La mort par l’inflation guette l’Europe

La BCE ne peut lutter contre l’inflation car les pays faibles ne supporteront aucune hausse des taux.

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La mort par l’inflation guette l’Europe

Publié le 28 mars 2017
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Par Nick Hubble.

Alerte rouge ! Alerte rouge ! Le spectre de l’inflation est de retour… Ça sent le début de la fin de l’Europe.

Les banques centrales sont censées contenir l’inflation en relevant les taux d’intérêt et éviter la déflation en les réduisant. C’est ce qu’on appelle une politique contra-cyclique. On essaye de compenser le cycle économique pour le rendre plus stable.

Qu’arrive-t-il quand il y a à la fois inflation et déflation ?

En Espagne, en Belgique et en Allemagne, les taux d’inflation ont grimpé en flèche depuis mi-2016. En Espagne, les prix sont passés d’une baisse de 1% par an à une hausse de 3%. En Belgique, l’inflation a doublé pour arriver à 3%. En Allemagne aussi, le taux d’inflation se situe bien au-delà de la cible de 2% de la BCE.

Entre temps, le Portugal, l’Italie et la Grèce sont encore bien en dessous de la cible d’inflation.

Comment alors établir une politique monétaire pour les deux groupes en même temps ?

La réponse des banquiers centraux consiste à couper la poire en deux et à croiser les doigts. Ils espèrent que les taux d’inflation entre les différents pays se nivelleront. Par conséquent, en établissant un taux pour l’ensemble de l’Europe, ils font bien leur boulot. Les principaux banquiers centraux européens pensent que des taux d’inflation différenciés au sein de l’Europe ne sont tout simplement pas leur problème. Pour eux, la Zone euro est un tout.

Inertie dangereuse

Mais si on regarde de plus près chaque pays individuellement, on se rend compte à quel point cette inertie est dangereuse. L’Espagne est enlisée dans des taux d’intérêt incroyablement bas et un taux d’inflation élevé. Avec une économie moribonde, les Grecs seraient horrifiés par une hausse des taux.

Le résultat de cette politique mi-figue mi-raisin de la BCE est à l’exact opposé de la politique contra-cyclique. Elle est pro-cyclique. La BCE aggrave l’inflation dans les pays où l’inflation est forte et étrangle ceux où l’inflation est faible.

Les Espagnols savent bien où mène cette situation. Si les taux ne grimpent pas pour l’Espagne, il y aura une bulle spéculative artificielle financée par la dette qui éclatera par la suite, tout comme au début des années 2000.

Ce que pourrait faire la BCE

Certes, la BCE pourrait augmenter les taux pour lutter contre l’inflation en Allemagne, en Belgique et en Espagne. Mais la Grèce ne pourrait pas supporter un taux d’intérêt plus élevé. Cela étoufferait toute croissance économique, sans parler du budget du gouvernement, qui ne peut se permettre des charges d’intérêt supplémentaires. C’est là une différence essentielle et j’y reviendrai un peu plus loin.

Le fait est que la BCE n’a pas d’issue. Mais nous savons que les banquiers centraux préfèrent que l’inflation devienne incontrôlable plutôt que de laisser entrer la déflation. C’est là l’histoire de toutes les monnaies. Elles finissent par disparaître à force d’inflations.

Tout ceci offre d’excellentes opportunités d’investissement. Par exemple, l’Allemagne connaît maintenant le boom immobilier qu’elle avait raté dans les années 2000. À cette époque, les taux d’intérêt étaient élevés pour « l’homme malade de l’Europe. » Cette fois-ci, ils sont bas pour le poumon économique de l’Europe.

Mais tout cela finira mal. Demandez donc aux Espagnols et aux Irlandais.

Les taux d’intérêt réels sont négatifs en Allemagne et en Belgique

Les gouvernements européens ne peuvent se permettre une hausse des taux d’intérêt. Ils ont trop de dette. Ils sont assez contents de voir l’inflation grignoter cette dette alors que la BCE maintient les taux d’intérêt bas.

Étudions de plus près les rendements des obligations d’État – le taux d’intérêt que le gouvernement doit payer pour emprunter plus d’argent. Si on tient compte de l’inflation pour obtenir le « taux réel, » ils sont insolites. Les Espagnols peuvent emprunter de l’argent pour deux ans à -3% ! Les Allemands à -2,6% pour deux ans et à -1,7% à 10 ans. Les Belges peuvent emprunter de l’argent à –2,27% pour 10 ans !

Ceux qui achètent les obligations d’État perdent de l’argent, et vite. Les gouvernements gagnent de l’argent sur leurs emprunts, ajustés de l’inflation. Tant que cela durera, les gouvernements seront ravis d’avoir une inflation élevée et des taux d’intérêt bas. Mais les bulles se gonflent tout comme dans les années 2000.

Ce qui tuera l’UE

Lorsque l’inflation deviendra incontrôlable dans les pays florissants d’Europe, ou qu’une hausse des taux d’intérêt posera des problèmes aux économies malades, les pays exigeront de restaurer le contrôle de leur propre politique monétaire. Mais ce serait un tel coup au cœur de l’UE que celle-ci en mourra probablement.

Il faut donc surveiller d’un oeil les prochaines statistiques d’inflation et de l’autre les taux d’intérêt de la BCE. L’Europe se dirige droit vers la ruine, quel que soit le chemin qu’elle emprunte.

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  • Question : comment font les US pour régler ce genre de pb ?

    Ils ont eux aussi une monnaie commune, le dollar.
    Ils ont eux aussi des états avec des économies très différentes (ex. Californie « poumon économique » vs « Rust Belt » en faillite).

    Ont-ils à relever les mêmes défis ? Comment les relèvent-ils ?

    A ce qu’il me semble, leur Union est loin d’être menacée…

    • J’aurais tendance à dire qu’un élément de réponse tient dans l’unité. Les U.S ne sont pas une mosaique de peuplades diverses. Les notions mêmes de sorties de l’union, ou de sortie du dollar ne se posent donc absolument pas.

      Mais comme vous le soulignez, les U.S connaissent des Etats prospères, et d’autres en faillites. Je connais mal la fiscalité de ce pays, mais j’imagine que les U.S laissent davantage jouer la concurrence fiscal inter-Etats, le gouvernement fédéral intervenant peu pour régler ces questions de prosperité. Les Etats n’ayant pas de ressort nationaliste ou souverainiste vis-à-vis de la monnaie, ils n’ont d’autres choix que de favoriser l’emploi et l’innovation pour se tirer vers le haut. Il suffit de noter le rythme de création d’emplois ces dernières années.

      • « Les notions de sortie de l’union ne se posent absolument pas »
        On devrait dire : « ne se posent absolument plus »
        => Ils ont essayé dans leur histoire une « sortie de l’union », et ça a abouti sur une guerre terrible (la guerre de sécession).

        En Europe, nous avons connu pire (deux guerres mondiales, le fascisme…), et pourtant j’ai l’impression que le nationalisme et le repli sur soi est de retour :/

    • La FED a prévu de passer son taux directeur à 3% d’ici 2018 (par incrémentation de 0.5%). Après faut pas oublier que les US c’est quasi 20% du produit mondial à eux seul avec une croissance positive depuis de nombreuses années, un pib énorme et un niveau de vie bien plus élevé que des pays comme la Grèce, même dans les pires Etats. En d’autres termes ils ont les moyens de s’endetter, tout simplement parce qu’économiquement ils ont les moyens de rembourser grâce à leur fort pouvoir d’achat. L’immense dette qu’ils ont contractée leur permet de résister face à l’inflation.

      Le problème de fond, pour l’ue, c’est que certains Etats ont été beaucoup trop dépensier par rapport à la capacité réelle de remboursement de son contribuable. C’est ce qui fait qu’un pays comme le Soudan ne pourra pas dépenser comme la Chine, la Grèce ou l’Allemagne. Si déjà les Etats les plus pauvres n’ont pas de réelles capacités de remboursement avec des taux très bas, bha si on lève les taux, ça se transforme en austérité absolue et insoutenable, là où certains Etats auraient justement besoin d’une mesure (par ex justement une hausse de taux) pour éviter la surchauffe de leur économie.

      Le problème de fond reste que les Etats sont incapables de se discipliner eux-mêmes et que par défaut quand on leur donne la possibilité de dépenser, ils le font sans réfléchir aux conséquences, c’est ça qu’il faudrait avant tout pointer du doigts.

    • Aux US, les habitants des différents Etats parlent la même langue, ce qui facilite la mobilité de la force de travail. Cette mobilité fournit un certain garde-fou aux politiques locales les plus débiles, contrairement au cas de l’Europe. Par ailleurs, la qualité des institutions y permet un plus haut niveau de développement / revenu et donc plus de marge de manœuvre sur l’endettement

      • En ce qui concernen la langue, ce n’est pas tout à fait vrai.
        L’espagnol est langue officielle en Floride.
        Les communautés hispanophones et asiatiques sont significatives aux US.

        On trouve là bas des quartiers entiers dédiés à une communauté – à un tel niveau qu’on trouverait totalement choquant en France.

        De plus, le territoire est beaucoup plus vaste qu’en Europe, avec des différences de cultures locales marquantes (on ne vit pas au Texas de la même façon que dans le Maine ou à NY)
        -> La mobilité locale n’est pas si évidente que ça.
        Mais certainement plus facile qu’en Europe, ceci dit.

        Après ça, je vous rejoins sur la qualité des institutions.
        Comme le mentionne Zod plus haut : leur union est forte.
        La notre est faible en comparaison.

    • La monnaie (quand c’est la même) circule. Ce que par pure mauvaise foi l’auteur de l’article feint de ne pas savoir. La consommation et les dépôts/prêts bancaires recyclent la monnaie en permanence. Un dollar épargné ou consommé en Californie peut se retrouver sous forme de crédit dans un autre état en fonction des besoins. Les états en inflation sont plus demandeur que les états en déflation qui sont plus fournisseurs.

      Le seul point important est l’inflation globale qui est régulée par les taux d’intérêts. Toute autre tentative de régulation augmente les problème sans jamais les régler.

      Lire Friedman.

      C’est une des grandes force des US d’avoir une monnaie unique. La dernière tentative visant à introduire des monnaies différentes c’est soldée par une guerre civile parce que justement la partie ayant réclamé sa propre monnaie en est quasiment morte économiquement de suite.

  • Les commentaires sont fermés.

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