Coca-Cola et Santa Claus : une épopée !

Coca-Cola a su instaurer avec le personnage de Santa un lien unique et durable dans le temps. À travers cette image, chaque veille de Noël, Coca-Cola entretient une part du rêve américain.

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Coca-Cola Santa by Miel Van Opstal(CC BY 2.0)

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Coca-Cola et Santa Claus : une épopée !

Publié le 23 décembre 2021
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Par Frédéric Aubrun.
Un article de The Conversation

« Raconter une histoire c’est donner des repères, des bornes, avec suffisamment de force pour que l’imagination recrée les intervalles entre eux, avec infiniment plus de réalité que les mots, le dessin, ni même le film, n’en offriront jamais. Et cette histoire-là fonctionnait. D’un dessin à l’autre, il y avait tout un chapitre. »

C’est ainsi que Ted Benoit, dessinateur et scénariste de bande dessinée, décrit l’histoire de Santa dans les publicités Coca-Cola. Les images du Père Noël peintes par Haddon H. Sundblom font historiquement partie du storytelling de la marque, en maniant avec dextérité une caractéristique de la BD, l’ellipse, qui consiste à laisser volontairement un intervalle vide entre deux scènes pour que le public puisse imaginer la scène manquante. C’est ce procédé que nous allons étudier dans les publicités Coca-Cola mettant en scène Santa Claus dans les années 1930.

The Night Before Christmas


« A Visit from Saint Nicholas » par Clement C. Moore.

Avant de nous intéresser au rôle de Santa dans les publicités Coca-Cola, il convient de rappeler ses origines pour mieux en saisir la portée symbolique dans l’univers publicitaire de la marque. « Santa Claus » est la dénomination américanisée de « Saint-Nicolas » et ce serait le conte de Clément Moore publié en 1823 A Visit from Saint Nicholas qui aurait popularisé Saint-Nicolas aux États-Unis.

Il a pour la première fois été dessiné sous les traits d’un homme rondouillard, barbu et vêtu de fourrure par l’illustrateur américain Thomas Nast, dans le journal Harper’s Weekly dès le 3 janvier 1863. C’est en décembre 1930 que le personnage de Santa tel qu’on le connaît aujourd’hui fait officiellement son apparition aux côtés de la boisson dans le Saturday Evening Post, peint par Fred Mitizen.

À cette époque, la plupart des gens considéraient encore Coca-Cola comme une boisson réservée aux périodes estivales. Les « bathing girls » de Coca-Cola étaient déjà devenues une tradition à l’intérieur même de la publicité de la marque.

Dans les années 1930, Coca-Cola poursuit sa stratégie de communication pour couvrir toutes les saisons après sa campagne « Thirst knows no season » pour rappeler aux gens que Coca-Cola peut étancher notre soif à n’importe quelle saison, surtout en hiver, avec une campagne associant Santa à la boisson pour chaque fin d’année.

1931 : « My hat’s off to the pause that refreshes »

C’est avec cette annonce parue en 1931 dans le même journal que l’on découvre le Père Noël de Haddon H. Sundblom, celui-là même qui sera mis en scène dans de nombreuses autres images publicitaires, faisant de Coca-Cola le créateur du plus célèbre Père Noël. Ce personnage rieur, rondouillard et complètement vêtu de rouge a en effet su traverser les années et devenir au fil du temps l’icône universelle de Noël. Santa Claus déclare : J’enlève mon chapeau avant la pause qui rafraîchit.

Coca-Cola semble vouloir montrer que, pendant cette période de crise, nous sommes tous égaux, en représentant Santa en train de prendre sa pause Coca-Cola après avoir fait son travail. Le message qui accompagne cette image n’en est pas moins évocateur : « Vieux Santa, l’homme le plus occupé du monde, prend le temps pour la pause qui rafraîchit, avec le Coca-Cola glacé. Il sait même comment se montrer bon envers lui-même. Et donc il se montre toujours souriant. Alors pourquoi pas vous ? Où que vous fassiez des courses, vous trouverez une joyeuse « soda-fountain » avec du Coca-Cola glacé déjà prêt ». Ce message humoristique insiste sur la disponibilité de la boisson, présente n’importe où, et source de plaisir lors de la pause qui rafraîchit.

Cette image paraît également véhiculer une atmosphère heureuse à travers les rondeurs et le sourire de Santa. Nous voilà donc dans la symbolique de Noël, cette fête religieuse célébrée en… hiver. Un détail qui a toute son importance dans la stratégie de Coca-Cola puisque la firme semble ici revendiquer son intemporalité en montrant que même en période non estivale, la pause Coca-Cola a sa place. Santa est présenté ici comme une icône hivernale. Couleur emblématique de la marque, le rouge agit ici comme un important stimulus visuel qui force le regard du récepteur sur le Père Noël et sur le logo. Santa Claus et Coca-Cola ne font plus qu’un, unis par la couleur rouge.

Coca-Cola, raconte-nous l’histoire de Santa !

En 1932, nous retrouvons le Père Noël de Sundblom dans une nouvelle publicité Coca-Cola, et cette fois-ci nous avons véritablement affaire à une histoire. En effet, Santa se trouve dans une situation inattendue et pour le moins surprenante : il lit le message laissé par un enfant (Jimmy) qui lui a écrit « Cher Santa, s’il te plaît repose-toi ici. Jimmy ». Sont accolés au message une bouteille de Coca-Cola, un verre, un ouvre-bouteille et une chaussette pour les cadeaux.

Cette scène semble donc se dérouler la veille de Noël, et Sundblom semble s’être inspiré de la légende de Saint-Nicolas, telle qu’elle est narrée dans le poème de Clément Moore (1823). Jimmy a pensé à Santa en lui laissant une bouteille de Coca-Cola près de sa chaussette la veille de Noël.

Nous pourrions donc penser que sans sa « pause Coca-Cola », Santa Claus aurait du mal à se consacrer pleinement à sa tâche. Ce ne sont donc pas les qualités de la boisson qui sont mises en avant dans cette publicité, mais bien l’imaginaire qui est construit autour de Coca-Cola. On ne vend alors plus une boisson mais du rêve en associant son image à la légende de Saint-Nicolas, lui conférant par là même un caractère mythique.

Nous allons à présent étudier trois images qui se suivent dans le temps et qui racontent au final une grande histoire que seul le récepteur est à même de construire avec son imagination.

Pour Noël 1936 : Santa est présenté comme un « grand enfant » qui s’amuse « lui aussi » en profitant de la « pause qui rafraîchit » pour boire son Coca-Cola. Boire Coca-Cola la veille de Noël s’apparenterait à un moment d’évasion, à l’instar du petit garçon qui s’amuse avec son train électrique ou de la petite fille qui s’occupe de sa poupée.

Un an plus tard, pour Noël 1937 : « Donner et prendre » est désormais devenue la devise officielle du Père Noël de Sundblom. Alors que l’année précédente il prenait fièrement sa pause au pied du sapin d’une demeure familiale, en 1937 Santa savoure avec allégresse une bouteille de Coca-Cola prise dans le frigidaire d’une autre demeure familiale (à moins que ce ne soit la même… et c’est tout l’enjeu de l’ellipse narrative de jouer avec notre interprétation).

1956 Coke Coca-Cola Santa Advertidement Readers Digest by SenseiAlan (CC BY 2.0)

Enfin, nous voilà à Noël 1938 : Santa remercie la petite fille, et par là même tous les enfants qui lui ont laissé une bouteille de Coca-Cola dans le réfrigérateur chaque veille de Noël pour qu’il puisse profiter de la « pause qui rafraîchit » et continuer de distribuer des cadeaux. La logique de gratification bat ici son plein : si tu veux que Santa vienne, il faut qu’il y ait du Coca-Cola à la maison.

Comme le soulignent Gérard Cholot, Daniel Cuzon-Verrier et Pierre Lemaire dans leur ouvrage consacré aux plus belles affiches de Coca-Cola, Santa « apparaît sous le pinceau d’Haddon Sundblom comme le plus fantastique messager de la marque. Nous le voyons arriver dans un foyer, fatigué – on le serait à moins – et se diriger tout naturellement vers le réfrigérateur familial pour se servir un bon Coke bien frais. Raigaillardi, il peut se consacrer à sa sainte mission ! »

Coca-Cola a su instaurer avec le personnage de Santa un lien unique et durable dans le temps. À travers cette image et cette histoire qui s’adresse à tous les foyers, chaque veille de Noël, Coca-Cola entretient une part du rêve américain.

Sur le web-Article publié sous licence Creative commons

Un article publié initialement le 26 décembre 2019.

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