Les riches ne paient pas d’impôts ? Vraiment ?

Il est ridicule, voire même carrément mensonger, de prétendre que la majorité des personnes riches ne paient que peu ou pas d’impôts. Il s’agit là de populisme vicieux.

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Les riches ne paient pas d’impôts ? Vraiment ?

Publié le 22 février 2021
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Par Michel Kelly-Gagnon.

Plusieurs commentateurs, dont certains se présentent par ailleurs comme étant spécialistes en fiscalité, aiment répéter ad nauseam sur toutes les tribunes publiques que « les riches ne paient pas d’impôt ».

En tout cas, si certains riches réussissent peut-être à éviter de payer l’impôt sur le revenu grâce à diverses manœuvres (légales ou non), je peux vous assurer que plusieurs en paient, et une claque à part ça !

l’Un de ces riches, un bon ami à moi, lequel fait clairement partie du 1 % des contribuables les plus fortunés au Québec, a partagé avec moi les détails de sa situation fiscale en me montrant carrément ses documents fiscaux officiels, dont notamment ses relevés T4 et relevé 1, ainsi que ses comptes de taxes municipales et scolaires.

Un cas détaillé

Durant l’année 2020, son revenu total a été de 335 992 dollars. Les prélèvements fiscaux à la source observables sur son T4 et son relevé 1 (l’équivalent québécois du T4) furent de 77 456 dollars (Impôt provincial québécois sur le revenu), 71 912 dollars (Impôt fédéral sur le revenu), 3146 dollars (contributions au RRQ), 650 dollars (cotisation à l’assurance-emploi), 387 dollars (régime québécois d’assurance parentale), pour un grand total de 153 551 dollars, ou un taux effectif de 45,7 %.

En lisant ces lignes, certains syndicalistes hurleront que l’assurance-emploi n’est pas un impôt, mais ce n’est pas non plus une véritable prime d’assurance, car elle n’est pas ajustée en fonction du risque, du niveau ou fréquence des réclamations passées, ce qui serait assurément le cas s’il s’agissait d’une véritable assurance au sens actuariel du terme.

Même chose pour « l’assurance parentale », car donner naissance à un enfant n’est généralement pas un « accident fortuit » ! Mais même en ne tenant pas compte de ces trois ponctions fiscales, cela donne tout de même un taux effectif de 44,5 %.

(Notons qu’en 2020, le taux marginal d’impôt combiné – fédéral et provincial – est de 53,31 % sur chaque dollar gagné après les premiers 214 368 dollars.)

Il faut par contre noter que mon ami reçoit souvent en avril ou mai de chaque année un remboursement variant entre 9000 dollars et 12 000 dollars grâce à l’usage maximal qu’il fait de diverses déductions permises (contribution au REER, déduction de dépenses médicales, etc.).

Autres frais

Mais même en tenant compte de ce « remboursement d’impôt », il nous faut maintenant ajouter à sa charge fiscale totale les taxes scolaires, les taxes municipales, les taxes provinciales et fédérales à la consommation, ainsi que certains types de taxes où le taux est plus élevé que le taux usuel des taxes à la consommation (par exemple sur l’essence). Après, on pourrait évidemment ajouter les divers permis et droits requis.

Mais ne faisons pas dévier le centre de mon propos : pour les fins de la discussion qui nous occupe, je vais inclure ces droits et permis à la « charge fiscale », au sens strict.

Par contre, calculer le montant exact payé par mon riche ami en matière de taxes à la consommation n’est pas chose facile, car certaines dépenses, par exemple celles d’épicerie ou encore les dépenses médicales, ne sont pas taxables alors que d’autres, par exemple l’essence ou l’alcool, le sont à un taux plus élevé que le taux combiné (TPS + TVQ) de 14,97 %.

Mais si je me fie à un regard rapide de ses relevés de carte de crédit pour la période entre le 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020, lesquels sont très majoritairement constitués de dépenses taxables au taux combiné de 14,97 %, et que j’y ajoute les taxes municipales et scolaires, on arrive à une ponction fiscale totale avoisinant les 50 ou 51 %. Et là je ne parle pas du taux théorique marginal, mais bien du montant réellement payé (c’est-à-dire du taux effectif).

J’anticipe déjà que certains affirmeront que le cas spécifique de ce riche n’est pas représentatif. Pourtant, les 15 % des contribuables les plus fortunés au Québec ont payé plus de 88 % de l’impôt sur le revenu, selon les données les plus récentes.

Et les 1 % les plus riches, eux, se sont tapés 21 % du total des impôts payés ! Et donc, si c’est vrai que « certains » riches paient peu ou pas d’impôt, et je doute fort qu’il y en ait tant que cela, cela signifie, par voie de conséquence, que la contribution relative des autres riches est d’autant plus importante !

L’objectif de ce texte n’est pas de débattre si être spolié de 50 % ou 51 % du fruit de son labeur est suffisant ou pas (personnellement je pense que c’est déjà bien trop élevé), mais plutôt de démontrer qu’il est ridicule, voire même carrément mensonger, de prétendre que la majorité des personnes riches ne paient que peu ou pas de taxes et impôts.

Il s’agit là de populisme vicieux qui ne fait qu’envenimer indûment les relations sociales et créer des tensions et revendications fondées sur de la désinformation.

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  • attention…l’idée c’est la « juste » part à » l’impot »…donc dans un pays où l’égalitarime règne…

    on s’attendrait pour savoir qi les riches payent le « juste  » impôt à avoir les clefs du calcul absolu…

    Pour moi la vrai imposture est de considerer les riches comme des spoliateurs ..

    dans une économie libre, les riches sont des bienfaiteurs récompensés à la juste valeur du marché de la satisfaction des gens avec lesquels ils interagissent…

  • Il est fichtrement chanceux votre pote québécois et en outre ses héritiers ne payeront pas de « droits » de succession!

  • Ce n’est pas pour rien que l’envie était un des sept péchés capitaux du catholicisme ( curieusement, dans l’islam, c’est l’ostentation qui provoque l’envie qui est stigmatisée, et ce n’est pas un des plus grands péchés )

  • L’impôt progressif ne va pas de soi.
    Cet impôt touche en effet au rôle de l’Etat et plus particulièrement au rôle qu’on lui assigne en matière de redistribution des richesses :
    – ceux qui estiment que les inégalités de revenus sont socialement nuisibles sont favorables à l’impôt progressif car il réduit l’écart entre ceux-ci au nom de l’équité verticale, idée égalitariste selon laquelle les personnes disposant des revenus les plus élevés doivent se rapprocher des revenus les plus faibles en supportant une charge fiscale plus importante ;
    – ceux qui estiment que la redistribution n’est qu’une forme de charité obligatoire, donc une spoliation illégitime quand la justice sociale serait que chacun contribue de la même façon aux dépenses publiques sur la base d’un taux unique, c’est-à-dire proportionnellement à ses revenus.
    L’argument concernant l’utilisation plus ou moins intense des biens et équipements publics selon le niveau de revenu n’est pas pertinent et invérifiable (par exemple les riches seraient censés utiliser davantage le réseau routier mais les pauvres les infrastructures locales, logement sociaux, allocations liées au revenu..).
    L’argument keynésien selon lequel il convient de favoriser les petits revenus en taxant davantage les gros de manière à favoriser la consommation est contestable dans la mesure où cette pratique décourage l’investissement et l’esprit d’entreprise.. donc la croissance future.
    L’argument selon lequel les « pauvres » contribuent davantage à la fiscalité indirecte (ex TVA) dans la mesure où la part de leur revenu « consommé » est supérieure à celle des riches est également contestable du fait de l’existence de taux différenciés et moins élevés sur les produits de consommation de base.
    En conclusion, la fiscalité progressive ne repose que sur le dogme égalitariste des revenus et celui de l’intervention autoritaire de l’Etat en la matière, c’est-à-dire une conception totalement socialiste et redistributive de la fiscalité qui fait douter de sa légitimité.

    • L’impôt progressif est d’essence socialiste.
      L’impôt proportionnel à un taux très modéré (de l’ordre de 10%) est, lui, d’essence libérale.

      • non ce serait plutôt la contribution volontaire à mon opinion…

        • Le libéralisme ne nie pas la nécessité d’un état pour exercer les fonctions régaliennes. Compte tenu de la nature humaine, on ne peut s’en tenir à la générosité des bienveillanst donateurs.

    • « L’argument selon lequel les « pauvres » contribuent davantage à la fiscalité indirecte (ex TVA) dans la mesure où la part de leur revenu « consommé » est supérieure à celle des riches est également contestable du fait de l’existence de taux différenciés et moins élevés sur les produits de consommation de base. »

      Argument d’autant plus contestable que le plus gros poste de dépenses est le loyer qui n’est pas (encore) soumis à la TVA.

  • Ceux qui ne paient pas d’impôts sont ceux qui en vivent.

  • Votre propos est d’une logique imparable. Ce qui montre une fois de plus que, tant au Québec qu’en France, nous vivons dans un monde de folie taxatoire, qui finalement aboutit toujours à un appauvrissement du pays, comme on le voit tous les jours en France, Covid ou pas.

  • Rien à voir avec le populisme, ce n’est que du socialisme! Celui-ci reposant uniquement sur le mensonge et l’escroquerie, en profitant de la bêtise humaine!

  • oh non , on peut très bien dire que ce qui est « juste » est a balance entre cout..et « service public » reçu…

  • – J’aime pas les riches.
    – C’est quoi un riche ?
    – C’est quelqu’un qui gagne 4000 Euros.

    Voici parmi tant d’autres, une flatulence du foireux François Hollande.
    Alors à moi de poser une question :
    C’est avec 4000 balles que François Hollande drague
    les starlettes de cinéma ?

  • Les commentaires sont fermés.

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