Victoire statistique de la BCE

Ceux qui font du mauvais esprit vont trouver curieuse cette concomitance : les statistiques de la BCE ne viennent-elles pas à point pour montrer dès maintenant les bienfaits de la campagne de rachats ?

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Mario Draghi en juin 2014 2 (Crédits ECB European Central Bank, licence Creative Commons)

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Victoire statistique de la BCE

Publié le 19 mars 2015
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Par Jacques Garello.

Mario Draghi en juin 2014 2 (Crédits ECB European Central Bank, licence Creative Commons)
Mario Draghi en juin 2014 2 (Crédits ECB European Central Bank, licence Creative Commons)

 

Lundi 9 mars 2015 était un jour doublement historique pour la Banque Centrale Européenne. D’une part, elle lançait son programme de rachats d’emprunts publics à taux nul ou négatif. D’autre part, elle annonçait que la zone euro s’engageait dans une période de croissance soutenue et révisait de manière encourageante ses prévisions pour les deux prochaines années.

Ceux qui font du mauvais esprit vont trouver curieuse cette concomitance : les statistiques de la BCE ne viennent-elles pas à point pour montrer dès maintenant les bienfaits de la campagne de rachats ?

Payer pour prêter

On ne dira jamais assez l’audace de cette innovation, qui consiste pour la BCE à racheter des titres d’emprunts à un taux négatif. Entre les mains de ses détenteurs actuels, ces titres ne rapportent rien, parfois même ils leur coûtent : ce serait le cas pour un tiers des titres à acheter, avec des taux d’intérêt négatifs pouvant aller jusqu’à 1 ou 2 %. La BCE est bonne fille, elle ira jusqu’à acheter des titres à taux négatif s’il ne dépasse pas -0,2 %. Comprenons bien ce qui se passe : la BCE paye pour prêter !

Nous voici donc en rupture de capitalisme classique : fin de la course au profit, la perte est un bon optimum social. Évidemment cette nouvelle logique s’explique par le désir de venir au secours des banques de la zone euro surchargées en titres d’emprunt en général émis par les États. Et, de fait, la plupart de ces emprunts ont peu de chances de s’apprécier actuellement, ils ont même tendance à se déprécier. Toujours bonne fille, la BCE envisage sans hésiter de racheter non seulement des obligations émises à l’occasion d’emprunts d’État mais aussi celles qui ont été émises par diverses instances financières de l’eurozone, depuis le Fonds de stabilisation financière jusqu’à des agences nationales (comme l’Unedic et la Cades françaises), en passant par la Banque Européenne d’Investissement.

On peut insister sur le caractère massif de ces rachats. Dès ce mois, 50 milliards d’euros seront proposés aux financiers européens. Mais la cible est le rachat de quelque 1.100 milliards d’euros d’ici septembre 2016. « On ne manquera pas de vendeurs », rassure Mario Draghi.

Les prêts font les dépôts

Plus la BCE prêtera, plus ses actifs se gonfleront. Plus les actifs gonflent, plus le passif peut s’accroître. « Loans make deposits » (les prêts font les dépôts)  est un vieil adage bancaire : plus un banquier a de créances en portefeuille, plus il peut lui-même s’endetter. La BCE pourra donc émettre davantage d’euros, chaque euro étant une dette de la BCE.

Évidemment, il s’agit d’un jeu de masses comptables qui n’a aucun rapport ni avec la qualité des prêts accordés ni avec la nature des dettes contractées par la banque. L’important n’est-il pas que l’argent abonde dans la zone euro et permette à son tour de financer des crédits et du pouvoir d’achat de nature à relancer l’économie ? Autre conséquence heureuse : n’est-ce pas soulager les finances publiques des États endettés que de leur racheter leurs dettes et d’éviter les crises de trésorerie qui coûtent cher ? L’opération est donc parfaite… si l’on croit que l’inondation monétaire est une bonne chose. En fait, comme l’avait dit Jacques Rueff à propos des DTS (droits de tirage spéciaux) inventés par le FMI en 1969, c’est « un plan d’irrigation en période d’inondation ».

Les clignotants au vert

Si la démonstration précédente ne vous a pas convaincus, la BCE va vous donner des chiffres incontestables. En effet, les services statistiques de la banque vont donner des prévisions tout à fait rassurantes : le taux de croissance du PIB, qu’on attendait en général à 1% en 2015, sera à 1,5 % et atteindra 2% en 2017. Le taux d’inflation, qui était prévu à 0 % cette année, sera à 0,8 et atteindra 2% en 2017 (on dit maintenant que c’est le « taux d’inflation qui assure la stabilité des prix », curieuse manière de transformer une hausse en stabilité). Enfin, les taux de déficits publics dans la zone seront diminués de 2 % dans l’ensemble de la zone dès cette année. Une pure merveille ! Évidemment la BCE ne peut dire comment ces performances au niveau de la zone se répartissent entre les 19 pays qui la composent – mais on sait que la France est en dessous des performances d’ensemble. Voilà donc une belle victoire statistique qui autorise certains commentateurs à annoncer que les clignotants sont maintenant au vert. Daltoniens sans doute. Ce qui est sûr, c’est que l’euro chute à toute allure (il sera peut-être ces jours prochains à parité avec le dollar), que la France n’a visiblement pas bénéficié de l’euro faible, le déficit du commerce extérieur s’est accru, et que la courbe du chômage se tord de rire.

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  • La magie du verbe ! Aveuglé par son pouvoir d’imprimer de la fraîche, SuperMariole se prend pour un dieu.

    On n’oublie pas que la guerre monétaire n’est qu’accessoirement une guerre entre monopoles monétaires. La guerre monétaire est d’abord une guerre contre les citoyens à qui on impose de supporter la monnaie trafiquée.

    Cette guerre monétaire est une guerre civile.

  • Hello, pourquoi affirmer que la BCE paye pour prêter alors qu’elle rachète des titre à taux négatif ? Si elle rachète des titres à taux négatifs c’est plutôt une bonne affaire non ? Aidez-moi à comprendre, merci.

    • Un taux négatif signifie que le créancier verse un intérêt au débiteur. Autrement dit, à la fin de l’histoire, le débiteur doit rembourser moins que ce qu’il a reçu au départ. Celui qui s’endette s’est enrichi sans rien faire, tandis que celui qui a fait l’effort de prêter est plus pauvre. Amusant, non ?

      • D’accord, donc lorsque la BCE rachète des titres ça signifie qu’elle devient le débiteur, et que donc c’est elle qui paie à la place des Etats pour les rembourser. Ou alors je m’emmêlle les pinceaux et en fait elle rachète aux banques, et du coup les Etats remboursent direct à la BCE et les banques sont tranquilles.

        Mais si c’est ça, étant donné que ce sont les meilleurs dettes (ou du moins celles des meilleurs débiteurs) est-ce que ça change vraiment quelques chose pour les banques ? le risque de ne pas se faire rembourser moins que ce qu’on a prêté est-il si élevé ?

        • Encore un petit effort, vous allez y arriver.

          « donc lorsque la BCE rachète des titres ça signifie qu’elle devient »… le créancier qui va perdre de l’argent dans l’opération. Mais la BCE, elle s’en fout de perdre car, quand elle ventile sa thune d’arnaqueur aux Obèses impécunieux, en réalité bien sûr, c’est vous qui payez en perdant du pouvoir d’achat directement sur votre salaire et votre épargne. Rien n’est jamais gratuit et il faut toujours un pigeon pour équilibrer les comptes. Ne cherchez plus : le pigeon, c’est vous !

      • Oui, mais c’est le « TAEG », sans la prise en compte de l’inflation ni de la monnaie avec laquelle la B.C.E. rachète cette dette: bien sûr que si c’est en $ ou en ChF, elle n’y a pas perdu grand chose, puisque l’ *€ s’est dévalué face à ces deux monnaies!

  • Les banques centrales ont une gestion vraiment calamiteuse des actifs en rachetant des obligations au plus haut. Elles ont déjà montré leur incompétence en revendant l’or au plus bas il y a 15 ans et en le rachetant actuellement au plus haut.
    Et après, on s’étonne que l’économie va mal…

  • Peut être est il trop tôt pour conclure en e qui concerna la France.
    En effet compte tenu de son système d’amortisseurs sociaux, elle souvent la dernière à rentrer en récession mais aussi la dernière à bénéficier de la reprise quand elle vient.
    Il n’empêche que la reprise venant de l’extérieur n’encouragera pas nos dirigeants à réformer pour qu’elle puisse également venir de l’intérieur et c’est ça qui m’effraie!
    Le paradoxe c’est que l’action de la BCE encourage l’immobilisme chez nous!

    • Il n’est jamais assez tôt pour conclure que les injections monétaires finissent toujours en crises économiques et sociales profondes. Face au rouleau compresseur de la fausse monnaie, pourquoi investir, pourquoi prendre des risques, pourquoi faire des efforts, alors que vous êtes sûrs de finir perdant ? Cyniquement, les politiciens évoquent la concurrence déloyale pour justifier leurs interventions collectivistes. Mais la seule concurrence déloyale, ce sont précisément ces interventions collectivistes, et en premier lieu l’émission de fausse monnaie.

      Avec ses prévisions falsifiées, SuperMariole veut faire croire que, cette fois-ci, c’est différent. Il veut faire croire qu’il explore un territoire inconnu alors que l’expérience a déjà été tentée de multiples fois par le passé. Cette fois-ci finira, comme toutes les expériences historiques équivalentes, par l’appauvrissement généralisé de la population. Concernant la France, étant donné le point de départ, ce QE aura des conséquences dramatiques. Ce QE, c’est de la haute trahison contre la population.

    • Oui, vous avez raison! Au lieu de profiter de ce délai pour réformer (en profondeur), la France (F. Hollande qui n’a l’air d’y piger que pouic), attendait des partenaires leur croissance qui améliorerait, sans rien faire, la situation, la balance commerciale française et, pourquoi pas, l’emploi!

      D’où, une France, « ancien co-moteur de l’Europe » (esbroufe!), se situe de plus en plus dans les pays « du Sud », qui eux-mêmes, ont réagi.

      Il serait temps de constater que la France, si elle n’est pas au bord de « l’amende » européenne, a tout de même un commissaire européen qui aura beau pérorer, il sera soigneusement surveillé, jusqu’au moindre faux-pas « pro-Français ». Claude Juncker, à qui il a été imposé, en vieux renard de la politique nationale ou communautaire, savait très bien ce qu’il faisait, en laissant P. Moscovici venir (il n’avait pas le choix!) mais en le laissant perpétuellement en porte-à-faux entre exigences de l’Union et politique française!

      • C’est plus compliqué que cela, car en 2010, pour sauver l’Euro le Conseil a imposé à la Commission une mission d’ingèrence sur les administrations nationales. La BCE a servi pour couvrir les dettes grecques dont les prèteurs sont français et allemands qui ne sont pas unnocents de la cata. En effets ils furent très persuasifs pour faire acheter à l’Etat grec dans les années 80 des biens sans pouvoir les rembourser. Le degré de corruption de la classe politique grecque, dans un pays sans industrie, des fonctionnaires engagés sur des standarts de rèpublique bananière, aucun impot, ni tva c’est à dire sans budget auront eu raison d’un peuple qui reste l’éternelle victime de leur dirigeant democrates ou dictateurs. La France vit bien au delà de ses moyens avec 600 milliads de social, sans rèforme pour relancer le cercle virtueux de la croissance. Moscovici est responsable en France pour avoir cru à une reprise sans rèformer. Mais que faire sans rèformes , au moins sur le gaspillages? Etre au pouvoir àlors que DSK devait ètre celui qui savait, ce n’est pas facile. La gauche avec Hollande fut une surprise. Une èquipe qui sans dèvaluation n’a pu que taxer plus pour sauver notre model social en faillite. Moscovici est unhomme qui ne peut que comdaner la France, pour faire rèagir la classe polique française. Reste que c’est le FN qui devrait prendre la charge du pays et de ce fait renoncer à beaucoup de ses promesses si l’article 50 de Traité n’est pas soulevé. La BCE aura le control des Etats pour imposer la raison des banquiers de plus en plus riches par la règle stupide dìinterdir les peuples à laisser les Etats à emprunter à taux 0 sur l’argent dèposée banque: Les mondialistes ont agi sans aucun dèbat, dans le but de faire disparaitre les Etats en les ruinant. Le monopole de la monaie par la BCE comme pour la FED reste le plus grand scandale de l’histoire européenne, car chaque pays dans la zone Euro est trop diffèrent pour imposer un model unique. Meme que la promesse de la valeur de l’Euro n’aura pas été tenu….Les USA ont finalement rèussi leur plan Marshal…

  • La BCE emploie le QE ou la planche à billet pour masquer les maux. C’est la fuite vers l’avant. La suisse ne peut plus racheter les dettes publiques des autres pays Européens. Le bilan de La bc suisse atteint un record. Celui de la BCE peut exploser sans que personne ne se rend compte. Pas de surveillance pas de contrôle, seul le marché sanctionnera quand l’euro dégringolera et le pouvoir d’achat de l’européen se détériore. Peu de chinois viendront au secours. Peut être les USA offriront un plan Marshall et sélectionnera quelques pays et imposera la sortie des plus faibles.
    Ils ne Rachèteront des les dettes de leurozone qu’au prix qui leur convient. Ils profiteront de leur dollars fort. Les USA ont pu s’en sortir avec leur QE grâce aux découvertes du gaz de schiste, une économie dynamique vivante et un marché de travail souple. Amérique n’est jamais aussi forte sauf cataclysme naturel ou cata environnementale. Dieu en veut parfois aux puissants qui abusent de pêpêchés capitaux et propagent le malheur. Leurs banques avec des bilans solides et liquides dirigent a nouveau le monde avec la bénédiction de la féd et sa politique agressive sauf invention d’une nouvelle tare comme les subprime.

    • La BCE, clairement, sur le modèle allemand, est « indépendante » de la politique, sauf qu’avec le problème de la Grèce , il a fallu travailler « en troïka », en imposant une austérité qui, touchant plusieurs pays entre lesquels les échanges étaient important, l’activité économique de ces pays a bien faibli par une morne consommation et un report des investissement des entreprises se retrouvant en sur capacité potentielle de production. Partout, l’état de ces pays déraisonnables (ils ont tous attendu la dernière limite pour se mettre en ordre sur les 3 critères: dette, déficit, inflation, au même moment, ce qui ne les a pas aidé!

      Je crois donc que M. Draghi ne fait que tenter rétablir un équilibre plus favorable à une potentielle reprise économique mais rien n’est moins sûr! Et de plus, sa décision est un acte « politique » et correspond à une dévaluation de l’€ qui connait maintenant une quasi-parité avec le $ et le ChF, soit une perte d’au moins 20% des capitaux détenus par les euro-citoyens.

      J’ai alors une question: ne manque-t-il pas, dans l’Union Européenne, l’équivalent d’une « cour des comptes »?

      Qui pourrait, lors d’un rapport trimestriel, expliquer et calculer clairement les conséquences des décisions encore trop souvent prises par la commission (émanation des états), la BCE (actuellement faussement indépendante) et le conseil rassemblant les exécutifs des pays européens (ceux-là mêmes qui incluent les incapables de gérer correctement leurs finances nationales, entrées et sorties, dette ou respect des budgets) et dont la transparence est sujet à caution! Je suis sûr que même la majorité des députés européens auraient du mal à expliquer ce qui se passe et les conséquences qu’il faut en attendre!

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