Marc de café de Gérard Salem

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Marc de café de Gérard Salem

Publié le 30 août 2015
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“Disons les choses comme elles sont, mon père s’irrite de l’engouement de ma mère pour les oracles en tout genre, cartomancie, chiromancie, vol de corbeaux, ce genre de niaiseries. Il voit dans les divinations une abdication de la raison, une forme de couardise, et cela le soucie pour notre éducation.”

Le ton est donné. Car c’est ainsi que s’exprime le narrateur dans l’ouverture du roman de Gérard Salem, construit de manière singulière, puisqu’il semble inspiré tout à la fois du jeu, de l’opéra et de la poésie, et comprend une Ouverture justement, deux parties, une grande, Première donne – De près, une moindre grande, Deuxième donne – De loin, séparées par un Intermède et suivies d’un Envoi.

Parmi les arts divinatoires, dont la mère du narrateur est fanatique et auxquels l’a initiée Tante Margot (qui n’est pas une vraie tante), il y a bien sûr le Marc de café qui donne son titre au roman, dont chaque morceau – il y en a vingt-sept – est une histoire qui se suffit à elle-même mais qui met en scène des personnages d’une même parentèle. L’éditeur en quatrième de couverture parle, avec à-propos, de roman en nouvelles

Chacune des parties de ce roman respecte, par moments approximativement, une chronologie. Dans Première donne – De près, le temps s’écoule de 1943 à 2013 et, dans Deuxième donne – De loin, de 1915 à 2015, tandis que l’Ouverture date de 1957 et l’Envoi de 1958. Georges, ou Giorgio, qui se trouve au centre du roman et qui y apparaît tantôt à la première personne, tantôt à la troisième, est né en 1946 et est donc également au centre du temps de cette saga séculaire et familiale.

Les histoires autonomes de ce roman se déroulent au Moyen-Orient, que d’aucuns appellent Proche, et reconstituent, comme une mosaïque fragmentée, dans son contexte, l’histoire d’une famille de chrétiens, originaires de Turquie et du Liban. Certains membres chrétiens de cette famille survivent dans le premier de ces deux pays, d’autres vivent dans le deuxième, mais également dans un troisième, l’Iran, et même dans un quatrième, la Suisse.

Ces chrétiens sont peut-être, comme le pense le grand-père de Georges, Djeddo Selim, “les seuls autochtones capables de donner une chance au dialogue entre l’Orient et l’Occident“: “Seuls ils pourraient faire reculer la barbarie si on les laissait vivre en Orient, berceau de leur religion.” J’ajoute qu’il ne peut évidemment pas imaginer, à l’époque, qu’on ne les laissera pas y vivre et que l’extermination des chrétiens du coin – arméniens, grecs, turcs ou arabes -, ne sera pas un monopole de l’État turc…

Gérard Salem raconte la vie de quatre générations de cette famille de Georges et ce monde moyen-oriental dans lequel elle évolue et qui fait rêver, comme tout ce qui apparaît exotique à un occidental. Si Gérard n’est pas Georges (Gérard est romancier, donc démiurge, et Georges, sa créature), Georges a des traits de Gérard qui se souvient – ce qui donne toute la crédibilité à son récit -, des traits de Gérard, qui, comme Georges, a fait des études de médecine et s’est spécialisé en psychiatrie.

A lire Gérard, on ne peut que penser qu’il a enfin réalisé le rêve de Georges, avec un merveilleux talent de conteur que ce dernier n’espérait peut-être pas avoir. Georges, comme Gérard, n’a certainement pas fait médecine à contre-coeur, mais, d’un autre côté, “il a toujours su que l’écriture était sa voie” et qu’en devenant médecin, il devrait “se résigner à en faire, comme Tchekhov, sa maîtresse et non son épouse légitime“. Aujourd’hui la maîtresse de Gérard est devenue son épouse légitime…

Gérard Salem, Marc de café, L’Âge d’Homme, 224 pages, à paraître en septembre.


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