Hold-up sur les taxes locales

L’exonération de la taxe d’habitation par la loi de finances 2018 de 80% des Français s’est accompagnée d’une condition moins connue.

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Hold-up sur les taxes locales

Publié le 30 mars 2018
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Par Jean-Philippe Delsol.
Un article de l’Iref-Europe

À la demande du président de la République, la loi de finances pour 2018 a exonéré dans la précipitation 80 % des Français de leur taxe d’habitation. Le Conseil constitutionnel a étrangement validé cette mesure inique qui fixe une frontière artificielle et infondée entre ceux qui payent et ceux qui ne payent pas.

Il a néanmoins assorti sa validation d’une condition liée à la mise en œuvre d’une réforme plus globale annoncée par M. Macron et devant concerner tous les contribuables. Sous le bénéfice de cette réserve, le gouvernement est donc contraint désormais d’aller de l’avant pour trouver le moyen de répondre aux besoins et attentes des collectivités locales en mal de financement.

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Les taxes locales représentaient au total en 2016 plus de 81 Md€, dont 54,8 Md€ au titre des taxes foncières et d’habitation revenant pour 41 Md€ aux communes. L’exonération progressive sur 3 ans de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables aura un coût de l’ordre de 13 Md€ pour les finances publiques. En l’état, il restera 8,5 Md€ à la charge des 20 % de Français non exonérés.

L’autonomie des collectivités locales en danger

Leur disparition pourrait remettre en cause l’autonomie des collectivités locales garantie par la Constitution. L’idée apparaît donc naturellement de trouver les moyens de rehausser la taxe foncière, et dans le respect du vieil art de lever l’impôt qui consiste selon Colbert « à plumer l’oie sans la faire criailler », la cible pourrait être encore une fois les plus riches.

Ainsi naît l’option « de considérer que cet impôt local fondé sur le foncier serait fondé sur le revenu » expose Gérald Darmanin au Sénat le 7 mars dernier. Un nouvel impôt progressif sur le revenu en quelque sorte. Et le ministre s’en justifie en soutenant que l’impôt foncier est injuste parce que il « est aujourd’hui le même, que le logement soit occupé par un avocat d’affaires ou par un salarié de la mairie de Tourcoing ». Ce qui est pour le moins ambigu.

En effet l’impôt foncier est en principe proportionnel à la valeur des biens sur lesquels il est assis. Il est donc proportionné à la richesse de chacun, ce qui est éminemment juste. N’oublions pas en effet que l’impôt foncier frappe le propriétaire, pas le locataire. Si l’avocat d’affaires et l’employé municipal de Tourcoing achètent côte à côte un même logement, il paraît éminemment normal qu’ils supportent le même impôt foncier.

Expropriation insidieuse

Au demeurant, déjà les plus riches sont surtaxés localement de diverses manières, d’une part du fait que les personnes âgées et/ou modestes bénéficient d’exonérations ou réductions de taux et d’autre part au travers de la surimposition possible, jusqu’à 60% de majoration, sur les résidences secondaires, alors même que leurs résidents occasionnels sont ceux qui utilisent le moins les services communaux (écoles, services sociaux…).

Les taxes locales deviennent exorbitantes et tendent déjà à favoriser une expropriation insidieuse des propriétaires qui n’ont pas les ressources suffisantes pour supporter cette charge annuelle. Mais les dépenses des collectivités locales visent essentiellement à offrir un environnement (sécurité, propreté, voierie, écoles…) qui est le même pour tous et valorise, ou dévalorise, toutes les propriétés de la même manière, si bien qu’il ne paraît pas anormal que chaque propriétaire y contribue en fonction de la valeur de sa propriété, nul n’étant obligé de devenir propriétaire au surplus.

Certes, les valeurs cadastrales qui servent de base au calcul des impôts locaux sont anciennes et très controversées. Mais il serait possible de remédier à cette injustice en actualisant ces valeurs. Mieux encore, il serait possible et souhaitable de transformer la taxe foncière en un impôt déclaratif par chaque propriétaire de la valeur de son bien, avec des sanctions lourdes en cas de sous évaluation constatée notamment lors de la transmission des biens.

Une transformation stupide et inique

Dans tous les cas, la transformation des impôts fonciers en un nouvel impôt sur les revenus serait aussi inique que stupide. L’idée de faire supporter aux citoyens les charges de leur vie courante en fonction de leurs revenus et de manière progressive tend en fait à égaliser toutes les situations.

Car le système n’a plus de limites. Si le prix de l’impôt est fonction du revenu, pourquoi pas aussi celui du pain et des voitures et des maisons… Mais pourquoi alors chercher à travailler plus pour gagner plus ? En poussant la logique jusqu’au bout, c’est du communisme parfait dont on sait à quelle misère il conduit inéluctablement.

D’ailleurs, un impôt proportionnel au revenu accentuerait les écarts de ressources entre communes riches et communes pauvres et conduirait l’État à assurer de nouvelles péréquations dépossédant un peu plus les collectivités locales de la maitrise de leurs finances rendues également plus illisibles. Mais ce serait peut-être, précisément, le but de la manœuvre que de renforcer encore l’État au détriment des collectivités locales pour mettre toujours plus la société civile dans la main de l’administration !

Alors que la Grande Bretagne avait connu les méfaits de la progressivité de l’impôt, le Chancelier de l’Échiquier déclarait le 16 avril 1894 : « Quand vous êtes une fois embarqués dans le système de la progression, vous n’avez plus de règle, plus de borne pour guider vos pas, il n’y a plus de principe de justice qui vous dise où vous arrêter ». Car la progressivité devient un instrument de puissance quasi illimité aux mains du législateur en même temps qu’elle est l’outil de la majorité qui s’exonère de l’impôt et fait payer la minorité, oublieuse du principe de consentement à l’impôt qui fonde toute démocratie.

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  • ce gouvernement et son :J’AI DÉCIDÉ devrait avant tout ,RÉFLÉCHIR ,c’est-à-dire un mot qu’il ne connaît pas. …malheureusement ils sont tous du gabarit !!! où allons nous ???
    nous sommes en fin de cycles….quand le peuple va t-i l de réveiller. …

  • Et pourquoi pas, tant que nous y sommes, instaurer une TVA variable en fonction des revenus de l’acheteur ?
    Ils ont dû y penser et renoncer devant les difficultés techniques de sa mise en œuvre.
    Quoique …
    Il est possible qu’un groupe de travail planche sur le sujet à Bercy.
    Allez savoir, quand on est insatiable.

  • Il ne se passe pas une journée sans nouvelle taxe et/ou contrainte, Depuis quelques années déjà je souligne que tant que nos élus de tous poils qu’ils soient nationaux, locaux ou européens n’en ont pas pris plein la gueule, ils ne s’arrêterons pas. C’est bien malheureux d’en arriver à de telles extrémités, mais force est de constater que la folie est devenue mondiale et suivie par les banques et d’autres organismes parapublics. Si en contrepartie il y avait des routes et infrastructures correctes, des lieux publics de détente forêts ou autre entretenus ou ne serait-ce qu’acceptable le problème serait un peu moindre mais il n’y a RIEN, surtout en France, Rien que des interdits, contraintes, taxes mensonges et manipulation digne des pires dictateurs. Cela va finir par la destruction complète de notre société quant à la culture, c’est déjà trop tard.

  • Désolé, mais si l’idée d’instaurer un impôt en fonction de la valeur du bien est sympa en théorie, en pratique elle est inapplicable. Parce-que la valeur du bien ne peut être connue que quand il est vendu.
    Quant à réévaluer les valeurs cadastrales, politiquement c’est une bombe. Elles auraient dû l’être régulièrement, elles ne l’ont pas été depuis les années 60 ou 70, quand on considérait qu’une barre de béton avec des cloisons en carton était le summum du luxe, et un immeuble des années 30 juste un taudis. Rattrapper 60 ans d’inaction serait très douloureux pour la population. Donc pour le pouvoir.

    • En pratique quand même on peut connaitre l’état du marché en comparant les ventes de biens dans un secteur.
      Les agences immobilières le font tous les jours.

      Et en ce qui concerne les valeurs cadastrales, l’Etat ne fait pas son travail, donc il faut que les autres paient son incurie ?

      • Ce sont plutôt les notaires et les services des hypothèques qui maîtrisent le sujet à la perfection. Ils savent parfaitement le prix de vente des biens sur toute la France, mais se gardent l’information pour eux. Il n’y a pas de petit pouvoir… « Mon Précieux ! » Le prix d’un bien immobilier non disponible à la vente est estimé par plusieurs méthodes de valorisation : comparaison directe, revenus futurs, prix hédoniques… Donc oui, fonder une nouvelle taxe fonction de la valeur des biens est techniquement possible dès demain puisque datas et méthodes sont disponibles.

        Après, tout dépendra du taux, de sa proportionnalité (surtout pas progressif) et de sa stabilité dans le temps. Si on subit la même progression de taux qu’avec la CSG, le nouvel impôt se terminera en catastrophe car l’immobilier est un marché lent. On ne joue pas impunément avec un marché qui évolue peu et exige plusieurs décennies pour corriger les erreurs passées.

        On se souvient ainsi des errements politiques de l’entre-deux guerres qui ont directement engendré les immenses bidonvilles des années 1950, pour aboutir ensuite aux merveilleuses barres HLM. L’Etat nous aura gratifié de plus d’un siècle de délires coûteux dans l’immobilier, avec des conséquences sociales aussi désastreuses que multiples. Quand l’Etat entreprend de toucher à l’immobilier, il doit le faire la peur au ventre et la main tremblante, voire la corde au cou.

        Si nous étions en démocratie, tout changement de taux, forcément proportionnel, devrait être obligatoirement sanctionné par référendum réservé aux propriétaires. A défaut de cette précaution salutaire, il est hautement souhaitable de ne pas instaurer un nouvel impôt.

  • les plus malins sont les gitans

  • La France est pire qu’un pays communiste.
    Une seule solution : supprimer l’état et dégager tous les profiteurs qui ont fait une rente de situation à vie avec nos impôts.
    Leur seule solution pour ne pas faire sauter le système par les banlieues et pour garder leurs privilèges est de tondre la classe moyenne basse qui trop peur de perdre son emploi et qui n’osera pas déclencher les hostilités.

    Qui se fait brebis, le loup le mange.

    Mai approche.

  • C’est un régime communiste donc inique qui pratique le racket.

  • Comment feraient-ils avec les sociétés immobilières ? Plein pot ?
    Comment feraient-ils avec les propriétaires domciliés à l’étranger ? Plein pot ?
    Parmi ces gens làa, comment distinguer celui qui est riche ou pas ?
    Nombreux seront ceux à renoncer à la propriété en France, et se tourner vers d’autres pays plus accueillants.

    On voit bien que cela reviendrait à une interdiction économique de posséder des biens immboliers.
    Le batîment en fera alors les frais.

  • Il existe aussi des gens qui ont acheté un appartement à Paris quand ils touchaient 10 ou 15k€ par mois et qui le possède toujours mais sont à la retraite avec 30 ou 40 k par an , donc payer plus ou moins pour avoir le droit de continuer à habiter chez soi n’est pas complètement idiot

    • @Joe Pike
      Bonsoir,
      « donc payer plus ou moins pour avoir le droit de continuer à habiter chez soi n’est pas complètement idiot »
      L’idée même de devoir payer pour pouvoir vivre chez soi est une abération. L’Etat nous doit la garantie de nos droits : c’est l’une de ses deux raisons fondamentales d’existence. Si on paye un logement, avec les frais de notaire et les taxes à l’achat, il n’a rien à demander de plus. Surtout pas à réclamer une taxe pour que l’on garde le logement.
      Ce n’est pas idiot pour des collectivistes hostiles à la propriété privée, qui vivent de la lutte et de la destruciton des classes, tout en rêvant d’en créer une seule supérieure à toutes les autres.
      « qui touchaient 10 ou 15K€ par mois… mais sont à la retraite avec 30 ou 40k€ par an. »
      Leur pouvoir d’achat a été divisé par 4 voire 4,5. Augmenter les impôts sur leurs logements, taxés au possbile depuis des années, jouera sur leur pouvoir d’achat amputé.
      Les propriétaires paient la taxe foncière et la taxe d’habitation. Les locataires paient la taxe d’habitation.

  • « l’impôt foncier frappe le propriétaire, pas le locataire »
    Vous n’imaginez quand même pas que les propriétaires bailleurs vont se gêner pour répercuter la hausse de la taxe foncière sur les loyers. Les locataires paieront la hausse de la taxe foncière ou de n’importe quelle taxe d’ailleurs car on ne loue jamais à perte. S’ils ne peuvent pas augmenter les prix à cause de réglementations d’encadrement des loyers, les propriétaires cesseront tout simplement de louer. Pénuries de logements à prévoir.

    • « Pénuries de logements à prévoir. » donc hausses de loyers par la suite.
      Pression sur le parc social insuffisant.
      Puis par la suite hausse de la pression (a)morale des polytocards sur les (salauds de) riches propriétaires.

      • Ensuite les logements seront préemptés non pour y loger des gens dans le besoin mais les copains des élus. Et pour les récalcitrants, ce sera une balle dans la nuque.

  • Les commentaires sont fermés.

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