Macron remonte dans les sondages : l’effet du quoi qu’il en coûte ?

Pourquoi la cote d’Emmanuel Macron semble-t-elle remonter un peu dans les sondages malgré la gestion cahotique de la crise sanitaire ?

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Emmanuel Macron BY European External Action(CC BY-NC 2.0)

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Macron remonte dans les sondages : l’effet du quoi qu’il en coûte ?

Publié le 8 février 2021
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Par Arnaud Benedetti.

À tout juste un peu plus d’un an de l’échéance présidentielle, les sondages qui se succèdent révèlent un soutien certes minoritaire au président de la République mais néanmoins bien plus confortable, à ce stade du mandat, que celui de ses deux prédécesseurs immédiats, Nicolas Sarkozy et François Hollande.

Une toute dernière étude, publiée voici 48 heures par Kantar pour Le Figaro place Emmanuel Macron à 39 % d’opinions favorables, ce quelques jours à peine après sa décision de ne pas procéder à un nouveau confinement immédiat.

Faut-il y voir une dissonance entre la tonalité parfois fortement critique dont le chef de l’État est l’objet dans le débat public et une relation aux Françaises et aux Français moins tendue que ne le laisseraient apparaître les observateurs et autres commentateurs ?

Macron, seul maître à bord

Sans doute l’un des premiers facteurs d’explication de ce socle modéré de confiance est à rechercher dans les effets mêmes de la crise sanitaire que nous traversons pour laquelle pourtant l’action de l’exécutif donne lieu en continu à de nombreuses controverses.

La pandémie installée désormais dans une durée prégnante pourrait susciter une adhésion par défaut d’une partie de l’opinion. En effet lorsque le principe d’incertitude domine, l’un des réflexes collectifs consiste aussi à s’adosser mentalement à une forme de stabilité.

Le détenteur du pouvoir, quel qu’il soit, bénéficierait dès lors d’une prime de confiance, opérant pour de nombreux segments de la société comme un moyen de se réassurer dans un moment de forte anxiété quant aux représentations de l’avenir.

La faible visibilité à court terme peut générer ainsi une disposition psychologique à s’en remettre mécaniquement à la figure du pilote, seul maitre à bord, nonobstant les zones de turbulences. À proportion que l’aléa croît, se densifie aussi, faute d’une perception d’alternative immédiate, une adhésion à celui qui incarne organiquement l’ultime solidité dans un monde devenu si hypothétique.

La psychologie collective est évidemment travaillée par l’exceptionnalité des circonstances. Elle ne suffit pas néanmoins à épuiser l’analyse. D’autres éléments interviennent.

Un « quoi qu’il en coûte » bénéfique pour l’opinion ?

Certains s’inscrivent d’abord dans la structuration sociale même du macronisme. Celui-ci exprime in fine une sociologie assez peu volatile politiquement, organisée dans sa vision du monde, attachée à un conservatisme de mouvement qui articule l’aspiration à la stabilité et la volonté d’insérer la nation dans la mondialisation.

Ces fondamentaux idéologiques agrègent ainsi des segments sociaux, le bloc élitaire décrit par Jérôme Sainte-Marie, dont le rapport à la chose publique est empreint de constance et peu sensible aux variations conjoncturelles, y compris celles induites par la pandémie.

Cette propriété au demeurant fait écho à la demande diffuse de stabilité suscitée par le caractère imprévisible de la crise. Mais faut-il encore trouver dans la gestion de cette dernière, paradoxe apparent au regard des critiques dont celle-ci demeure la cible, l’un des ressorts du matelas de soutien dont paraît profiter la courbe présidentielle.

Le sanitaire concentre certes toutes les récriminations mais de manière latente l’appui à l’économie, le quoiqu’il en coûte, par ailleurs si peu en accord avec la doxa originelle des marcheurs, atténue le ressenti négatif dominant de l’action publique, de ses dysfonctionnements dans la conduite de l’événement épidémique.

Tout se passe comme si les amortisseurs économiques et sociaux servaient de palliatifs à la douleur existentielle propagée par la circulation du virus, favorisant un ajustement à plus de résilience alors que publiquement doutes et réserves ne cessent d’imprégner le climat politico-médiatique .

Cette double scène, celle de l’espace public et de la visibilité de ses affrontements, et celle d’une opinion moins indexée qu’il n’y paraîtrait sur la première, constitue pour une part une donnée tendancielle du moment.

D’aucuns ne manqueront pas d’y déceler l’impact du désalignement de la com-pol du chef de l’État sur le tensiomètre médiatique et le retour à un usage plus normé du fonctionnement qu’autorise les institutions de la Vème République.

La ressource communicante, parfois moquée du Premier ministre, cristallise les attentions les plus critiques, à front renversé de la séquence précédente Emmanuel Macron/Édouard Philippe.

La quotidienneté de la gestion au Premier ministre, le cap au Président : la dichotomie des prises de paroles Matignon/Élysée instaure une répartition des tâches, où le Président vise à installer une narration de distance, de contrepied des annonces médiatiques, de scénarisation de son autonomie décisionnelle quand son chef du gouvernement se fait de son côté le messager de la tête de l’exécutif et se soumet aux exigences fonctionnelles et calendaires des professionnels des médias.

Cet infléchissement de la communication a vocation à gérer vraisemblablement aussi le stock modéré mais néanmoins persistant de confiance dont le Président reste crédité à un an de l’expiration de son mandat et à imposer pour mieux capitaliser également l’idée d’une solidité, voire d’une force de celui-ci au prisme de l’opinion et en comparaison des deux derniers locataires élyséens.

Mais le clivage persiste…

Cette relative démonstration de puissance, relevé sondagier autant que levier communicant, n’en demeure pas moins contrainte. Qualitativement, la marque présidentielle reste d’abord clivante, profondément marquée par les épisodes successifs d’un mandat éprouvé par des crises, celle des Gilets jaunes entre autres, et des écarts de communication perçus souvent comme allergisants.

Par ailleurs, l’efficience de cette apparente solidité du soutien est tributaire de l’issue de la pandémie et de sa durée : plus le terme d’une sortie de celle-ci s’éloigne, plus s’accroît la probabilité d’une fragilisation des exécutifs démocratiques en responsabilité.

Emmanuel Macron n’échappera pas à ce risque latent, a fortiori peut-être plus que ses homologues dans la mesure où la gestion française de la covid a été le théâtre, peut-être plus qu’ailleurs, de forts dissensus trouvant leurs sources dans une culture politique qui pardonne moins à l’État qu’elle le fétichise d’autant plus.

Last but not least, et non des moindres, outre qu’une popularité modérée ou réelle ne garantit en rien sa transubstantiation en dynamique électorale, la martingale macroniste, minoritaire sociologiquement, fait le pari que cette minorité suffisamment structurée et mobilisée est en mesure de préempter le pouvoir ; elle ne peut pour autant esquiver la menace d’une offre alternative susceptible d’agréger et de mobiliser le moment venu une sociologie majoritaire (celle des classes populaires et d’une partie des classes moyennes) avec une majorité politique.

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  • Le maréchal Pétain bénéficiait aussi d’un certain soutien de la population.
    Dans un climat de peur installé par le régime, les dictateurs bénéficient toujours d’une certaine forme, non pas de popularité, mais de soutien, tant il est seriné qu’ils seraient la seule alternative au chaos.
    Macron, dont on attend toujours les manifestations de la grande intelligence qui lui est prêtée, a au moins compris ça.

    • N’en doutez pas, Emmanuel Macron est certainement le meilleur stratège politique de l’histoire de France depuis Vercingétorix!
      Il mérite sa réélection…. au moins une fois, ne fusse que, au moment voulu, il puisse nous expliquer la façon dont il envisage de nous faire rembourser….

      • françois bayrou a dit :  » les taxes et les impôts on les aura quand la France aura retrouvé sa puissance économique….. » la dite puissance économique c’est pas demain la veille , en revanche , les taxes et les impôts …..

      • Emmanuel MACRON est un arriviste qui a eu l’intelligence de s’entourer de talents qui préfèrent l’ombre ET d’abrutis qui ne vivent que pour la lumière.

        Quant au meilleur stratège politique de ces soixante-quinze dernières années, il n’y a guère que De Gaulle qui tienne la route. Cinquante après sa mort, on se revendique encore de son nom. En 2030, MACRON ne sera qu’un vulgaire souvenir.

    • Mentir aux sondages est un devoir civique et une promotion de la liberté.

  • effet du martèlement de la catastrophe, l’assimilant de fait à un chef de guerre..

  • Gestion cahotique ou chaotique ?

  • Le fameux « quoiqu’il en coûte » est plus justement un « quoiqu’il VOUS en coûte ».
    Mais tout va bien la dette qui vient d’exploser n’est pas un problème,nous allons la rouler!Pour une entreprise cela s’appelle de la cavalerie et c’est interdit.
    Ce sont les français,surtout les épargnants, qui vont être roulés.
    Ce roulage de la dette va être le rocher de sisyphe pour des générations.

    • « Le fameux « quoiqu’il en coûte » est plus justement un « quoiqu’il VOUS en coûte ». »
      Allez faire comprendre ça à une majorité d’assistés en France, c’est peine perdue puisque c’est toujours l’argent « des autres » qui finance et jamais LE VOTRE!

  • Vu l’état de délabrement de la société il faut s’accrocher à une branche pour ne pas couler, dieu ayant disparu il nous reste le président.
    Sa popularité est encore faible mais elle ne peut que monter si il manipule bien la population, avec l’aide des médias, il y arrivera.

    • Bizarrement, il semblerait que les français s’accrochent à une branche que notre président est en train de scier consciencieusement, branche sur laquelle il est lui-même assis! Tout le monde tombera ainsi « en même temps »! Ah l’égalité à la française! un vrai bonheur que le monde entier ne nous envie pas! CPEF

  • vu l’indépendance des sondeurs et des organes qui les publient…

  • Si c’est la réalité c’est une preuve que les divisions qu’il crée et entretient payent. Mais ceux qui seraient contents que d autres soient punis vont déchanter car ils seront encore moins bien servis. Il faut arrêter de compter sur ces politiques profiteurs menteurs et ne compter que sur soi et sur les autres car nous pouvons bien vivre ensemble malgré ou grâce à nos différences.

  • Moi qui suis un anti Macron depuis le début, je lui accorderais plutôt un bon point pour avoir résister à tous les « savants » de plateau télé qui voulaient le reconfinement!
    – Les Suisses nous démontrent tous les jours qu’on peut très bien ouvrir les stations de ski sans faire flamber l’épidémie, en respectant certaines précautions.
    – Le Portugal nous démontre que malgré le reconfinement, ils ne savent plus où mettre les morts….

    • Le Portugal fait face aux variants anglais et sud africains…Les Suisse au COVID chinois de base…c’est très simple en fait..

    • Je suis revenue de Macron depuis ND des Landes, mais j’avoue que comme vous, il m’a agréablement surprise avec cette résistance. Mais elle arrive hélas trop tard.

    • Ouais enfin le Portugal s’en est sorti mieux que nous pendant 1 ans quand même

      • Oui! vous avez raison, je voulais juste dire que contrairement à ce que beaucoup pensent, le confinement généralisé, méthode médiévale, n’est pas la panacée……

    • « je lui accorderais plutôt un bon point pour avoir résister à tous les « savants » de plateau télé qui voulaient le reconfinement »
      Je crains que ce soit plus pour ne pas mécontenter son électorat « de dans un an » que pour éviter une dette accrue de la France ou pour contrer la maladie.
      J’approuve néanmoins la décision de non-reconfinement mais de là à voter pour lui…

  • Les sondages, c’est comme les réseaux sociaux : ceux qui veulent le plus s’exprimer ne sont pas forcément ceux qui ont les choses plus intelligentes à dire…

    • Pour avoir assez longtemps fait partie de panels: la manière de poser des questions, et surtout de n’avoir que des réponses fermées : pour, plutôt pour, plutôt contre, contre… sans nuance possible , associé au fait que les réponses doivent être faites en 10 secondes max…font que les réponses sont très souvent le fruit du hasard.

  • Vraiment ? Si je comprends bien, en France, il suffit de tout faire de travers pour avoir la cote ou alors de poser des questions qui iront dans le sens du message que l’on veut faire passer !

  • La cote à Macron ?

    Syndrome de Stockholm…

  • Sébastien Auzière est le fils aîné de Madame Macron et donc le frère de ses deux filles, pas le mari de l’une d’elle. Il est vrai toutefois qu’il est ingénieur statisticien et qu’il est actuellement vice-président de Kantar.

  • « Macron remonte fortement dans les sondages » (Le Figaro)
    « Staline est le père du peuple et ilnsauverz l’humanité » (La Pravda)
    « Biden est un homme intègre et ouvert à la réconciliation nationale » (Le New York Times)
    L’avantage avec les états totalitaires ou qui tournent totalitaires, c’est qu’on sait exactement qui ne pas croire.

  • Kantar est une entreprise phare dans les sondages, trafiquer ses sondages pour faire plaisir à un homme politique, ce serait un véritable suicide entrepreneurial. Il faut arrêter avec ces thèses débilitantes…

  • Les commentaires sont fermés.

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