Dix leçons d’Europe

10 leçons économiques venant d’Europe, à l’intention du président des États-Unis

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Dix leçons d’Europe

Publié le 10 mai 2011
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La semaine dernière, Open Europe a participé à un débat à Washington DC organisée par la Heritage Foundation, ayant pour sujet la spirale de la dette et du déficit obsédant les États-Unis et l’Europe. La discussion peut être consultée ici.

Dans une note publiée la semaine dernière, en tandem avec Sally McNamara et J.D. Foster de la Heritage Foundation, nous avons également indiqué dix leçons économiques de l’Europe :

10 leçons économiques venant d’Europe, à l’intention du président des États-Unis

Alors que le débat sur la charge de la dette en Amérique s’intensifie, les problèmes sociaux et économiques de la zone euro fournissent un avertissement aux États-Unis. Le Portugal est le dernier pays de la zone euro recherchant un plan de sauvetage de plusieurs milliards de dollars de la part de la communauté financière internationale, malgré le fait qu’une telle démarche devrait créer au moins autant de problèmes qu’elle n’en résoudrait. La Grèce et l’Irlande ont tous deux été renfloués mais font toujours face à la possibilité d’un défaut souverain car ils continuent à lutter avec un manque de croissance et de faibles niveaux de compétitivité.

Comme les États-Unis s’attaquent à leur propre situation financière, voici 10 leçons à retenir de l’expérience européenne.

1. Les marchés financiers risquent de perdre patience

La principale leçon que l’on peut tirer de la crise des dettes souveraines dans la zone euro est que soutenir de lourds déficits et l’accumulation de la dette, avec aucune indication de changement se traduit toujours en paiements d’intérêt plus élevés et vraisemblablement en taux d’intérêt supérieurs, ce qui signifie que plus de recettes fiscales seront consommées simplement pour payer les péchés financiers passés. Aujourd’hui, la Grèce, l’Irlande et le Portugal sont respectivement confrontés à des taux d’intérêt de 13 pour cent, 10 pour cent et 9 pour cent, et font toujours face à la possibilité bien réelle de défaut de paiement.

Les États-Unis sont sur un terrain dangereux en ne s’attaquant pas aux déficits actuels et futurs de toute urgence. L’administration Obama semble s’appuyer sur les marchés leurs assurant une fourniture illimitée de liquidités à des taux raisonnables. Mais cela ne peut durer éternellement. Même en l’absence d’une correction fiscale, les taux d’intérêt devraient largement s’accroître dans les prochaines années, alors que l’économie mondiale rebondira. Par exemple, l’administration prévoit une augmentation du taux de Trésor sur 10 ans de 230 points de base. Ajouter des déficits en cours, et les investisseurs finiront par donner aux États-Unis le traitement irlandais, en augmentant le coût d’emprunt.

2. Le facteur temps est essentiel

Les hommes politiques européens (et les contribuables) ont vertement appris que l’inaction, au lieu de prendre les mesures qui s’imposent, mène à des prix plus élevés. L’échec de réponse apportée à la crise dans la zone euro dès le début a vu la spirale des coûts apparaitre et s’accentuer. Les dirigeants politiques américains feraient bien d’apprendre que même quand ils ne font rien, les problèmes économiques continuent de grandir.

3. Les banques centrales sont au cœur du problème

La Banque centrale européenne (BCE) est en difficulté. Elle emprunte énormément, elle a pris des risques vertigineux dans les dettes publiques de la zone euro et elle est massivement exposée aux banques et gouvernements insolvables. Son capital et ses réserves pourraient être anéantis par une perte de seulement 4 pour cent sur ​​ses actifs, ainsi elle devrait être recapitalisée par des gouvernements déjà à court ou imprimer de l’argent pour survivre.

Le pompage de liquidités dans un système bancaire sous-capitalisé ne peut fonctionner. Au contraire, il augmente l’exposition à risque et menace d’attiser les tensions inflationnistes.

4. En Europe, la crise a commencé avec les banques et finira avec elles

On ne peut échapper aux mauvaises banques. En Irlande, le coût du renflouement des banques a dépassé les 70 milliards € (102 milliards de dollars) dans la dernière année seulement. Les banques en difficulté continuent à emprunter 450 milliards € (653 milliards de dollars) provenant de la BCE à des taux nettement inférieurs à ceux qu’ils rencontreraient sur ​​les marchés libres. Cependant, fournir des liquidités aux banques et aux gouvernements insolvables n’a fait que créer une série de banques européennes zombies qui sont tributaires du financement de la BCE et ne survivent que grâce à elle.

Ce n’est pas une solution durable. Par exemple, plus de 110 banques américaines empruntent massivement à la Réserve fédérale avant de finalement faire faillite. Elles ont gaspillé de l’argent public.

5. Se méfier de la régulation financière politiquement accréditée

Une grande partie de l’Europe financièrement régulée en cette période post-crise a été un terrain propice pour les politiciens de faire passer des règlements fondés sur des préjugés de longue date et des convictions idéologiques plutôt que de bon sens économique. Les réglementations sur ​​la vente à découvert, les fonds spéculatifs et les taxes proposées sur les transactions financières menacent la santé des marchés financiers européens tout en ne résolvant aucune des questions sous-jacentes à la crise financière.

Il y a des inclinations similaires aux États-Unis, où le gouvernement a imposé une réglementation excessive sur les fonds spéculatifs et les sociétés d’investissement privé. Ces lois mal acheminées pourraient sensiblement porter atteinte au marché des liquidités et faire perdre du temps au Congrès ainsi que de l’argent aux contribuables. Peut-être que le pire reste la réglementation excessive contribuant déjà à la migration régulière des prestataires de services financiers à l’étranger ; les menaces d’imposer un fardeau encore plus lourd de réglementation ne peuvent qu’accélérer cette migration.

6. Les retours de flamme du protectionnisme

Les réactions instinctives des hommes politiques à protéger leurs économies dès que la crise frappe doivent être combattues. Le libre-échange soutient les économies, même en temps de crise. Une conclusion réussie des négociations de Doha pourrait entraîner 164 milliards de dollars d’avantages globaux pour les États-Unis. Le risque pour les États-Unis de se tirer une balle dans le pied vient du blocage des accords de libre échange avec la Corée du Sud, la Colombie et le Panama. Même l’Union européenne, célèbre pour ses barrières au commerce extérieur, va de l’avant avec les accords de libre-échange qu’elle a conclus avec la Corée du Sud ainsi que l’Inde.

7. Ne pas adopter le « Cap and Trade »

Copier le système européen de « Cap and Trade » (mécanisme visant à instaurer des titres de pollution facilement échangeables et destinés à lutter contre la pollution dans le monde) en cette période serait une erreur désastreuse pour les EU. Ses lacunes sont nombreuses et les « emplois verts » européens créés sont apparus au détriment de beaucoup d’autres vrais emplois dans d’autres secteurs. Le système a également été entravé par la fraude et l’accumulation des permis gratuits à enfoncer le prix du carbone au point où il est totalement sans effets.

8. « L’état providence » peut nuire à l’économie

Plusieurs pays européens ont appris à leurs dépens que le financement des pensions de retraite massives, les systèmes de prestations généreuses et les organismes de santé publique peuvent conduire à des niveaux d’imposition et de dépenses du gouvernement tels que l’économie peut tomber. Et il y a pire : le financement par répartition, et non par capitalisation, des régimes de retraite et des systèmes de sécurité sociale en Europe se traduit par un colossal problème de dette qui est, en plus, aggravé par l’évolution démographique.

Les EU font face à des problèmes similaires. Les expériences européennes démontrent que reporter des décisions impopulaires peut être bien pire, dans le long terme, que prendre des décisions irraisonnables à court terme.

9. Persistants, les déséquilibres commerciaux excessifs sont les signes précurseurs d’une économie malade

Une caractéristique commune à toutes les économies européennes en difficulté est qu’elles ont enregistré des déficits commerciaux gigantesques dans les années qui ont précédé le crise ; les États-Unis sont dans la même situation. Dans plusieurs économies européennes, l’adoption de l’euro a entraîné des coûts d’emprunt artificiellement bas qui ont encouragé plus d’emprunts et conduit aux déficits budgétaires et commerciaux.

Le déficit commercial américain à long terme regroupe de nombreux facteurs, y compris de faibles taux d’épargne par rapport aux taux d’investissement intérieur. Les ménages, les entreprises et le gouvernement aux États-Unis devraient accorder de l’attention aux expériences européennes. Malgré la tentation de profiter d’emprunts bon marché, épargner est nécessaire pour soutenir l’économie, en particulier en temps de crise.

10. La crédibilité compte

Les gens se plaignent souvent de politiciens bavards et inactifs (ou imprudents). Ce n’est jamais plus vrai qu’en période de crise économique. Les marchés financiers réagissent de mauvaise manière dès qu’ils croient que le gouvernement a perdu sa capacité ou sa volonté d’agir de façon responsable. Le public et les marchés sanctionnent ceux qui ne produisent pas de réelles politiques crédibles et agissent de façon décisive. Et une fois que le gouvernement perd sa crédibilité, il est presque impossible de trouver un moyen de revenir.

Les États- Unis à la croisée des chemins

Contrairement à beaucoup de ses partenaires continentaux, le nouveau gouvernement conservateur dirigé par la Grande-Bretagne a choisi d’avaler la pilule amère de l’austérité et de la réduction du déficit. Malheureusement, il a avalé de ce fait une énorme augmentation de la taxe. La Suède, qui est aussi à l’extérieur de la zone euro, a dirigé avec succès son économie à travers cette crise. Ayant tiré des enseignements précieux dans les années 1990, le gouvernement de centre-droit de la Suède a choisi d’inciter sa population à travailler et maintient sa discipline budgétaire, ce qui a conduit ce pays à une croissance économique de 4,5 pour cent en 2010.

Les États-Unis sont confrontés à un choix similaire : ils peuvent continuer à poursuivre les politiques socialistes défaillantes qui ont été mises en œuvre dans la plupart des pays d’Europe occidentale, ce qui les mènera vers un trou noir économique ou ils peuvent apprendre de la Grande-Bretagne et de la Suède et laisser le marché libre pour traverser la tempête actuelle. Il est encore temps de faire le bon choix.

Un article repris du blog d’Open Europe avec l’aimable autorisation de ses responsables. Traduction : Barem.

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  • Opposer la Suède au socialisme n’est pas forcément pertinent. Leur système est très socialiste, tout de même ?

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