La Nuit à Paris, les Brigades de Mimes reviennent en force !

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Paris la nuit - tour eiffel (Crédits : Gustavo Fernando Durán, licence CC-BY-NC-SA 2.0), via Flickr.

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La Nuit à Paris, les Brigades de Mimes reviennent en force !

Publié le 12 décembre 2014
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Il y a quatre ans, Bertrand Delanoë, le maire d’alors de Paris, lançait en fanfare les États Généraux de la Nuit. Son but était à l’époque de trouver une solution pour faire vivre harmonieusement les Parisiens du jour avec ceux de la nuit, ceux qui se lèvent tôt pour travailler, et ceux qui boivent, chantent, et se couchent tard. À l’époque déjà, j’avais noté, assez consterné, les solutions mises en place. Heureusement, Anne Hidalgo, la remplaçante de Bertrand, va mettre à tout ça un petit coup de booster (ou de bambou, selon le point de vue).

Avant d’aller plus loin, il est assez impératif de bien resituer le contexte. Dans un vibrant appel à la cohabitation pacifique des fêtards et des riverains s’étaient donc ouverts en novembre 2010 les États Généraux de la Nuit auxquels on fit participer une psychosociologue spécialiste des mobilités nocturnes, un philosophe, un médecin urgentiste, et le président de SOS Racisme parce que… heu, parce que bon les fêtes nocturnes à Paris ne doivent pas être racistes, je suppose. Ah oui, et aussi, en apparition rapide, le président de la Chambre syndicale des cabarets et discothèques, dont les activités auraient – dit-on – un lien avec le sujet.

WTF ?Si on peut comprendre l’utilité d’un médecin urgentiste dans ce patchwork rigolo, on reste interdit devant la présence à l’époque d’une psychosociologue spécialiste des mobilités nocturnes, d’un philosophe ou du représentant du commerce équitable de bons sentiments anti-racistes. On regrette d’ailleurs l’absence d’un plâtrier ou d’un sexeur de bigorneaux qui auraient sans aucun doute donné un authentique cachet de n’importe quoi musclé à ce panel déjà fort bien membré.

En définitive et comme souvent en France, cette montagne grandiloquente avait accouché d’une souris nanoscopique avec, tout de même, l’idée géniale de faire intervenir des brigades de mimes chargées de semer le silence, ainsi qu’une saine consternation chez ceux qui paient pour ces conneries. L’année qui suivit fut quand même l’occasion pour certains de savoir si ces mêmes mimes couinent lorsqu’on les cogne.

Moyennant quoi, nous voilà quatre ans plus tard, et à la faveur du changement de tête à la municipalité, ce qui devait n’être qu’une amusante péripétie se mue progressivement en institution au nom ronflant : le Conseil parisien de la nuit vient de naître.

Bien sûr, ce Conseil ne pourrait pas survivre s’il n’était immédiatement emplâtré de formalisme qui prendra la forme de cinq collèges, qui représenteront les institutions (qui ont fait jusqu’à présent tant de bien à la Ville Lumière), les Conseils généraux (parce que, parce que bon, voilà, les Conseils généraux, quoi), les associations de riverains, d’étudiants, de médiation, lucratives sans but (les usual suspects), les organismes dédiés à la fête à Paris la grève à Paris des trucs et des machins en rapport (comme la RATP ou Bruitparif) et un petit paquet de personnes hétéroclites mais qualifiées (forcément qualifiées). Cette liste à la Prévert ne doit pas vous effaroucher. C’est, finalement, la même déclinaison, en version turbo, de ce qu’on trouvait dans les précédents États Généraux de novembre 2010.

Quant à la mairie, au milieu de tout ça, elle se contentera de servir d’intermédiaire pour permettre aux uns et aux autres de papoter entre eux (avec ou sans brigade de mimes pour transmettre les messages, la question n’est pas tranchée). Parce que, comprenez-vous, comme l’explique l’article du Figaro, (je cite) :

Le maire de Paris a mis en exergue le rôle de médiateur, de conciliateur qu’elle entendait jouer, entre ceux qui veulent faire la fête et ceux qui veulent dormir, et qui sont d’ailleurs souvent les mêmes.

Oui, vous avez bien lu : l’analyse du Bulotron 2000 en fonction dans le bureau du Maire de Paris est formelle : ceux qui font le bordel la nuit sont souvent ceux qui veulent dormir. Sapristi. Il serait temps d’en prendre conscience pour qu’enfin, leur condition psychiatrique soit reconnue et qu’on passe à autre chose à base de neuroleptiques puissants.

brigade bruno julliardUn malheur n’arrivant jamais seul et les abrutis volant souvent (par mesure de précaution, sans doute) en escadrille, Bruno Julliard est de la partie, puisqu’il souligne « la spécificité de la capitale, beaucoup plus petite et dense que Berlin ou Londres ».

S’il apparaît exact que la densité d’habitants est supérieure à Paris qu’à Londres ou Berlin (dans un rapport de 4 à 5, en fait), on comprend cependant très mal pourquoi ce qui ne posait pas de problèmes en 1970 ou en 1980 devient subitement problématique en 2014, d’autant que cette fumeuse densité utilisée par Julliard pour passer, encore une fois et avec brio, pour une andouille, n’a pas beaucoup varié depuis des décennies à Paris. Bref, le pauvret a mal calibré son Bulotron.

Mais rassurez-vous. Ces erreurs de paramétrages d’une machine complexe n’auront pas de conséquences graves : lorsqu’on voit l’agenda de ce Conseil, on sait que la partie est déjà gagnée, forcément, puisqu’il va devoir réfléchir à de nouveaux espaces pour les nuits à Paris, ce qui, une fois l’aspect fumigène gentiment évaporé, ne manquera certainement ni de charme ni d’imagination (et pour le côté spontané qui va généralement avec la notion de fête, on repassera, mais la paix sociale est à ce prix). Bien évidemment, tout ce délire festif ne pourrait être citoyen sans inclure les inévitables pilules de bonheur socialiste, sous la forme de Préventex 200, de Discriminafon 325, de Mobilys 500 et de Tagueulcémagique™ en suppositoires.

Concrètement, cela se traduira via une posologie au moins mensuelle par d’abondantes démarches pour

  • prévenir les conduites à risques (faire la fête sans débordement, avec distribution d’alcootests et de préservatifs, je suppose),
  • favoriser les mobilités nocturnes, qui est une expression alambiquée pour camoufler la triste réalité de transports en commun parisiens inexistants ou dangereux passé minuit, et de taxis de plus en plus compliqués à dégotter.
  • encadrer le travail de la nuit, parce que trop de liberté tuant la liberté, rien de tel qu’un petit code et des petites réglementations pour aider tout ça, mais si, mais si
  • promouvoir malgré tout la vie nocturne, notamment auprès des touristes qui ont une chance de ne pas savoir ce qu’elle recouvre en vrai et donc, de dépenser leurs devises bien vite avant de se les faire dérober.

haddock.jpgRien qu’à la lecture de ce programme, on se sent tout revigoré et l’idée s’impose que les brigades de mimes devraient peut-être intervenir lourdement au sein de l’équipe municipale. Une bataille de mimes contre des clowns serait même probablement très touristique.

En tout cas, pas de doute : après avoir englué les commerces dans des règles débiles, après avoir pourchassé les tenanciers de bars, de discothèques, de cercles de jeu, après avoir fait fuir les banlieusards automobilistes en transformant la circulation parisienne en enfer, les édiles se sont progressivement rendus compte que, peut-être, ils étaient en train de saboter ce qui donnait son charme à la Ville Lumière qui se rapproche chaque jour un peu plus d’une Ville Dortoir, d’un gros village mou, aux vieilles pierres pittoresques mais au rythme savamment cadencé, et si paisible qu’on peut y mourir sagement d’endormissement.

Dès lors, il est franchement amusant de constater l’ampleur du travail déployé par l’actuelle équipe municipale pour tenter de faire retrouver son lustre d’antan à une ville qui fut, jadis, considérée comme un des hauts lieux mondiaux de la fête et de la vie nocturne. Il faut en effet mettre ces tentatives et le lancement du Conseil de la Nuit en face des travaux dogmatiques lancés depuis plus d’une décennie à Paris par les mêmes équipes, efforts tous concentrés dans le même sens : faire fuir le pauvre, le petit peuple et les vilains automobilistes pollueurs de la capitale, afin de les remplacer par cette population bien plus socialo-compatible du bobo parisien, du cadre moyen supérieur à la mode, et des familles bio-compatibles qui n’hésiteront pas à pédaler du Vélib ou utiliser les superbes bus au gaz naturel ou à l’électricité pour se déplacer dans une capitale qu’ils souhaitent ardemment vitrifier quelque part à la fin du XXe siècle (après désinfection populaire cela va de soi).

À l’aune de ce but sur lequel les élus sont toujours ouvertement engagés, on comprend donc que les petites attentions lancées en direction de la vie festive et nocturne parisienne ne sont que des petits airs de flutiau lancés pour calmer les esprits. La ville, tenue d’une main de fer dans un gant de spandex aux couleurs d’arc-en-ciel, continuera donc sa lente descente vers une muséification terminale.

Bonne nuit.
—-
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  • Ils feraient bien de former des brigades anti-émeutes. Il faut vraiment être socialiste pour pas comprendre la grande fête qui se prépare.

    • Des émeutes sans les femmes ! Cela va sans dire, bien entendu.

      Ou alors peut être celles-ci qui pensent qu’exhiber une paire ne nichon est plus puissant qu’une balle de 38.

      On peut dire que les sexes vont être réunifiés sous la grande cause de la révolution. Espérons que les féministes passent à autre chose de plus constructif pour notre avenir à tous et à toutes.

      Sinon, l’on pourrait rajouter les gays, les étrangers (toutes les couleurs, hein!), les religions, les couleurs politiques….etc

      ça va effectivement est une super parade festive. J’ai hâte de filmer ça !

  • Oui, quand il s’agit de Bertrand, je comprends pour les gants en spandex. En revanche pour la Hildago, je penche plus sur du SM. Ces gens sont des vrais pervers.

    Le problème étant qu’ils font leurs expériences idéologiques sur nous, pendant que « eux » préservent leur petit bonheur payé par le contribuable.

    Finalement, je comprends la stratégie qui vise uniquement à verrouiller la Kapitale qui va forcément prendre feu d’ici peu….

  • Il n’y a pas de fête sans « p’tites femmes de Paris » (en clair des prostituées), sans alcool et sans fric, et sans que ça produise du bruit et de la fureur. Toutes choses que la bourgeoisie soi-disant de gauche pourchasse sans merci…
    Alors elle peut toujours faire croire qu’elle veut restaurer l’attractivité de la France de la belle époque (qui reposait justement sur le fait qu’on pouvait s’amuser à Paris comme on ne pouvait pas le faire à New York, Buenos Aires, Madrid ou Londres…), c’est de l’esbrouffe.

  • Pour avoir vécu cette réunion (pour des raisons d’ordre professionnel, je n’en suis pas arrivé au point où je pourrais aller me faire du mal de la sorte par pur plaisir ou malsaine curiosité) je ne peux qu’abonder dans cette description exacte de ce navrant moment.

    En complément d’informations, étaient également présents :

    – Une représentante d’Osez le féminisme (bon, elle, elle a une excuse. Il faut dire que la réunion se déroulait dans la Salle des Fêtes du 4ème Arrondissement et que dans les bâtiments municipaux de ce quartier, chaque pièce comporte un placard dans lequel se cache une militante d’Osez le féminisme. Elle a vu du bruit et de la lumière autour de son panier, elle est sortie, et elle est intervenue pour dire que l’espace urbain nocturne est exclusivement masculin).

    – Christophe Girard, qui s’emmerde quand même pas mal depuis qu’il n’a plus de réelles responsabilités municipales et ça se voit.

    – Anne Hidalgo, qui a daigné auréoler l’audience de sa présence pour un discours d’amour à la nuit parisienne aussi vibrant et sincère qu’un compliment d’Evelyne Thomas, de toute façon c’est bien simple, dès qu’elle parle de Paris, elle « kiffe ». Paris est merveilleuse, Paris a un sex-appeal détonnant. Il faudrait l’informer que l’abus de Photoshop verbal est mauvais pour la crédibilité.

    – La première intervention de la salle fut bien évidemment trustée par un représentant de SUD. On a pas tout compris ce qu’il a dit ce pauvre monsieur, les orthophonistes sont pas hyper syndiqués, mais en substance on a quand même saisi l’idée vu que ces mésozoaires idéologiques sont en boucle, c’est « le travail la nuit attention emploi acquis sociaux négociations grève Perestroïka c’est un scandale Liliannefaistesvalises ».

    Cependant, il ne faut guère être étonné de tout cela. La Mairie ne souhaite pas prendre de décisions. Les fêtards et les associations de riverains sont irréconciliables, Hidalgo ne voudra pas plus arbitrer que ne l’a (pas) fait Delanoë. Trop risqué de prendre partie. Avec Julien Courbet, ce serait déjà réglé.

  • Excellent ! Comme d’habitude !

  • Mais si, H16, le môssieur ne s’est pas gouré, ce sont bien les mêmes qui font la fête et qui sont contre ! C’est juste une question d’époque : ce sont ceux qui faisaient la fête et tout le tapage qu’ils voulaient dans les seventies et les eighties, quand ils avaient vingt ans, qui veulent désormais se coucher comme les poules et dormir, puisqu’ils ont maintenant 50 ans et +. 🙂

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