Gone Girl : terrifiant et fascinant

David Fincher nous offre un nouveau film angoissant et profond, hommage aux œuvres d’Alfred Hitchcock, fait d’illusions et de faux-semblants.

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Amy Dunn dans Gone Girl

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Gone Girl : terrifiant et fascinant

Publié le 25 octobre 2014
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Par Victoria Melville.

GoneGirlAfficheLe dernier film de David Fincher commence avec le cinquième anniversaire de mariage d’Amy et Nick, le jour où Amy disparaît. La police enquête, les médias s’en mêlent et, rapidement, l’image du couple idéal s’estompe pour laisser place à celle d’un homme qui n’aimait plus sa femme et qui aurait très bien pu la tuer.

Convoquant toute la mythologie hitchcockienne, David Fincher réalise un film angoissant dans lequel tout n’est que faux-semblants et illusions. La première partie du film consiste pour Nick, Américain moyen totalement dépassé par les événements, à chercher son épouse disparue mais aussi à se débattre contre les accusations de meurtre dont il est victime, les indices en sa défaveur s’accumulant rapidement, faisant de lui l’homme le plus détesté des États-Unis, harcelé par les médias, détesté de ses voisins et suspecté par la police. Ce n’est qu’au terme de cette première partie, haletante et rythmée par la lecture du journal intime d’Amy, que le spectateur comprend ce qui s’est réellement passé et l’ampleur de l’illusion, déroulée au cours d’une seconde partie terrifiante. Cette plongée dans l’esprit dérangé de l’héroïne nous mènera à une fin parfaitement symétrique du début du film. Même plan, même réflexion de Nick sur les pensées d’Amy, mais entre temps, il a compris et on peut même se demander s’il n’y a pas trouvé son compte. C’est en tout cas ce que pense sa sœur, anéantie lorsqu’elle le comprend.

Amy Dunn dans Gone Girl
Amy Dunn dans Gone Girl

Ce film passionnant est un hommage savoureux au maître de l’épouvante dans lequel presque chaque concept et chaque plan se réapproprient les codes hitchcockiens. La blondeur glaciale de Rosamund Pike n’est pas sans rappeler celle de Grace Kelly ou de Tippi Hedren dont le personnage de Marnie constitue une inspiration maîtrisée pour le personnage d’Amy, à la chevelure si symbolique et aux traumatismes si graves.

Pas de printemps pour Marnie
Pas de printemps pour Marnie

On voit presque Marnie se faire caresser les cheveux par sa mère dans le premier plan du film.

Quant à la profusion de véhicules de chaînes de TV, on ne peut s’empêcher de l’assimiler aux mouettes et corbeaux qui attaquent la maison des personnages troubles et aux relations extrêmement conflictuelles des Oiseaux. Finalement, la maison dans laquelle tout se déroule semble une version modernisée du manoir de Maxim de Winter dans Rebecca, une maison immense, froide, dans laquelle les héros semblent des étrangers, des pièces rapportées qui n’ont rien à faire ici. De jolis clins d’œil dont le cinéphile se régalera tout au long du film en attendant le twist final durant 2 heures et demie, à l’issue desquelles on est presque surpris : comment ? C’est déjà fini ?

Loin de se limiter à une critique de la soi-disant société du spectacle américaine, le film est bien plutôt une réflexion profonde sur les faux-semblants, les illusions, l’hypocrisie, les petits arrangements avec la réalité que les relations humaines induisent, en particulier au sein d’un couple. Le personnage de Nick est brillamment interprété par Ben Affleck qui, il faut bien le dire, excelle dans ce rôle de mari gentil et un peu pataud, pas brillant mais plutôt sympa et terriblement faible. Rosamund Pike est littéralement terrifiante dans le rôle d’Amy la névrosée, calculatrice assumée, dont le but ultime est de façonner sa vie, et surtout ses hommes, à sa manière. On a ici un personnage fascinant et ultra-classique de femme manipulatrice qui fait horreur aux féministes extrémistes (ne cliquez pas si vous n’avez pas vu le film, vous y découvririez la fin interprétée de façon pour le moins capillotractée mais si vous l’avez vu, ne vous privez pas d’une bonne tranche de rigolade), d’une perversité inouïe et finalement d’une humanité terriblement réaliste. On regrettera un tout petit peu la minceur du personnage de Neil Patrick Harris dont les propres névroses auraient pu être développées ainsi que quelques invraisemblances qui n’affaiblissent néanmoins pas la force du récit et la maestria de sa réalisation. À voir !

  • Gone Girl, Thriller américain réalisé par David Fincher (sortie le 8 octobre 2014), d’après le roman de Gillian Flynn, avec Ben Affleck, Rosamund Pike, Neil Patrick Harris. Durée : 2h29

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  • Justement, c’en est un tel hommage que rien n’est surprenant dans ce film. On comprend en dix minutes la réalité de cette disparition, et il faut se taper 2h20 d’un film long et parfois poussif pour découvrir un dénouement frustrant, calculé et finalement détestable. Les acteurs sont bons, mais je ne suis pas d’accord, les nombreuses invraisemblances devraient changer le scenario ! Ce n’est pas le cas, et toute la critique offrira un oscar à un film qui le mérite à peine, faute de mieux.

  • je suis d’accord avec alec et j’évite les analyses sans fin… fil trop long et lent… décevant pour un fincher adapté d’un bouquin qui lui-même était moyennement réussi… le thriller je ne sais pas où il se situe ! la critique des médias et de la société américaine, ce n’est pas ce que j’avais envie de voir… quant à ben affleck, il est juste mais sans plus… bref ! déceptif comme ils disent aux inrocks… et puis toutes ces invraisemblances ! vive le fincher de fight club, seven et benjamin button

  • Ouaip, avant ça il y avait eu :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Voici_le_temps_des_assassins
    (le personnage de Catherine est bien déjanté)
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Man%C3%A8ges
    (Dora est un beau modèle d’hystérique)

    Ou comment bien comprendre qu’elles ne sont pas non plus des anges !

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Par Nicola Tournay

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