Croissance : les nouvelles de Bercy qui enfoncent Hollande

Pour préparer le terrain de la bataille sur le budget, le gouvernement annonce des résultats décevants et rétropédale sur le rétropédalage précédent en matière d’économies budgétaires.

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Michel Sapin credits PS (licence creative commons)

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Croissance : les nouvelles de Bercy qui enfoncent Hollande

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 10 septembre 2014
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Par Baptiste Créteur.

Michel Sapin credits PS (licence creative commons)Ça sent le sapin à Bercy : après avoir longtemps hésité à continuer ses autres discours, Michel Sapin annonce qu’il va désormais tenir un discours de vérité.

Il annonce donc, avant la préparation d’un budget qu’on devine serré, que la croissance est plus faible que prévu, et le déficit est plus élevé. Pourtant, il annonce aussi que l’objectif de réduction des dépenses est maintenu. Où est donc l’argent manquant ? Implicitement, Michel Sapin confirme la validité de l’effet Laffer : la hausse des taux de prélèvement a réduit les rentrées fiscales.

Il faudra donc maintenir les économies prévues et rétropédaler sur le rétropédalage précédent annonçant des économies revues à la baisse pour tenir compte d’une inflation plus faible que prévu. Hollande sera désormais capitaine de rétropédalo.

« Ma responsabilité, ce n’est pas de plonger le pays dans l’austérité», a affirmé le ministre des Finances. «Le sérieux budgétaire, c’est la condition de la reprise durable de l’activité», a-t-il souligné, précisant que le «cap» du gouvernement, « c’est celui de la réduction de nos déficits à un rythme compatible avec le retour de la croissance ».

Croissance Sapin (Crédits : René Le Honzec/Contrepoints.org, licence Creative Commons)Austérité ? Pas bien. Sérieux budgétaire ? Bien. Sur la base de cette subtile distinction et de ce raisonnement complexe, le gouvernement prépare son prochain couac : le budget, voté dans quelques jours. Avec des recettes fiscales qu’on peut prévoir plus faibles que prévu, il faut maintenir les objectifs d’économies, et on ne peut plus compter sur l’inflation. De réelles économies vont devoir être trouvées pour compenser. Les montants d’économies ont déjà été annoncés, mais pas détaillés ; le gouvernement anticipe, à raison, les protestations à venir.

L’équation n’est pas simple. Il faut contenir la dépense, et vite, pour maintenir l’État à flot. Déjà, la plupart des socialistes, qui ne croient que dans les “vraies politiques de gauche” où les entrées dans l’incinérateur à argent public vont croissant, risquent de tiquer. Mais on parle en plus de la réduire, plus sérieusement que prévu, et il faudra détailler le montant des économies à réaliser ; là, il y a un sérieux problème.

Car si on peut, à la rigueur, convaincre les parlementaires que le “sérieux budgétaire” est un mal nécessaire, aucun n’acceptera que le sérieux budgétaire le touche de près ou de loin. Après tout, si tous les autres sont sérieux, la fête peut continuer pour certains. Tous auront d’excellents arguments, résumés en une phrase :

Vous sacrifiez [domaine d’intervention étatique] !

Ainsi que ses innombrables variantes :

C’est [domaine d’intervention étatique] qu’on assassine ! La finance aura donc raison de [domaine d’intervention étatique] ! Vous êtes le bourreau de [domaine d’intervention étatique] !

Dans la mesure où l’État est la solution à tous les problèmes, il sera difficile de prioriser. Vaut-il mieux sacrifier l’éducation, la santé ou la sécurité ? Faut-il assassiner la culture ou la solidarité ?

Le “cap” du gouvernement se situe de l’autre côté d’un précipice, au-dessus duquel un fil de funambule idéologique est tendu. D’un côté, il faut de la dépense publique pour relancer la croissance. On le voit bien, en 40 ans de déficits publics systématiques et de dépense publique croissante : la croissance a été relancée si bien qu’on ne sait pas vraiment où elle a atterri. De l’autre, il faut réduire la dépense publique pour relancer la croissance. Restaurer les marges des entreprises et le pouvoir d’achat des Français, relancer à la fois l’investissement et la consommation, l’offre et la demande, l’emploi, etc. La direction a déjà été choisie : le gouvernement mènera une politique de l’offre. Mais parce qu’il a choisi, il offre le flanc aux critiques, qui ne manqueront pas de l’attaquer sur ce à quoi il a renoncé (certes très marginalement, mais le mal est fait).

« Soutenir les entreprises, c’est d’abord soutenir la production dans notre pays», a-t-il ajouté : « Sans production et sans richesses produites, le pays s’appauvrit et le chômage augmente ».

Malgré les difficultés, Michel Sapin est fin prêt. Il a, dans son cartable, un pacte de responsabilité tout neuf, et vient de se procurer un manuel (Valls) “Discours de Vérité”. Il porte son costume des grands soirs et ses lunettes qui lui donnent un air sérieux budgétaire.

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  • Ce que Sapin n’ose pas dire (les autres non plus d’ailleurs) c’est que la réduction de la dépense publique en période de faible croissance de l’économie entraine mécaniquement une baisse du PIB. Si le PIB diminue le ratio dette sur PIB augmente. Les 3% de déficit deviennent donc encore plus difficiles à atteindre… L’équation est soluble mais il faut accepter quelques années de serrage de ceinture. Plus on attend plus ce sera douloureux.

  • Le sérieux budgétaire, c’est 60 milliards de déficit pour les sept premiers mois de l’année, soit 37 % des recettes. Sapin est une grosse tanche qui ne fera rien, élections approchant.

  • Valls a défendu sa politique de “sérieux budgétaire” en clamant à l’Assemblée qu’il ne veut pas supprimer des postes d’enseignants ou d’infirmières.

    Mais qui demande la suppression de ces postes ? Personne ! L’équilibre des comptes publics ne dépend pas de telles suppressions. C’est en revanche la privatisation de ces postes, et plus généralement le retour à la liberté des secteurs économiques illégitimement placés sous la coupe de l’Obèse, qui s’avèrent indispensables.

    La décollectivisation de l’économie est la condition nécessaire et suffisante du retour de la croissance. Ainsi, les comptes publics rejoindront l’équilibre et les marchés, enfin libérés, produiront à nouveau la prospérité pour tous.

  • Dans le genre soutien aux entreprises, Ce matin, le patron de la BPI a annoncé fièrement qu’il a réussi à augmenter considérablement les prêts attribués à des PME qui souvent, n’ont rien demandé (elles ont été démarchées par nous, disait-il). Avec le discours : «Il ne faut pas attendre que le carnet de commandes se remplisse pour investir et ces prêts sont sans garanties ». Ou: comment l’État socialiste essaie de convertir les chefs d’entreprise à son irresponsabilité budgétaire…
    Evidemment, cet adepte de la méthode Coué socialiste (pléonasme, puisque cette manière de gouverner consiste justement à nier la réalité pour mieux la faire plier à l’idéologie), ce responsable donc, n’a pas jugé utile de préciser qu’en cas de défaillance des entreprises, le contribuable serait appelé à la rescousse. Comme à chaque fois que l’État se plante en voulant s’immiscer dans les rouages économiques…

    • De toute façon, les emplois promis par le “pacte” ont probablement disparu dans la récession avant même d’être créés (une croissance inférieure à 0,5% est une récession pour nous à cause du taux de natalité). Il n’y a pas que le budget de l’état qui a du se prendre une baffe.

      Peut-être que si ils arrêtent de jouer au plus con avec Poutine et les écolos ils auront un sursis ?

      • “Peut-être que si ils arrêtent de jouer au plus con avec Poutine”

        Bien au contraire, c’est une de leurs décisions les plus courageuses et honorables, cette crevure de Poutine ne mérite rien de mieux que voir l’économie de son pays couler, car qui dit économie stagnante et repoussante dit aussi puissance stagnante 🙂

  • Donc mr Sapin reconnait qu’il nous ment depuis plus de 2 ans, mais cela n’engage en rien sa responsabilité, et que dorénavant il va dire la vérité?
    Vous le croyez, vous, ce menteur pathologique.

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