Des « ultralibéraux » au Luxembourg ?

La création d’un nouveau parti luxembourgeois est l’occasion pour la presse de fustiger le retour du grand méchant ultralibéralisme.

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Des « ultralibéraux » au Luxembourg ?

Publié le 21 juin 2015
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La réponse de Thibaut André.

N'approchez pas / Do not approach. Credits Denis-Carl Robidoux via Flickr ( CC BY-NC 2.0)
N’approchez pas / Do not approach. Credits Denis-Carl Robidoux via Flickr ( CC BY-NC 2.0)

 

Ce billet fait suite à l’article de Véronique Poujol sur la création du nouveau parti luxembourgeois Déi Liberal d’inspiration libérale classique, paru sur le site www.paperjam.lu en date du 16/06/2015.

D’emblée, ça commence très fort avec un titre en guise de punchline : « Les ultralibéraux font bande à part ». À ce jour, malgré mes questions et recherches, je ne suis toujours pas parvenu à me faire définir proprement ce qu’était un ultralibéral et sa doctrine apparente, l’ultralibéralisme. Par ailleurs, si l’ultralibéralisme existe, j’imagine que son opposé, l’ultrasocialisme existe également. Madame Poujol peut-elle éclairer l’humble lecteur que je suis à ce sujet ?

Mais, à mon sens, fort peu soucieuse de toute justesse sémantique, la journaliste avait surtout à l’esprit d’activer un réflexe pavlovien au sein du lectorat en assimilant d’emblée à des monstres les tenants d’« une philosophie du droit et une morale individuelle ayant pour objet la promotion des libertés civiles et le respect de l’individu, de son intégrité physique et morale ainsi que de sa propriété ». C’est ma définition du libéralisme venant en droite ligne des Lumières. J’attends donc sa définition de l’ultralibéralisme pour analyse et comparaison.

Et ce n’est que le début de l’article. La suite est de toute beauté.

L’auteur assimile le DP (Demokratesch Partei, parti démocrate de l’actuel Premier ministre Xavier Bettel) à l’establishment libéral et définit la création du nouveau parti comme un acte de rébellion. Si la deuxième partie est correcte, la première partie prête à sourire car le DP est un parti pro-État comme les autres partis mainstream, ce qui n’est en rien libéral. Il y a donc une contradiction criante dans cette assertion qui est révélatrice des graves lacunes et préjugés de l’auteur en matière de philosophie politique.

Il est agréable de voir que Mme Poujol mentionne l’excellent économiste et prix Nobel F.A. von Hayek mais non sans le salir en le taxant par personne interposée de « pape de l’ultralibéralisme ». Si la journaliste prenait la peine de lire les ouvrages de Hayek ainsi que ceux de Ludwig von Mises et Murray Rothbard pour la comparaison, elle réaliserait pourquoi Hayek est considéré par les membres de l’école autrichienne d’économie comme le plus modéré en matière d’État minimal. Ses positions en faveur des services publics tels que l’assurance-chômage, la sécurité sociale et l’enseignement au-delà des fonctions régaliennes comme la justice, la police et l’armée tendent à le rapprocher plutôt du camp social-démocrate. En outre, c’était un homme posé, courtois et un peu timide qui a également étudié et enseigné les sciences sociales. Il était ouvert au débat contradictoire et allait même jusqu’à défendre des collègues face aux critiques virulentes qu’ils pouvaient essuyer même s’ils ne partageaient pas leurs idées. On est très loin de l’image du mangeur d’enfants et de petits chats que l’auteur tente de lui coller.

Et, à ce stade, nous ne savons toujours pas ce qu’est l’ultralibéralisme…

Ensuite, vient le trio des affreux : Pinochet, Reagan et Thatcher. Si le premier ne recueille pas la sympathie des libéraux, une analyse claire et lucide de la politique socio-économique de Pinochet nous enseigne que les conditions plus libérales qui y furent pratiquées ont favorisé par la suite la transition démocratique pacifique que le Chili a connue. C’est un fait reconnu par les libéraux que Pinochet n’était qu’un affreux dictateur responsable de disparitions, exécutions et persécutions. Ses actes sont hautement condamnables et un devoir de mémoire s’impose. Sa place était indubitablement en prison. Au Chili, le régime d’Allende (avant celui de Pinochet) était loin d’être le paradis terrestre. Il est également important de rappeler que, à côté, la junte argentine (chère à la gauche et à l’extrême-gauche) n’était pas en reste. À ce jour, le Chili est le pays le plus développé au plan économique en Amérique latine. Pour rappel, c’est aussi le seul pays de ce continent ayant connu une transition démocratique pacifique. On ne peut pas en dire autant des dictatures avoisinantes et de l’Europe de l’Est que les intellectuels et journalistes de gauche louaient pour leurs bienfaits avant que la vérité n’éclate.

Retour au Grand-Duché de Luxembourg : les élections législatives luxembourgeoises de 2013 ont donné lieu à un changement politique important avec l’éviction de Jean-Claude Juncker et la mise en opposition de son parti CSV au profit d’une coalition formée par le DP de Xavier Bettel, le LSAP (Parti socialiste) et Dèi Greng (Les Verts). Également, on a vu entrer discrètement au parlement le Parti communiste renaissant de ses cendres. Malgré mes recherches, je n’ai pas trouvé d’article de la main de Mme Poujol pour dénoncer les 100 millions de morts au bas mot que le communisme a produit dans ses diverses mises en pratique. Mais la gauche, c’est moral, ma bonne dame. Même à son extrême.

Quant à Margareth Thatcher, tout libéral pourra parler franchement à Mme Poujol de ses travers conservateurs mais force est de constater, faits à l’appui, qu’elle a sauvé la Grande-Bretagne de la banqueroute grâce à d’ambitieuses réformes économiques libérales. Ronald Reagan essuiera aussi de sévères critiques de la part des libéraux, notamment pour son recours à l’endettement public, mais je tiens à rappeler qu’il a mis fin à la guerre froide et a largement participé à la chute des dictatures soviétiques. Et je pourrais encore digresser pendant quelques lignes pour expliquer à notre journaliste comment le couple Thatcher-Reagan a manœuvré en sous-main pour provoquer la chute du régime infâme de l’Apartheid en Afrique du Sud et permettre la libération et l’accession au pouvoir de Nelson Mandela, et tout cela en évitant un bain de sang. Mme Poujol et ses confrères n’en ont pas parlé à la mort de Mandela le 5 décembre 2013, trop obnubilés par le culte idolâtre repris à gauche comme à droite parmi les partis étatistes. Amnésie collective ou révisionnisme historique sur fond de déni de réalité ?

Mais je digresse. Revenons à nos moutons.

Hayek ayant été classé dans le camp du mal, la journaliste du camp du bien que Mme Poujol semble incarner se permet même de mal orthographier son nom : il s’agit en fait de Friedrich August von Hayek (et non Van Hayek…) qui était d’origine austro-hongroise (et non hollandaise…).
Je passe le paragraphe où la journaliste égratigne Claude Hemmer, un des trois fondateurs de Déi Liberal, pour sa position dans la fonction publique. Lorsqu’un libéral travaille dans le privé, c’est un affreux capitaliste sans cœur apparemment. Lorsqu’il travaille dans le public, même si cela peut être un excellent poste d’observation pour étudier le système et proposer des réformes cohérentes, il fait l’objet de moqueries pour comportement contradictoire.

À vrai dire, outre le fait que Mme Poujol ne connaît visiblement rien du courant libéral, si ce n’est les clichés avilissants et autres sophismes que sa caste véhicule, et que sa vision de l’histoire penche pour le révisionnisme baigné du zeitgeist de la bien-pensance contemporaine, je me demande si notre journaliste a mené un véritable travail de recherche et j’émets de sérieux doutes sur son intégrité journalistique.

En effet, une recherche rapide via Google en utilisant les mots « Hayek » et « Voltairenet » nous offre comme premier choix un article aux arguments aussi fallacieux dont Mme Poujol semble s’être largement inspirée. En fait, elle a même repris des passages entiers de l’introduction sans citer la source.

La conclusion de son article fait référence au récent référendum luxembourgeois dont les trois questions se sont soldées par une réponse négative par la population votante (étrangers résidents et non-résidents travaillent en masse dans le secteur privé). Quand on sait que cette dernière est constituée majoritairement de fonctionnaires vivant de la ponction fiscale et de la manne publique, on ne peut pas être étonné d’un tel résultat. L’arrivée d’un parti se revendiquant du courant libéral classique ne peut qu’apporter un air de fraîcheur dans ce conservatisme étatique nous menant à la ruine. Mme Poujol n’est pas sans savoir que les pensions publiques sont impayables au-delà d’un horizon de 30 ans. Et d’autres défis de taille passeront par des réformes ambitieuses si nous voulons léguer à nos enfants et petits-enfants une société prospère. Pour information, ce parti est dès lors très bien accueilli par le milieu libéral luxembourgeois.

Je reste à la disposition de Mme Poujol pour toute information complémentaire et surtout pour tout conseil de lectures qu’elle souhaiterait obtenir sur le libéralisme. Mes lectures intensives comprennent des ouvrages de Bastiat, Condillac, Turgot, Say, Menger, Böhm-Bawerk, Mises, Hayek, Rothbard, Hoppe, Hülsmann, Huerta de Soto et j’en passe.

Dans l’intervalle, je conseille à Mme Poujol de se procurer rapidement La Présomption fatale et La Route de La Servitude de F.A. von Hayek. Ces ouvrages célèbres sont très riches en enseignements et, surtout, ils nous montrent sur quelle pente savonneuse nos démocraties vacillantes peuvent se positionner, particulièrement lorsqu’elles détruisent à petit feu les institutions défendant la propriété privée sans laquelle nulle civilisation ne peut survivre.

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  • Superbe article.
    Cette correspondante de l’AFP semble avoir pour formation une licence d’histoire dune université française.
    Ceci explique sans doute le peu de compétences et l’orientation politique de l’auteur.
    Seul des personnes de grandes qualités et à l’esprit critique sortent indemnes de ces centres de propagandes socialo-communistes que sont devenus la plupart des facultés de lettres en france.

    • lisez Le Livre Noir de l’AFP de Jean Robin. L’AFP est une véritable agence de propagande gauchiste et de désinformation. c’est une agence socialocommuniste qui en gros fait de la propagande socialiste, islamophile, immigrationniste et anti israélien.
      70% des articles de journaux viennent de l’AFP. L’AFP fait exprès de taire certains évènements et de mettre en exergue d’autres évènements.

  • V. Poujol est francaise, Faut pas aller chercher plus loin 😉

    • Xavier Bëttel est luxembourgeois (‘as e Lëtzebuerger’. en langue locale).

      En tant que Luxembourgeois moi-même, je me dispense de commentaire, faut pas aller chercher plus loin.

  • L’ultralibéralisme n’existe pas. L’ultralibéralisme est un épouvantail planté par les étatistes pour effrayer les moutontribuables.
    L’un des raisons, je pense que tant de gens croient qu’il existe un ultralibéralisme c’est à cause du fait qu’au luxembourg (comme en belgique), il existe un parti traditionnel qui se dit libéral (mais qui n’est en rien libéral). Au luxembourg, c’est le DP. d’ailleursi si vous discutez avec des membres de ces soi disants partis libéraux vous ferriez que la plupart de ses membres ne savent pas ce qu’est le libéralisme, ils ne connaissent pas les principaux auteurs libéraux. Vous seriez choqué de la méconnaissance de la plupart de ces gens concernant le libéralisme.
    En gros, ce que veulent ces soi disants libéraux c’est un état providence qui puisse fonctionner tout en essayant de préserver les entreprises (ils se rendent quand même compte que ce sont elles qui créent de la richesse). Cela n’a rien à voir avec le libéralisme classique. Qu’il soit clair, je suis parfaitement au courant qu’il n’y a pratiquement aucune chance pour qu’un vrai parti libéral arrive au pouvoir mais il existe certains partis traditionnels plus au moins libéraux (PLR, Parti conservateur (en GB),…). Certes, on ne peut pas dire que ce sont de vrais partis libéraux mais au moins, ce sont des partis qui ont un certain degré de libéralisme. Mais des partis comme le DP au luxembourg ou le MR en Belgique n’ont pas grand chose de libérales.
    Friedman disait qu’un pays libéral avait des dépenses publiques à maximun 15 %. Cela me fascine tjs ces gens qui sont persuadés que le monde actuel est dirigé par l’ultralibéralisme. J’imagine que pour ces gens, les pays communistes étaient des pays modérément libéraux. Je crois qu’ils confondent capitalisme et libéralisme et qu’ils ne savent pas ce qu’est le capitalisme de connivence. C’est quand même fascinant de voir des gens hair le libéralisme alors qu’ils ne savent pas ce que c’est. Questionner un antilibéral sur le libéralisme, quels sont les principaux penseurs libéraux,..ect vous ferrez en général, il ne sait pas du tout ce qu’est le libéralisme

  • « C’est un fait reconnu par les libéraux que Pinochet n’était qu’un affreux dictateur responsable de disparitions, exécutions et persécutions. Ses actes sont hautement condamnables et un devoir de mémoire s’impose » la plupart des libéraux par peur d’être assimilé à Pinochet tombe dans le piège des gauchistes en acceptant la version que la majorité des gens connaissent qui n’est ni plus ni moins qu’une diabolisation de Pinochet et qui est une réécriture de l’histoire par les gauchistes. Moi, je dit qu’il faut dire la vérité historique, il ne s’agit pas de faire Pinochet un héros, de le glorifier juste de dire la vérité. ET cela n’a rien à voir avec le fait que Pinochet a mené une politique économique plutôt libérale car c’est exactement la même chose avec Franco qui n’était en rien libéral. Franco et Pinochet sont certes deux dicateurs mais aujourd’hui, on les diabolise, il est plus que temps d’arrêter la propagande gauchiste à leur sujet.

    La vérité est là, le chili était au bord de la guerre civile (manifestations, greves,….) à cause de la politique sectaire et antidémocratique d’Allende.Quelques mois avant la chute d’Allende, le sénateur communiste Volodia Teitelboim pronostiquait entre 500.000 et un million de morts en cas de guerre civile. l’armée a fait le coup d’état à cause de l’infiltration de mouvements d’extrême gauche dans l’armée. Sans Pinochet, il y aurait eu une guerre civile

    dans la vie, il faut assumer les conséquences de ces actes. le 4 mai 1973, l’opposition au gouvernement d’Allende a raté de peu la majorité des deux tiers à la chambre (qui lui aurait permis de passer outre les vetos présidentiels) et au sénat (qui lui aurait permis de destituer le président) car il y a eu des fraudes massives organisé par allende. si allende avait respecté le processus démocratique, il n’y aurait pas eu de coup d’état.
    lisez « Pinochet, l’autre vérité » de Philippe Chesnay. la majorité des vctimes du régime de pinochet furent les chefs de la gauche, des gens qui avaient pour but de créer une dictature du prolétariat.

    Lisez l’historien Pierre Vayssière spécialiste de l’amérique latine. notamment son livre « Le Chili d’Allende et de Pinochet dans la presse française : Passions politiques, informations et désinformation, 1970-2005″ qui montre l’opération de manipulation médiatique orchestré par la gauche francaise.
    lisez La face cachée d’Allende: antisémitisme et eugénisme de Victor Farias, un intellectuel juif qui a aussi écrit Heidegger et le nazisme. il est aussi l’auteur d’autres ouvrages :Les nazis au Chili et La gauche chilienne: 1969-1973. le point de départ de ce livre est le refus du gouvernement d’allende d’extrader l’ex SS-Standartenführer, Walther Rauff. le célèbre « chasseur de nazi », Simon Wiesenthal était convaincu que Salvador Allende, avait délibérément protégé le responsable nazi et il a demandé des années plus tard à son ami, Victor Farias d’enquêter. la thèse de doctarat défendu par alllende Hygiène mentale et délinquance montre à quel point il était raciste et eugéniste. en tant que Ministre de la Salubrité, il se charga de présenter le projet de Loi de stérilisation des aliénés applaudi par les racistes qui est quasiment la meme chose que la Loi sur la protection de la descendance contre les maladies héréditaires du régime nazi. le fondateur du Parti socialiste chilien, Mamaduke Grove, était régulièrement « payé » par le Ministère des Affaires Etrangères nazi et que les ministres socialistes du gouvernement du Front Populaire étaient également directement « soudoyés » par l’ambassade nazi de Santiago. En 1956, Allende était-il actionnaire et directeur général de l’une des plus grandes sociétés anonymes du Chili, la Société Pelegrino Cariola.

    • Allende n’était pas un démocrate ( il a gracié les militants du Mouvement de la Gauche Révolutionnaire (MIR) ainsi que d’autres membres de groupes d’extrême-gauche qui avaient été emprisonnés pour faits de terrorisme qui ont repris leur activité terroriste en toute impunité, rachet des actions de la Compagnie manufacturière de Papiers et de Cartons, entreprise clé car seule productrice de papier pour les journaux, fermeture de stations de radios de l’opposition, tentative de fermeture du journal El Mercurio, la nationalisation de la maison d’édition Zig-Zag, attaques contre les journaux d’opposition El Mercurio, La Segunda, Tribuna, Mañana, etc, interdiction faite aux chaînes de télévision de l’Université catholique, Canal 13 et Canal 4, et celle de l’Université du Chili, Canal 9, assassinats politiques (Edmundo Pérez Zujovic,….). le 26 mai 1973, la Cour suprême s’adressa à Allende pour dénoncer l’intromission de l’exécutif dans le judiciaire et pointer une rupture de l’ordre judiciaire ; Allende répondra le 12 juin en déclarant que le gouvernement ne pouvait faire appliquer les décisions de justice « de manière indiscriminée » et qu’il revenait à l’exécutif de juger de l’opportunité ou non de leur application ; le 25 juin, la Cour suprême répliquera en dénonçant l’arbitraire politique du gouvernement d’Unité populaire qui réduisait à néant les droits des justiciables. le 4 mai 1973, l’opposition au gouvernement d’Allende remporta les élections législatives avec 55,6% des suffrages (87 députés et 30 sénateurs) contre 44,1% pour l’Unité populaire (63 députés et 20 sénateurs) ; l’opposition rata de peu la majorité des deux tiers à la chambre (qui lui aurait permis de passer outre les vetos présidentiels) et au sénat (qui lui aurait permis de destituer le président) ; un rapport réalisé par des professeurs de la faculté de droit de l’Université catholique et présenté le 18 juillet fera état de fraudes électorales de la part du gouvernement. Ceux-ci attiraient l’attention sur le fait que 750.000 nouveaux électeurs avaient été inscrits depuis les élections municipales de 1971 alors qu’ils n’auraient dû être normalement que 500.000. Le rapport décrivait également les énormes disparités dans les augmentations de nouveaux électeurs selon les circonscriptions. Il signalait par ailleurs des cas de fraudes avérés à Santiago ou Coquimbo (carnets d’électeurs ne correspondant pas aux personnes ayant voté, centaines d’électeurs inscrits le dernier jour au même domicile, etc.) Le rapport concluait : « lors des élections parlementaires de mars a eu lieu une fraude électorale de grandes proportions, qui concerne entre 200.000 et 300.000 votes illégaux ». le 23 aout 1973, la Chambre des députés approuva, par 81 voix contre 47, un projet d’accord présenté la veille accusant le gouvernement d’Allende d’avoir violé la légalité, de viser à s’emparer de la totalité du pouvoir afin d’instaurer un système totalitaire, en opposition absolue avec la constitution chilienne ; dans cet accord, les parlementaires chiliens demandaient au président de la République, mais aussi aux forces armées et aux carabiniers de mettre fin aux agissements illégaux du gouvernement d’Unité populaire qui mettent en péril l’ordre constitutionnel et légal du pays.

      Allende n’était un rien un modéré son but était une dictature du prolétariat, c’était un fervent marxiste. « Notre stratégie écarte de fait la voie électorale comme méthode pour atteindre notre objectif de prise du pouvoir. » « Nous affirmons que c’est un faux dilemme que de se poser la question si nous devons prendre la ‘voie électorale’ ou la ‘voie insurrectionnelle’. » (21e congrès général du Parti socialiste, Linares, 1965) « Le Parti socialiste, comme organisation marxiste-léniniste, pose la prise du pouvoir comme objectif stratégique à atteindre […] pour instaurer un État révolutionnaire […] » ; « La violence révolutionnaire est inévitable et légitime. […] Elle constitue l’unique chemin qui mène à la prise du pouvoir politique et économique, et à sa défense et renforcement » ; « « Seule la destruction de l’appareil bureaucratique et militaire de l’État bourgeois peut consolider la révolution socialiste » ; « Les formes pacifiques ou légales de lutte (revendicatrices, idéologiques, électorales, etc.) ne conduisent pas par elles-mêmes au pouvoir. Le Parti socialiste les considère comme des instruments limités d’action, intégrés au processus politique qui nous emmène à la lutte armée. » (22e congrès général du Parti socialiste, Chillán, 1967). en 1972, le sous-secrétaire général du parti socialiste, Adonis Sepúlveda Acuña rappelait que l’insurrection révolutionnaire restait bien l’objectif final des socialistes chiliens : « Notre stratégie met, de fait, de côté la voie électorale comme méthode pour atteindre notre objectif de prise du pouvoir. » « […] s’il s’agit de répondre à la question de savoir s’il est possible de conquérir le pouvoir par la voie électoral, c’est-à-dire l’instauration d’un gouvernement ouvrier qui exproprie les moyens de production de la bourgeoisie, pour organiser une société socialiste, sans aucun doute possible, aussi bien l’histoire du mouvement ouvrier que les principes marxistes indiquent clairement que cela n’est pas possible et qu’une politique de cet ordre ne sert seulement qu’à semer de fausses illusions auprès des travailleurs. » « Le parti a un objectif, et pour l’atteindre il devra employer les méthodes et les moyens que la lutte révolutionnaire rendra nécessaires. L’insurrection devra être déclenchée quand la direction du mouvement populaire sentira que le processus social qu’elle a elle-même lancé aura atteint sa maturité et qu’elle se prépare à être l’accoucheuse de la révolution. »

      L’étude des chiffres macro-économiques illustrent l’ampleur du désastre économique provoqué par la gestion du gouvernement Allende : baisse du PIB qui se retrouve en 1973 pratiquement au même niveau que 1970 (-1,21% en 1972 et -5,57% en 1973) ; indice des salaires réels chutant de 45% durant la même période ; pouvoir d’achat chutant de 10% d’octobre 1970 à avril 1973 sur base des prix alimentaires ; investissement brut dégringolant à 15% du PIB contre une moyenne de plus de 21% entre 1965 et 1970. Dans le même temps, les dépenses publiques passeront de 13% du PIB en 1970 à 53% en 1973 avec un déficit budgétaire sautant de 39% des recettes de l’État en 1970 à 115% en 1973 (de 2,7% du PIB en 1970 à 24,7% en 1973). De leur côté, les entreprises publiques cumuleront plus d’un milliard de dollars de pertes.
      Les déséquilibres économiques provoqueront l’explosion des importations qui s’envoleront de 956 millions de dollars en 1970 à près de 1,5 milliard en 1973, alors que la valeur des exportations stagne (sauf en 1973, grâce à un boom du prix du cuivre sur les marchés internationaux). La balance commerciale excédentaire de 155,9 millions de dollars en 1970 devint déficitaire de 16,3 millions en 1971, 253,4 millions en 1972 et 138,3 millions en 1973. Parallèlement, la dette extérieure augmentera de 500 millions de dollars entre 1970 et 1973. Le tout encadré par de rigides barrières douanières qui interdisaient l’entrée de pas moins de 300 produits au Chili et des tarifs douaniers pouvant grimper jusqu’à 750%, avec une moyenne de 105% en 1973. De même, on comptera pas moins de 15 taux de change différents, avec un ratio entre le plus bas et le plus élevé excédant les 8.000% !
      Plus dramatique encore : le déchaînement de l’inflation et l’établissement d’un plafonnement des prix qui, au lieu de juguler l’augmentation des prix, créera des ruptures dans l’approvisionnement et conduira à l’hyperinflation. De 28% en 1971 à 606% en septembre 1973. Avec une monnaie chilienne qui sera dévaluée de près de 1.000% face au dollar. Cette situation laissera les commerces désapprovisionnés et donnera naissance aux interminables queues devant les magasins, typiques de tout pays socialiste qui se respecte. La majorité des biens de première nécessité ne se trouvant plus qu’au marché noir. Le pays restera finalement sans réserves, ne serait-ce que pour importer les denrées les plus élémentaires. Le 6 septembre 1973, le gouvernement Allende annonçait que les réserves de farine ne pouvaient couvrir que quelques jours.

      « L’expérience du docteur Allende a échoué parce que sa coalition d’Unité Populaire, dominée par les socialistes et les communistes, a tout fait pour installer au Chili un système socialiste radical auquel était farouchement opposée plus de la moitié de la population. Il avait été élu en 1970 avec seulement 36,3% des voix, à peine 39.000 votes de plus que son concurrent conservateur arrivé en deuxième place. Lors des élections législatives du début de cette année, l’Unité Populaire n’a seulement obtenu que 44%. Pourtant, en dépit d’un parlement dominé par l’opposition, souvent en méprisant les tribunaux et face au chaos économique et à une inflation qui faisait rage, le régime a continué de « réquisitionner » des entreprises, grandes et petites. Ces actions ont polarisé le Chili comme jamais auparavant, provoquant une opposition tous azimuts, non seulement de la part du riche ou d’une frange fasciste, mais bien de la classe moyenne qui représente la moitié de la population et qui se voyait affronter sa propre destruction. Si le docteur Allende avait progressé de manière plus réfléchie, s’il avait fait une pause pour consolider après la nationalisation des industries de base du Chili et posé des limites raisonnables à son programme socialiste, il aurait probablement terminé son mandat avec de grandes chances de succès. » new york times
      la vérité est là, le chili était au bord de la guerre civile (manifestations, greves,….).Quelques mois avant la chute d’Allende, le sénateur communiste Volodia Teitelboim pronostiquait entre 500.000 et un million de morts en cas de guerre civile. l’armée a fait le coup d’état à cause de l’infiltration de mouvements d’extreme gauche dans l’armée

    • Pour Franco, lisez ceci: LA GUERRE D´ESPAGNE – L´HISTOIRE FACE À LA CONFUSION MÉMORIELLE de Stanley Payne (les livres de cet historien ont été interdits sous l’espagne franquiste donc on ne peut pas l’accuser de sympathie franquiste). autre livre à lire: Ma guerre d’Espagne : Brigades internationales : la fin d’un mythe de Jean-Jacques Marie (Postface), Sygmund Stein (Auteur), Marina Alexeeva-Antipov.
      ansi que Le Temps de Franco de Michel Del Castillo
      plusieurs historiens intéressants sur franco: Brian Crozier, Antony Beevor , Bartolomé Bennassar, Gerald Brenan, Philippe Nourry.
      Les républicains espagnols étaient en rien des démocrates, ils voulaient créer une dictature du prolétariat.
      un texte intéressant à lire sur le commencement de la guerre civile en espagne: http://www.contrepoints.org/2014/04/01/19527-fin-de-la-guerre-despagne
      Franco a refusé à plusieurs reprises de participés à des coups d’états, il n’est intervenu que quand il a vu qu’il n’avait pas d’autres choix

      • Cher Jacques,

        Merci pour ces rappels indispensables, mais je crains que rares seront ceux qui vont accepter le fait qu’Allende était un tyran rouge. D’ailleurs les communistes ne font plus peur. Aussi, à l’époque de Pinochet, en pleine guerre froide, les alliés de l’URSS sont ceux qui ont écrit l’histoire.

        Ce qui est intéressant aussi, c’est de voir quelles ont été les réactions au coup d’Etat du général Sissi en Egypte, mettant fin au régime issu des urnes, des frères musulmans. Même Le Monde, dans son éditorial, approuvait le coup.

        Rappel : comme vous l’avez écrit, il ne s’agit pas de faire aucune apologie, mais de reconnaître les circonstances pour mieux comprendre les actions. Et aussi de garder à l’esprit que la vie politique n’offre souvent que le choix entre des maux et des moindres maux.

        • « si, à l’époque de Pinochet, en pleine guerre froide, les alliés de l’URSS sont ceux qui ont écrit l’histoire » encore aujourd’hui, ce sont les gauchistes qui réécrivent l’histoire. Toute l’histoire a été réécrite par les gauchistes. l’exemple le plus flagrant c’est la diabolisation du moyen âge (qui était loin d’être une période obscurantiste) et de l’église catholique. à lire « Pour en finir avec le Moyen Age Poche « de l’historienne Régine Pernoud , « Le Moyen Age, une imposture » de l’historien Jacques HEERS et » Le Moyen Age, Ombres et lumières « de Jean VERDON (livre intéressant mais pas très détaillé trop généraliste)
          « les réactions au coup d’Etat du général Sissi en Egypte, mettant fin au régime issu des urnes, des frères musulmans.  » j’ai quand même du mal à pleurer pour les Frères Musulmans. Certes, ils ont été élus mais cela ne leur donnait pas le droit de se comporter comme ils l’ont fait. Il est clair que l’Egypte était en train de devenir une dicature islamiste. De plus, il y a eu un vaste mouvement anti Frère Musulman qui était organisé. L’armée égyptienne a bien fait d’intervenir mais elle aurait dû rendre le pouvoir et non pas le conserver pour elle. c’est comme pour pinochet: il avait raison d’intervenir mais il n’aurait pas dû conserver le pouvoir aussi longtemps, il aurait dû le rendre plus tôt (il a quand même fini par rendre le pouvoir). Allende a été élu président en raison des divisions de la droite qui avait deux candidats (il n’y avait qu’un tour).
          Ce n’est pas parce que l’on est élu que l’on a tout les droits. Déja, il se peut très bien que l’opinion publique change d’avis (comme ce fut le cas en Egypte), si je me souviens bien une courte majorité à soutenu l’intervention de l’armée. La démocratie n’est pas la dictature de la majorité, il faut aussi respecter la minorité. Si un gouvernement est élu mais qu’il commence à agir de manière dictatoriale (comme ce fut le cas en Egypte), je pense que l’armée a le droit d’intervenir (à condition de rendre le pouvoir le plus vite possible au peuple), si on utilise des méthodes antidémocratiques, il ne faut pas s’étonner à ce que nos opposants fassent de même. En Egypte, les frères musulmans ont vraiment été stupide de croire qu’ils pouvaient faire ce qu’ils voulaient, ils n’ont que récolter ce qu’ils ont semé

  • Qu’attendre d’autre d’une journaliste nationale-socialiste idolâtre de Van Staline et des goulags ?

    …On peut s’abaisser à son niveau, c’est facile il suffit de déconnecter son cerveau.

  • Excellente réponse. Ce qui est incroyable dans le texte commis par Mme Vérinique Poujol publié sur PaperJam est l’omniprésence du terme ultralibéral (5 fois) sans jamais avoir à le définir. De toute manière on comprend directement l’orientation de l’auteur vu les termes employés dans ce texte:
    * ultralibéraux
    * dissidents
    * symptôme d’un malaise
    * acte de rébellion
    * désinhibition de certains membres en manque de repères
    * Pinochet, Reagan et Thatcher
    * mouvement rebelle, même marginal
    Que des termes laissant croire à un putsch des « ultra » sur le DP.

    Cela dit, il faut reconnaitre que Mme Véronique Poujol a également rédigé un texte à peu près neutre sur le même site et le même parti: http://paperjam.lu/news/dei-liberal-veut-faire-bouger-les-lignes-du-dp – cela devait être fait remarquer.

    Dans tous les cas, dire que le DP est un parti libéral c’est vraiment trompeur. Je le verrais plutôt comme un parti centriste ou social-démocrate progressiste, similaire à tous ces ventres mous qui gouvernent tant de pays et veillent scrupuleusement à leur démantèlement et déracinement au profit de leur carrière et intérêts personnels, et de super structures technocratiques gérées par des personnes non élues, et mains exécutrices de divers groupes d’intérêts.

    De plus, le DP n’a été que le marche pied ayant permis au parti socialiste de reprendre le pouvoir au CSV. Même si le DP est la tête d’affiche du gouvernement via son premier ministre et son ministre des finances, la récente orientation politique laisse plutôt à penser que c’est le parti socialiste qui tient les rennes. Les dernières réformes et l’aplaventrisme dont font preuve cette coalition ne laisse présager rien de bon. Et en cas de problème, c’est le DP qui prendra tout le blâme, et le LSAP pourra toujours retourner leur veste comme ils l’ont fait par le passé avec le CSV, pour un plat de lentilles… et se refaire une virginité en cas de nouvelles élections.

    D’ailleurs, semble-t-il qu’une pétition vient d’être introduite pour une dissolution du gouvernement et la tenue de nouvelles élections législatives: http://www.lessentiel.lu/ro/news/dossier/petition/story/16731397

    Mais bon, y a quand même un problème avec toute cette farce… si c’est pour laisser le vainqueur en terme d’élus dans l’opposition et former un gouvernement de coalition avec tous les perdants, ça ne fera strictement rien avancer…

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libéralisme
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