L’Europe face à l’orientalisation du monde

« Easternisation » se présente comme une référence incontournable pour toute personne qui s’interroge sur l’état du monde et sur son devenir.

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L’Europe face à l’orientalisation du monde

Publié le 20 novembre 2016
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Par Thierry Godefridi.

61jayypqmsl-_sx332_bo1204203200_Cet article est le troisième du triptyque consacré à la recension d’Easternisation de Gideon Rachman, l’ouvrage dans lequel ce spécialiste en Affaires étrangères au Financial Times s’interroge sur les répercussions de la montée en puissance de la Chine et se demande si cette dernière et les États-Unis pourront, à l’âge nucléaire, éviter « le piège de Thucydide » (un concept se référant à la guerre que se livrèrent Sparte et Athènes pour la suprématie dans la Grèce antique).

La politique de l’ « offshore balancing »

Pendant sa campagne pour l’investiture du Parti démocrate en vue de l’élection présidentielle de 2008, Hillary Clinton reconnut que la situation économique des États-Unis, en particulier leur déficit budgétaire financé par la Chine, restreignaient leur capacité à se heurter à leur principal créditeur.

Un courant de pensée dit réaliste, illustré par Stephen Walt, un professeur à l’Université de Harvard, sous-tend ce scepticisme à l’égard du maintien de l’hégémonie des États-Unis dans un monde où ces derniers ne comptent que pour environ 5% de la population. Cette école réaliste, précise Rachman dans Easternisation, suggère aux États-Unis de s’abstenir de déploiements militaires autour du monde et de contenir leurs ennemis potentiels en agissant par procuration au travers d’alliés régionaux (politique dite de l’offshore balancing ).

Se référant à la nomination au Conseil de sécurité nationale du professeur Charles Kupchan, auteur du livre No One’s World dans lequel il déclara à brûle-pourpoint que les États-Unis aspiraient à un niveau d’hégémonie mondiale pour lequel ils n’avaient ni les ressources ni la volonté politique, les plus anxieux parmi les alliés de l’Amérique soupçonnent l’administration Obama de déjà pratiquer subrepticement une politique d’offshore balancing, et il est douteux que l’élection de Donald Trump les rassure sur ce point. Alors que le budget militaire des États-Unis dépassait encore celui du reste du monde sous l’administration Clinton, il ne représente, sous Obama, plus que 40% des dépenses militaires mondiales.

Le pari hasardeux de l’Europe

Le sort du Moyen-Orient pendant les années Obama exemplifie, selon Rachman, un aspect beaucoup plus important de l’orientalisation du monde. Le déclin relatif de l’Amérique fait partie d’un phénomène plus large, celui du déclin de la puissance de l’Occident dans son entièreté. Ayant du mal à supporter les charges de son rôle d’unique superpuissance, l’Amérique s’est tournée vers l’autre côté de l’Atlantique et elle a bien dû constater que les puissances européennes souffraient d’un déclin précipité sur la scène politique mondiale.

« Le processus d’orientalisation du monde entraîne le fait que l’Europe est de plus en plus vulnérable à des tendances économiques, politiques et sociales dans le reste du monde qu’elle ne peut contrôler et qui en menacent la stabilité, la prospérité, voire même la paix »,

écrit Rachman. Relevant que l’Europe était aux prises avec d’inextricables difficultés liées à sa faible croissance et un niveau de chômage élevé depuis bien avant la crise de 2008, il poursuit :

« Consciemment ou inconsciemment les Européens ont fait un pari avec leur sécurité. Ployant sous leurs dépenses d’État-providence, ils ont choisi de se désarmer. Pour autant que l’environnement immédiat du continent demeure pacifique, ce désengagement peut ne pas constituer un problème. Mais avec une Russie en colère à l’est, une Amérique en pleine introspection à l’ouest et un Moyen-Orient dans la tourmente au sud, les nations européennes risquent de découvrir que leur pari a échoué, sans encore en mesurer toutes les dangereuses conséquences. »

Dans Easternisation – War and Peace in the Asian Century, Gideon Rachman propose un panorama détaillé et complet du monde d’aujourd’hui et une vision géopolitique éclairée de celui de demain, loin des idées reçues et sans parti pris. Cet ouvrage à l’écriture allègre et caustique de l’un des journalistes les plus renommés au monde dans le domaine des Affaires étrangères se présente comme une référence incontournable pour toute personne qui s’interroge sur l’état du monde et sur son devenir.

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