McDonald’s et les nuisances du syndicalisme à la française

Idéologiquement opposé à la libre entreprise, le syndicalisme d’extrême gauche à la française, loin d’assurer la défense des salariés, constitue en fait une obstruction permanente à la liberté d’entreprendre conjuguée à des stratégies personnelles pour abuser des statuts protégés garantis par notre Code du travail.

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McDonald’s et les nuisances du syndicalisme à la française

Publié le 31 mai 2019
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Par Nathalie MP.

Il y a quelques mois, je vous racontais comment, de FO à la confédération paysanne de José Bové sans oublier Jean-Luc Mélenchon, toute la planète anti-capitaliste habituellement prompte à vilipender le géant américain du fast-food s’était mobilisée pour sauver un restaurant McDonald’s de Marseille en grande difficulté que son propriétaire voulait céder à un repreneur. Or l’histoire rebondit ces jours-ci et confirme amplement que les chefs d’entreprise pris à la gorge par une bonne intersyndicale bien politisée n’ont qu’une idée en tête : se débarrasser des éléments les plus jusqu’au-boutistes pour sauver leur entreprise.

Résumé des épisodes précédents

L’été dernier, le franchisé Jean-Pierre Brochiero annonce qu’il souhaite vendre ses six restaurants McDonald’s de Marseille. Cinq d’entre eux sont repris par Mohamed Abassi, autre franchisé McDo de la région. Quant au sixième d’où est parti le conflit, celui de Saint-Barthélémy dans les quartiers Nord, il essuie depuis longtemps de lourdes pertes et doit être transformé en restaurant asiatique halal par un autre repreneur.

Les syndicats dénoncent immédiatement le manque de sérieux du dossier de reprise, ce en quoi ils n’ont pas forcément tort, et crient à une tentative de museler les syndicats par disparition pure et simple du restaurant.

Branle-bas de combat immédiat du côté de tous ceux, syndicats, habitants, élus, qui font profession de défendre les opprimés du grand capital. Selon un argumentaire assez surprenant venant d’eux : malgré l’horreur économique et écologique absolue que représente McDo dans le monde, tous s’aperçoivent soudain que ce restaurant particulier joue au contraire un rôle crucial de structuration sociale et d’insertion dans ce quartier particulièrement délabré et abandonné des pouvoirs publics.

Les jeux installés à l’entrée sont un soulagement bienvenu pour les mamans, les jeunes du quartier y trouvent un point de rencontre autre que la rue et ce sont jusqu’aux horaires de travail qui tiennent compte des caractéristiques sociales locales en s’adaptant aux exigences du bracelet électronique des quelques salariés en libération conditionnelle. Eh oui.

Mais parallèlement à tout ceci, les syndicalistes maison menés par la CGT, SUD et FO n’ont jamais lésiné sur les grèves, les occupations de locaux ou les débrayages ciblés pendant le coup de feu pour obtenir des conditions salariales et des avantages – 13ème mois dès 1 an d’ancienneté, primes trimestrielles, mutuelle presque intégralement prise en charge par l’entreprise – bien au-delà de ce qui se pratique chez McDo France en général :

Ils ont réussi une coalition intersyndicale exceptionnelle. Ce qui leur a permis de gagner des droits impressionnants, bien supérieurs à ceux qui existent dans les autres McDonald’s.  (Raphaël Million, SUD Solidaires)

Résultat, coincé entre une clientèle qui se porte plutôt vers les petits prix et des obligations salariales et sociales élevées, le McDo de Saint-Barthélémy accuse des pertes récurrentes depuis 10 ans. En 2017, elles s’élevaient à 409 000 euros pour 3,1 millions de chiffre d’affaires, soit 3,3 millions de pertes cumulées depuis 2009. Selon Jean-Pierre Brochiero, elles ont même atteint 1 million d’euros en 2018.

Nouveaux développements

Début septembre 2018, suite a une procédure engagée par les salariés, le tribunal a interdit la vente du McDo de Saint-Barthélémy à la société Hali Food qui envisageait de le transformer en restaurant asiatique halal. Une décision compréhensible compte tenu des faiblesses du dossier. Mais surtout de quoi regonfler à bloc l’intersyndicale qui compte dorénavant s’attaquer aussi à la reprise des cinq autres McDo par Mohamed Abassi.

Aussi, lorsque celui-ci a proposé quelques jours plus tard de reprendre aussi le McDo de Saint-Barthélémy, mais à la condition expresse de supprimer les quatre postes de direction du restaurant, soit une économie de 400 000 euros par an sur la masse salariale afin de redonner de la viabilité à une entreprise très mal en point, les syndicats ont « tout naturellement » refusé.

Car oui, M. Abassi est bien évidemment un patron exécrable et ses méthodes sont simplement inadmissibles dans un pays où le Code du travail comporte plus de 1500 pages et pèse 1,5 kg. Voyez plutôt : il a l’audace de vouloir licencier des salariés en période d’essai et il se serait séparé de deux cadres ayant plus de 25 ans d’ancienneté. Pour l’intersyndicale, la confirmation évidente qu’Abassi cherche à se débarrasser du 13ème mois au bout d’un an d’ancienneté en ne recrutant plus que des CDD et des étudiants impressionnables.

Interrogé par Mediapart, Mohamed Abassi a rejeté ces allégations, expliquant au contraire qu’il allait étendre l’obtention du 13ème mois au bout d’un an en vigueur dans les cinq restaurants qu’il a repris à ses sept autres établissements où cet avantage ne fonctionnait qu’à partir de deux ans d’ancienneté.

Il a confirmé qu’il voulait « assurer la pérennité de cette entreprise et de ses emplois » avec une attitude entrepreneuriale « la plus normale possible », mais il ne cache pas non plus que selon lui, l’attitude des salariés protégés que sont les délégués du personnel des McDo de Marseille ne relève plus d’un dialogue social constructif, mais du coup de force et du chantage permanent.

C’est particulièrement vrai de l’irréductible représentant de FO, Kamel Guemari, en congé maladie depuis des mois. Il figure dans le lot des quatre postes en suspens et se dit convaincu que cette opération ne vise qu’à le faire taire.

Rebondissement

L’enregistrement révélé la semaine dernière par La Marseillaise lui donne apparemment raison. Il s’agirait d’une conversation téléphonique qui s’est tenue en janvier 2019 entre le vice-président de McDo France en charge des restaurants situés en région et un syndicaliste CGT des McDo marseillais également conseiller prudhommal. C’est ce dernier qui a enregistré et fait circuler la conversation, nous apprend Mediapart. On s’en serait douté.

Compte tenu de l’interlocuteur, il est assez incroyable que le vice-président en question ait pu s’épancher comme il l’a fait. Il n’est d’ailleurs plus à son poste, mais a repris une franchise selon un projet qui était prévu depuis un an.

Toujours est-il qu’il a expliqué, avec certes peu de finesse dans l’expression mais beaucoup de clarté sur le fond, que les syndicalistes et les représentants du personnel des McDo marseillais étaient surtout motivés par le régime de salarié protégé et les heures de délégation que ce statut leur conférait :

Malheureusement, en France, t’es obligé de composer avec ça parce que t’as pas le choix, et c’est les syndicats, et c’est machin, et c’est l’inspection du travail, et que tout un chacun use de toutes les ficelles pour continuer à bouffer sur la bête.

Il cite ensuite nommément Kamel Guemari comme l’un des syndicalistes que McDo cherche à faire partir.

Scandaleux, n’est-ce pas ? Les plaintes et les anathèmes pleuvent sur le groupe qui se défend en parlant de calomnie et de diffamation, récurrentes depuis le début dans l’affaire du restaurant de Saint-Barthélémy. McDo France et les franchisés répugnent certainement à s’exprimer ainsi, et voir ces propos non expurgés portés en place publique les met évidemment mal à l’aise.

Mais il ne faut pas se raconter d’histoire. Aussi bruts de décoffrage soient-ils, les mots du vice-président de McDo traduisent bien le sentiment de lassitude extrême qui s’empare de nombreux chefs d’entreprise confrontés aux même blocages à tel point qu’ils ne voient plus qu’une seule solution à leurs problèmes : d’abord essayer de se débarrasser des syndicalistes les plus radicaux ; faute d’y parvenir, chercher à se débarrasser au plus vite de leur entreprise auprès du premier repreneur venu.

On peut appeler cela de l’obstruction syndicale si l’on veut et se dire avec bonne conscience que les patrons, êtres malfaisants et tortionnaires par construction, doivent être encadrés plus que jamais, mais ce serait oublier un peu vite qu’en France, les syndicats d’extrême gauche trouvent leurs origines dans les proximités du Parti communiste français avec l’Union soviétique et sont de ce fait idéologiquement opposés à la libre entreprise.

Dès lors, le syndicalisme actif ne peut être qu’une obstruction à la liberté d’entreprendre conjuguée à des stratégies personnelles pour obtenir les statuts protégés garantis par notre Code du travail hyper normatif.

Comme je le signalais déjà dans le premier épisode, un autre franchisé McDo de Marseille propriétaire de huit restaurants, Serge Melniczuk, avait donné l’an dernier au journal La Provence une description très intéressante du fonctionnement syndical en vigueur. Un témoignage pas unique en son genre qui mérite amplement d’être souligné :

Il y a 10 mecs qui utilisent leur position syndicale pour faire du chantage. Ils réclament un certain montant de l’heure pour leurs camarades mais ils gagnent entre 5000 et 7000 euros avec le téléphone et la voiture de fonction. […] Ils ont des postes de responsables avec des mandats syndicaux ce qui leur permet de travailler à mi-temps. Ils bloquent les restaurants et négocient leur pouvoir de nuisance en obtenant des avantages à titre personnel. […] Quand vous payez ça se calme. L’inconvénient, c’est qu’ils en demandent toujours plus.

Toujours plus, jusqu’au jour où le dirigeant, observant ses comptes en déconfiture permanente et voyant qu’aucun « dialogue social » digne de ce nom ne peut être instauré malgré ses multiples propositions, décide de jeter l’éponge. Dans ces conditions, qui des syndicats ou des franchisés sont les plus responsables de tous les salariés qui risquent de se retrouver sur le carreau ?

Il est vrai que la CGT a perdu récemment de sa superbe en passant au second rang national derrière la CFDT. Mais la représentativité syndicale (11 %) n’a de toute façon jamais été élevée en France sans pour autant empêcher les multiples abus et blocages des organisations syndicales. Et il n’en reste pas moins que la matrice anti-entreprises continue d’irriguer profondément les mentalités françaises comme en témoignent hélas de multiples aspects coercitifs de la loi Pacte pour les entreprises.

Un texte du gouvernement actuel qui se déclare pourtant pro-entreprises. Ça promet.

Chers lecteurs, je vous souhaite un excellent week-end de l’Ascension !
À ce sujet, vous pouvez lire “Résurrection et Ascension : folle journée pour les Chrétiens !” 

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  • Le racket syndical est généralisé , et ce depuis longtemps..
    C’est sur qu’a Marseille , ou les entreprises de construction doivent ‘payer » les caïds locaux pour pouvoir travailler .. çà prend une ampleur impressionnante..
    mais Marseille , c’est déjà l’Afrique .. ou la corruption est cultivée comme un art

    • @CHDC Marseille porte de l’Afrique c’est le 19ème siècle. Vu aujourd’hui depuis le tiers-monde c’est le pays entier qui est corrompu, pas de manière aussi ouverte certes, mais avec la leçon de morale en plus.

  • Faut un sacre courage pour entreprendre a Marseilles sans appuis de la pegre locale ! Celle ci aurait remis rapidement de l’ordre a se desordre .

  • C’ est sûr. Entre le genre de syndicalistes marseillais flingueurs d’ activité ( cf le port), de patron un peu voyou qui choisit une entreprise réputée pour la qualité de ses produits et du bonheur au travail, modèle du genre en surconsommation bas de gamme à fort volume de déchets à traiter…vous n’ avez pas trouvé meilleur exemple pour critiquer les syndicats?

    • Surconsommation de quoi au juste ?

      • Et bien, sans mettre la tête dedans, je vous suggère d’ observer ce qui se jette dans les poubelles chez Mc Do. Ce sera un après midi utile, vous serez moins bête et ça vous ira mieux.

  • cette longue diatribe anti droits salariaux et anti syndicale indique bien que vous etes bien calée dans le fauteuil du capitalisme et de l’ultra capitalisme mondialiste , certainement bien assise sur un gros tas de billets …heureusement qu’il y a encore des gens pour vous combattre !!!

    • Et vous probablement un fonctionnaire assis à glander derrière son fauteuil attendant la fin de la journée pour aller dépenser l’argent que vous volez aux pauvres ?

      • Ya du niveau de l’argument là.. Ni Anticapitaliste ni vous n’êtes plus haut qu’une plaque d’égout.
        Mais sinon, il est malheureux de voir ce que le syndicalisme originel et nécessaire est devenu comme frein au développement, et une véritable mafia.
        C’est un avant-goût des relations qui existerait en Libertalie ! Eh oui, dans un pays ultra-libéral avec un état riquiqui, les travailleurs n’auraient d’autres choix que de se rallier à des syndicats hyper puissants contre des patrons hyper-puissants. Logique. Il faut bien créer un rapport de force à peu près équitable; une sorte d’offre et de demande :-).

    • Justement les syndicats ne s’attaquent pas à ce que vous dénoncez, mais souvent à des chefs de PME…

      • le plus grand ennemi des chefs de PME c’est le gros capital internationalisé et national qui n’a d’autre loi que le dividende , le taux de profit ,la fraude fiscal… . c’est lui qui impose sa tyrannie au restant ….. c’est lui qu’il faut arraisonner ….MAIS ce n’est ni la droite ni le PS qui l’ont fait ou le ferons !!!!

    • Le principal problème des syndicats, c’est qu’ils ne sont pas payés qu’avec l’argent de leurs membres (ce qui serait normal).
      Des voyous, il y en a partout, chez les patrons, chez les syndicats, chez les salariés. Le but est que la loi punisse ces personnes, simplement.

      Pourquoi faut-il des syndicats rattachés alors que de simples représentants du personnel, choisis ce même personnel, suffit. Il est là le problème.

      PS: ce message vous est offert par un étudiant infirmier dans sa piscine de billets 😉

    • « cette longue diatribe anti droits salariaux et anti syndicale […] »


      @anticapitaliste : Le respect des droits des salariés et des syndicats ne pose problème aux libéraux que lorsqu’il s’agit de faux droits (droits-créances.)
      Comme faux droit on peut notamment citer le « droit à un revenu décent.»
      Considérons l’exemple suivant :
      – Le patron A paie un « salaire de misère » à un employé qu’il s’est contractuellement engagé à payer un « revenu décent. »
      – Le patron B paie un « salaire de misère » à un employé qu’il s’est contractuellement engagé à payer un « salaire de misère. »

      D’un point de vue libéral l’État doit sanctionner le patron A car ce dernier est coupable de fraude. Cependant l’État doit laisser tranquille le patron B, même dans le cas où son employé estime avoir le « droit à un revenu décent. »

  • vivant à Marseille, je ne peux que confirmer ce qui est relaté ici. J’ai en tête un nombre impressionnant de cas identiques: faux arrets de travail, arnaque à l’invalidité, je m en foutisme total, horaires ridicules avec boulot au black en sus, petits traffics…
    Et les inspecteurs du travail qui vont emmerder les entrepreneurs dans les beaux quartiers mais qui foutent pas les pieds dans les quartiers nord…
    Et l’autre tache anticapitaliste qui veut nous combattre… mec, tu défends juste le vol! comment tu le justifie?

  • Mohamed Abassi aurait mieux fait d’être patient et d’investir 1 million d’Euros dans le btc au lieu de s’emmerder avec ces trous du cul de syndycats. Il aurait fait 3x. La patience, avec ces trous de balle, il a cette qualité.

    Il faut vraiment être complètement con et débile pour investir en fRance.

  • Les commentaires sont fermés.

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