Réforme du marché du travail : de bonnes pistes mais manque l’essentiel !

Les ordonnances de réforme du marché du travail peuvent susciter l’espoir. Mais cela ne paiera que si la prise de risque des entrepreneurs et de leurs financiers est enfin encouragée.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
(Crédits Troisième Histoire, licence Creative Commons)

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Réforme du marché du travail : de bonnes pistes mais manque l’essentiel !

Publié le 5 septembre 2017
- A +

Par Bernard Zimmern.

Malgré de bonnes pistes, on peut prévoir l’échec prévisible de la réforme du droit du travail dévoilée dans les ordonnances qui viennent de sortir. Cet échec n’a cependant rien à voir avec les causes théoriques imaginées habituellement.

Des réformes à saluer

Je me réjouis au contraire de la réforme du droit du travail et de voir que les mesures telles que la suppression de la cause réelle et sérieuse comme motif de justification de licenciement disparaissent, où la réduction des effets de seuil, comme je l’ai demandé depuis près d’une vingtaine d’années.

Je l’ai demandé parce que l’entrepreneur de travaux publics de Rennes avec 49 salariés ne peut dépasser ce nombre sans risquer la faillite ou parce qu’une commerçante en produits pharmaceutiques ne peut pas embaucher un troisième collaborateur sans courir le risque de déposer son bilan en cas de fluctuations de commande.

2 millions d’emplois ne voient pas le jour par crainte des dirigeants de ne pouvoir licencier en cas de recul de la conjoncture

Avec l’aide de deux CGPME régionales, en interrogeant 4 000 entreprises, j’ai pu estimer qu’environ 2 millions d’emplois (11% des emplois actuels) ne voient pas le jour par crainte des dirigeants de ne pouvoir licencier en cas de recul de la conjoncture. Ce pourcentage est aussi celui que les Danois avaient constaté dans leur réforme de 2006 qui supprimait les obstacles au licenciement.

Tout ceci confirme que les entreprises ne peuvent embaucher si elles ne peuvent pas licencier.

Des réformes de bon sens qui ne suffiront pas

Mais la réforme du droit du travail ne va pas suffire à relancer l’emploi. Le gouvernement a oublié anormalement, du fait de la destruction créatrice de Schumpeter, environ 10% des emplois disparaissent chaque année des entreprises existantes, et que seule la création d’entreprises nouvelles est capables de combler ce manque.

Or la création d’entreprise reste particulièrement déficiente en France et ce point n’est pas du tout pris en compte par la réforme : l’INSEE nous amuse en parlant de 600 000 entreprises nouvelles créées chaque année, en oubliant de mentionner que, sur celles-ci seules 25 000 sont créées avec au moins un emploi ; laissant 575 000 autres être des zombies qui disparaîtront rapidement.

Pour avoir de vraies créations d’emplois, il faut considérer les entreprises qui naissent avec plusieurs salariés et les moyens financiers de se développer dans la durée. À ce jour, le gouvernement et Bercy refusent encore de voir qu’il faudrait au moins 4 milliards de plus investis dans les créations d’entreprises par des entrepreneurs privés et non par des organismes d’État, comme l’ANVAR ou la BPI.

Nous ne pourrons vraiment espérer voir le chômage se réduire que lorsque le gouvernement aura compris qu’il faut voter les dispositions fiscales comme celles qui ont réussi aux États-Unis ou au Royaume-Uni, qui font assurer par l’État environ la moitié du risque financier pris par l’entrepreneur.

Nous en sommes loin car l’idéologie qui semble prévaloir à Bercy et notamment de la Direction de la législation fiscale, est qu’il faut pénaliser ceux qui s’enrichissent par la plus-value et en premier lieu les entrepreneurs

Au final ce ne sont pas les 2 millions d’emplois perdus à cause du Code de travail mais les 5 millions d’emplois qui devraient intéresser nos dirigeants : ces 5 millions d’emplois perdus par une législation fiscale décourageant les entrepreneurs qui financent l’économie, et qui pénalise lourdement le travail et la reprise économique. À quand une réforme ?

Voir les commentaires (14)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (14)
  • « Tout ceci confirme que les entreprises ne peuvent embaucher si elles ne peuvent pas licencier. »
    Plutôt: « … ne peuvent pas embaucher si elles ne peuvent pas licencier » non ?

    • ● Pas et point, termes accessoires de négation, se suppriment très souvent avec les verbes pouvoir, oser, savoir, cesser, suivis d’un infinitif, et, dans le langage familier, avec le verbe bouger.
      Exemple : La plupart des princes et des ministres ont bonne volonté ; ils ne savent comment s’y prendre. (Montesquieu)

  • On a beau chercher, on ne voit pas quelle ordonnance, dans son texte, supprimerait la notion de cause réelle et sérieuse, encore moins le seuil crucial des 50 salariés. Il n’y a donc aucune raison de se réjouir.

  • Bien sur qu’il manque l’essentiel !

    Au USA, les travailleurs free-lance sont 34% des emplois. On pense qu’ils seront la majorité dans 3 ans.

    Rejeter les 575 000 entreprises unipersonnelles par an d’un revers de manche et la preuve que l’auteur n’a absolument rien compris à la révolution qui a lieu et que les réformettes du salariat seront aussi inutiles qu’anachroniques.

    Il manque une vraie réflexion sur la protection sociale de l’indépendant afin d’éviter que nos coachs sportifs, nos créatifs, nos web designers, nos informaticiens, nos ouvriers du bâtiments, nos mécaniciens … n’aient le choix qu’entre deux alternatives : vivre du travail au noir, sans protection sociale, sans retraite en bricolant avec l’argent gratuit (pole emploi, RSA, etc …) ou partir vendre leurs talents à l’étranger.

    Personne ne se pose de question de pourquoi on ne trouve plus aucun de ces métiers individuels qualifiés sur le marché du travail ? (à part nous ressortir la bêtise monstrueuse du manque de formation)

    A quand une libéralisation des régimes sociaux qui réduirait le chômage à 3% en 6 mois ? A quand une réforme des conditions de prêts bancaires et des bails ?

    Bien sur, c’est plus sympa de vivre dans les ors du palais bourbon et sur les plateaux télé (ou dans des think-tank tout aussi déconnectés)

    Ce pays est foutu !

    • Nous manquons de travailleurs manuels qualifiés parce que des cinglés de l’EdNat ont décidé de donner le bac à tout le monde et à en faire des étudiants qui végèteront toute leur vie.

      • Il n’est pas incompatible d’être intellectuel et manuel, bien au contraire. Le problème en France, c’est que les programmes d’éducation oblige à être l’un ou l’autre alors qu’il faut être l’un et l’autre. Résultat : mépris réciproque et incompréhension mutuelle. Cela fait de notre pays le pays de la zizanie où chacun vit avec des oeillères.

      • Pourquoi vous focaliser sur les « travailleurs manuels » alors que cela touche TOUS les travailleurs qui ont un savoir faire technique ?

        Arrêtez de croire à cette histoire de « manque de formation » qui n’est qu’une arnaque de plus pour faire grossir le brontosaure.

  • Oui, il manque vraiment l’essentiel !!!
    Qu’est-ce qui fait qu’un « patron » embauche ?
    C’est le chiffre d’affaire !
    Tous les bidouillages sur les charges sociales, la pseudo-liberté de licencier, tout cela permet aux entreprises en difficulté de survivre (quelque temps…). Mais cela ne fait pas l’embauche.
    Et le chiffre d’affaires, ce sont les clients qui le créent !
    Redonnons du pouvoir d’achat aux Français, ils retrouveront le moral et envisageront l’avenir plus sereinement !

    • Non, ce sont les perspectives de profit. Si les clients sont subventionnés par une taxe sur le chiffre d’affaires, ou sur le PIB, ou par une dette transmise à nos enfants, personne ne va se fatiguer à embaucher, la taxe étant certaine et les profits aléatoires.

    • Redonner du pouvoir d’achat ça ne fait que créer de l’inflation, Donc détruire des emplois.

    • Ah encore un qui veut booster la demande artificiellement avec des aides…

  • il serait plus judicieux de baisser les impôts d’entreprise..les charges sont trop importante..
    revoir les retraites chapeau …qui coûte un max…des sommes astronomique..qui plombe les entreprises…mais là C’est le silence ….

    • Les retraites chapeau ne sont pas des pénalisations, l’entreprise offre une retraite chapeau à un dirigeant dont elle estime globalement qu’il lui fera gagner nettement plus qu’il ne lui coûtera, sinon elle ne s’attacherait pas les services de ce dirigeant à moins d’être cinglée.

  • Les commentaires sont fermés.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

La rupture conventionnelle est un dispositif de rupture du contrat de travail d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. Contrairement à la démission, elle permet au salarié de bénéficier des allocations chômage.

Voici 5 raisons de conserver tel quel ce dispositif.

 

Sa remise en cause serait un acte de défiance envers le dialogue social

La rupture conventionnelle est issue de la négociation entre partenaires sociaux : sa création a été prévue par l’accord national interprofessionnel de 2008 (signé par l’e... Poursuivre la lecture

2
Sauvegarder cet article

Un article de Philbert Carbon.

 

L’Insee dresse un portrait des multinationales françaises dans une note récente. Par firme multinationale française, l’institut désigne un groupe de sociétés (hors services non marchands et filiales bancaires) dont le centre de décision est situé en France et qui contrôle au moins une filiale à l’étranger.

 

Les multinationales françaises réalisent plus de la moitié de leur chiffre d’affaires à l’étranger

En 2021 (année sur laquelle porte la note), elles contrôlaient 51 00... Poursuivre la lecture

Un article de Bertrand Nouel

Qu’est-ce que la « trappe à bas salaires » ? C’est le fait d’encourager l’embauche de salariés peu productifs (peu compétents, peu expérimentés…) en abaissant, jusqu’à les supprimer, les cotisations et charges patronales qui seraient normalement prélevées sur le salaire brut. On a « en même temps » complété la rémunération des mêmes salariés avec la « prime d’activité », qui est à la charge de la CAF. Ces exonérations et ce complément n’existent que pour les bas salaires : au niveau du smic et en dégressivi... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles