Finance islamique en Afrique : leçons de Londres

Le monde a été surpris quand le Royaume-Uni, sous l’impulsion de David Cameron, a décidé de faire de Londres un centre financier islamique pouvant concurrencer Dubaï.

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Finance islamique en Afrique : leçons de Londres

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 26 novembre 2013
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Par Sola Ademiluyi, depuis le Nigeria.

MALAYSIA-FRANCE-ECONOMY-ISLAM

Lorsque Rauf Aregbesola, le gouverneur de l’État d’Osun au sud-ouest du Nigeria, a levé 10 milliards de naira via le système d’obligations islamiques ou sukuk, il a rencontré une forte réaction de la communauté chrétienne. L’Association chrétienne du Nigeria a vu dans cette nouvelle pratique une tentative d’islamiser l’État. Ce dernier est un État agraire, la plupart de ses revenus allant aux dépenses courantes. Il aurait été suicidaire de lever des fonds par le biais d’un prêt bancaire avec un taux d’intérêt astronomique. Le Sukuk, qui fonctionne donc sans intérêt, semblait la meilleure option pour le bien commun.

Le monde a été surpris quand le Royaume-Uni, sous l’impulsion de David Cameron, entendait faire de Londres un centre financier islamique pouvant faire concurrence à Dubaï et à Kuala Lumpur en Malaisie, comptant lever 320 millions de dollars l’année prochaine.

Les obligations islamiques sont garanties par des actifs et elles ont connu une croissance rapide. Le taux de croissance des actifs financiers islamiques est d’environ 17% par an et est estimé atteindre 2 670 milliards de dollars en 2017 contre 1 200 aujourd’hui. La crise financière de l’occident doit avoir fait repenser de manière critique son modèle économique à ses décideurs.

La Grande-Bretagne a une minorité musulmane et la population de chrétiens dévots s’amenuise rapidement du fait de la vague de laïcité qui a envahi l’ancien grand empire depuis l’aube du 20ème siècle.

M. Cameron a été assez visionnaire pour mettre ses sentiments de côté et faire ce qu’il était selon lui dans l’intérêt économique de la nation. Cette vision de la création de Londres comme centre financier de l’Europe avait été conçue et exécutée par Margaret Thatcher, qui avait ouvert grandement la cité au monde. Il s’agit de soutenir ce rêve louable qui a vu la ville se métamorphoser rapidement en l’une des villes les plus cosmopolites du monde.

Nous devrions être plus tolérants à l’égard des modèles qui ont le potentiel de faire avancer le continent. Il nous reste en effet encore à voir une proposition concrète quant à une alternative viable aux taux d’intérêt faramineux que l’on trouve sur le continent.

Il faut se débarrasser de ce fléau du continent qui consiste en cette imposition de la subjectivité à un niveau social, qui a engendré tant de guerres, tensions et conflits. Si seulement nous pouvions raisonner davantage ensemble et être le gardien de nos frères, plaçant le bien commun au-dessus de toute autre chose, ce continent serait un paradis pour tous.

Revenons à Londres. On aurait pu penser que la communauté chrétienne en Grande-Bretagne allait crier au scandale. Étonnamment, ce fut le silence, car il n’y a pas eu de sous-entendus quant à une quelconque tentative d’islamiser l’État.

Par contraste, lorsque l’actuel patron de la banque centrale du Nigeria, Sanusi Lamido Sanusi a émis l’idée d’introduire la finance islamique dans le pays, les groupes chrétiens ont violemment réagi contre elle, la voyant comme un programme insidieux pour convertir l’État à l’Islam. Ils ont pourtant oublié que l’homme de la rue, qui n’est pas en mesure d’avoir accès à des facilités de crédit pour développer ou même démarrer une entreprise à petite échelle, pouvait avoir un intérêt majeur dans cette finance.

Pour que le continent connaisse une croissance exponentielle, il doit être davantage ouvert à de nouvelles idées qui peuvent le faire aller de l’avant, et oublier les arguments fondés sur un pur égoïsme de classe ou de religion. Il a vu assez de violences et de bouleversements qui l’ont  maintenu dans un état ​​d’arriération économique pour permettre que les sentiments prennent la place de la raison.

Il est grand temps d’adopter les aspects du développement qui marchent, d’où qu’ils viennent. Le fait de copier sans souci est largement autorisé sur la voie du succès. Demandez aux Japonais et aux Chinois ! Il est temps d’en finir avec le fanatisme.


Cet article a paru initialement en anglais sur le site d’AfricanLiberty.org. Traduction : Libre Afrique.

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  • Centre financier islamique!…
    Ce concept mérite une fatwa, c’est le coran qui le dit!…

  • Il ne faut bien sûr pas interdire la finance islamique, mais je doute qu’elle ait un avenir dans un marché libre. Ce type de finance est très interessante pour celui qui emprunte mais pas du tout pour celui qui prête (pourquoi prêter si l’on risque juste de tout perdre et que l’on espère aucun gain?). Le risque est que trop peu de monde ne souhaite prêter de cette manière et que ce type de credit reste très peu accessible.
    Par ailleurs, l’islam ordonne l’INTERDICTION du prêt a intérêt, ce qui en soit est une mesure anti-libérale. D’ailleurs l’islam dans son ensemble est l’anti-thèse même du libéralisme.

    • Sauf qu’en fait le taux d’intérêt est tout aussi présent dans la finance islamique que dans la finance « occidentale ». Ce n’est que du packaging qui le fait disparaître pour faire « sharia compliant ».

      Et la gestion du risque n’est pas meilleure. En fait elle est largement pire.

      Mais ça attire les gogos qui pensent que ça donne « une finance morale » ou pire encore qu’ils ne paient pas d’intérêts.

  • la violence islamique dans le nord du Nigéria, à l’encontre des chrétiens n’est pas qu’une vue de l’esprit…

  • « C’est quand on est vaincu qu’on devient chrétien, ou musulman… »
    [Ernest HEMINGWAY version 2013]

    Sans rire, parler de finance Islamique tout en proclamant qu’il s’agit d’une avancée alors même qu’il n’est question que d’opportunisme financier, le tout en prenant soin de mâtiner le discours de gentils africains qui auront ainsi un accès au crédit, il fallait oser !

    La finance se suffit à elle même, elle n’a pas besoin d’être ni islamiste ni chrétienne ni maoïste, sinon à scinder un peu plus ce monde, et tant qu’on y est en proclamant que c’est justement l’effet inverse qui est escompté, ben voyons…

    L’Afrique, quelle soit chrétienne ou musulmane a besoin d’une seule chose : que l’occident cesse de se mêler de ses affaires et de piller ses richesses, en d’autres termes l’Afrique se suffit à elle même.

    Cameron en bon pragmatique cherche à faire rentrer de l’argent dans les caisses du royaume, point.
    Nous sommes en 2013, information 2.0, pas en 1777 et la lecture du « Journal de Paris » faite à une élite bien pensante.

    • Perso, je comprend bien le point de vue de l’auteur. Néanmoins je pense que le liberalisme a aussi besoin de se proteger pour survivre. La finance islamiste, ne nous leurrons pas, c’est un cheval de Troie religieux, rien de plus, une ingerance dans l’Etat et la finance d’abord, avant un controle plus globale. C’est donc un but totalement anti-liberal. Le mirage d’un profit ne doit pas occulter cet etat de fait. D’autant plus dans une region du monde où l’Islam est en plein recrutement. Il ne faut pas etre naif, cette initiative n’a rien d’ innocent et encore moins de liberale.

    •  » c’est quand on est vaincu que l’on devient chrétien ou musul…  »

      non, c’est quand on est con !

  • La finance islamique est supervisée par une autorité islamique.
    Rien n’interdit d’en appliquer les idées sans cette supervision.
    D’autre part faire fonctionner la finance selon d’autres principes que le pragmatisme ne produira pas de richesses; et si l’islam permettait la prospérité, cela se serait vu.

    Le seul intérêt de la finance halal, c’est de se concilier les musulmans pieux.
    L’inconvénient est le même que pour la viande halal:
    – Contraintes indues, donc choix non pragmatiques et non optimaux (=>sous-développement du monde musulman)
    – Irrespect de la liberté de conscience des non-musulmans à qui on demande de suivre des règles qui ne les concernent pas
    – Fracture sociale ou si, comme pour la viande, on demande aux non-musulmans d’accepter les pratiques musulmanes et non l’inverse: Monopole musulman à terme

    Plus profondément, la finance islamique est un recul du pragmatisme et de la vraie laïcité.
    Elle accrédite le principe de règles non fondées sur le bien commun objectif et constatable par tous.

    Elle met donc en danger la démocratie: Si on exclut l’existence d’absolus en dehors du périmètre défini par la morale chrétienne, où on ne peut pas les éviter, alors dans ce domaine on s’en remettra au dialogue et à l’objectivité.
    Mais si on l’admet, alors le dialogue n’est plus possible et les plus violents imposent leurs vues.
    Toute ressemblance avec le monde musulman est probante.

    In fine c’est un aspect de plus du rejet par l’islam de la distinction entre le spirituel et le temporel, entre Dieu et César. Or avec le socialisme nous suivons le même chemin: Enseignement obligatoire de la morale socialiste à tous les enfants, lois réprimant non objectives les « mauvaises pensées », redéfinition du mariage civil comme un « droit à » arbitraire et égalitariste au lien d’un devoir envers la nations…

    La régression intellectuelle dénoncée par Philippe Nemo concourt à l’islamisation, et réciproquement

    • Aujourd’hui il n’y a pas de monde musulman au sens ou il existe un monde occidental ou laique. Il n’existe aucun système, ni pays appliquant l’islam dont on puisse dire « ok, ça ne fonctionne pas ». Tous les pays auxquels vous pouvez penser, sont des systèmes batards entre occidentalité et islamisme. Vouloir appliquer un peu de tout, en mélangeant ne peut que donner quelque chose de bancale.

      Quand à la démocratie, elle se détruira de l’intérieur par la cause des peuples eux même. Elle mourra de toute façon de ses contradictions et de son hypocrisie que nous sommes tous de plus en plus nombreux à ressentir.

      La violence et la soif d’hégémonisme de celle-ci n’ayant rien à envier à l’islamisme caricaturé dans les médias de masses.

  • « Par contraste, lorsque l’actuel patron de la banque centrale du Nigeria, Sanusi Lamido Sanusi a émis l’idée d’introduire la finance islamique dans le pays, les groupes chrétiens ont violemment réagi contre elle, la voyant comme un programme insidieux pour convertir l’État à l’Islam. Ils ont pourtant oublié que l’homme de la rue, qui n’est pas en mesure d’avoir accès à des facilités de crédit pour développer ou même démarrer une entreprise à petite échelle, pouvait avoir un intérêt majeur dans cette finance. »

    Euh, peut-être les chrétiens du Nigéria ont-ils mal réagis parce qu’ils sont en première ligne pour constater la brutalité islamique, et parce qu’ils considérent que ce n’est pas forcément une bonne idée de donner des leviers économiques (donc de pouvoir) à des gens qui rêvent de les égorger ?

  • À propos de ton dernier point, cest vrai. Mais interdire une pensèe qui interdit l’intérêt est tout aussi anti-libéral.

  • Les commentaires sont fermés.

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