Reggae : introduction au Early Reggae (4)

Quatrième épisode de notre série estivale sur le reggae avec le « Early reggae » : everything crash ! (1968 – 1971)

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Lee Scratch Perry in 2014 by Preetam Slot(CC BY 2.0)

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Reggae : introduction au Early Reggae (4)

Publié le 21 juillet 2019
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Par Selecta Nardus.

Les origines du reggae sont tout aussi mystérieuses que celles du ska et du rocksteady. Nombreux sont ceux sont qui en revendiquent la paternité (parmi d’autres : le producteur Coxsone, le chanteur Frederick « Toots » Hibbert ou encore le bassiste Leroy Sibbles).

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Dans ce flou très jamaïcain, une certitude : l’auditoire impatient des sound systems s’est lassé en 1968 du rocksteady, a réclamé du neuf et créé une nouvelle danse, qui appelait une nouvelle musique.

Dans ses jeunes années, le reggae est donc une évolution du rocksteady vers un tempo plus nerveux et un son plus jamaïcain, moins américain, plus abrupt, moins soul.

Voici la recette du early reggae :

  • accélération du rythme
  • voix plus en retrait, retour au premier plan des musiciens
  • contretemps plus marqué grâce à des techniques comme l’echo delay ou le « double chop » à la guitare
  • retour des cuivres et arrivée tonitruante de l’instrument phare de la période : l’orgue, joué par les meilleurs spécialistes yardie, Jackie Mittoo et Winston Wright

L’arrivée du reggae correspond au déclin de Treasure Isle, Duke Reid restant bloqué aux années rocksteady, et à celui de Prince Buster, converti à l’Islam sectaire et « black power » de la Nation of Islam. Studio One, en revanche, fait un carton et reprend le leadership. Le reggae, c’est beaucoup de choses et beaucoup de gens, mais c’est avant tout Studio One et « Coxsone » Dodd. Pour faire court, la Motown de Jamaïque, mais avec un nombre infini de tubes, connus ou qui méritent de l’être.

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D’autres producteurs marquent la période, comme Joe Gibbs et le sino-jamaicain Leslie Kong. On doit à ce dernier plusieurs succès des Maytals et un excellent album des Wailers. Contre l’avis de Bunny Wailer (cousin de Marley), il appelle cet album « Best of The Wailers », titre curieux pour un groupe encore émergent. Mauvaise idée, Bunny le maudit et Kong meurt prématurément un an plus tard.

Si vous n’êtes pas habitués au early reggae, vous serez surpris à l’écoute de la playlist que je vous ai concoctée : 1/ Qu’est ce que c’est que ce truc ? 2/ Bon sang, c’est bon ! Cette période, comme certains de ses groupes majeurs (Comme les Pioneers ou les Kingstonians), a pourtant été totalement rayée de la carte à partir du début des seventies.

Totalement ? Non ! Un petit groupe résiste encore et toujours à la modernité tyrannique. Issu des quartiers cockney de Londres et de la classe ouvrière, il est maintenant partout, à Paris, à Osaka et même à Cherbourg. Les skinheads ! Cette inquiétante tribu, héritière des mods anglais des sixties, est l’anti-Woodstock. Contrairement aux enfants bien nés qui s’encanaillent avec des cheveux longs et des chemises à fleurs, les skinheads se rasent le crâne et soignent leur tenue. Faisant les 400 coups avec les rude boys jamaïcains émigrés (parfois au détriment des commerçants pakistanais victimes du « paki bashing »), leur musique de ralliement par excellence est le Early Reggae, arrivé à Londres grâce au mythique label Trojan.

Qu’ils soient « trojan skins »/ trad’ 69, politisés dans les années quatre-vingts (très) à gauche ou à droite, ou recyclés en supporters fidèles de foot, les skinheads révèrent tous le early reggae. Voyez donc cette foule enthousiaste à Stamford Bridge, le stade du club de Chelsea, entonner avant chaque match le « Liquidator », classique de la période.

La grande figure du early reggae s’appelle Lee « Scratch » Perry. D’abord ingénieur du son et « homme de main » de Coxsone, il prend sa liberté et exprime tous ses talents à partir de la fin des années soixante : producteur, arrangeur, bidouilleur, chanteur et musicien. Fan de western, américain ou spaghetti, il compose alors des hymnes au cinéma et à Clint Eastwood, dans le plus pur style early reggae, avec son groupe, les Upsetters (les emmerdeurs). Ces derniers seront récupérés en partie par Bob Marley, dont certains fans disent que les années les plus créatives étaient les années « Scratch » Perry.

Il sera aussi un des acteurs majeurs de l’évolution du reggae dans les années soixante-dix. Jusqu’en 1979, où, dans un accès de folie, il met le feu à son studio. Couteau suisse devenu suisse tout court aujourd’hui, Perry est tellement déjanté qu’il inspire les publicitaires (voir la série de pubs pour la bière Guiness).

Voilà 20 early reggae de premier choix pour faire trembler le dancehall (et en bonus : un chef-d’œuvre des Wailers produit en 1970 par Leslie Kong).

Dance to the original reggae beat !

Playlist Early reggae :

  • The Upsetters – Return of Django
  • Lee Scratch Perry – People funny boy
  • The Kingstonians – Sufferer
  • The Ethiopians – Everything crash
  • The Viceroys – Promises promises
  • Harry J Allstars – Liquidator
  • The Pioneers – Long shot kick de bucket
  • The Upsetters – A live injection
  • The Gaylads – There’s a fire
  • Justin Hinds and the Dominos – Drink Milk
  • Jackie Mittoo – Hot milk
  • Toots and the Maytals – Pressure drop
  • The Bleechers – Come into my parlour
  • The Untouchables – Tighten up
  • Tony Tribe – Red red wine
  • The Lyrics – Who cause it
  • The Tennors – Another scorcher
  • Stranger Cole & Lester Sterling – Bangarang
  • The Clarendonians – I’m sorry
  • Horace Andy – I’ll be gone
  • Bob Marley and the Wailers – Caution

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