À qui profite l’aide au développement ?

« Qui connaît un pays qui est devenu riche grâce à l’aide au développement ? »

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Gage Skidmore Magatte Wade speaking at the 2013 International Students for Liberty Conference in Washington, D.C. CC BY-SA 2.0

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À qui profite l’aide au développement ?

Publié le 22 novembre 2018
- A +

Par Frédéric Duval.

Cet été, lors du congrès 2018 de la Société du Mont-Pèlerin, j’ai rencontré une femme extraordinaire.

Elle s’appelle Magatte Wade, elle est fondatrice de deux entreprises : une de boissons à base de bissap (boisson traditionnelle d’Afrique de l’Ouest) et une de produits de beauté, également à partir de produits africains.

Née au Sénégal, formée en France et en Allemagne, elle a développé son business aux États-Unis où elle vit actuellement. Cette Sénégalaise porte cependant en elle le désir profond de développer son pays d’origine. Loin d’être une ingrate expatriée, Magatte exporte des produits qu’elle produit au Sénégal. Elle crée de la valeur autant pour ses clients que pour ses employés, en Afrique. Elle tend des ponts entre le Sénégal et l’Occident… chose que peu réussissent à faire.

 

Vous voulez nous aider ? Arrêtez !

Lorsque je l’ai rencontrée, elle donnait une conférence sur le développement en Afrique.

Elle commença par cette question : « Qui connaît un pays qui est devenu riche grâce à l’aide au développement ? »

Silence dans la salle.

« Normal, il n’y en a aucun. Un pays se développe en produisant et en entreprenant… et non pas en recevant de l’aide. L’Afrique ne se développera pas en recevant des cadeaux. »

On pouvait sentir une ambiance lourde dans la salle… Comme si un coup de massue avait été donné sur l’ensemble de nos consciences.

Il faut dire que quantité de politiciens mettent un point d’honneur à délivrer chaque année de l’aide pour les pays pauvres. De l’aide qui, selon elle, ne fait qu’empirer la situation.

Il s’en est suivi une suite de faits… qui m’ont profondément marqué et m’ont fait revoir tous mes standards éthiques et moraux.

En premier lieu, il y a le constat de l’échec : dans la plupart des pays dits « pauvres » les aides coulent, mais rien ne change.

En vérité… plus l’aide arrive, moins ça change.

Magatte a expliqué les raisons, et c’est d’une évidence économique tellement banale que je n’arrive pas à comprendre comment j’ai pu ne pas le voir.

 

La solidarité qui élève

À la base, une aide est là pour des cas exceptionnels.

On aide nos amis lorsqu’ils ont perdu leur travail, ont subi un décès, un accident, ou souffrent d’un trouble passager.

Devant l’adversité soudaine d’une situation, l’amitié et l’aide nous permettent de remettre debout quelqu’un, pour qu’il reprenne contrôle sur sa vie.

La solidarité est passagère. Elle sert à élever quelqu’un pour qu’il retrouve sa liberté et son indépendance.

La solidarité qui maintient dans la dépendance au lieu d’élever est néfaste.

C’est exactement ce qui se passe avec l’aide au développement que nos pays ont mis en place pour aider certains pays d’Afrique. On délivre gratuitement des biens, créant ainsi une dépendance funeste envers ces services.

Magatte m’a dit, en insistant bien fortement, que l’aide est indispensable lorsqu’il y a des désastres : guerre, tsunami, tremblements de terre… Dans ces situations, les gens ont un besoin urgent d’aide car leur vie est dévastée par un événement imprévisible.

Les gens, dans nos sociétés, le comprennent bien. C’est lors de ces événements qu’ils donnent volontiers de l’argent. Mais après il faut que cela cesse !

Or, nos États prennent le relais de la solidarité volontaire et entretiennent cette industrie de l’aide.

 

L’aide automatique tue l’économie

Elle nous a donné l’exemple d’Haïti, qui est une terrible tragédie. Cela fait huit ans que le séisme a eu lieu, et les ONG sont toujours là à déverser l’aide internationale.

Comment voulez-vous qu’un agriculteur haïtien reprenne son travail lorsqu’il est en concurrence avec une ONG qui délivre de la nourriture gratuitement ?

Bill Wirtz, que j’ai interviewé il y a quelques semaines, me racontait cette anecdote d’un parlementaire européen :

« Quand j’étais au Burkina Faso, j’ai commandé du poulet et on m’a dit qu’il n’y en avait pas aujourd’hui parce que l’avion en provenance de France n’était pas arrivé. »

Car le pire, c’est que les ONG donnent exactement le genre de produits que les gens, sur place, pourraient créer eux-mêmes : chaussures, charpentes, nourriture… tous les produits de base sur lesquels se construit peu à peu une économie !

Comme le dit l’économiste africaine Dombisa Moyo dans son livre L’aide fatale :

« L’aide maintient l’économie dans un état de paralysie [car] l’argent n’est pas utilisé pour des activités économiques durables en Afrique. »

Magatte me confiait :

« Imagine, tu es un enfant africain qui grandit dans un tel contexte. Quelle est l’image que tu as de toi-même et de tes proches ? Nous sommes des récipients de l’aide, cantonnés à un rôle de mendiants. »

En s’inscrivant dans la durée, l’aide au développement détruit l’esprit d’initiative des individus. Mais la raison pour laquelle ces ONG continuent leur travail, malgré les preuves d’inefficacité, c’est que c’est un vrai business ! Des quantités d’emplois de riches occidentaux sont garantis par l’entrée perpétuelle d’argent étatique pour le « développement ».

Mais cette aide n’est évidemment pas le seul problème.

 

Un problème institutionnel

Magatte a insisté aussi sur un autre point. L’Afrique a un grave problème politique : les droits de propriété ne sont pas respectés ou même reconnus.

Les exemples foisonnent : les gouvernements vendent des parcelles de terrain gigantesques pour des entreprises étrangères, sans se soucier des « propriétaires » locaux.

L’État de droit n’est donc pas mis en place : aucun enregistrement, aucune reconnaissance de la propriété.

Quand il y a une reconnaissance de propriété, c’est souvent un enfer bureaucratique corrompu et coûteux pour y parvenir. C’est pour ça que la plupart de l’économie se fait au noir… Et quand vous obtenez des garanties et une reconnaissance, vous avez encore le risque de voir ces biens expropriés et non reconnus par le prochain gouvernement.

Le contexte légal est donc instable, incomplet, et fait tout pour empêcher les entreprises de prospérer.

En réalité même si les médias parlent avec emphase des investissements internationaux (chinois, européens, américains, …) c’est, au contraire, d’un manque d’investissements que souffre l’Afrique.

Car c’est un investissement risqué…

Les multinationales préfèrent investir en Asie ou en Australie qu’en Afrique… même s’il y a d’immenses richesses à exploiter. Les investissements de capitaux privés pour l’Afrique sont ridicules en comparaison.

 

Une vision biaisée du problème

Toutes ces réflexions sont présentes dans le documentaire Poverty Inc que je vous invite vivement à visionner. Ce qui est dingue, c’est qu’en Occident on a une vision biaisée du problème qui nous empêche de voir la réalité.

Tout est ramené à notre passé (et présent) colonial, pour augmenter notre sentiment de culpabilité et nous faire accepter l’envoi de milliards d’argent public à des personnes qui ne demandent qu’à entreprendre et à prendre leur indépendance.

Dans le documentaire, ils parlent même d’un « néocolonialisme » par l’aide et les bons sentiments !

On maintient des situations de corruption et de dépendance qui sont malsaines et contraires à toutes les leçons de l’histoire concernant le développement.

En parallèle, les pays que nous laissons faire comme la Chine ou l’Inde, ont fait sortir plus d’un milliard de personnes de la pauvreté en deux décennies.

On blâme les entreprises internationales qui essaient d’investir dans les pays africains alors qu’on devrait différencier les cas de corruption et de capitalisme de connivence, des cas légitimes et profondément bénéfiques pour l’économie locale.

Et puis cela devrait aussi nous interroger sur les mêmes aides au développement (principalement pour des infrastructures) que nous versons aux pays de l’Est à cause de l’Union européenne.

Sur le web

Voir les commentaires (18)

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  • foutue sanctification des ong , pour une bonne combien de néfastes?

    • @jacques lemiere
      Bonsoir,
      Combien d’O.N.G méritent réellement cette appélation ?

    • L’article confond l’aide au développement et l’aide humanitaire. C’est ridicule, et ça n’a strictement rien à voir. L’une est versée par l’etat et concerne essentiellement les infrastructures d’eau, d’éducation, routes… https://afd.opendatasoft.com/page/accueil/

      L’autre, l’aide humanitaire, est gérée par les ONG en cas de sinistré ou de guerre. C’est ce dont semble parler cette dame.
      Faut pas tout mélanger, un peu de rigueur dans vos titres.

  • Le problème vient peut-être que le personnel que l’on envoie « en aide » est largement sur payé par rapport au locaux, ils vivent comme des nababs et tombent de leur cocotiers au retour chez eux. Malheureusement ils servent de modèle aux locaux qui veulent les copier avec l’acha

    • J’ai été coupé ! …avec l’achat de produits importés au détriment des produits locaux. Il faudrait surement que les investissements d’aides servent à développer l’autosuffisance plutôt que l’exportation qui ne profite qu’à un petit nombre (et aussi un peu maffieux) et généralement assure le pillage de certaines ressources (eaux profondes, par exemple).

  • Il y a longtemps que je dénonce les ONG, qui sont des vrais business servant uniquement à fournir un emploi à leurs membres. Comme de plus elles sont « progresistes », c’est à dire de gauche, elles ajoutent le problème du socialisme comme handicap à l’Afrique. Lors de l’indépendance dans les années 1960 grâce à l’influence de notre intelligentsia communiste, tous mes amis de l’élite africaine ne juraient que par le socialisme que tous leurs pays avaient adopté. Résultat prévisible, échec total du développement. Et c’est vrai que l’Europe évacue ses stock de nourritures, viande, lait, etc… vers l’Afrique, ruinant ses paysans.

  • Non seulement, l’occident envoie de l’aide d’une totale inefficacité, mais également diffuse via les ONG, tout un discours sur la nocivité de la technologie végétale notamment. Résultat, des ONG ont ainsi bloqué l’utilisation de variétés OGM du coton , qui permettaient de meilleurs revenus aux ruraux. Une autre forme de colonialisme, drappé de bons sentiments.
    un exemple parmi d’autres:
    http://seppi.over-blog.com/2018/09/des-militants-anti-ogm-perdent-un-proces-historique-au-nigeria.html

  • Ce qui se fait donc avec le tiers monde, l’Afrique en particulier, décrit ici, c’est ce que nos bons socialistes font sur le plan intérieur, la protection sociale à la Française, que le monde entier nous envie…

  • « L’aide au développement » c’est l’argent des Pauvres des Pays Riches qui va dans les poches des Riches des Pays Pauvre, c’est à dire de leur Gouvernants.

  • Des ONG avaient il y quelques années décidé de mettre fin à l’esclavagisme endémique dans la corne de l’Afrique. Ils se déplaçaient une fois par an et rachetaient des esclaves, avec les fonds de généreux contributeurs occidentaux, pour leur rendre la liberté.
    En quelques années le nombre d’esclaves avaient subitement augmenté ! Surtout dès que les tribus savaient par le téléphone arabe que les acheteurs étaient annoncés. La plupart des esclaves libérés étaient des proches des esclavagistes… Allez savoir pourquoi !
    Les autres, les vrais, étaient prudemment mis hors de vue !
    L’enfer est pavé de bonnes intentions.

    • Il ne faut pas demander aux gauchistes de réfléchir, ils en sont incapables par manque de neurones. Comme ils sont d’une ignorance crasse en économie, ils ne peuvent imaginer un tel phénomène? Pour eux le marché est une inconnue et de toute façon les africains sont des débiles!
      On peut remarquer que Christiane Taubira nous reproche sans cesse l’esclavage, que nos ancêtres ont aboli et interdit il y a 150 ans, mais se fiche complètement de l’esclavage actuel dans les pays musulmans, qui ne la gêne pas du tout. Il concernerait pourtant plus de 2 millions de captifs d’après Malek Chebel.

  • Sans vouloir critiquer l’auteur, c’est ce que prône pas mal de populistes dits xénophobes ou nazis lorsqu’ils proposent d’aider plutôt les pays avec de la formation plutôt que de donner de l’argent… Au lieu de donner du poisson à un esquimau, il serait plus intéressant de lui apprendre à pêcher pour qu’il devienne autonome…

  • Sans vouloir critiquer l’auteur, c’est ce que prône pas mal de populistes dits xénophobes ou nazis lorsqu’ils proposent d’aider plutôt les pays avec de la formation plutôt que de donner de l’argent… Au lieu de donner du poisson à un esquimau, il serait plus 0 de lui apprendre à pêcher pour qu’il devienne autonome…
    , kna

  • La révélation m’a frappé il y a une douzaine d’années : pour qui se sent des affinités avec ces gens, la manière de les aider est de leur prêter ou d’investir chez eux, en restant propriétaire de ses fonds et en leur demandant des intérêts ou des dividendes. Le côté miraculeux de l’affaire, c’est que ça suffit souvent à les en sortir !

  • « Née au Sénégal, formée en France et en Allemagne, elle a développé son business aux États-Unis où elle vit actuellement. Cette Sénégalaise porte cependant en elle le désir profond de développer son pays d’origine. »

    En Belgique, le soutien et les bourses offerts aux jeunes qui veulent étudier en Europe pour repartir ensuite développer leur pays, cela s’appelle précisément « Aide au développement ».

  • Les commentaires sont fermés.

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