Guerre contre l’Iran? Erreurs et manipulations

Les raisons avancées pour justifier une éventuelle guerre contre l’Iran sont tout aussi valables que celles avancées pour justifier la guerre d’Irak.

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Guerre contre l’Iran? Erreurs et manipulations

Publié le 6 février 2012
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Les raisons avancées pour justifier une éventuelle guerre contre l’Iran sont tout aussi valables que celles avancées pour justifier la guerre d’Irak.

Un article de Pierre-Yves Saint-Onge.

Ca fait très longtemps que la guerre en Iran semble près de nous. L’Iran est un grand pays du Moyen-Orient, plein d’histoire, d’hydrocarbures et de conflits. J’en avait glissé un mot ici en décembre 2011, mais aussi précédemment ici et ici en 2006. Clairement, mes prédictions de l’époque étaient prématurées. Mais est-ce que la situation présente est plus propice à ce conflit ?

Que s’est-il passé dans les dernières semaines vis-à-vis de l’Iran?

  • Un tueur a assassiné un scientifique nucléaire iranien, avec une bombe. Le quatrième depuis quelques années.
  • Les États-Unis ont fait suivre leur embargo économique de l’Iran par une mesure similaire de la part de l’Union européenne, comme on peut lire ici et ici. Celle-ci sera effective sous peu, car ceux-ci espèrent trouver des sources alternatives de pétrole. La Chine et la Russie ont refusé de se joindre à l’embargo. La Chine importe présentement 2,6 millions de barils de pétrole par jour en provenance d’Iran et ne serait pas en mesure de trouver de source alternative. La capacité des autres pays de remplacer la production n’existe pas. Ces mesures d’embargo risquent d’affecter spécialement le Japon, qui a déjà dû augmenter ses importations de pétrole suite à la catastrophe de Fukushima, et qui est un client important de l’Iran.
  • Une mesure est aussi en place pour geler les fonds bancaires iraniens. Ces mesures ont déjà eu l’effet de faire chuter la devise iranienne de plus de 63% en un mois.
  • Les forces navales multinationales se déplacent dans la région, augmentant le risque d’un accident ou d’une erreur qui pourrait escalader le conflit, tel l’incident qui a causé le USS Vincennes, pensant être sous attaque en 1988, à descendre un avion de passagers iranien. Les États-Unis y ont trois groupes de porte-avions (USS Carl Vinson, USS John C Stennis et USS Abraham Lincoln), les Britanniques et les Français sont aussi présents, ainsi que les Russes dans la Méditerranée, à un port de Syrie (Tartus). Nous y avons aussi dépêché le HMCS Charlottetown, où il rejoindra le HMCS Vancouver.

Les raisons évoquées par les États-Unis pour entrer en conflit seraient d’empêcher l’Iran de développer l’arme nucléaire. Explorons cette raison.

L’Iran est un signataire du Traité de Non-Prolifération Nucléaire. Les signataires de ce traité affirment ne pas permettre ou développer d’armement nucléaire et ne vouloir se servir de cette technologie qu’à des fins pacifiques. C’est aussi ce que les autorités iraniennes réclament depuis plusieurs années. Dans les derniers mois, on nous a annoncé que le développement d’une arme était imminente car les scientifiques iraniens ont réussi à enrichir de l’uranium à un facteur de 20% – ceci est le niveau d’enrichissement nécessaire pour son utilisation à des fins médicales et pour l’utiliser dans une arme, celui-ci doit être enrichi à 90%.

Il est à noter qu’il n’y a aucune clause dans ce traité qui permet d’intervention militaire pour prévenir de façon préventive un État qui serait en possibilité de faire du travail de recherche dans une direction interdite.

Qu’en pensent les Américains ? Le secrétaire à la Défense Leon Panetta a admis le mois dernier à l’émission télévisée Face The Nation que l’Iran ne développait pas l’arme nucléaire !

I think the pressure of the sanctions, the diplomatic pressures from everywhere, Europe, the United States, elsewhere, it’s working to put pressure on them, to make them understand that they cannot continue to do what they’re doing. Are they trying to develop a nuclear weapon? No. But we know that they’re trying to develop a nuclear capability, and that’s what concerns us. And our red line to Iran is, do not develop a nuclear weapon. That’s a red line for us.

Une citation qui circule depuis des années du président Iranien Ahmadinejad qu’Israël seraient effacé de la carte serait une mauvaise traduction du Farsi, qui aurait été ensuite utilisée à répétition par les médias aux États-Unis, devenant ainsi partie du folklore médiatique, selon cet expert (je ne suis certainement pas un expert en Fars i!). Cet article est très détaillé et bien référencé. Les propos iraniens peuvent toujours êtres mal vus, mais pris dans leur contexte et dans leur véritable signification n’ont pas la même portée que ceux rapportés dans les médias.

J’amène cet argument dans l’article car protéger Israël est une autre raison donnée par les États-Unis dans leurs menaces envers l’Iran. Donc, non seulement la prémisse que l’Iran a menacé de détruire Israël serait plutôt un argument politique contre le régime politique de cette nation, mais de plus Israël n’a pas demandé l’aide des États-Unis dans ses problèmes régionaux. Le seul candidat républicain dans les primaires qui n’a pas (ou presque) promis d’attaquer l’Iran s’il est élu s’est fait ridiculiser par les autres candidats et les médias… Il a déclaré qu’il ne s’en mêlera pas car Israël pouvait s’occuper de ses problèmes… et il a même déclaré ce qui ne se déclare pas – qu’il couperait l’aide à Israël car celle-ci avait la capacité de faire face à ses problèmes sans aide américaine. Clairement, il s’est fait attaquer de toutes parts pour ses déclarations. Mais il y a tout de même quelques voix qui sont d’accord avec lui – dont Benjamin  Netanyahu, le premier ministre israëlien. Un expert en sécurité américain, pense de même et il explique cette position dans cette entrevue.

Depuis, l’Iran a menacé de bloquer le détroit d’Hormuz, mince étendue d’eau où transite une grande partie du pétrole brut international. Est-ce possible qu’ils réussissent à mettre leur menace à exécution ? Selon le général Martin Dempsey, à la tête des Joint Chiefs of Staffs, la réponse est oui.

They’ve invested in capabilities that could, in fact, for a period of time block the Strait of Hormuz. We’ve invested in capabilities to ensure that if that happens, we can defeat that.

De quel genre de capacité parle-t-on ? L’Iran a développé il y a quelques années le missile de croisière anti-navire Qadr, qui a une portée de 200km et qui peut-être lancé à partir d’un camion. De plus, l’Iran a plusieurs sous-marins capables de lancer des torpilles nouvelle génération qui peuvent voyager au-delà de 200 nœuds.

La question restera la même que celle que nous nous posions en 2003 pour la guerre en Iraq… pourquoi l’Iran et non pas la Corée du Nord ou le Pakistan?

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