François Legault dévoilera lundi matin son « manifeste » tant attendu. On raconte qu’il pourrait un jour transformer son groupe de réflexion en parti politique. Si c’est le cas, les récents sondages lui donnent déjà 30% des voix — même si ces voix n’ont aucune idée du programme de M. Legault. Ça en dit long sur le vide politique au Québec. Vide que le PQ et le Parti libéral sont incapables de combler.
Comment un « Parti Legault » pourrait-il prendre le pouvoir ? En politique, c’est connu, on gagne en charmant l’électeur moyen. Que veut-il, cet électeur moyen ? Au Québec, on nous répète qu’il veut payer moins d’impôts, tout en préservant ses programmes sociaux. « Paradoxal ! Contradictoire ! Impossible », dit-on. Au contraire, c’est possible.
Un État plus efficace
Réduire la taille de l’État ne signifie pas nécessairement couper dans les services. Cela peut vouloir dire : livrer les services de façon plus efficace, à moindre coût.
Comment se fait-il que le coût du programme de garderies à $7 ait augmenté presque 7 fois depuis ses débuts en 1997, alors que le nombre de places a seulement augmenté 2,5 fois, selon les données du Conseil du Trésor et du Ministère de la Famille et de l’Emploi ? Où est passé tout l’argent ?
Pourquoi, depuis des années, l’État dépense bon an mal an 4-5 milliards supplémentaires dans le réseau de la santé, et que l’attente à l’urgence continue d’augmenter ? Les baby-boomers commencent à peine à envahir nos urgences. Ce sera quoi dans dix ans ? La majorité des médecins, infirmières et spécialistes de la santé vous le diront : nous avons d’abord un problème d’organisation et de structures. De groupes d’intérêt qui tirent la couverte chacun de leur bord. Même pas besoin de privatiser quoi que ce soit, M. Legault. Faire le ménage et exiger plus d’efficacité réglerait déjà une partie des problèmes.
Pourquoi paye-t-on toujours plus de subventions aux entreprises, sachant que pour la plupart de ces programmes (il y en a des centaines) nous sommes incapables, selon le vérificateur général, de bien mesurer les coûts et les bénéfices ?
Nous avons versé depuis 10 ans des centaines de millions à des multinationales du secteur aéronautique. À chaque fois, pour « créer des emplois ». Pourtant, ce secteur emploie aujourd’hui quelque 5.000 travailleurs de MOINS qu’il y a dix ans.
Malgré les généreux avantages consentis aux pharmaceutiques, le Québec a perdu 1.200 emplois dans la recherche pharmaceutique depuis 2008, selon une enquête de la CBC. Et c’est sans compter les récentes mises à pied annoncées par Pfizer à Montréal. Certaines subventions ciblées peuvent se justifier, mais peut-on au moins vérifier si ça fonctionne ?
Faire les choses autrement
On pourrait continuer longtemps. Nos écoles, par exemple, accueilleraient à bras ouverts une partie de l’argent qui se dépense dans les édifices des commissions scolaires, dans les voyages et les parties de golf des commissaires.
Réformer ces programmes ne veut pas forcément dire les éliminer, ou éliminer le but qu’ils servent. Cela veut dire faire les choses autrement. En privilégiant les citoyens-utilisateurs, au lieu de privilégier le système et ceux qui en vivent.
Qui sait, peut-être pourrait-on préserver les programmes sociaux, tout en baissant les impôts ? Voilà qui plairait à l’électeur moyen québécois.
Bien sûr, syndicats et corporations de toutes sortes vont monter aux barricades. Mais les convaincre serait votre boulot, M. Legault. Si bien sûr vous êtes prêt à sauter dans l’arène politique.
Une dépense publique plus efficace pourrait permettre de diminuer les déficits, puis les prélèvements, en offrant les mêmes services. C’est ce pour quoi je milite. Mais il ne semble pas y avoir de réflexion sur le sujet.
Généralement, deux groupes s’opposent: ceux qui veulent tout privatiser, et ceux qui considèrent que la dépense publique soutient l’économie, et que la baisser ferait baisser la protection sociale, et entraînerait par ailleurs une récession. Je caricature, mais à peine.
La dépense publique, c’est l’argent qui sort des poches de ceux qui produisent les richesses. Rien ne permet d’infirmer que ces dépenses ne seraient pas mieux orientées si l’argent restait dans ces poches. Et d’expérience, tout semble montrer que c’est le cas.
Parler ainsi peut-il permettre de faire évoluer les choses en France? Je ne pense pas.
Par contre, proposer des projet concret, de nouvelles manières concrètes de proposer les mêmes services, ce serait un début, et là ce pourrait être accepter.
Ou encore, proposer, sous forme associative, des projets privés. Dans l’éducation, pare exemple, ce serait extraordinaire de proposer une école privée associative (non confessionnelle, sinon cela ne mènera à rien) dans une ZEP. Ce serait une vitrine pour une nouvelle gestion.
Dans le domaine de la santé, une mutuelle, ou un groupe de mutuelles pourraient proposer une nouvelle gestion également. Je pense à des centres médicaux, qui fourniraient directement les médicaments, sans passer par les pharmacies, et dont les médecins ne seraient pas influencés par les visiteurs médicaux, et qui gérerait les fournisseurs extérieurs, comme les labo d’analyses, les cabinets de radiologie, comme des fournisseurs, en encourageants les regroupement et le partage des gains de productivité (les labo, ce sont des machines automatiques aujourd’hui, et la radiologie est très capitalistique).
Proposer la suppression de la protection sociale en déclarant que le privé amènera très vite des solutions n’a aucune chance de convaincre en France.
D’autre part, coimbien sont armés pour un tel monde? Le système libertarien suppose que chacun, au fil des générations, a appris à développer des solutions, et à se prendre en charge. Aujourd’hui, je doute que beaucoup d’entre nous en soit capable, et je n’en suis même pas certain pour moi-même. Il faut donc nécessairement une solution progressive.
Et je pense que les discours libertariens ne proposent pas ce genre de solution, et ne présente pas d’aspect pratique pour la France. La politique que je propose est plus pragmatique.
Moi, je pense qu’exposer clairement les choses, appeler un chat un chat est une oeuvre nécessaire pour l’édification d’une pensée limpide, de bon sens.
Proposer des projets concrets est intéressant, mais il faut d’abord expliquer pourquoi ; d’autant que, c’est bien joli de proposer ces projets intéressants, mais pour le moment, l’expérience montre aussi que tous les gauchistes vont hurler à la libéralisation tsoin tsoin du service correspondant et la mort du petit cheval tsoin tsoin.
Un autre défaut de la politique dite pragmatique, c’est qu’elle devient très vite une politique de compromis, puis de compromission voire d’abandon. De libéral, ça passe à social-libéral, puis socialiste, puis collectiviste pur et dur.