Si l’on revenait…, d’Élisabeth Daucourt

Un recueil de nouvelles qui prend comme sujet le passé pour mieux accepter le présent.

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Si l’on revenait…, d’Élisabeth Daucourt

Publié le 8 juillet 2015
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Par Francis Richard.

Elisabeth Daucourt et si l'on revenaitLa vie, ce n’est pas seulement l’instant présent. Il y a un avant et il y aura, peut-être, un après. La vie ne s’explique que par cet avant, qui permet tant bien que mal de comprendre le présent et de se situer dans le courant de l’existence. Aussi n’est-il rien de plus inconscient que de vouloir en faire table rase.

Si l’on revenait… à un moment ou à des moments d’un passé enfoui est l’hypothèse bénéfique que font les personnages des nouvelles d’Élisabeth Daucourt. Il ne s’agit pas pour eux de dire ou penser que c’était mieux avant, ou moins bien d’ailleurs. Il s’agit seulement de se souvenir pour se comprendre aujourd’hui, s’accepter et, si possible, aller de l’avant.

Le passé enfoui dans la plupart des nouvelles de ce recueil est celui d’il y a quelques décennies. Il appartient en quelque sorte déjà à l’histoire, faite en réalité des histoires de chacun, éléments d’un tout qui caractérisent une époque, en l’occurrence toujours bien révolue.

Comme les mœurs ont beaucoup évolué pendant ces quelques décennies écoulées, à lire ces nouvelles on mesure le chemin parcouru. L’auteur ne porte pas de jugement. Elle raconte et les différents récits se suffisent à eux-mêmes sans qu’il ne soit besoin de commentaires.

Pour que ces récits prennent de la consistance, les personnages ne se contentent pas de se retrouver sur les lieux où ils se sont déroulés, ils remettent leurs pas dans ceux qu’ils ont jadis empruntés et reviennent surtout, par la pensée ainsi ravivée, aux circonstances qui les ont entourés et qui les expliquent.

Ainsi, revenir à l’enfance, Au bord du Doubs, ce n’est pas seulement y repasser ses vacances, mais c’est en refaire rituellement, ne serait-ce qu’au conditionnel, tous les gestes accomplis au bord de cette rivière en compagnie des parents et de la fratrie.

Ainsi, revenir à l’enfance, c’est partir du bouillon des soirs d’alors, dans lequel dansent les lettres, pour évoquer les histoires racontées par le père, les textes appris à l’école et la littérature transmise par la mère, qui tous mettent des Lettres en scène.

Ainsi, revenir à l’enfance, c’est évoquer Le chapeau de la Toussaint des dames, qui leur permet alors de se distinguer les unes des autres, quelle que soit leur condition : « À l’église, le sexe faible doit encore se couvrir et faire preuve d’humilité, mais le respect obligé devant Dieu offre les bonheurs exquis de la coquetterie »

Ainsi, revenir à l’enfance, c’est retrouver par le souvenir, puis par la lecture, Le chemin droit qui mène au camp de concentration du Struthof, le jour où le général de Gaulle y inaugure le Mémorial national de la déportation. C’est donc aussi la découverte de l’horreur, qui serait insupportable en l’absence des parents et amis.

Revenir à l’enfance ou au passé, dans ce recueil, c’est bien d’autres occasions de se souvenir de celles évoquées ci-dessus – il y en a dix-huit en tout. Mais, pour quelques souvenirs heureux, ou simplement cocasses, combien de souvenirs douloureux, souvent du fait de mésinterprétations de la religion catholique, qui occupe une grande place dans la vie passée, parfois présente, des personnages.

Souvenir heureux, celui d’Edwige, anesthésiée par son dentiste, dans La fête aux cerises, qui embarque « pour un vol au pays des joies passées » ; souvenir douloureux, dans Le miracle, celui de Lucia, partie à Lourdes demander que son union avec Constant soit féconde, qui apprend à son retour qu’une autre, la bonne, a été exaucée à sa place, en son absence…

Qu’ils soient heureux ou douloureux, ces souvenirs relatés par Élisabeth Daucourt ont le charme des époques révolues, non pas qu’elles inspirent la nostalgie, mais qu’elles ressuscitent des événements datés, que les personnages ont vécus et qui font partie intrinsèquement d’eux-mêmes, indissociables de leur histoire.

Ces souvenirs relatés par Élisabeth Daucourt doivent également leur charme au style de l’auteur, qui sait en quelques mots, sans qu’il n’y en est d’inutiles, restituer, souvent avec poésie, les êtres et les choses, parler à l’imagination des lecteurs pour les aider à les relier les uns aux autres et leur donner une âme, qu’ils ne peuvent qu’aimer.

Dans Les volets clos, les lecteurs s’y croiraient, dans cette ville du Tessin où Rocco descend du train : « Les rues étroites ont interdit l’accès au soleil dont quelques rayons curieux mais discrets guignent entre les toits de tuiles roses« . Plus loin, ils le voient, comme s’il était sous leurs yeux, quand « il emprunte l’étroit chemin du bas, celui qui caresse le cimetière des êtres aimés à l’ombre de l’église »

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