assemblée nationale élue démocratiquement ne peut qu’approuver l’initiative du gouvernement issue du même vote

 

Ces deux arguments sont inadmissibles, et même scandaleux. Le plus grave est qu’un président de Commission ne se soucie pas de la séparation des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif. Quand donc, dans une démocratie libre, le Parlement est-il aux ordres du gouvernement ?

Je sais que le texte et la pratique de la Constitution de la Cinquième République ont fabriqué des dizaines de générations de députés godillots, et la réforme chiraquienne a aggravé le phénomène (mais elle n’a pas suffi en 2022). Mais je crois que le macronisme fait fi, et de la Constitution et de la démocratie, puisque les Conseils Nationaux de la Refondation ont vocation à proposer des textes de lois à… l’exécutif. C’est la fameuse « démocratie délibérative ».

Quant à l’allusion à une demande des industriels du carburant de solliciter une infraction à la loi, c’est la parole du député contre celle du président de Total, d’Édouard Leclerc et des dirigeants de Carrefour et Intermarché, au minimum.

Voyons en effet ce qui se disent de l’autre côté les fabricants et distributeurs de carburants. Par le truchement de Robert Gantois président de l’Union des Industries Pétrolières (UIP), ils ont marqué leur hostilité à la mesure, au moins pour trois raisons :

Ils ont le souci d’un commerce équitable

Ils ne veulent pas faire disparaître le réseau des petites stations-service qui couvrent la France rurale en particulier. Leur représentant Francis Pousse avait d’ailleurs prédit la ruine totale pour ces commerçants, malgré les compensations que le gouvernement auraient pu leur offrir (l’État vous ruine, puis fait un chèque).

Ils nient avoir des marges importantes

Elles ne sont pas supérieures à deux ou trois centimes par litre.

Ils dénoncent la démagogie

Il s’agit de celle qui consiste à présenter les grandes compagnies et leurs actionnaires accumulant des superprofits et ne payant pas d’impôt. Des exercices bénéficiaires alternent avec d’autres déficitaires, cela dépend en partie de la valeur du dollar et de la position de l’OPEP. Quant aux actionnaires, ils ont engagé leur épargne dans des équipements qui contribuent à la croissance globale, y compris sur le territoire français.

 

J’ajouterai deux arguments allant dans le même sens.

Le premier est que ceux qui font des surprofits avec le carburant sont les gens de Bercy, puisque sur deux euros payés à la pompe, l’État perçoit plus d’un euro trente. C’est, je le rappelle, ce que nous appelons « l’impôt d’inflation » : toute hausse des prix augmente les recettes fiscales, puisqu’elles varient à coup sûr proportionnellement.

Le deuxième est que le gouvernement qui en appelle aux « responsabilités » (couplet repris par François Bayrou encore ce matin) est lui-même irresponsable, puisque c’est son incurie qui explique non seulement la hausse des carburants, mais aussi celle de toutes les formes d’énergie, à travers les accords européens, et dans le cadre de la fumeuse « transition énergétique ».

 

L’État français a accumulé les dettes, il peut déjà difficilement en assurer le service (45 milliards cette année). Il sera sans doute déclassé, et un jour il demandera l’aumône aux contribuables européens, car les contribuables français n’auront plus un sou en poche.

Nos gouvernants devraient raison garder. Leurs discours ne sont que vains mensonges. Et on a dépassé les deux euros à la pompe de l’Élysée, de Matignon et de Bercy.

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    • Pour nos députés, il suffit de distribuer l’argent des autres. Alors, pourquoi les entreprises ne distrubueraient elles pas l’argent qu’elles ne gagnent pas ?
      Ce raisonnement est en ligne direct avec un raisonnement du fonctionnaire : l’État a plein d’argent (il suffit de prendre aux riches patrons) et n’augmente pas les effectifs des fonctionnaires ni leurs salaires. Ah ces entreprises privées, elles devraient prendre exemple sur l’État et sa rigoureuse gestion des finances.

  • En France, nous avons la « chance » d’avoir des députés non seulement godillots mais d’une ignorance crasse des aspects économiques ! Ce n’est que le résultat d’une éducation qui n’a jamais voulu comprendre l’importance de l’économie et pour cause, tout le ministère est composé de gauchistes voire d’extrême-gauchistes !
    La note sera salée dans quelques années et la France sera encore plus déclassée !

  • Si les députés godillots gèrent leurs finances privées comme ils gèrent celles du pays, ils devraient déjà tous être en commission de surendettement, en faillite, voire en prison!
    Ils sont sans doute sauvés par le « deux poids deux mesures du en même temps » cher à Macron.

  • « Le premier est que ceux qui font des surprofits avec le carburant sont les gens de Bercy »
    Bercy, le premier casino de France, il gagne à tous les coups! Les français soumis à ses règles ( à l’insu de leur plein gré) n’ont aucune martingale pour espérer gagner un jour!

  • Je trouve que c’est une « riche » idée qui va résoudre le pouvoir d’achat qui s’effondre
    Par exemple on va demander aux bailleurs d’appartements de louer leurs biens à perte
    ou les boulangers, ou les garagistes , de vendre à perte, puis les transports en commun gratuits
    Mais alors pourquoi pas les autoroutes ? et la collecte des ordures ménagères ? ou les salaires des députés et des ministres ? et les salaires cachés des fonctionnaires de Bercy ? Il suffit de dérouler le pelote de tout le gras accumulé et on va y arriver

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  • Comme pour les 78% d’élèves de sixième qui ne savent pas placer 1/2 sur une ligne graduée, la question est « Mais vous pouvez m’expliquer comment et pour quoi en fait come sa s’il vous plaît »
    Et la réponse du prof : « J’en sais pas plus que toi, surtout que ça sert à rien pour devenir ministre non plus ! « 

  • l’interdiction de vente à perte tient donc toujours..quelle en est sa justification? le dumping?

    • quand on est libéral ce me semble on pose des question sur la justification de quelque interdiction dan le domaine de la liberté économique;..

      • le souhait ne peut pas être l’autorisation…
        qui n’en était pas une véritable mais une exigence necessaire pour pouvoir appliquer un souhait du gouvernement de baisser le prix du carburant..
        ne pas oublier , a priori le point de vue libéral c’est  » bas les pattes »..

        sauf en matière l’ectricté où « il faut des prix bas »..san veritable marché et donc sans véritable prix..

  • La plupart des députés Renaissance se satisfont pleinement de leur statut de godillot.
    Ils n’ont qu’à répéter à l’envi les éléments de langage qu’on leur fait passer, ça leur évite de travailler et même de réfléchir.
    Mais les députés de l’opposition ne semblent pas vraiment dérangés par leur inutilité puisqu’ils ne font rien pour mettre fin à ce cirque. Il suffirait d’une motion de censure, ça aurait de la gueule d’accepter de perdre son mandat.

    • Le statut de godillot est très en vogue actuellement ! Rappelons-nous cependant que ces godillots ont été élus !!! En d’autres termes, une partie des français se satisfont pleinement d’avoir des députés godillots.
      Ce qui me fait dire que la France est très mal barrée et ceux qui ne votent pas pour des godillots le sont aussi !!!
      Je suis actuellement en Andalousie et je viens de constater que la communauté française qui vit à Marbella s’est accrue de 1000 unités en un an! Pourtant, pour faire court, l’Espagne n’est pas le Pérou mais beaucoup de nos concitoyens préfèrent y vivre.

  • Bonjour,
    Pourtant, grâce à l’inflation nous n’avons pas de choix pour nos économies (en €) que les placements à perte .

    • non….il faut investir..

    • Non non, il y a des placements gagnants. Par exemple, investissez dans le MSCI world index, ça rapporte sur le long terme un doublement tous les 12 ans à peu près (inflation déduite). L’Etat verra même ça d’un très bon oeil, il vous piquera 30% de la plus-value à la sortie…

      • On peut même tenter d’acheter des compagnies pétrolières étrangères, c’est ce que j’ai fait et cela rapporte des gros dividendes actuellement taxés à 30 % quand même vu l’énorme participation de l’Etat glouton à mon épargne qui a déjà subie (taxe sur le revenu et prélèvement sociaux et impôt de plus value)

  • Je m’interroge au cas où:
    1) Si la baisse des carburants avait été réalisable, qu’elle aurait été la position du gouvernement devant le réajustement normal des prix mais quand même un peu brutal après 6 mois (à prix du baril de brent constant)?
    2/ Si le prix du brut passe de 90 $ le baril à 130 $ par exemple, « en même temps » (clin d’œil) même question
    Est-ce que Mme Borne et M Le Maire se posent ce type de question plutôt que de traiter de l’instant politique ?
    Gouverner c’est prévoir…

    • Parti comme c’est, on va passer l’hiver avec effectivement le baril monté à 130$ par l’OPEP+, et retombant à 65 au printemps par une petite manipulation amicale des BRICS pour fêter le lâchage de l’Ukraine par les USA en campagne électorale. Mais Mme Borne ne se pose pas la question, si ça tourne au vinaigre, elle est née début 61, donc fait partie des dernières à pouvoir partir en retraite à 62 ans…

      • Quant à BLM, il est de notoriété publique qu’il a travaillé en étant handicapé (par son intelligence), donc il peut bénéficier d’un départ anticipé.

      • Madame Borne se moque totalement de l’âge de la retraite , dans un coin de sa cervelle, ellle se dit ,qu ‘elle aussi, a le profil pour se présenter à la Présidentielle et. river son clou à. Darmanin , Philippe et les autres , sinon , pas de souci ;la Republique est pleine de planques douillettes et bien payées à ne rien faire

  • J’ai toujours en tête la citation suivante : « Si un État avait enfanté un Microsoft, un Google, un Facebook, fait fructifier son économie comme Warren Buffett l’a fait pour les actifs de Berkshire Hathaway ces cinq dernières décennies ou inventé l’ampoule électrique, cela se saurait. » – Thierry Godefridi

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Nicolas Tenzer est enseignant à Sciences Po Paris, non resident senior fellow au Center for European Policy Analysis (CEPA) et blogueur de politique internationale sur Tenzer Strategics. Son dernier livre Notre guerre. Le crime et l’oubli : pour une pensée stratégique, vient de sortir aux Éditions de l’Observatoire. Ce grand entretien a été publié pour la première fois dans nos colonnes le 29 janvier dernier. Nous le republions pour donner une lumière nouvelles aux déclarations du président Macron, lequel n’a « pas exclu » l’envoi de troupes ... Poursuivre la lecture

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