Par Jean-Louis Caccomo
Dans un monde ouvert, marqué par le changement, l’évolution incessante et l’innovation, la complexité, l’imprédictibilité, le conservatisme économique et politique constituent sûrement une posture suicidaire.
Le conservatisme économique est grandement le fait de la puissance des corporatismes et des syndicats, arc-boutés sur la défense de leurs positions acquises (justifiées dans le passé mais intenables aujourd’hui). De manière chronique, chaque profession (les cheminots, les pilotes, les huissiers, les taxis, les agriculteurs…) paralyse l’économie pour maintenir le statu-quo. C’est un rituel implacable devant lequel recule chaque gouvernement, qu’il soit de droite comme de gauche, malgré les dégâts économiques que ces paralysies entraînent. Il va sans dire que les gouvernants s’empressent de nous rassurer que le “modèle social” français sera préservé alors même que l’implosion de notre économie est le plus sûr moyen de couler ce modèle. Au passage, si c’était véritable un “modèle”, pourquoi le reste du monde ne s’en inspire-t-il pas ? N’est-ce pas la définition d’un modèle ?
Autre indice tout aussi significatif, quand on observe les plus grandes entreprises cotées à Wall-Street aux États-Unis – ou le palmarès des 500 plus grandes fortunes publié par le magazine Fortunes – on constate son profond renouvellement tous les 20 ans. Quand j’étais étudiant en économie, Google, Facebook, Microsoft, Tweeter… n’existaient pas. Et bien malin celui qui peut nous dire quels seront les géants américains de demain. Le contraste est grand avec la France alors que la plupart des grandes entreprises du CAC 40 étaient déjà là 30 ans plus tôt.
Quant au conservatisme politique, il est sans doute la pire caractéristique de l’exception française. Encore une fois, la comparaison avec les États-Unis (ou l’Allemagne) est sans appel. Là-bas, quand un président perd les élections, il se retire de la vie politique avec l’ensemble de son administration ainsi désavouée, à charge du parti de faire émerger un candidat nouveau. Chez nous, ce processus ne fonctionne pas au point que l’on voit réapparaître les mêmes en place depuis des décennies. À gauche, Laurent Fabius, ancien premier ministre de François Mitterrand, est aujourd’hui ministre des affaires étrangères de François Hollande. À droite, on retrouve Alain Juppé – on ne peut pas vraiment dire qu’il soit un nouvel arrivant – affiche ses prétentions présidentielles. Or, tous ces hommes et femmes politiques, qui semblent gérer une rente à vie, ont conduit la France là où elle est aujourd’hui. Il est vrai que l’on ne change pas une équipe qui perd. Et que penser du retour de Sarkozy, battu par François Hollande, lequel envisage sans doute de se représenter…
Si notre pays n’est plus à la pointe des innovations, de la croissance économique, il y a fort à parier que ces conservatismes en sont la cause majeure. Mais, on ne voit pas comment les dirigeants donneraient l’exemple, en supprimant les rentes politiques dont ils bénéficient. La monarchie française a été balayée par la révolution pour ne pas avoir voulu entreprendre les réformes défendues par Turgot (abolition des privilèges). L’Union Soviétique s’est effondrée là encore parce que ses dirigeants, coupés de la base, n’ont pas voulu faire aboutir les réformes lancées par Gorbatchev. C’est un avertissement historique : le conservatisme est un suicide économique et politique.
On ne peut que partager l’analyse. Mais que l’attente de la chute est longue !
Au conservatisme du personnel politique, répond le conservatisme des citoyens qui ne veulent absolument pas que ça change d’un chouilla pour eux, et qui en appellent à l’état dès qu’il y a un soucis.
Particulier qui ont fait construire dans le lit dune rivière, entreprises qui produisent des produits qu’aucun client n’acheterait sans une aide directe, indirecte ou déguisée au travers des normes ou réglementation corporatiste.
Etre impitoyable face aux politiques, c’est l’être sur nos lâchetés.
“La monarchie française a été balayée par la révolution pour ne pas avoir voulu entreprendre les réformes défendues par Turgot (abolition des privilèges).”
La monarchie est surtout tombé parce que le peuple avait faim.
Malheureusement pour nous c’est loin d’être le cas aujourd’hui (l’Etat providence conscient qu’il y joue se survie y veille).
Quand au ‘jeux’; l’abrutissement de nos ‘concitoyens’ par les institutions médiatiques est suffisant pour comprendre que 2 millénaires plus tard ‘Panem et circenses’ est toujours d’actualité et n ‘augure rien de bon quand au renversement du conservatisme.
Comme beaucoup j’appelle de mes vœux un renversement de table. Malheureusement je ne pense pas le voir de mon vivant.
En 1992 Royal était ministre de l’écologie à coté de Sapin déjà ministre du Budget
Aux conservatismes des acteurs économiques, des personnels politiques… j’ajouterai le conservatisme sociétal.
Aujourd’hui, les jeunes ne se marient plus… ce qui ne les empêchent pas de fonder une famille, d’acheter une maison en commun.
Aujourd’hui, les familles se composent, se décomposent, se recomposent… comme les couples se forment se déforment et se forment à nouveau.
Aujourd’hui, la notion d’emploi ou de metier à vie n’existent plus… sauf pour les fonctionnaires, finalement plus prisonnier que libre de cette “prison” aussi dorée qu’enviée.
Aujourd’hui, la notion de territoire est élastique, encore accroché à l’esprit de quartier ou de village, et prete à traverser le monde en quelques heures d’avion lowcost. On ne discute plus avec son voisin de palier ou de bus… mais avec des quidams du monde entier…
Et quel bonheur de vivre dans une Europe sans barrière, avec la même monnaie… nous sommes si proches… il ne manque qu’une langue commune pour se renforcer encore.
Les techniques bousculent les regles ancestrales.
Le monde bouge, et heurte nos principes, nos réflexes culturels. Certains s’arque-boutent, souffrent, d’autres developpent des reves et des utopies.
TOUS nous cherchons le bonheur.
“Et bien malin celui qui peut nous dire quels seront les géants américains de demain”
Bien malin qui peut dire si même ils seront encore américains (alibaba, …).
Le problème de ce billet est qu’il faudrait au préalable définir le conservatisme.
C’est essentiel dans le cadre d’une civilisation qui s’enfonce un peu plus chaque jour dans le socialisme.
Par exemple, aux Etats Unis, Obama est progressiste et le Tea Party est conservateur.
Moi je veux bien être progressiste mais 9 fois sur 10 on me propose une réforme qui est un pas de plus vers la soviétisation.
le tea party n’est pas conservateur il y a des libertariens qui sont moralement progressistes. Le Tea Party est un mouvement politique hétéroclite aux États-Unis, contestataire qui s’oppose à l’État fédéral et ses impôts. il est composé de libertariens, d’évangélistes,….renseignez vous un peu sur ron paul et dites moi si vous le trouver conservateur
perso, je n’aime pas employé le mot “progressiste” car qui sont ils pour définir ce qu’est le progrès ?? en général, ils veulent imposer leur vision des choses au reste du monde. ces “progressistes” sur certains sujets sont très conservateur, la plupart croient en des idéologies complétement dépassés, souvent ils refusent d’accepter le changement. la gauche francaise en est l’exemple type. lisez Le progressisme entre illusion et imposture de P.A Taguieff
Jacques, je suis d’accord avec vous. Je voulais juste dire que le mot conservatisme peut recouvrir des sens opposés.
Voyez ! Les décisions de la Cour suprême dans les années trente condamnant certains aspects du New Deal sont qualifiés de “conservatrices” par les keynésiens.
Je pense que vous comme moi soutenons les décisions prises alors. Cela nous classe dans le camp des conservateurs.
Quand à Ron Paul, je considère qu’il est le politicien américain le plus proche des pères de l’Amérique. Il est donc ce qu’on peut imaginer de plus conservateur de nos jours.
Tout le problème vient du fait que quelques libéraux s’imagine pouvoir faire resurgir le libéralisme dans nos sociétés. C’est une chimère. La tendance lourde est à la soviétisation. Le libéralisme ne reviendra qu’après effondrement dans plusieurs siècles. Les libéraux sont donc conservateurs et les progressistes sont socialistes.
Pour vous en convaincre, moi aussi je vous conseille un livre : http://www.contrepoints.org/2014/07/08/171609-rome-du-liberalisme-au-socialisme-de-philippe-fabry
http://www.contrepoints.org/2014/05/17/166215-lenfer-est-pave-de-bonnes-intentions-8-les-vices-de-la-vertu
Selon la définition de philippe NEMO, le progressisme, c’est expérimenter une nouvelle réforme, a contrario du conservatisme, sans jamais revenir en arrière, même si cette expérience est un échec. Je pense qu’il ne faut pas penser que progressisme est étymologiquement issu du mot progrès.
Je suis artisan taxi et pourtant totalement en accord avec cet article. L’immobilisme affirmé de certaines professions vient essentiellement du manque de courage politique de réformer en profondeur. Dans le cas de ma profession, par peur de s’attaquer au secteur du transport de personne dans sa globalité ils ont simplement céder à une extrême facilité, une sorte d’aveu de totale incompétence, en introduisant des formes différentes et totalement déréglementées de transport mais empêchant ainsi totalement les forces en place de se concurrencer à cause de leur réglementation extrêmement contraignante. Je n’attends que ça d’évoluer mais la loi actuelle m’en empêche !
J’aime en général toujours les articles éclairés de Jean Louis Caccomo. Mais je trouve qu’on a tord de faire un procès au conservatisme, comme mal absolu. La société idéale est axée sur trois piliers qui devraient être d’égale puissance : 1/3 conservatisme, 1/3 libéralisme, 1/3 progressisme.
Pourquoi éliminer ce qui marche ou ce qui tient debout même s’il est ancien ?
L’absolutisme dans le progrès ou dans la libéralisation à tout va produit aussi des incohérences et de fâcheuses conséquences. Une société où le conservatisme est dominant est de toute évidence sclérosée, et la France actuelle est telle, mais il ne faut pas non plus ne faire une religion. Notre immense culture, ce qu’elle produit comme richesses et niveau d’éducation, est aussi affaire de conservation.