Par Lionel Frémaux.
Nous ne reviendrons pas ici en détail sur ce qu’est Bitcoin, ni sur la technologie sous-jacente, la fameuse blockchain. Nous nous contenterons de constater que, depuis l’invention de Bitcoin, la reconnaissance du potentiel de cette technologie a fait du chemin, ses cas d’usage se sont multipliés, avec d’ores et déjà quelques belles réussites entrepreneuriales, et de nombreux « alt-coins » sont apparues, avec parfois suffisamment de facteurs différenciants pour se faire une place aux côtés de Bitcoin sur le marché.
C’est ainsi que, en ce début d’année 2017, l’ensemble du marché des cryptomonnaies pèse plus de 20 milliards d’euros, Bitcoin restant largement majoritaire (près de 85%) dans ce total où Ethereum (support pour la création de smart contracts) et Dash (cryptomonnaie anonyme) font également bonne figure avec des valorisations de 1, 5 Mds€ et 350 M€.
Transformation majeure en vue ?
Tout ce petit monde, qui se développe depuis plusieurs années au gré des innovations et de l’intérêt porté par le grand public, est peut-être à la veille d’une transformation majeure.
Un peu ironiquement pour Bitcoin qui se fonde, entre autres, sur des principes libertariens de décentralisation et de défiance envers les gouvernements et les banques centrales, ce n’est pas d’une innovation technologique que pourrait provenir la prochaine rupture, mais de la décision d’une institution financière, en l’occurrence la SEC (Securities Exchange Commission), l’autorité de contrôle des marchés financiers américains.
Après plusieurs années d’instruction et plusieurs reports de décision, la SEC doit en effet se prononcer le 11 mars sur une demande de création d’un premier ETF (Exchange Traded Fund) indexé sur la valeur du bitcoin. S’il est difficile d’anticiper la décision (on entend parler de coin toss), il est possible d’anticiper ses conséquences. Bien sûr, un refus entraînerait une chute rapide (et probablement limitée) du cours, purgeant ainsi les anticipations trop optimistes.
Une autorisation, en revanche, ouvrirait en grand le robinet des investissements institutionnels. Le bitcoin se comportant comme une valeur refuge, un peu comme l’or, il pourrait attirer des investissements conséquents. Autant que l’or ?
Après un rapide calcul
Faisons un calcul rapide. L’Homme a produit environ 5 milliards d’onces d’or et continue d’en produire au rythme d’environ 50 millions par an. La valeur de l’once d’or étant actuellement d’environ 1 100 € (soit environ celle d’un bitcoin), la totalité de l’or jamais produit a une valeur d’environ 5 000 milliards d’euros, soit plus de 250 fois la valorisation actuelle de l’ensemble des bitcoins.
On a miné jusqu’à présent un peu plus de 16 millions de bitcoins, et on continuera d’en produire (mais de moins en moins vite) jusqu’à atteindre le total de 21 millions… dans 113 ans. Autrement dit, Bitcoin ne subira pas l’inflation qui détruit peu à peu la valeur des monnaies fiat, et ne subira bientôt même plus la même inflation que celle du stock d’or. S’il devait à terme peser ne serait-ce que 10% du marché de l’or, un bitcoin pourrait valoir plusieurs dizaines de fois plus qu’une once d’or !
Sans trop ajouter foi à ces amusants calculs, il faut tout de même s’attendre un bond spectaculaire si la SEC donne son blanc-seing à la création d’un ETF.
Et pourtant, l’arrivée massive d’investissements institutionnels ne serait pas exempte de risques ou de problèmes pour le monde des cryptomonnaies. Avec l’arrivée de fonds d’investissements viendront une forme d’interconnexion avec l’économie « standard » actuelle, à la fiscalité instable et confiscatoire, sujette aux tentatives de manipulations étatiques, et une augmentation des exigences techniques pesant sur Bitcoin, alors même que ses développeurs et ses mineurs semblent toujours avoir autant de mal à se mettre d’accord sur les évolutions techniques proposées…
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