Le problème de l’eau : sécheresse ou indigence institutionnelle ?

Il existe une solution de propriété en commun permettant la pérennité de la ressource.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0
Goutte d'eau

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Le problème de l’eau : sécheresse ou indigence institutionnelle ?

Publié le 2 juillet 2011
- A +
Par Max Falque (*)
 

La loi sur l’eau de 1992, en faisant de la ressource en eau un « patrimoine commun de la nation » excluait par principe, voire par idéologie, la définition de droits de propriété, et donc ouvrait la voie à la célèbre tragédie des biens collectifs – ou, plus exactement, celle du libre accès à une ressource limitée sur laquelle s’exerce une demande croissante.

Rappelons les conclusion du célèbre article de Garrett Hardin publié dans la revue américaine « Science » en 1968 qui décrit comment un pâturage communal est inévitablement détruit dès lors que chaque propriétaire de troupeaux a un intérêt a le surpaturer avant que ne le fasse un autre pasteur. Pour éviter cette tragédie, deux solutions sont possibles : soit réglementer, soit attribuer des droits de propriété lorsque cela est physiquement et socialement possible.

En matière d’eau agricole, la France a choisi la voie de la réglementation, et tout semble indiquer que les résultats ne sont pas au rendez-vous : conflits, surexploitation, pénurie. En effet au lieu de conférer des droits de propriété sur l’eau souterraine, la réglementation octroie des autorisations de prélèvement, assortie d’une redevance en fonction de la capacité des aquifères.

Ceci suppose : d’abord de connaître la ressource, c’est-à-dire le fonctionnement de chaque aquifère, tâche très difficile en l’état des connaissances et des techniques ; ensuite de connaître les prélèvements par chacun des pompages sur chaque aquifère.

Or, malgré la réglementation, on sait que les déclarations ne correspondent pas, et de loin, à la réalité. Autrement dit la gestion administrative de l’eau souterraine est guidée par une double incertitude et, dans ces conditions, la « ruine est la destination finale ».

Pourtant une autre voie est possible : la définition de droits de propriété permettant la mise en place d’un marché.

En effet dès lors qu’apparaît un déséquilibre entre offre et demande pour une ressource économique et/ou environnementale, la meilleure solution passe par sa valorisation car

« l’absence de prix conduit les gens à se comporter comme si la valeur des services livrés par le patrimoine naturel était nulle. Parfois la puissance publique intervient au travers de redevances ou de prix administrés. Mais ils sont souvent fixés de façon arbitraire à des niveaux très bas » (P. Point).

Aujourd’hui le comportement de chaque agriculteur rationnel est de pomper toute l’eau dont il a besoin… si possible avant que ses voisins n’en fassent autant. Il serait dès lors étonnant que l’on n’assiste pas à une baisse du niveau, puis à l’assèchement de la nappe, compromettant ainsi le débit des cours d’eau et les droit des autres utilisateurs (pêcheurs, association de protection…).

Compte tenu de la nature des aquifères, il existe une solution de propriété en commun permettant la pérennité de la ressource, celle de la «  propriété commune  » pour laquelle Elinor Ostrom a reçu le prix Nobel d’économie en 2009.

Il s’agit pour un petit groupe d’ayant droits de s’entendre sur les modalités de prélèvement sur l’aquifère et de définir les droits et obligations de chacun dans le respect des conditions environnementales, économiques et sociales de la communauté locale. En outre il est possible de vendre les droits d’eau.

Certes ces institutions ne sont pas simples à mettre en place, mais elles ont traversé les siècles et continuent à le faire dans de nombreux pays pour les eaux de surface. Si le pompage introduit un bouleversement technologique, les institutions traditionnelles peuvent inspirer les réformes. Ce qui est certain c’est qu’en l’absence de mécanisme de prix et en situation de quasi-libre accès la sécheresse sera de plus en fréquente. Il est temps que le législateur substitue le principe de réalité à l’idéologie, la démagogie et l’ignorance.

—-
Note

Ce problème est traité dans l’ouvrage collectif « Droits de propriété, économie et environnement : les ressources en eau», Falque et Massenet, (Dalloz, 2000, 507 p.) et notamment dans l’article de N. Kosciusko-Morizet, V. Richard et H. Lamotte  «  Que peut-on attendre de la mise en place des quotas individuels échangeables de prélèvement sur la ressource en eau en France ? L’exemple de l’agriculture irriguée »

—-
(*) Max Falque anime l’ICREI (International Center for Research on Environmental Issues) qui, dans le cadre de la faculté d’économie appliquée d’Aix en Provence, organise tous les deux ans un grand colloque sur les politiques environnementales.

Ce texte a été publié originellement dans La Tribune du 31 mai 2011 et sur le site de l’Institut Turgot.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

On critique souvent les libéraux – et en particulier les économistes libéraux – sous prétexte qu’ils sont matérialistes car ils s’intéressent aux biens matériels, donc aux droits de propriété et peut-être en particulier au capital (et donc au capitalisme...). Mais c’est très à tort que l’on fait ce type de critique.

Ainsi l’économiste Julian Simon a expliqué dans son livre, L’homme, notre dernière chance, que les ressources naturelles n’existent pas ; ce qui compte c’est que des individus soient capables d’imaginer des utilisations des... Poursuivre la lecture

Les dernières prévisions du GIEC indiquent que les précipitations sur la France seront globalement plus abondantes, mais que cette abondance se situera en dehors des périodes de sécheresse.

Il sera donc nécessaire de stocker de l’eau pour prévenir ces dernières, et les mégabassines doivent donc être multipliées. Par ailleurs, il existe d’autres méthodes que la sobriété pour prévenir les pénuries.

 

Les « mégabassines », ou retenues de substitution

Le nom « mégabassines » a été adopté par les médias et par le public :... Poursuivre la lecture

En vertu du célèbre constat de Lavoisier, l’eau ne se perd ni ne se crée.

 

Ici-bas, sa quantité est rigoureusement constante depuis la nuit des temps où on la trouve sous la forme liquide et sous la forme vapeur, selon ses conditions physiques. L’élément indispensable à la vie et au développement économique de l’humanité peut certes être décomposé en oxygène et en hydrogène, mais l’un et l’autre gaz sont très largement condamnés à redevenir H2O à plus ou moins brève échéance.

Sur environ 70 % de la surface du globe ... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles