Whisky et Harley-Davidson dans la guerre commerciale Europe-États-Unis

Les conditions commerciales se durcissent de part et d’autre de l’Atlantique : personne n’en sortira gagnant.

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Donald Trump by Ninian Reid(CC BY 2.0)

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Whisky et Harley-Davidson dans la guerre commerciale Europe-États-Unis

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 12 mars 2018
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Par Nick Hubble.

Comme chacun le sait, après les guerres des monnaies arrivent les guerres commerciales. C’est ainsi que cela s’est passé dans les années 1930 et c’est ainsi que cela se passera sans doute aujourd’hui.

Les États-Unis sont le premier pays à changer de cap concernant le resserrement monétaire. Les Américains ouvrent aussi les hostilités concernant la Guerre commerciale.

Le président Donald Trump a déjà imposé des taxes douanières sur le papier aluminium, les lave-linge et les panneaux solaires. L’acier et l’aluminium devraient être les prochains sur la liste.

Ce qui inquiète tout le monde, c’est que Trump, en tant que président, a tous pouvoirs sur la politique commerciale. Il n’a pas besoin du soutien du Congrès, comme c’est le cas pour d’autres sujets. Il peut se permettre de n’en faire qu’à sa tête.

Bien sûr, Trump affirme qu’il n’agit que par représailles – comme l’avait expliqué Barack Obama lorsqu’il a imposé des taxes douanières sur les panneaux solaires chinois en 2012. Pendant trop longtemps, les États-Unis ont toléré les subventions d’autres pays aux dépens de l’industrie américaine. À présent, les Américains veulent lutter à armes égales.

Il a raison bien sûr. L’Europe, la Chine et d’autres ont abusé de la politique de libre-échange des États-Unis en imposant leurs propres barrières douanières et subventions.

Mais Trump a également tort s’il pense qu’une situation équitable rendra le monde plus riche. Pas seulement parce que réduire le commerce est une mauvaise chose. Mais parce qu’il va déclencher des mesures de riposte.

Des représailles pour frapper les États dans lesquels Trump bénéficie d’un soutien

La réaction des Chinois et des Européens ne s’est pas fait attendre : ils ont immédiatement menacé d’imposer leurs propres droits de douane sur les biens en provenance des États-Unis si Trump poursuit son projet.

La beauté de ce type d’impasse est que les deux parties peuvent affirmer prendre une mesure de représailles. C’est la configuration parfaite pour qu’une situation parte en vrille.

Les Européens savent où frapper pour faire le plus mal aux Américains : sur Harley-Davidson et sur Jack Daniels. Ils veulent imposer des barrières douanières d’une manière ciblée. Ce sont là des industries majeures dans les États dont sont originaires les plus importants responsables politiques américains et soutiens de Trump.

Cibler des entreprises par des barrières douanières pour influencer la politique américaine est, naturellement, déraisonnable. Mais c’est normal dans une guerre commerciale.

Cependant, il n’y a pas que Trump qui est à l’origine de problèmes. Le Brexit est lui aussi en passe de déclencher une guerre commerciale.

Vive le whisky libre !

Le Royaume-Uni n’arrive toujours pas à déterminer ce qu’il attend du Brexit, parce que personne ne parvient à se mettre d’accord. Sans parler du peuple, qui change sans cesse d’avis. L’Union européenne (UE) a pourtant été claire. Elle veut punir la Grande-Bretagne de son faux pas politique par des sanctions économiques sur le commerce.

Le résultat de tout cela est une confusion totale.

Le journal allemand Der Spiegel a publié un article hilarant sur l’industrie écossaise du whisky. 90% de la production de whisky est destinée à l’étranger, soit un cinquième des exportations alimentaires de la Grande-Bretagne. En outre, cette industrie emploie 40 000 personnes, ce qui a fait d’elle un acteur de premier plan dans la campagne du « Remain ».

Jusqu’à récemment, il en était ainsi. Aujourd’hui, les producteurs de whisky écossais ne veulent plus rien avoir à faire avec l’UE, ni même avec l’union douanière. Croyez-le ou pas, ils ne veulent même pas d’un accord commercial ! La raison en est simple – et elle montre bien la nature bizarre du Brexit et de l’UE.

Sans un accord commercial au sujet du Brexit, la Grande-Bretagne et l’UE tomberaient sous les règles de l’OMC. Or, celles-ci spécifient que les droits douaniers sur le whisky sont de 0% ! Ce qui signifie que l’industrie du whisky s’en sort saine et sauve – et même plutôt pas mal vu la chute de la livre sterling. Peu importe où finira le Brexit, les importations de whisky ne craindront rien.

Aujourd’hui l’industrie du whisky soutient un Brexit dur. Rester au sein de l’union douanière mais hors de l’UE laisserait les producteurs britanniques à la merci des régulateurs européens sans le pouvoir d’influer sur ces réglementations à Bruxelles. Une perspective « terrifiante, » selon les termes d’un représentant de l’industrie du whisky.

Amusant de voir comment une industrie qui a mené une campagne fervente pour le « Remain » est devenue l’un des plus grands bénéficiaires du Brexit. Cela devrait remettre en question tout ce qu’on pense savoir à propos du Brexit.

En Inde, le décalage entre la rhétorique et la politique, s’agissant de guerres commerciales, est rapportée par Bloomberg :

À Davos en janvier, le Premier ministre indien Narendra Modi a déclaré que l’Inde ouvrait ses frontières au commerce et il a même comparé le protectionnisme au terrorisme. Ce mois-ci, son gouvernement a relevé les droits de douane sur une cinquantaine de groupes de produits, des montres aux cerfs-volants en passant par les téléviseurs et les pièces automobiles. Ces mesures font suite à de nouvelles taxes imposées en décembre sur les biens électroniques comme les téléphones mobiles et les fours micro-ondes.

Même les défenseurs du libre-échange trahissent la cause.

Où cela mènera-t-il le monde ?

Guerre monétaire, guerre commerciale, guerre armée

Depuis 2008, nous avons assisté à des dévaluations monétaires concurrentielles. Ce n’est qu’une façon de mettre en œuvre une politique mercantiliste. Les barrières douanières en sont une autre. Nous en sommes à ce stade aujourd’hui.

Le problème n’est pas seulement l’effet sur l’économie mondiale. L’échange commercial fonctionne en nous permettant de produire plus avec moins. Aller contre le commerce signifie privilégier le fait de produire moins avec plus.

Pour un personnage politique, être inefficace est censé entraîner une hausse du taux d’emploi…

Le problème est que cela ne conduit pas à une augmentation de la richesse matérielle. Aucun pays qui a tenté l’autarcie ne s’en est jamais sorti.

Le vrai problème est politique. Si la richesse économique se réduit et que les politiques économiques entre pays sont combatives, on a les conditions d’une guerre – véritable.

C’est là où Trump aux commandes devient réellement inquiétant.

Pour plus d’informations, c’est ici.

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  • Taxer les produits d’une région ou d’un secteur qui a élu Trump, ça n’est pas de la guerre commerciale mais de la basse politique. Ceux qui promeuvent de telles actions ne devraient pas avoir leur place dans des instances démocratiques.

    • Trump ne met pas la taxe carbone. Cela compte-il pour votre onction démocratique ?
      Il faut ajouter la diminution des normes. Plus le prix de l’énergie modéré.

      D’ailleurs, cette faveur pour l’industrie lourde est justifiée avec une politique d’énergie abondante. Sinon, elle devrait partir à l’étranger pour un gain modeste contre le retour d’importation de produit avec une valeur ajoutée.

      •  » Trump ne met pas la taxe carbone. Cela compte-il pour votre onction démocratique ?  »

        Par contre il pourrait taxer le papier carbone pour sauver les tous derniers fabricants de machine à écrire

        • @Le nouveau: Votre exemple est faux, incohérent, inintéressant… mais pour un jeu de mot que ne ferait on pas ? 🙁

          Si le libre échange est plutôt favorable en général, il faut relativiser les avantages pour le consommateur comparés à ceux des multinationales et financiers !

          http://charleshughsmith.blogspot.fr/2018/03/there-is-no-free-trade-there-is-only.html

          Le libre échange, c’est d’abord de gros profits. Pourquoi pas.
          Mais étrangement, ses supporters nous parlent d’abord des petits avantages pour les consommateurs, et en oubliant totalement qu’ils sont aussi des travailleurs, et surtout des résidents d’états-acteurs bien passifs…

          • @amike
            Bonjour,
            « Le libre échange, c’est d’abord de gros profits. »
            Le libre-échange est d’abord… des échanges. Le libre-échange c’est comme quand vous achetez un objet (une pelle, une brouette, un meuble, etc… )à votre voisin ou sur Leboncoin. Vous pouvez même négocier le prix.
            Dans le blog que vous mettez en lien l’auteur écrit en point 3
            « 3. Deny geopolitical rivals access to these resources. » (Refuser aux rivaux géopilitiques l’accès à ces ressources.)
            Pour l’auteur, il n’y a pas de « marché libre » il n’y a que le Jeu de l’échange Darwinien (Darwinian Game of Trade).

            « As I pointed out back in 2005, the savings accrued by consumers due to opening trade with China were estimated at $100 billion over 27 years (1978 to 2005), while corporate profits expanded by trillions of dollars. »
            « Savings » veut dire économies, épargne. L’auteur compare l’épargne des consommateurs aux profits d’entreprises. C’est comme si je comparais mon P.E.L au chiffre d’affaire de la boulangerie du quartier. Evidemment, je brasse beaucoup moins.
            Il ne faut pas oublier que lorsque vous payez un produit ou un service, vous lâchez certes quelques euros, mais vous gagnez ce service ou ce produit. Les trilliards de profits des entreprises dont parle l’auteur du blog sont dûs à ce que les clients/consommateurs ont eu en retour de leur argent.

    • C’est bien le problème de l’UE: ce ne sont pas des élus mais des technocrates sans légitimité.

  • Qui achèterait des Harley depuis que notre Johnny international est décédé.
    Le whisky est écossais ne concerne donc pas les Étasuniens qui fabrique du « Bourbon Wiskey » (le seul truc qui est bon aux US !).
    L’interdiction du beurre de cacahuètes est une mesure de protection contre l’épidémie de sur-poids. Votre grosseur (c’est un titre de noblesse US, aux dames « ON » dit Votre graisse) Mr Trump il n’y a pas de guerre commerciale déclarée.

  • L’échange libre avantage les deux parties, sinon il n’aurait pas lieu. Pourquoi faut-il périodiquement remettre en cause cette évidence?
    Au pire cas, si M. Trump veut punir les Américains en leur imposant des taxes sur les produits importés, ne faisons pas la même erreur en punissant les consommateurs européens qui veulent acheter des produits américains.

  • Et le TAFTA ? Terminé ?
    On ne peut pas souhaiter le libre échange et mettre des barrières douanières, non ?
    Quant à l’équité des échanges, quelqu’un peut-il me dire pourquoi les chinois peuvent acheter ou investir dans n’importe quelle entreprise française alors que pour investir en Chine il faut un partenaire chinois à 50% ?

    • Et pourquoi les Qatari peuvent revendre leur immobilier français sans payer de taxes, alors qu’un propriétaire français en France voit ses plus-values largement confisquées par l’Etat…

  • Sur le whisky, on s’en fout. La France produit aussi ses propres whisky. C’est évidemment plus grave sur les Harley-Davidson, puisque nous n’avons sur notre sol, plus aucun constructeur généraliste de motos. Evidemment, on pourra continuer à acheter du Honda, du BMW ou du Moto Guzzi. Mais quand même, Harley…
    Et puis il paraît que nous exportons, nous européens, pour 6 milliards d’acier et d’aluminium? Je doute qu’on importe pour autant de motos ou de whisky.

  • Beaucoup de bruit pour pas grand chose……

  • Les commentaires sont fermés.

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