2016 : annus horribilis pour l’Algérie ?

Contexte économique dégradé et crise inédite au sommet du pouvoir : l’année s’annonce difficile pour l’Algérie.

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2016 : annus horribilis pour l’Algérie ?

Publié le 15 janvier 2016
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Par Anthony Escurat.
Un article de Trop Libre

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Après quatre années de tergiversations, le pouvoir algérien a enfin présenté mardi 5 janvier son projet de révision constitutionnelle promis par Abdelaziz Bouteflika au cœur du printemps arabe. Un texte sans grandes innovations en forme de douche froide pour la presse comme pour l’opposition et qui inaugure une année 2016 des plus compliquées pour l’exécutif. Explications.

Chute du prix du pétrole, plan d’austérité, remue-ménages dans l’état-major de l’armée et des services de renseignement, procès d’anciens généraux, doutes sur la santé du chef de l’État sur fond de guerre de succession au palais d’El Mouradia, l’Algérie – trop souvent absente des écrans radars médiatiques français – referme une année 2015 bien difficile.

Diversifier enfin l’économie

Et pour cause, sur le plan économique, le bon élève qui cumulait hier excédent commercial, croissance soutenue et faible endettement se rapproche aujourd’hui dangereusement du fond de la classe sous l’effet brutal de la dégringolade des cours du pétrole. Ainsi, alors qu’un baril de brent à 110 dollars lui permettait d’assurer son important train de vie budgétaire, l’Algérie se trouve désormais contrainte de tailler dans son État-providence et de revoir à la baisse ses dépenses publiques (le baril avoisinant aujourd’hui péniblement les 35 dollars). Une révolution qui ne dit pas son nom dans un pays où près d’un quart de la population vit avec moins de 250 euros par mois et où plus de 25% des jeunes seraient sans emploi.

Plus vite qu’il ne l’avait manifestement prévu, l’exécutif va donc devoir s’atteler à la diversification d’une économie algérienne hyper-dépendante à la rente pétrolière et gazière, une manne qui représente pas moins de 97% de ses exportations et 70% de ses recettes fiscales. Dès lors, nombre de cassandres redoutent que le tour de vis budgétaire imposé en 2015 par le gouvernement d’Abdelmalek Sellal ne réveille en 2016 une crise sociale jusqu’alors anesthésiée par une généreuse politique de redistribution, sans pareil sur le continent africain.

Une crise inédite au sommet du pouvoir

À ce contexte économique et social dégradé se conjugue une crise inédite au sommet du pouvoir. Animée par les préparatifs de l’ « après-Bouteflika », cette guerre de clans au sein du sérail politico-militaire a atteint son point d’orgue à la fin de l’été avec le limogeage très médiatisé du pourtant si discret général Mohamed Mediène (dit « Toufik »), puissant patron des services de renseignement durant vingt-cinq ans et faiseur de rois à Alger. Un séisme qui, selon les observateurs, signe la reprise en main de l’appareil militaire et du pouvoir en général par le clan présidentiel avec à la manœuvre Saïd Bouteflika, frère et conseiller du président de la République, Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense et chef d’état-major de l’armée, et Amar Saadani, secrétaire général du FLN.

Une purge dans les hautes sphères militaires

Algérie rené le honzecPar ailleurs, à l’éviction inattendue du général Mediène a succédé une purge tout aussi inédite dans les hautes sphères de l’armée : trois généraux réputés proches du pouvoir ont ainsi été condamnés et plusieurs officiers supérieurs mis à pied. Cette succession d’affaires – en seulement quelques semaines – a poussé l’ex-chef du renseignement algérien à sortir de son mutisme habituel par voie de presse tandis que Khaled Nezzar, ministre de la Défense durant la décennie noire, a exhorté le président Bouteflika à intervenir pour « calmer les esprits ».

Concomitamment, inquiets face à la détérioration des climats politique et économique, un groupe de  19 personnalités – composé notamment d’anciens ministres, de parlementaires et d’acteurs du monde culturel – a adressé une lettre rendue publique au président Bouteflika, l’intimant de les recevoir. En toile de fond, c’est la question de la réelle implication du chef de l’État dans la gestion des affaires du pays qui est posée. Et le groupe des « 19 » de suspecter un coup d’État dans l’État, dont Abdelaziz Bouteflika, malade, serait l’otage.

Bien que restée lettre morte, l’initiative a fait grand bruit à Alger et le New York Times s’en est même fait l’écho outre-Atlantique, se demandant dans un article paru fin décembre qui dirigeait vraiment le plus grand pays d’Afrique.
Dans ce contexte, l’avant-projet de révision de la constitution présenté le 5 janvier dernier apparaît en total décalage avec les enjeux auxquels est aujourd’hui confrontée l’Algérie. La publication, le lendemain, par la Banque centrale des principales tendances financières de la première économie du Maghreb a de quoi réveiller des inquiétudes qu’une (timide) révision constitutionnelle ne saurait éteindre. Épargnée par le vent de révolte qui a soufflé hier sur le monde arabe, l’Algérie inaugure dès lors une année 2016 sous des auspices plus qu’incertains. À suivre…

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  • Très bon article merci.

    Le principal problème de l’Algérie reste son pouvoir très personnalisé. Après la mort de Bouteflika, l’Algérie va suivre le même chemin que le Venezuela (et pleins d’autres dictatures du genre). Le successeur, même si il est adoubé par le héro national, n’en aura pas le charisme.

    Toute la propagande nationaliste qui fait rage dans ce pays va tomber en désuétude et le pouvoir va être remit en cause. Les gens vont revenir à la réalité et se rendre compte que tout n’est pas si rose que ça. Reste à savoir comment le pouvoir va réagir, va il accepter ou tenter de resserrer la vis ?

    • “Le principal problème de l’Algérie reste son pouvoir très personnalisé.”
      Non. le principal problème de l’Algérie, c’est d’être un pays communiste avec une nomenklatura invisible ayant confisqué le pouvoir – et le fric qui va avec.

  • Si l Algerie s écroule, je sabrerais le champagne!!! :)))

    • Ha bon en quoi c’est une bonne chose ? Cela risque de déstabiliser toute la région et à terme, cela pourrait menacer L’Europe

      • Je crois qu’il dit ça car l’Algérie est quand même un pays qui nuit à pas mal de nos pays amis dont Israël…

        Pour ce qui est d’un écroulement, c’est assez probable dans la décennie. Le bon coté des choses c’est qu’avec le niveau de propagande nationaliste, toute personne qui interviendra verra son intervention se retourner contre lui.

        J’espère que le Maroc est prêt pour le moment “when shits hit the fan”, car ça va remuer…

        • C’est vrai que l’Agérie à la plus forte proportion de gens qui considère Israël comme l’ennemi principal.

          Près des trois quart.

          Contrairement à ce qu’on peux penser seul dans quatre pays arabes Israel est le pire ennemi pour la majorité de la population, Algérie, Maroc, Mauritanie et Liban.

          Même les Arabes Israel, intra et extra territoires autonomes ne sont qu’à 25% étonnamment.

        • Le Maroc? Le pays ne dépends pas du pétrole et demeure économiquement plus ouvert que le reste du Maghreb je m’en fais pas trop pour eux.

          Par contre l’Algérie ça sent très mauvais, on a pas besoin d’un écroulement dont la France serait la première victime collatêrale.

          • “Le Maroc? Le pays ne dépends pas du pétrole et demeure économiquement plus ouvert que le reste du Maghreb je m’en fais pas trop pour eux.”

            Oui mais il a un voisin qui a accumulé d’immenses stocks d’armes, un islamisme rampant, une économie en chute libre et une dictature de moins en moins légitime…

            “Par contre l’Algérie ça sent très mauvais, on a pas besoin d’un écroulement dont la France serait la première victime collatêrale.”

            Il y a de grandes chances que ça arrive, d’où ma remarque, j’espère que le Maroc est prêt à arrêter des hordes d’islamistes algériens lui fonçant dessus le jour ou ça arrivera.

        • Salut,
          Ton commentaire est assez simpliste, une crise pétrolière n’aura pas pour conséquence un écroulement en Algérie, d’ailleurs t’entends quoi par écroulement ? Par contre une crise politique est, comme dit dans d’autres commentaires, possible et à l’issue incertaine mais qui ne risque pas de conduire à une révolution. Mais ce sera une crise interne, sa politique extérieur n’a aucune raisons de subir des changements, sa prise de position contre Israël qui d’ailleurs est un pays amis des USA mais sûrement pas de la France, demeurera inchangée. Et pour finir, l’Algérie est rival du Maroc sur le plan économique et politique autant que la France et le Royaume-Uni, aucun risque de guerre donc entre ces deux pays inter-dépendants. Donc c’est vrai, l’Algérie va devoir relever de nombreux défis sur le plan économique et politique en très peu de temps. Mais avec vos raccourcis, on a l’impression que vous pensez que l’Algérie c’est la Libye! Peace!

      • Il semblerait qu’à cause de la baisse du pétrole et du fait que le Maroc ait prit position pour l’indépendance de la Kabylie, l’Algérie soit entrain de lâcher l’affaire au Sahara Occidental. Voilà qui ne manquera pas de stabiliser la région.

    • J’en ferai autant quand Israel n’existera plus.

  • Toujours à propos de l’Algérie, cette mauvaise blague circulant sur internet :

    “L’Algérie et la France ont divorcé en 1962.
    Visiblement c’est la France qui a obtenu la garde des enfants.”

    • Elle est pourrie cette vanne. Surtout qu’elle vieille comme le monde.

      • il est venu le temps , de mettre en place la déprogrammation de la bêtise humaine , expression de notre ami le poète Fatah Amrouche, israél , ces enfants ont le droit à la paix et au respect , ils font partie de la communauté humaine .la pollution de l’esprit de nos concitoyens sont sans limite.
        nous sommes un peuple amazigh, l’afrique du nord est amazigh, le maroc et le sahara occidental est amazigh, ils n’y a aucun problème entre toutes ces communautés, un espace, un vaste territoire et une population qui appartiennent toute à Dieu. arrêté de grâce vos insinuations et insultes .que Dieu vous pardonne !

  • Quand on sait que la communauté Franco algérienne compte 7 millions de représentants sur l’hexagone ( chiffre officiel algérien )il n’y a pas lieu de se réjouir de la crise ouverte algérienne . Les frères musulmans poursuivent leur islamisation de la société algérienne et ses deux branches in et out du pouvoir prospèrent sous l’égide de l’international du mouvement donc de l’éternelle trilogie nuisible Qatar / Arabie Saoudite / Turquie .
    Imaginons un instant que les frères musulmans manipulent la marionnette grabataire présidentielle , les vases communiquants France / Algérie peuvent légitimement nous donner du soucis pour notre avenir …….

    • l’AS est contre les FM, on a vu ça en Égypte et en Libye… Le vrai problème de l’Algérie ne viendrait pas du fait que l’on considère toujours les problèmes comme extérieurs et que l’on remette jamais en cause le régime ? Pourquoi les jeunes suivent les FM si tout est si rose ?

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